Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... A...a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 29 258 euros auxquels il a été assujetti au titre de la période du 1er janvier 2010 au 31 janvier 2012 et des intérêts de retard y afférents d'un montant de 974 euros et de prononcer le sursis de paiement de ces impositions sur le fondement de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales.
Par un jugement n° 1206748 du 30 avril 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 25 juin 2015, M. A..., représenté par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 30 avril 2015 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les différentes activités qu'il exerce en tant qu'infographiste sont des activités de création, constitutives d'oeuvre de l'esprit, ouvrant droit au taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée prévu au g de l'article 279 du code général des impôts.
Par un mémoire en défense, enregistré le 12 octobre 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les prestations qui ont fait l'objet de rappels de taxe sur la valeur ajoutée ne s'inscrivaient pas dans le cadre des cessions de droits patrimoniaux alors que le taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée s'applique aux cessions de droit patrimoniaux reconnus par la loi aux auteurs des oeuvres de l'esprit.
Par ordonnance du 9 septembre 2016 la clôture d'instruction a été fixée au 18 octobre 2016.
Par ordonnance du 2 février 2017, la clôture d'instruction a été rouverte et, le même jour, les parties ont été invitées à présenter, dans un délai d'une semaine, leurs observations sur la décision rendue le 27 janvier 2017 par le Conseil d'Etat dans l'instance n° 390660.
Le ministre de l'économie et des finances a produit des observations le 10 février 2017.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Vinet,
- et les conclusions de M. Besse, rapporteur public ;
1. Considérant que M.A..., qui exerce une activité d'infographiste, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité qui a porté, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, sur la période du 1er janvier 2010 au 31 janvier 2012 ; qu'à l'issue de ce contrôle, l'administration fiscale a remis en cause le régime de taux réduit appliqué par M. A...sur le fondement du g de l'article 279 du code général des impôts ; qu'après avoir vainement contesté cette remise en cause par une réclamation préalable, M. A...a saisi le tribunal administratif de Grenoble d'une demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour un montant de 29 258 euros, assortis d'intérêts de retard d'un montant de 974 euros ; qu'il relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. (...) " ; qu'il est constant en appel que M. A...n'a pas retiré le pli lui notifiant la proposition de rectification alors que cette notification avait été régulièrement réalisée ; que, dès lors, n'ayant pas contesté la proposition de rectification dans le délai imparti, la charge de la preuve lui incombe en vertu des dispositions précitées ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article 279 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2011 : " La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux réduit de 5,50 % en ce qui concerne : (...) g. Les cessions des droits patrimoniaux reconnus par la loi aux auteurs des oeuvres de l'esprit et aux artistes-interprètes ainsi que de tous droits portant sur les oeuvres cinématographiques et sur les livres. / Cette disposition n'est pas applicable aux cessions de droits portant sur des oeuvres d'architecture et des logiciels ; " ; que, pour le mois de janvier 2012, le taux réduit a été porté à 7 % ;
4. Considérant que, dans sa proposition de rectification, l'administration n'a pas remis en cause la qualification d'oeuvres de l'esprit des travaux réalisés par M. A...au cours de la période en litige mais a relevé l'absence de respect par le requérant du formalisme prévu par les dispositions du code de la propriété intellectuelle en matière de cessions de droits patrimoniaux attachés à de telles oeuvres et en a déduit que de telles cessions n'étaient, dès lors, pas intervenues ;
5. Considérant d'une part, M. A...fait valoir que l'essentiel de son activité consiste à créer des images de concours, illustrant des projets de commandes publique et que, pour le reste, son activité consiste à créer des images de promotion ou de communication et des images illustrant des permis de construire ; qu'il résulte de l'instruction et n'est pas sérieusement contesté par l'administration, que les travaux réalisés par M. A...relèvent d'une activité intellectuelle et créatrice, suivie d'une concrétisation, et portent l'empreinte de sa personnalité, de sorte qu'ils peuvent recevoir la qualification d'oeuvre de l'esprit ;
6. Considérant, d'autre part, qu'il résulte des dispositions précitées du g) de l'article 279 du code général des impôts que la cession à des tiers, par les auteurs d'oeuvres de l'esprit, des droits de représentation ou de reproduction qu'ils détiennent sur celles-ci est soumise au taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée, alors même que les conditions de formalisme posées par l'article L. 131-3 du code de la propriété intellectuelle ne seraient pas remplies ; qu'il résulte en l'espèce de la description faite par M. A...des travaux qu'il a accompli au titre des exercices en litige, qu'ils emportaient par leur objet même, la cession du droit de représentation des oeuvres de l'esprit en cause ; que la circonstance que M. A...a gardé certains exemplaires originaux desdits travaux tend à démontrer qu'il en a cédé le droit de reproduction à ses clients ; qu'ainsi, M. A...établit qu'il a cédé, au sens et pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, certains des droits patrimoniaux attachés aux oeuvres de l'esprit qu'il a créées au cours des exercices litigieux ; qu'il était donc en droit de leur appliquer le taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions relatives aux frais non compris dans les dépens :
8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;
9. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante dans la présente instance, une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1206748 du tribunal administratif de Grenoble du 30 avril 2015 est annulé.
Article 2 : M. A...est déchargé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2010 au 31 janvier 2012 et des intérêts de retard y afférents.
Article 3 : L'Etat versera à M. A...la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de M. A...est rejeté.
Article 5 : Le présent jugement sera notifié à M. B... A...et au ministre de l'économie et des finances.
Délibéré après l'audience du 14 février 2017, à laquelle siégeaient :
M. Bourrachot, président,
Mme Mear, président-assesseur,
Mme Vinet, premier conseiller.
Lu en audience publique le 16 mars 2017.
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N° 15LY02134
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