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31/01/2017 | FRANCE | N°15LY02497

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 31 janvier 2017, 15LY02497


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

1°) d'annuler l'arrêté du 17 mars 2015 par lequel le préfet de la Drôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé un pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de trois ans ;

2°) d'enjoindre sous astreinte au préfet, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour, ou,

titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation administrative et, dans l'attente...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

1°) d'annuler l'arrêté du 17 mars 2015 par lequel le préfet de la Drôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé un pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de trois ans ;

2°) d'enjoindre sous astreinte au préfet, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour, ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation administrative et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travailler ;

3°) d'enjoindre au préfet de supprimer l'inscription de non-admission au fichier d'information Schengen ;

4°) de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1501651 du 15 juin 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 15 juillet 2015, M.A..., représentée par Me Pierot, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 15 juin 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Isère du 17 mars 2015 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois et de lui délivrer dans cette attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le refus de titre de séjour a été pris après une procédure irrégulière, pour défaut de consultation de la commission du titre de séjour ;

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré qu'il n'établissait pas résider en France de manière continue depuis 2004 ;

- ce refus méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et procède d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- elle a été prise en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et procède d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- le refus de lui accorder un délai de départ volontaire est illégal en ce que le préfet n'était pas tenu à ce refus, quand bien même il n'avait pas déféré à une précédente mesure d'éloignement ;

- sa situation justifiait qu'un délai de départ volontaire lui soit accordé ;

- la désignation du pays de renvoi est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'interdiction de retour sur le territoire français procède d'une erreur d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 mai 2016, le préfet de l'Isère conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'il s'en rapporte à ses écritures de première instance.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord du 17 mars 1988 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Nathalie Peuvrel, premier conseiller ;

1. Considérant que M.A..., ressortissant tunisien né le 24 juin 1958, est entré en France pour la dernière fois en 2004, selon ses déclarations ; qu'il a fait l'objet, le 12 août 2009, d'un arrêté préfectoral portant reconduite à la frontière, puis, le 28 septembre 2009, d'un arrêté portant placement en rétention ; que la demande de M. A...tendant à l'annulation de l'arrêté du 12 août 2009 a été rejetée par le tribunal administratif de Grenoble et par la cour de céans ; que la demande de titre de séjour qu'il a présentée le 9 décembre 2013 a été rejetée par arrêté du préfet de la Drôme du 24 décembre 2013 lui faisant, en outre, obligation de quitter le territoire français, fixant le pays de destination et lui interdisant de revenir sur le territoire français pour une durée de deux ans ; que le préfet de la Drôme a, par arrêté du 17 mars 2015, rejeté la nouvelle demande de titre de séjour présentée par M. A...le 9 mars 2015 et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français sans délai, de la désignation du pays de renvoi et d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans ; que M. A...relève appel du jugement du 15 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales susvisée : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

3. Considérant que M. A...se prévaut de la durée de son séjour en France, soutient qu'il réside chez sa soeur atteinte de cécité pour lui apporter l'aide quotidienne dont elle a besoin et allègue qu'il bénéficie de perspectives professionnelles ; que, toutefois, les pièces éparses qu'il produit pour démontrer qu'il vit en France depuis 2004, date déclarée de son entrée sur le territoire national, ne suffisent pas à établir le caractère continu de sa résidence en France ; que, s'il a exercé un emploi de manoeuvre agricole saisonnier en été 2005, 2008 et 2009, cette circonstance n'établit pas la réalité de l'insertion professionnelle alléguée ; que, par ailleurs, il ressort du procès-verbal dressé le 31 janvier 2014 par la compagnie de gendarmerie de Pierrelatte que la soeur de M. A...a déclaré que son frère n'habitait plus chez elle et qu'elle ignorait son lieu de résidence précis ; qu'ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à la date du refus de titre de séjour contesté, M. A...apportait à sa soeur, atteinte de cécité, l'assistance quotidienne dont elle a besoin, alors, au demeurant, que celle-ci a un fils majeur et un autre frère résidant à proximité, dont il n'est pas établi qu'ils ne pourraient l'aider ; que, célibataire et sans charge de famille, M.A..., qui a résidé en Tunisie jusqu'à l'âge de quarante-cinq ans, n'est pas fondé à soutenir que le refus de titre de séjour en litige porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des objectifs en vue desquels il a été pris ; qu'en l'absence d'autres éléments, il n'est pas davantage fondé à soutenir que ce refus procèderait d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale ;

4. Considérant, en second lieu, qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. " ; que, comme il a été dit précédemment, M. A...ne peut pas être regardé comme justifiant d'une résidence habituelle en France depuis plus de dix ans et n'est, ainsi, pas fondé à soutenir que le préfet devait, en application des dispositions précitées, soumettre son cas à la commission du titre de séjour ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

5. Considérant que les moyens tirés de ce que l'obligation de quitter le territoire français prise à l'encontre de M. A...méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et procèderait d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle, doivent être écartés pour les motifs déjà exposés au point 3 ;

En ce qui concerne le refus de délai de départ volontaire :

6. Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. (...) Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; (...) f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2. (... ). " ;

7. Considérant qu'il est constant que M. A...a fait l'objet de deux précédentes mesures d'éloignement auxquelles il n'a pas déféré ; qu'il ne justifie pas d'une adresse stable et a fait usage d'un titre de séjour falsifié ; que, dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir que le refus du préfet de la Drôme aurait commis une illégalité en refusant de lui accorder un délai de départ volontaire ;

En ce qui concerne la désignation du pays de renvoi :

8. Considérant que, pour les mêmes motifs que ceux qui ont été exposés au considérant 3 ci-dessus, le moyen tiré de ce que, à raison de la situation familiale de M.A..., le préfet aurait procédé à une erreur manifeste d'appréciation en fixant comme pays de renvoi la Tunisie ou tout pays où M. A...serait légalement admissible doit être écarté ;

En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français :

9. Considérant qu'aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. / (...) L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...). " ;

10. Considérant que M.A..., en se bornant à soutenir que sa présence en France ne représente pas une menace pour l'ordre public et que le fait qu'il n'ait pas exécuté les précédentes mesures d'éloignement prises à son encontre est dû au fait que des demandes de titre de séjour étaient en cours d'instruction, ne démontre pas, à supposer même établie l'absence de menace à l'ordre public, qu'en lui faisant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans, le préfet de la Drôme aurait commis une erreur d'appréciation ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble, qui a répondu à tous les moyens dont il était saisi, a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fin d'injonction et d'astreinte :

12. Considérant que le présent arrêt, qui confirme le rejet des conclusions à fin d'annulation de l'arrêté préfectoral du 17 mars 2015, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte doivent être rejetées ;

Sur les frais non compris dans les dépens :

13. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce la somme que M. A...demande sur leur fondement au titre de ses frais non compris dans les dépens soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante ;

DECIDE:

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Drôme.

Délibéré après l'audience du 10 janvier 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Jean-François Alfonsi, président de chambre,

- M. Hervé Drouet, président-assesseur,

- Mme Nathalie Peuvrel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 31 janvier 2017.

2

N° 15LY02497

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY02497
Date de la décision : 31/01/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: Mme Nathalie PEUVREL
Rapporteur public ?: M. CLEMENT
Avocat(s) : PIEROT

Origine de la décision
Date de l'import : 14/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-01-31;15ly02497 ?
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