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08/12/2016 | FRANCE | N°15LY00097

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 08 décembre 2016, 15LY00097


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Par une première demande, la SARL d'architecture et d'urbanisme Atelier d'IS, la SARL d'IS, la SAS Cubic, la SARL Bet Cerbeton et la SAS Abac Ingénierie ont demandé au tribunal administratif de Lyon :

- de prononcer l'annulation de la pénalité de 36 179,25 euros appliquée au groupement titulaire du marché de maîtrise d'oeuvre de la restructuration du groupe scolaire Nové Josserand ;

- de condamner la ville de Lyon à leur verser la somme de 41 295,55 euros HT, soit 49 389,48 euros TTC au titre

de rémunération supplémentaire.

Par une seconde demande, ces mêmes sociétés ont de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Par une première demande, la SARL d'architecture et d'urbanisme Atelier d'IS, la SARL d'IS, la SAS Cubic, la SARL Bet Cerbeton et la SAS Abac Ingénierie ont demandé au tribunal administratif de Lyon :

- de prononcer l'annulation de la pénalité de 36 179,25 euros appliquée au groupement titulaire du marché de maîtrise d'oeuvre de la restructuration du groupe scolaire Nové Josserand ;

- de condamner la ville de Lyon à leur verser la somme de 41 295,55 euros HT, soit 49 389,48 euros TTC au titre de rémunération supplémentaire.

Par une seconde demande, ces mêmes sociétés ont demandé à ce tribunal :

- de prononcer la décharge de l'obligation de payer la pénalité de 36 179,25 euros appliquée au groupement titulaire du marché de maîtrise d'oeuvre de la restructuration du groupe scolaire Nové Josserand et d'annuler le titre rendu exécutoire le 24 mai 2011, émis par la ville de Lyon pour son recouvrement ;

- d'enjoindre à la ville de Lyon de leur rembourser, dans un délai de huit jours et sous astreinte, la somme de 28 239,87 euros.

Par un jugement nos 1104280 - 1104744 du 16 octobre 2014, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 12 janvier 2015, la SARL d'architecture et d'urbanisme Atelier d'IS, la SARL d'IS, la SAS Cubic, la SARL Bet Cerbeton et la SAS Abac Ingénierie, représentées par MeA..., demandent à la cour :

1°) de réformer ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 16 octobre 2014 ;

2°) de décharger le groupement de maîtrise d'oeuvre des pénalités appliquées à hauteur de 36 179,25 euros, ou à tout le moins d'en réduire le montant et d'annuler le titre exécutoire du 24 mai 2011 ;

3°) de condamner la ville de Lyon à verser, au titre d'une rémunération supplémentaire, à la société d'Is une somme de 31 609,74 euros TTC, à la société Cubic une somme de 5 627,24 euros TTC, à la société Abac Ingénierie une somme de 7 385,23 euros TTC, à la société Cet Cerbeton une somme de 3 815,30 euros TTC ;

4°) d'enjoindre à la ville de Lyon de leur rembourser dans un délai de huit jours à compter de l'arrêt à intervenir, et sous astreinte, la somme de 28 239,87 euros ;

5°) de mettre à la charge de la ville de Lyon des sommes de 2 000 euros à leur verser chacune, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Les sociétés soutiennent que :

- la ville doit assumer les conséquences des décisions qu'elle a prises et auxquelles le groupement de maîtrise d'oeuvre est étranger ; le chantier s'est déroulé dans des conditions exceptionnelles, au regard des malfaçons dues à la défaillance et à l'incompétence de l'entreprise Farget ;

- la ville de Lyon n'a pas cristallisé la rémunération du groupement, il lui appartient de justifier que la rémunération définitive a été fixée par ordre de service conformément à l'article 6.3 de l'acte d'engagement ; elle ne justifie pas avoir notifié au maître d'oeuvre le montant des travaux ; l'écart entre le coût total définitif des travaux et le montant total des marchés prévus est inférieur à 1,5 %, ce qui fait obstacle à l'application d'une pénalité ; les devis de l'entreprise Ruiz sont à rapprocher des erreurs et manquements de l'entreprise Farget ; les travaux du lot espace verts ne peuvent être pris en compte car ils ont été réalisés à la demande du maître d'ouvrage et des utilisateurs ; en toute hypothèse, le montant des pénalités doit être réduit car elles sont en réalité égales au montant du coût des travaux au-delà du taux de tolérance ; la ville a commis des fautes, ses allégations sur l'existence de fautes dans la réalisation des missions DET et EXE ne sont pas avérées ;

- elle a droit à une rémunération supplémentaire ; la ville de Lyon a sollicité d'autres travaux supplémentaires que ceux de l'entreprise Nallet ; les travaux supplémentaires décidés par la ville et réalisés par l'entreprise Nallet, d'un montant de 296 025,48 euros HT, ont été gérés par la maîtrise d'oeuvre, elle a droit à 13,95 % de cette somme soit 41 295,55 euros HT ; la maîtrise d'oeuvre a mis en oeuvre son expertise pour parvenir à un résultat satisfaisant, alors que l'ouvrage présentait d'importantes malfaçons menaçant sa pérennité et sa stabilité, elle a fait face à un surcroît de travail très important ;

- l'avis des sommes à payer ne comporte ni la signature de son auteur, ni la mention de la qualité de celui-ci, en méconnaissance de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 ; les bases de liquidation sont insuffisamment précisées, en méconnaissance de l'article 81 du décret du 29 décembre 1962 ; la créance tenant aux pénalités n'est pas établie.

Par un mémoire enregistré le 2 avril 2015, la ville de Lyon, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge des requérantes une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La ville soutient que :

- la requête est irrecevable, dès lors qu'elle se borne à reprendre ses écritures de première instance sans formuler de critique propre à remettre en cause le raisonnement adopté par le tribunal ;

- les pénalités ont été régulièrement appliquées ; le maître d'oeuvre avait connaissance des modalités de calcul ; la rémunération définitive a été arrêtée par ordre de service du 3 mars 2003, l'avenant n° 1 a été signé par le mandataire du groupement de maîtrise d'oeuvre ; seuls des travaux pour un montant de 108 982,31 euros ont été finalement considérés comme imputables au maître d'oeuvre, ce montant dépasse l'écart de 1,5 % ; c'est à juste titre que les travaux réalisés par la société Nallet, les surcoûts des travaux réalisés par l'entreprise Ruiz et les surcoûts du lot " espace vert " ont été pris en compte ; il n'est pas établi que la collectivité aurait commis une faute dans l'exécution du marché et qu'une éventuelle faute pourrait avoir une incidence sur le bien-fondé, le principe et le montant des pénalités ; les travaux supplémentaires induits par l'entreprise Farget ont été pris en compte par le maître de l'ouvrage dans le cadre de l'avenant du 18 janvier 2006 ;

- le titre de recettes est régulier au regard de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, dès lors qu'il comporte le nom et le prénom de l'auteur de l'acte, ainsi que sa qualité, et que le bordereau de titre de recettes comporte sa signature ; les bases de liquidation avaient été précisées dans le décompte général, ainsi que dans le rejet de la réclamation des maîtres d'oeuvre ; le titre de recettes renvoyait expressément au marché ; les pénalités sont régulières ;

- la société ne justifie pas de commandes supplémentaires pour un montant de 296 025,48 euros lui ayant occasionné un travail supplémentaire ; elle n'établit pas la réalité de prestations supplémentaires ; en toute hypothèse, les défaillances de l'entreprise Farget ont conduit à la signature d'un avenant qui a conduit à l'augmentation de la rémunération du maître d'oeuvre ; l'intervention de l'entreprise Nallet s'est limitée à la somme de 91 575,20 euros.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993 ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Samson-Dye, rapporteur,

- les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public ;

- les observations de Me C...pour la SARL d'architecture et d'urbanisme Atelier d'IS, la SARL d'IS, la SAS Cubic, la SARL Bet Cerbeton et la SAS Abac Ingénierie et de Me D... pour la ville de Lyon.

1. Considérant que la ville de Lyon a conclu avec les requérantes, constituées en groupement, un marché de maîtrise d'oeuvre, le 6 novembre 2002, portant sur la restructuration du groupe scolaire Nové Josserand ; que le décompte général a été notifié au mandataire du groupement le 23 février 2011 ; que les demandes du mandataire, qui par mémoire en réclamation en date du 17 mars 2011 a contesté l'application d'une pénalité et demandé le versement d'une rémunération complémentaire, ont été rejetées par la ville de Lyon le 18 mai 2011 ; qu'un titre de recettes d'un montant de 36 519,25 euros HT a été émis le 24 mai 2011 par la ville de Lyon et a fait l'objet d'une compensation par le comptable public à hauteur de 28 239,87 euros ; que la SARL d'architecture et d'urbanisme Atelier d'IS et autres ont saisi le tribunal administratif de Lyon de deux demandes, l'une contestant le solde du décompte sur ces deux aspects et la seconde sollicitant l'annulation du titre exécutoire ; que les membres du groupement de maîtrise d'oeuvre relèvent appel du jugement par lequel ce tribunal a rejeté leurs demandes ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par la ville de Lyon :

2. Considérant que la requête d'appel ne constitue pas la reproduction littérale des écritures de première instance des maîtres d'oeuvre et énonce de nouveau de manière précise les critiques adressées au décompte et au titre exécutoire ; qu'elle répond, dès lors, aux exigences de motivation des requêtes d'appel prévues par l'article R. 411-1 du code de justice administrative ; que la fin de non-recevoir invoquée par la ville de Lyon ne peut, par suite, être accueillie ;

Sur le solde du marché de maîtrise d'oeuvre :

En ce qui concerne la rémunération supplémentaire :

3. Considérant qu'ainsi que l'ont rappelé à juste titre les premiers juges, le titulaire d'un contrat de maîtrise d'oeuvre est rémunéré par un prix forfaitaire couvrant l'ensemble de ses charges et missions, ainsi que le bénéfice qu'il en escompte, et que seule une modification de programme ou une modification de prestations décidée par le maître de l'ouvrage peut donner lieu à une adaptation et, le cas échéant, à une augmentation de sa rémunération ; qu'en outre, le maître d'oeuvre ayant effectué des missions ou prestations non prévues au marché et qui n'ont pas été décidées par le maître d'ouvrage a droit à être rémunéré de ces missions ou prestations, nonobstant le caractère forfaitaire du prix fixé par le marché si, d'une part, elles ont été indispensables à la réalisation de l'ouvrage selon les règles de l'art, ou si, d'autre part, le maître d'oeuvre a été confronté dans l'exécution du marché à des sujétions imprévues présentant un caractère exceptionnel et imprévisible, dont la cause est extérieure aux parties et qui ont pour effet de bouleverser l'économie du contrat ; que, par ailleurs, la responsabilité du maître d'ouvrage n'est pas susceptible d'être engagée du seul fait de fautes commises par les autres intervenants à l'opération ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les défaillances de l'entreprise Farget, attributaire de lots de gros oeuvre, ont amené le maître d'ouvrage à conclure le 18 janvier 2006 un avenant avec le groupement de maîtrise d'oeuvre, portant sa rémunération hors taxe de 485 480 euros à 549 585 euros ; que si les requérantes soutiennent avoir été exposées à un surcroît de travail important, elles n'établissent pas qu'elles auraient été amenées à réaliser des prestations supplémentaires par rapport à ce qui était prévu au contrat initial, et excédant celles faisant l'objet de cet avenant, dont il n'est pas allégué qu'il aurait fait l'objet de réserves ; que la seule augmentation de la masse des travaux commandés aux entreprises ne saurait, à elle seule, ouvrir mécaniquement droit au maitre d'oeuvre à un supplément de rémunération ; que les requérantes ne se prévalent ni d'une modification du programme par le maître d'ouvrage, ni de sujétions imprévues ayant bouleversé l'économie du contrat, ni de la nécessité de réaliser des prestations indispensables à la réalisation de l'ouvrage dans les règles de l'art ; que, dans ces conditions, c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé qu'elles n'avaient pas droit à une rémunération supplémentaire ;

En ce qui concerne les pénalités pour dépassement du coût des marchés de travaux :

5. Considérant qu'aux termes de l'article 7-5 du marché de maîtrise d'oeuvre conclu le 6 novembre 2002 entre les parties : " 7-5 : Respect du coût des travaux- Taux de tolérance à l'AOR / Le titulaire est contractuellement engagé au respect du coût résultant des marchés de travaux conclus par le Maître d'ouvrage. Le contrôle de cet engagement se fait dans les conditions suivantes : / Au moment de la notification par le Maître d'ouvrage du Décompte Général et Définitif aux entreprises, l'écart entre le coût total définitif des travaux (non compris les avenants éventuels imputables au Maître d'ouvrage) et le montant résultant des marchés de travaux ne peut être supérieur à 1.5 %. / Si le coût total définitif des travaux· ne correspond pas à cet ·écart, la rémunération sera réduite du montant du surcoût, dans la limite de 15 % de la rémunération des éléments postérieurs à l'attribution des marchés de travaux. / La comparaison entre le coût total définitif des travaux et le montant des marchés de travaux conclus par le Maître d'ouvrage est effectué lors du Décompte général et Définitif hors variations des prix éventuelles. / Le coût total définitif des travaux comprend tous les travaux nécessaires pour répondre au programme contractuel de l'opération " ;

6. Considérant que, sur le fondement de ces stipulations, la ville de Lyon a appliqué une pénalité de 36 179,25 euros au groupement de maîtrise d'oeuvre ;

7. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction qu'il y a lieu d'écarter, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, le moyen tiré du défaut de cristallisation du montant de la rémunération des maîtres d'oeuvre ;

8. Considérant, en deuxième lieu, que les sociétés requérantes soutiennent qu'aucune pénalité ne pouvait leur être appliquée, dès lors que l'écart entre le coût total définitif des travaux, après déduction des surcoûts imputables au maître d'ouvrage et à d'autres entreprises, et le montant des marchés de travaux serait inférieur au seuil de tolérance de 1,5 % ;

9. Considérant, d'une part, que si elles soutiennent que la ville ne s'explique pas sur le coût total définitif des travaux, elles ne développent dans leurs écritures aucune critique argumentée et étayée pour contester le montant retenu par la collectivité ; qu'en particulier, les allégations sur le fait que certaines dépenses auraient servi à assurer d'autres besoins que ceux du marché ne sont pas assorties des précisions permettant d'en apprécier le bien fondé ; que, dans ces conditions, il y a lieu de retenir comme montant définitif des travaux la somme déterminée par le maître d'ouvrage, soit 4 749 952,08 euros ;

10. Considérant, d'autre part, que les requérantes contestent le montant des surcoûts de travaux que la ville a estimé imputables à la maîtrise d'oeuvre ;

11. Considérant que, s'agissant des lots 2A et 2B, repris par la société Ruiz après la défaillance de l'entreprise Farget, le document joint au décompte identifie un montant de travaux supplémentaires imputés au maître d'oeuvre, à hauteur de 41 127,12 euros, s'agissant du seul lot 2A ; qu'ainsi, les requérantes ne peuvent utilement se prévaloir de l'imputabilité des travaux du lot 2B ; que les travaux du lot 2A ont fait l'objet d'une fiche de suivi de modifications n° 52, pour un montant de 60 990,58 euros, signée par le maître d'oeuvre, et dans laquelle celui-ci indique que ces travaux étaient demandés par lui-même, et non par le maître d'ouvrage ; que, si les requérantes soutiennent qu'il s'agit d'une erreur matérielle, elles ne l'établissent pas ; que les maîtres d'oeuvre ne démontrent pas en quoi ces travaux ne leur seraient pas imputables à hauteur de la somme de 41 127,12 euros, étant précisé que la ville a estimé que les travaux de la fiche n° 52 étaient imputables à la maîtrise d'ouvrage à hauteur de 19 863,46 euros ;

12. Considérant que, s'agissant du lot 14 relatif aux espaces verts, le document joint au décompte a retenu des travaux supplémentaires, pour partie imputables au maître d'oeuvre pour 28 246,72 euros, et pour une autre partie imputables au maître d'ouvrage, à hauteur de 6 600 euros ; que les requérantes soutiennent qu'il s'agit de travaux d'amélioration et d'embellissement, et non d'erreurs imputables à la maîtrise d'oeuvre ; que, cependant, ces travaux incluent, notamment, le remplacement de végétaux, ainsi que la mise en place d'un arrosage automatique ; qu'ainsi que l'ont relevé à juste titre les premiers juges, qui ne sont pas efficacement contredits, un extrait du programme de l'opération, en date du 26 mars 2002, qu'il incombait au maître d'oeuvre de faire appliquer, imposait l'absence de toxicité des végétaux à planter et que serait mis en place un arrosage automatique ; qu'il n'est pas contesté, en appel, que le remplacement des espèces végétales découle de leur toxicité ; que, par ailleurs, il était de la responsabilité du maître d'oeuvre de prévoir, dans les pièces du marché de travaux, un arrosage automatique ; que, pour le surplus, les requérants ne développent aucune argumentation précise, alors que la seule circonstance que l'origine des autres modifications découlerait de remarques des usagers ou de la ville, et notamment des agents en charge de l'entretien, ne suffit pas à établir que ces surcoûts ne seraient pas en réalité imputables au maître d'oeuvre ; que, dans ces conditions, le groupement requérant n'est pas fondé à contester l'intégration des surcoûts constatés sur ce lot dans la base de calcul des pénalités ;

13. Considérant qu'il suit de là que, selon les éléments joints au décompte et dont les requérantes n'ont pas efficacement contesté le bien-fondé, le montant des surcoûts pouvant être pris en compte pour le calcul des pénalités est de 108 982,31 euros, ce qui représente plus de 1,50 % du montant définitif des travaux ; que, par suite, le seuil de tolérance étant dépassé, une pénalité prévue par l'article 7-5 du contrat pouvait être infligée au groupement de maîtrise d'oeuvre ;

14. Considérant, en troisième lieu, que le moyen tiré de ce que le maître d'ouvrage aurait commis des fautes n'est pas assorti des précisions permettant d'en apprécier les conséquences quant au bien-fondé des pénalités en litige ;

15. Considérant, en quatrième et dernier lieu, qu'en l'espèce, les sociétés requérantes demandent la modulation des pénalités qui leur ont été infligées et font valoir que ces dernières sont égales au montant du dépassement des travaux excédant le taux de tolérance ; que, cependant, et en tout état de cause, il ne résulte pas de l'instruction, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, que les pénalités infligées par la ville au groupement de maîtrise d'oeuvre, qui représentent approximativement 6 % du montant total du marché, atteindraient un montant manifestement excessif ; qu'ainsi, les conclusions tendant à la modulation des pénalités ne peuvent qu'être rejetées ;

16. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérantes ne sont pas fondées à contester les pénalités qui ont été retenues dans le décompte de leur marché de maîtrise d'oeuvre ;

Sur le titre exécutoire :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;

17. Considérant qu'un état exécutoire doit indiquer les bases de liquidation de la dette, alors même qu'il est émis par une personne publique autre que l'Etat, pour lequel cette obligation est expressément prévue par l'article 81 du décret du 29 décembre 1962 ; qu'en application de ce principe, la ville de Lyon ne pouvait émettre le titre exécutoire en litige, dont le montant avait été par ailleurs rectifié de manière manuscrite pour opérer une compensation, sans indiquer, soit dans le titre lui-même, soit par référence précise à un document joint à l'état exécutoire ou précédemment adressé au débiteur, les bases et les éléments de calcul sur lesquels il se fonde pour mettre les sommes en litige à la charge du groupement de maîtrise d'oeuvre ;

18. Considérant que le titre exécutoire en litige porte uniquement la mention " pénalités solde GS Nové Josserand, marché 220599 " ; que, ce faisant, il ne comporte aucune référence précise à un document antérieurement adressé au groupement de maîtrise d'oeuvre ; qu'il n'est pas allégué qu'un autre document y était joint ; que, dans ces conditions, le titre exécutoire du 22 mai 2011 est, pour ce motif formel, illégal, alors même que les sociétés en cause avaient reçu antérieurement communication du décompte général, retenant pour les pénalités un montant identique à celui figurant sur l'avis de somme à payer et d'un courrier de la ville de Lyon du 18 mai 2011 rejetant leur réclamation relative au solde du marché expliquant le mode de calcul de cette pénalité ; que, par suite, les requérantes sont fondées à demander l'annulation de ce titre exécutoire et à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté leurs conclusions sur ce point ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

19. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ;

20. Considérant que l'annulation par une décision juridictionnelle d'un titre exécutoire pour un motif d'insuffisance de motivation n'implique pas nécessairement, compte tenu de la possibilité d'une régularisation éventuelle par l'administration, que les sommes perçues par l'administration sur le fondement de ce titre soient immédiatement restituées à l'intéressé ; que, dans ces conditions, il y a seulement lieu d'enjoindre à la ville de Lyon, si elle n'a pas émis avant l'expiration d'un délai de deux mois, un nouveau titre dans des conditions régulières, de restituer au groupement requérant les sommes perçues sur le fondement de la décision annulée ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les frais non compris dans les dépens :

21. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la cour fasse bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais exposés à l'occasion du litige soumis au juge et non compris dans les dépens ; que, dès lors, les conclusions de la ville de Lyon doivent être rejetées ;

22. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées au même titre par les requérantes ;

DECIDE :

Article 1er : Le titre exécutoire émis le 24 mai 2011 par la ville de Lyon est annulé. Les sociétés Atelier d'Is et SARL d'architecture et d'urbanisme Atelier d'Is sont déchargées de l'obligation de payer la somme correspondante.

Article 2 : Il est enjoint à la ville de Lyon de restituer aux sociétés Atelier d'Is et SARL d'architecture et d'urbanisme Atelier d'Is, mentionnées dans le titre exécutoire du 24 mai 2011, les sommes perçues sur le fondement du titre exécutoire annulé à l'article 1er du présent arrêt, si la ville n'a pas édicté un nouveau titre exécutoire dans des conditions régulières avant l'expiration d'un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le jugement nos 1104280-1104744 du tribunal administratif de Lyon du 16 octobre 2014 est annulé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL d'architecture et d'urbanisme Atelier d'IS, la SARL d'IS, la SAS Cubic, la SARL Bet Cerbeton, la SAS Abac Ingénierie et à la ville de Lyon.

Délibéré après l'audience du 17 novembre 2016 à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président,

Mme Michel, président-assesseur,

Mme Samson-Dye, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 décembre 2016.

1

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N° 15LY00097


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY00097
Date de la décision : 08/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Comptabilité publique et budget - Créances des collectivités publiques - Recouvrement - Procédure - État exécutoire.

Marchés et contrats administratifs - Exécution financière du contrat - Rémunération du co-contractant - Prix - Rémunération des architectes et des hommes de l'art.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Aline SAMSON DYE
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : SELARL BARRE-LE GLEUT

Origine de la décision
Date de l'import : 17/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-12-08;15ly00097 ?
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