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06/12/2016 | FRANCE | N°14LY02535

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 06 décembre 2016, 14LY02535


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A...D...a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

1°) d'annuler l'arrêté du 7 septembre 2012 par lequel le préfet de l'Isère ne lui a accordé qu'une autorisation partielle d'exploiter des terres agricoles sur le territoire de la commune de Poliénas, ensemble la décision du 31 octobre 2012 rejetant son recours gracieux ;

2°) de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1206341 du 10 juin 2014, le tribunal ad

ministratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 7 septembre 2012 et la décision du 31 octobre ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A...D...a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

1°) d'annuler l'arrêté du 7 septembre 2012 par lequel le préfet de l'Isère ne lui a accordé qu'une autorisation partielle d'exploiter des terres agricoles sur le territoire de la commune de Poliénas, ensemble la décision du 31 octobre 2012 rejetant son recours gracieux ;

2°) de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1206341 du 10 juin 2014, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 7 septembre 2012 et la décision du 31 octobre 2012 et mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 5 août 2014, le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt demande à la cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 10 juin 2014 et de rejeter la demande de M.D....

Il soutient que :

- les premiers juges ont statué ultra petita en ce qu'ils n'étaient saisis que d'une demande d'annulation partielle de l'arrêté du 7 septembre 2012 ;

- le jugement est insuffisamment motivé s'agissant de la situation du concurrent de M. D... ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que M. D...et son concurrent relevaient du même rang de priorité, au sens de l'article II du schéma directeur départemental des structures agricoles ; le préfet de l'Isère était tenu de rejeter la demande de M. D... en tant qu'elle portait sur les parcelles faisant l'objet d'une demande concurrente prioritaire.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 octobre 2014, M.D..., représenté par MeC..., conclut au rejet de la requête, à la confirmation du jugement en ce qu'il annule l'arrêté du préfet de l'Isère du 7 septembre 2012 lui ayant refusé l'autorisation d'exploiter trois parcelles d'une superficie totale de 1,87 hectares et à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir :

- à titre principal, que la requête est irrecevable en ce qu'elle ne mentionne ni le nom du ministre chargé de l'agriculture ni celui de la directrice des affaires juridiques et en ce qu'elle a été signée par une autorité incompétente ;

- à titre subsidiaire, que l'arrêté du 7 septembre 2012, en tant qu'il lui refuse l'autorisation d'exploiter 1,87 hectares, a été signé par une autorité incompétente ; qu'il est irrégulier en ce qu'il ne mentionne pas le nom du directeur départemental des territoires et en ce que la commission d'orientation de l'agriculture était irrégulièrement composée et a été consultée sans procédure contradictoire préalable ; qu'aucune demande d'autorisation d'exploiter n'était nécessaire ; que l'arrêté préfectoral est erroné s'agissant de la superficie de terres qu'il exploitait avant de présenter sa demande d'autorisation ; que son rang de priorité était supérieur ou, à tout le moins, égal à celui de son concurrent ; qu'il fait l'objet d'un traitement discriminatoire ; qu'il relève de la priorité "B deuxièmement" prévue par l'arrêté du préfet de l'Isère du 28 mai 2013 se substituant à l'arrêté du 28 décembre 2000.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime ;

- l'arrêté préfectoral du 23 août 2010 révisant le schéma directeur départemental des structures agricoles de l'Isère ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Peuvrel,

- et les conclusions de M. Clément, rapporteur public.

1. Considérant que le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt relève appel du jugement du 10 juin 2014 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté 7 septembre 2012 autorisant M.D..., agriculteur au sein de la commune de Poliénas, à exploiter 3,96 hectares et sa décision du 31 octobre 2012 rejetant le recours gracieux de M. D...contre cet arrêté ;

Sur l'étendue du litige :

2. Considérant que M. D...a demandé l'autorisation d'exploiter 5,83 hectares dont il serait devenu propriétaire le 27 janvier 2012 ; que, par arrêté du 7 septembre 2012, le préfet de l'Isère a, d'une part, accordé à M. D...l'autorisation demandée pour les 3,96 hectares qui ne faisaient pas l'objet d'une demande concurrente et lui a, d'autre part, refusé l'autorisation pour les 1,87 hectares restants, pour lesquels il a, par arrêté du même jour, délivré l'autorisation d'exploitation à la demande concurrente qui avait été présentée par M. B... ; que M. D... a demandé au tribunal administratif de Grenoble l'annulation de l'arrêté du 7 septembre 2012 en tant qu'il lui refusait l'autorisation d'exploiter 1,87 hectares ; que le tribunal administratif a, par le jugement attaqué, annulé cet arrêté dans sa totalité ; que, dès lors, le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt est fondé à soutenir que, ce faisant, le tribunal a statué au-delà des conclusions dont M. D... l'avait saisi et que son jugement doit être annulé en tant qu'il annule l'autorisation accordée à l'intéressé d'exploiter une superficie de 3,96 hectares ;

Sur la régularité du jugement :

3. Considérant que les premiers juges ont estimé que la demande de M. D...relevait du même rang de priorité que M.B... ; qu'ils ont mentionné les caractéristiques que présentait la demande de M. D...en termes de superficie exploitée et de nature des cultures, ont précisé que cette demande portait sur un agrandissement au-delà d'une unité de référence et en deçà de deux unités de référence et en ont déduit qu'elle relevait du même rang de priorité, à savoir le Troisièmement du B intitulé "Autres Priorités", que la demande de M. B... ; que, dans ces conditions, ils n'étaient pas tenus d'exposer également la situation de ce dernier et ne peuvent, dès lors, être regardés comme ayant insuffisamment motivé leur jugement sur ce point ;

Sur le bien-fondé de la requête :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 331-2 du code rural et de la pêche maritime : " I.-Sont soumises à autorisation préalable les opérations suivantes : 1° Les installations, les agrandissements ou les réunions d'exploitations agricoles au bénéfice d'une exploitation agricole mise en valeur par une ou plusieurs personnes physiques ou morales, lorsque la surface totale qu'il est envisagé de mettre en valeur excède le seuil fixé par le schéma directeur départemental des structures. / Ce seuil est compris entre une et deux fois l'unité de référence définie à l'article L. 312-5. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 331-3 du même code : " L'autorité administrative se prononce sur la demande d'autorisation en se conformant aux orientations définies par le schéma directeur départemental des structures agricoles applicable dans le département dans lequel se situe le fonds faisant l'objet de la demande. Elle doit notamment : 1° Observer l'ordre des priorités établi par le schéma départemental entre l'installation des jeunes agriculteurs et l'agrandissement des exploitations agricoles, en tenant compte de l'intérêt économique et social du maintien de l'autonomie de l'exploitation faisant l'objet de la demande ; (...) 4° Prendre en compte la situation personnelle du ou des demandeurs, notamment en ce qui concerne l'âge et la situation familiale ou professionnelle et, le cas échéant, celle du preneur en place ; (...). L'autorisation peut n'être délivrée que pour une partie de la demande, notamment si certaines des parcelles sur lesquelles elle porte font l'objet d'autres candidatures prioritaires. (...) " ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté par le ministre que, contrairement à ce qu'a relevé le préfet de l'Isère, M. D...n'entre dans aucune des priorités définies par le schéma directeur départemental des structures agricoles ; qu'en effet, n'étant pas titulaire d'une autorisation d'exploiter, il n'a pas la qualité d'exploitant en place, qu'étant installé depuis plusieurs années, il n'entre pas dans le champ des priorités à l'installation et qu'étant âgé de plus de cinquante-six ans et ne s'étant pas engagé à libérer les terres, bâtiments et cheptels de son exploitation en vue de contribuer à l'installation d'un jeune agriculteur, il ne remplit pas les critères définis dans le B relatifs aux "Autres priorités" ; qu'il ressort, par ailleurs, des pièces du dossier comme des écritures du ministre chargé de l'agriculture que l'unité de référence de 40 hectares définie par l'arrêté préfectoral du 28 décembre 2000 n'étant assortie d'aucune pondération, le concurrent de M.D..., qui exploite 24,60 hectares de terres, n'entre pas dans le rang de priorité défini au Troisièmement du B de l'article II du schéma directeur correspondant à un agrandissement après reprise de terres supérieure à une unité de référence et inférieure à deux unités ; que, si le ministre fait valoir que la demande de M. B...serait prioritaire par rapport à celle de M. D... au motif qu'elle relèverait du Deuxièmement du B de l'article II relatif aux situations d'agrandissement après reprise de terres inférieure à une unité de référence pour un exploitant individuel âgé de moins de cinquante-six ans, le relevé qu'il produit de la Mutualité sociale agricole du 15 novembre 2011 mentionnant la superficie exploitée par l'intéressé ne permet pas, à lui-seul, de démontrer que la demande de M. B...serait prioritaire par rapport à celle de M. D..., alors que le Deuxièmement du B de l'article II du schéma directeur départemental des structures agricoles fixe d'autres conditions que la seule superficie exploitée, dont il n'est ni allégué ni démontré que M. B...les respecterait ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la requête, le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par son jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du 7 septembre 2012 en tant que, par celui-ci, le préfet de l'Isère a autorisé M. D...à exploiter 3,96 hectares sur les 5,83 hectares qui avaient été demandés ; que le surplus des conclusions de sa requête d'appel doit, en revanche, être rejeté ;

Sur les frais non compris dans les dépens :

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 10 juin 2014 est annulé en tant qu'il annule l'arrêté du préfet de l'Isère du 7 septembre 2012 dans ses dispositions autorisant M. D...à exploiter 3,96 hectares sur les 5,83 hectares demandés.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 3 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros à M. D...en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt et à M. A...D....

Copie en sera adressée au préfet de l'Isère

Délibéré après l'audience du 15 novembre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Alfonsi, président de chambre,

- M. Drouet, président-assesseur,

- Mme Peuvrel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 décembre 2016.

2

N 14LY02535


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY02535
Date de la décision : 06/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Agriculture et forêts - Exploitations agricoles.

Procédure - Pouvoirs et devoirs du juge - Questions générales - Conclusions - Ultra petita.


Composition du Tribunal
Président : M. ALFONSI
Rapporteur ?: Mme Nathalie PEUVREL
Rapporteur public ?: M. CLEMENT
Avocat(s) : MAUBLEU

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-12-06;14ly02535 ?
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