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26/01/2017 | FRANCE | N°15LY01495

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 26 janvier 2017, 15LY01495


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. E...B...a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner le docteur Jegou et le centre hospitalier de Givors à lui verser une somme totale de 642 357,32 euros en réparation des préjudices consécutifs à sa prise en charge en février 2005 dans cet établissement.

Par un jugement n° 1303139 du 7 avril 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de M. B...et a condamné le centre hospitalier de Givors à verser une somme de 36 544,56 euros à la caisse primaire d'assurances ma

ladie du Rhône en remboursement des frais d'hospitalisation et des indemnités jou...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. E...B...a demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner le docteur Jegou et le centre hospitalier de Givors à lui verser une somme totale de 642 357,32 euros en réparation des préjudices consécutifs à sa prise en charge en février 2005 dans cet établissement.

Par un jugement n° 1303139 du 7 avril 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de M. B...et a condamné le centre hospitalier de Givors à verser une somme de 36 544,56 euros à la caisse primaire d'assurances maladie du Rhône en remboursement des frais d'hospitalisation et des indemnités journalières qu'elle a supportés.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 30 avril 2015, M.B..., représenté par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 7 avril 2015.

2°) de condamner le centre hospitalier de Givors à lui verser une somme de 642 477,32 euros en réparation des préjudices subis ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Givors les frais d'expertise ;

4°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Givors une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient :

Sur la recevabilité de sa demande de première instance :

- qu'elle était recevable dès lors qu'il a formé une réclamation préalable réceptionnée par le centre hospitalier de Givors le 4 mars 2015 et qu'en tout état de cause, le centre hospitalier de Givors, qui a conclu au fond, a lié le contentieux ;

Sur la responsabilité du centre hospitalier de Givors :

- qu'il n'a pas été informé du risque d'infection nosocomiale avant l'opération ;

- que le centre hospitalier a commis une faute dans sa prise charge de l'infection sur le plan orthopédique ;

Sur ses préjudices :

- que ses dépenses de santé ont été prises en charge par la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône ;

- que les frais d'assistance à expertise s'élèvent à 1 817,92 euros ;

- que les frais de déplacement pour se rendre à des consultations, à des soins ou aux expertises s'élèvent à 300 euros ;

- que les frais de renouvellement de ses différentes prothèses s'élèvent à 565 359,40 euros ;

- que son déficit fonctionnel temporaire doit être indemnisé à hauteur de 42 380 euros.

- que son déficit fonctionnel permanent de 5 % doit être indemnisé à hauteur de 17 500 euros ;

- que les souffrances endurées, évaluées à 3,5 / 7, doivent être indemnisées à hauteur de 10 000 euros ;

- que son préjudice esthétique doit être évalué à hauteur de 5 000 euros.

Par un mémoire enregistré le 30 juillet 2015, la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône, représentée par Me Philipde Laborie, demande à la cour de confirmer le jugement du tribunal et de lui allouer une somme de 36 544,56 euros au titre des prestations servies à M. B..., une somme de 1 037 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ainsi qu'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir :

- que le centre hospitalier de Givors est responsable de l'infection nosocomiale contractée par M. B...;

- qu'elle a déboursé 33 405 euros de frais d'hospitalisation et 3 139,56 euros d'indemnités journalières ;

- que le montant de l'indemnité forfaitaire de gestion doit être réactualisé et porté à 1 037 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er juillet 2016, le centre hospitalier de Givors, représenté par MeD..., conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir :

Sur la recevabilité de la demande :

- que le requérant n'établit pas avoir formulé une réclamation préalable auprès de lui, de sorte que sa demande de première instance était irrecevable ;

Sur sa responsabilité :

- que le défaut d'information allégué n'a pu être à l'origine d'aucun préjudice réparable, dès lors qu'il n'existait pas d'alternative au geste chirurgical réalisé ;

- que le lien de causalité entre l'infection contractée à l'hôpital et les préjudices subis par M. B...n'est pas établi ;

Sur les préjudices :

- que le recours à un médecin conseil est facultatif de sorte que la demande de M. B... à ce titre doit être rejetée ou limitée à une somme de 500 euros ;

- que M. B...ne justifie pas avoir exposé des frais de déplacement ;

- que M. B...ne peut solliciter une somme de 320 842,15 euros en remboursement de sa prothèse principale, dès lors qu'il portait déjà une prothèse avant l'intervention ;

- que M. B...ne peut prétendre au remboursement de prothèses de randonnée, de ski et de bain dès lors qu'il aurait eu besoin de ce matériel du simple fait de son accident, indépendamment de la survenue de l'infection nosocomiale ;

- que l'indemnité due au titre du déficit fonctionnel temporaire ne saurait excéder 20 139,30 euros ;

- que l'indemnité due au titre du déficit fonctionnel permanent ne saurait excéder 5 000 euros ;

- que les souffrances endurées doivent être indemnisées à hauteur de 3 500 euros ;

- que sa demande d'indemnisation au titre du préjudice esthétique doit être rejetée.

Par un mémoire, enregistré le 2 septembre 2016, M. B... conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens.

Il indique en outre avoir adressé une nouvelle réclamation préalable au centre hospitalier de Givors le 27 juillet 2016.

Par un mémoire enregistré le 14 décembre 2016, le centre hospitalier de Givors conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens.

Il fait valoir en outre que le contentieux n'a pas été lié dès lors qu'à la date à laquelle le tribunal administratif a statué, aucune décision implicite de rejet n'était née et que la réclamation préalable formée après le jugement du tribunal administratif ne saurait régulariser a posteriori sa demande.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Beytout, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public ;

- et les observations de Me Pollard, avocat de M.B....

1. Considérant que M.B..., victime, le 21 janvier 1995, d'un accident de la voie publique ayant entraîné une amputation du tiers supérieur de la jambe gauche, a, le 7 février 2005, dans le cadre de son activité professionnelle, fait une chute entraînant une fracture sus-condylienne gauche ; qu'il a alors subi, le 9 février suivant une intervention chirurgicale au centre hospitalier de Givors, pratiquée par le docteur Jegou, consistant en une ostéosynthèse par plaque vissée ; que toutefois, en raison de la survenue d'un volumineux hématome et de fièvre, il a été hospitalisé à nouveau au centre hospitalier de Givors et a subi une seconde intervention le 15 mars 2005 de " mise à plat de l'arthrite " ; qu'en l'absence de guérison, il a été de nouveau opéré le 8 avril 2005 pour la mise en place d'une mèche itérative, puis, le 20 mai 2005, pour mise à plat de l'abcès ; que les prélèvements du 12 avril 2005 seront positifs concernant la présence d'un germe de type proponiobactérium avidum ; qu'il a de nouveau été opéré le 24 mai 2005 pour retirer le matériel et, devant l'absence de consolidation de la fracture, pour une amputation au quart inférieur de la cuisse gauche ; qu'il a, enfin, subi le 18 mars 2009 une nouvelle intervention avec raccourcissement du moignon de 4 cm en raison de douleurs persistantes ; qu'estimant avoir été victime de fautes dans le cadre de sa prise en charge et d'une infection nosocomiale lors des différentes hospitalisations précitées, il a saisi le juge des référés, lequel a, le 16 janvier 2012, ordonné une expertise, confiée au docteur Brion, spécialiste des maladies infectieuses, qui s'est adjoint le docteur Chanzy, spécialiste en chirurgie orthopédique, en qualité de sapiteur ; que par la présente requête, il relève appel du jugement du tribunal administratif de Lyon du 7 avril 2015 en tant que les premiers juges ont rejeté ses demandes indemnitaires dirigées contre le centre hospitalier de Givors ;

Sur la recevabilité de la demande indemnitaire de M. B...dirigée contre le centre hospitalier de Givors :

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 412-1 du code de justice administrative : " La requête doit, à peine d'irrecevabilité, être accompagnée, sauf impossibilité justifiée, de la décision attaquée ou, dans le cas mentionné à l'article R. 421-2, de la pièce justifiant de la date de dépôt de la réclamation (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée " ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aucune fin de non-recevoir tirée du défaut de décision préalable ne peut être opposée à un requérant ayant introduit devant le juge administratif un contentieux indemnitaire à une date où il n'avait présenté aucune demande en ce sens devant l'administration lorsqu'il a formé, postérieurement à l'introduction de son recours juridictionnel, une demande auprès de l'administration sur laquelle le silence gardé par celle-ci a fait naître une décision implicite de rejet avant que le juge de première instance ne statue, et ce, quelles que soient les conclusions du mémoire en défense de l'administration ; que lorsque ce mémoire en défense conclut à titre principal, à l'irrecevabilité faute de décision préalable et, à titre subsidiaire seulement, au rejet au fond, ces conclusions font obstacle à ce que le contentieux soit lié par ce mémoire lui-même ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la demande de M. B...a été enregistrée au greffe du tribunal administratif le 25 avril 2013 ; que le tribunal, par un courrier avec accusé de réception du 7 mai 2013, l'a invité à régulariser sa demande par la production de la décision attaquée ou, si l'administration n'avait pas répondu à sa demande, par celle de la pièce justifiant le dépôt de cette dernière ; que le conseil de M. B...a alors indiqué dans un courrier adressé le 14 mai 2013 au tribunal, qu'il n'avait pas présenté de demande préalable d'indemnisation mais qu'il allait s'adresser au centre hospitalier de Givors afin de l'interroger sur sa position dans ce dossier ; que par un courrier du 23 juillet 2013, le conseil de M. B...a indiqué au tribunal que " la demande préalable d'indemnisation adressée au centre hospitalier de Givors le 14 mai 2013 n'a pas reçu de réponse ", sans pour autant produire ni cette demande ni l'accusé de réception de celle-ci ; qu'il n'a pas davantage produit ces pièces devant la cour avant la clôture de l'instruction ; que parallèlement, en réponse à une nouvelle demande du tribunal, en date du 20 février 2015, le conseil de M. B... a précisé ne pas avoir adressé de demande préalable d'indemnisation au centre hospitalier mais a indiqué qu'il entendait régulariser la procédure ; qu'il a joint à ce courrier une copie d'une demande préalable d'indemnisation supposée avoir été adressée au centre hospitalier le 26 février 2015, ainsi qu'une copie de l'accusé de réception de cette demande, qui ne comportait aucun cachet de La Poste, ni date de présentation, d'avis de passage ou de distribution ; que si, en appel, il a produit un accusé justifiant de la réception de cette demande par le centre hospitalier de Givors le 4 mars 2015, aucune décision implicite de rejet n'était née le 7 avril 2015, date à laquelle les juges de première instance ont statué ; qu'en outre, le centre hospitalier de Givors n'a, devant le tribunal administratif, défendu au fond qu'à titre subsidiaire après avoir, à titre principal, opposé l'irrecevabilité des conclusions à fin d'indemnité de M. B... ; que la demande présentée devant le tribunal administratif de Lyon était ainsi irrecevable, alors même que la fin de non-recevoir invoquée par le centre hospitalier de Givors n'avait pas trait à l'absence de décision préalable ; que la nouvelle réclamation préalable formée par le conseil de M. B... le 27 juillet 2016, postérieurement à la notification du jugement attaqué, n'a pu avoir pour effet de régulariser a postériori la demande présentée devant le tribunal ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;

Sur la demande de la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône tendant à l'actualisation de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale :

6. Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône conclut en appel à une majoration de l'indemnité forfaitaire de gestion que le centre hospitalier de Givors a été condamné à lui payer ; que toutefois, ayant obtenu entière satisfaction en première instance, elle n'a pas demandé en appel une condamnation du centre hospitalier de Givors à lui payer un supplément de débours ; que sa demande relative à l'indemnité de gestion doit donc être rejetée ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soient mises à la charge du centre hospitalier de Givors, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, les sommes que demandent M. B... et la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

8. Considérant en revanche qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... le versement d'une somme de 1 500 euros au centre hospitalier de Givors sur le fondement de ces dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : M. B... versera au centre hospitalier de Givors une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... B..., au centre hospitalier de Givors et à la caisse primaire d'assurance maladie du Rhône.

Délibéré après l'audience du 5 janvier 2017 à laquelle siégeaient :

M. Faessel, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

Mme Beytout, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 janvier 2017.

1

4

N° 15LY01495


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY01495
Date de la décision : 26/01/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-01-02 Procédure. Introduction de l'instance. Liaison de l'instance.


Composition du Tribunal
Président : M. FAESSEL
Rapporteur ?: Mme Emilie BEYTOUT
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : CABINET JEROME LAVOCAT

Origine de la décision
Date de l'import : 07/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2017-01-26;15ly01495 ?
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