La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/12/2016 | FRANCE | N°15LY04029

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 13 décembre 2016, 15LY04029


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme B...et D...A...ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 5 décembre 2014 par lesquelles le préfet de la Drôme leur a refusé la délivrance d'un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourront être reconduits d'office.

Par un jugement n° 1503695-1503697 du 15 septembre 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes.

Procédure

devant la cour

Par une requête, enregistrée le 21 décembre 2015, M. B...A...et Mme D...C......

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. et Mme B...et D...A...ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 5 décembre 2014 par lesquelles le préfet de la Drôme leur a refusé la délivrance d'un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourront être reconduits d'office.

Par un jugement n° 1503695-1503697 du 15 septembre 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 21 décembre 2015, M. B...A...et Mme D...C..., épouseA..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 15 septembre 2015 ;

2°) d'annuler ces décisions du préfet de la Drôme du 5 décembre 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Drôme de leur délivrer un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale" dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à leur avocat d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Ils soutiennent que :

- les refus de titre de séjour ne sont pas motivés ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de leur situation ;

- leur situation n'a pas été examinée au regard de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- les décisions contestées comportent une erreur sur le prénom de M. A... et indiquent à tort qu'il " n'indique pas craindre pour sa vie ou sa liberté en cas de retour " dans son pays d'origine et qu'il a été protégé par les autorités de son pays puisqu'il a obtenu un passeport ;

- le risque de mariage forcé et la situation familiale de Mme A... justifient qu'un titre de séjour leur soit délivré ;

- l'état de santé de Mme A... nécessite des soins dont elle ne pourra pas bénéficier dans son pays d'origine ;

- les décisions contestées méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elles méconnaissent l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- elles méconnaissent l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire enregistré le 1er mars 2016 le préfet de la Drôme conclut au rejet de la requête en s'en rapportant à ses écritures de première instance.

Par une décision du 3 novembre 2015, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. et Mme A....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu, au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller.

1. Considérant que par un jugement du 15 septembre 2015 le tribunal administratif de Grenoble a rejeté les demandes de M. et Mme A..., ressortissants albanais nés respectivement le 24 octobre 1985 et le 8 janvier 1993, tendant à l'annulation des décisions du 5 décembre 2014 par lesquelles le préfet de la Drôme a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourront être reconduits d'office ; que M. et Mme A... relèvent appel de ce jugement ;

2. Considérant que les moyens tirés de ce que les refus de titre de séjour opposés aux requérants ne seraient pas suffisamment motivés et de ce que le préfet n'aurait pas procédé à un examen particulier de leur situation doivent être écartés par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

3. Considérant qu'il ressort des motifs de ses arrêtés que le préfet de la Drôme a pris en compte la présence en France de la fille des requérants en relevant que rien ne s'oppose à ce que la cellule familiale se reconstitue en Albanie, eu égard notamment au jeune âge de l'enfant ; qu'il a ainsi, contrairement à ce qui est soutenu, examiné les éléments de la situation des requérants en rapport avec la protection de l'intérêt supérieur de l'enfant que l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant lui impose de prendre en considération ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plain droit : / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le médecin de l'agence régionale de santé a estimé, dans son avis du 6 octobre 2014, d'une part, que l'état de santé de Mme A... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sans qu'il existe dans son pays d'origine de traitement approprié et, d'autre part, que la présence de son époux est nécessaire pour l'accompagner ; que, pour s'écarter de cet avis, le préfet de la Drôme s'est fondé sur divers documents relatifs à la situation sanitaire en Albanie desquels il ressort que ce pays dispose des capacités pour soigner les pathologies psychiatriques ; que Mme A... ne peut utilement soutenir qu'elle n'aurait pas effectivement accès en Albanie aux soins exigés par sa pathologie, en raison notamment des implications financières de son traitement, dès lors que les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile subordonnent la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade à l'absence d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'étranger et non à la condition qu'il ne puisse effectivement en bénéficier ; que, dans ces conditions, et alors que Mme A... ne produit pas d'éléments de nature à établir qu'elle ne pourrait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, le moyen tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne à droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent des enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale. " ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. et Mme A..., ne résidaient sur le territoire national que depuis moins de deux ans à la date des décisions contestées ; que ces décisions n'impliquent aucune séparation familiale ; que la seule circonstance que Mme A... aurait refusé de se soumettre à un mariage arrangé ne suffit pas à établir que les requérants ne pourraient établir leur vie privée et familiale dans leur pays d'origine, où ils ont vécu jusqu'à leur arrivée en France et où ils ont nécessairement conservé des attaches ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, les décisions contestées ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit de M. et Mme A... au respect de leur vie privée et familiale et ne portent pas atteinte à l'intérêt supérieur de leurs enfants ; que, par suite, elles ne méconnaissent pas les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; qu'elles ne sont pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de leurs conséquences sur la situation personnelle des intéressés ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " ; que cet article 3 énonce que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants. " ;

9. Considérant que si le préfet a mentionné de manière erronée dans son arrêté que les requérants ne font pas état de craintes pour leur vie ou leur liberté en cas de retour en Albanie, il mentionne également que leurs demandes d'asile ont été rejetées et que les autorités de ce pays leur ont délivré des passeports ; que, dans ces conditions, cette mention erronée ne peut être regardée comme ayant eu une incidence sur le sens des décisions du préfet ;

10. Considérant qu'en se bornant à affirmer qu'ils subiront des persécutions en cas de retour dans leur pays d'origine, Mme A... ayant refusé de se soumettre à un mariage arrangé, les requérants, dont la demande d'asile a d'ailleurs été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides puis par la Cour nationale du droit d'asile, n'établissent pas la réalité des risques qu'ils allèguent ainsi encourir en cas de retour en Albanie, ni que les autorités albanaises ne pourraient assurer leur protection, ni qu'ils seraient le cas échéant exposés à des risques sur l'ensemble du territoire albanais ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes ; que leurs conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant à ce qu'il soit fait application, au bénéfice de leur avocat, des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Mme D...C..., épouse A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Drôme.

Délibéré après l'audience du 21 novembre 2016 à laquelle siégeaient :

M. Boucher, président de chambre,

M. Gille, président-assesseur,

Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 décembre 2016.

1

2

N° 15LY04029

md


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY04029
Date de la décision : 13/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: Mme Véronique VACCARO-PLANCHET
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : SELARL BERNARDI ESQUERRE MONTEIRO PROUST

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-12-13;15ly04029 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award