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01/12/2016 | FRANCE | N°14LY02882

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 01 décembre 2016, 14LY02882


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner le centre hospitalier de Valence, et subsidiairement l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), à lui verser une indemnité de 172 293,50 euros, outre intérêts au taux légal, en réparation des préjudices qu'elle a subis du fait d'une infection contractée dans cet établissement le 5 juillet 2005.

Par un jugement n° 1301476 du 18 juillet 2014, le

tribunal administratif de Grenoble a condamné le centre hospitalier de Valence à ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner le centre hospitalier de Valence, et subsidiairement l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), à lui verser une indemnité de 172 293,50 euros, outre intérêts au taux légal, en réparation des préjudices qu'elle a subis du fait d'une infection contractée dans cet établissement le 5 juillet 2005.

Par un jugement n° 1301476 du 18 juillet 2014, le tribunal administratif de Grenoble a condamné le centre hospitalier de Valence à verser à Mme A... une somme de 47 432 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 13 mars 2013.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 11 septembre 2014, présentée pour Mme B...A..., domiciliée..., il est demandé à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1301476 du 18 juillet 2014 du tribunal administratif de Grenoble en tant qu'il a limité à la somme de 47 432 euros l'indemnité mise à la charge du centre hospitalier de Valence ;

2°) de condamner le centre hospitalier de Valence à lui verser une indemnité d'un montant total de 112 120,27 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 11 mars 2013 ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Valence la somme de 2 500 euros, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'indemnisation de ses préjudices subis à raison d'une infection nosocomiale doit être mise à la charge du centre hospitalier de Valence, en raison des fautes commises résultant d'une indication opératoire d'ablation du matériel d'ostéosynthèse critiquable, d'une asepsie non conforme aux règles de l'art et du non-respect de son obligation d'information ;

- elle est fondée à demander l'indemnisation des postes de préjudices suivants :

• frais divers : 605,94 euros

• assistance d'une tierce personne : 2 000 euros

• pertes de revenus : 20 264,33 euros

• incidence professionnelle : 5 000 euros

• frais de défense : 750 euros

• souffrances endurées : 25 000 euros

• déficit fonctionnel temporaire : 17 500 euros

• déficit fonctionnel permanent : 35 000 euros

• préjudice d'agrément : 4 000 euros

• préjudice esthétique : 2 000 euros.

Par des mémoires, enregistrés les 9 janvier et 25 septembre 2015, présentés pour le centre hospitalier de Valence, il conclut :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à l'annulation du jugement du 18 juillet 2014 du tribunal administratif de Grenoble en tant qu'il a mis à sa charge la somme de 47 432 euros, et au rejet de la demande présentée par Mme A... ;

3°) à titre subsidiaire, à la réduction de l'indemnité mise à sa charge au montant total de 39 932,50 euros ;

4°) à ce que soient mis à la charge de Mme A... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et les entiers dépens de l'instance.

Il soutient que :

- aucune faute à l'origine d'un quelconque dommage de Mme A... ne peut être reprochée au centre hospitalier, dès lors, en premier lieu, que l'indication opératoire, qui n'a nullement été remise en cause par les experts, a été posée en raison de douleurs et d'une gêne, en deuxième lieu, qu'a été rapportée la preuve de la délivrance d'une information complète à la patiente, et alors que la survenue d'une infection nosocomiale dans le type de chirurgie en cause n'était pas un risque fréquent pour lequel l'établissement était tenu d'une obligation d'information, et en dernier lieu, qu'une antibiothérapie n'était pas recommandée s'agissant d'une intervention d'ablation de matériel d'ostéosynthèse ;

- les experts ont conclu que l'intervention s'était déroulée selon les règles de l'art et que la complication rencontrée en raison de difficultés pour enlever une vis avait constitué un accident médical non fautif ;

- l'infection contractée par Mme A... résulte d'une cause étrangère, de nature à exonérer l'établissement hospitalier de sa responsabilité, dès lors que l'origine des complications présentées par la patiente résulte d'une défaillance du matériel métallique, qui a causé une fracture du péroné et des lésions de nécrose musculaire, secondairement surinfectées ; l'infection à staphylocoque dorée est consécutive à cette nécrose musculaire et doit être regardée comme consécutive à la survenue de cet aléa thérapeutique ; l'hôpital a mis en oeuvre toutes les mesures connues en matière d'hygiène et d'asepsie et l'infection a présenté, dès lors, un caractère d'irrésistibilité ;

- à titre subsidiaire, les demandes indemnitaires de Mme A... devront être réduites.

Par un mémoire, enregistré le 15 septembre 2016, présenté pour l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), il conclut :

1°) à sa mise hors de cause ;

2°) au rejet de la requête ;

3°) à la mise à la charge du centre hospitalier de Valence d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les dommages subis par Mme A... sont directement et exclusivement imputables à la survenue d'une infection nosocomiale au décours de l'intervention subie le 5 juillet 2005 au centre hospitalier de Valence, à l'exclusion de toute autre cause, dès lors notamment qu'elle est sans lien avec les difficultés rencontrées par l'opérateur au cours de cette intervention, ledit centre hospitalier s'étant rendu responsable d'une faute à l'origine de l'infection nosocomiale en cause en n'administrant pas d'antibioprophylaxie au cours de cette intervention ;

- le dommage résultant de la survenue de cette infection nosocomiale n'atteint pas le seuil de gravité exigé par l'article L. 1142-1-1 du code de la santé publique permettant une indemnisation au titre de la solidarité nationale.

Par un mémoire, enregistré le 3 novembre 2016, présenté pour le centre hospitalier de Valence, il maintient ses conclusions pour les mêmes motifs.

Il soutient, en outre, que la survenue de l'infection est la conséquence des complications survenues lors de l'intervention chirurgicale, qui constituent un accident médical non fautif ou aléa thérapeutique, et que le critère de gravité pouvant justifier l'indemnisation par la solidarité nationale est bien rempli dès lors que l'incapacité temporaire totale de travail de Mme A... a duré plus de 6 mois, à savoir en l'espèce 14 mois et demi.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique du 10 novembre 2016 :

- le rapport de M. Seillet, président-assesseur ;

- les conclusions de Mme Vigier-Carrière, rapporteur public ;

- et les observations de Me Di Cintio, avocat de Mme A... et de Me Pouilly, avocat du centre hospitalier de Valence.

1. Considérant que Mme A..., née le 15 mai 1971, qui a été victime, le 6 février 1989, d'un accident de ski à l'origine d'une fracture du tibia et du péroné droits, a alors bénéficié, dans un hôpital helvétique, d'une ostéosynthèse du tibia avec pose d'une plaque vissée, plaque ensuite déposée le 6 février 1990 ; qu'à la suite d'une nouvelle fracture du péroné droit survenue en 1992, elle a bénéficié d'une greffe osseuse et d'une ostéosynthèse par plaque vissée ; que l'intéressée, qui avait été adressée par son médecin référent à un chirurgien orthopédiste du centre hospitalier de Valence, en raison de douleurs à hauteur du péroné droit, a été admise dans cet établissement pour une ablation de la plaque d'ostéosynthèse, qui a été pratiquée le 5 juillet 2005 ; que lors de cette intervention les manoeuvres du chirurgien pour enlever l'une des quatre vis ont conduit à un " trait de fracture " qui a rendu nécessaire une greffe ; qu'après sa sortie de l'hôpital, le 8 juillet suivant, Mme A... a ressenti de vives douleurs à la jambe droite, et s'est rendue à plusieurs reprises au centre hospitalier de Valence où elle a finalement été hospitalisée de nouveau, le 14 juillet 2005, après constat d'une désunion de sa cicatrice et de l'apparition de pus ; qu'elle y a été réopérée le jour-même, puis traitée, avant son transfert à l'hôpital de la Croix Rousse, à Lyon, le 22 juillet, où elle a été réopérée le 2 août, et dont elle n'est ressortie que le 24 août, pour se rendre dans un centre de rééducation où elle a bénéficié de soins jusqu'au 9 décembre 2005 ; que l'expert désigné par une ordonnance du 20 juin 2006 du juge des référés du tribunal administratif de Grenoble, à la demande de Mme A..., assisté d'un sapiteur infectiologue, a rédigé son rapport le 26 mars 2007, en considérant que l'intervention du 5 juillet 2005 s'était déroulée selon les règles de l'art mais que Mme A... avait été victime d'une infection à staphylocoque doré " liée aux soins " ; que Mme A... a recherché devant le tribunal administratif de Grenoble la responsabilité du centre hospitalier de Valence et demandé la condamnation de cet établissement hospitalier à l'indemniser des préjudices qu'elle impute à des fautes commises lors de son hospitalisation le 5 juillet 2005 ; que Mme A... fait appel du jugement du 18 juillet 2014 du tribunal administratif de Grenoble en tant qu'il a limité à la somme de 47 432 euros l'indemnité mise à la charge du centre hospitalier de Valence ; que, pour sa part, le centre hospitalier de Valence, qui conclut au rejet de cette requête, demande également, à titre incident, l'annulation de ce jugement en tant qu'il a retenu sa responsabilité et, à titre subsidiaire, la réduction de l'indemnité mise à sa charge ; qu'enfin, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), appelé en la cause par la cour, conclut à sa mise hors de cause et à la confirmation de la condamnation du centre hospitalier de Valence ;

Sur la responsabilité :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " I. - Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. / Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère. / II. - Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d'un producteur de produits n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'atteinte permanente à l'intégrité physique ou psychique, de la durée de l'arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire. / (...)" ;

3. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique qu'une infection nosocomiale n'ouvre droit à indemnisation par l'ONIAM, au titre de la solidarité nationale, des préjudices de la victime que dans l'hypothèse où la responsabilité de l'établissement hospitalier ne peut être retenue ;

4. Considérant que si les dispositions précitées du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique font peser sur l'établissement de santé la responsabilité des infections nosocomiales, qu'elles soient exogènes ou endogènes, à moins que la preuve d'une cause étrangère ne soit rapportée, seule une infection survenant au cours ou au décours d'une prise en charge et qui n'était ni présente, ni en incubation au début de la prise en charge peut être qualifiée de nosocomiale ;

5. Considérant, qu'il résulte de l'instruction, et en particulier du rapports des experts, qu'à la date de l'intervention Mme A... " ne présentait aucun foyer infectieux ", que l'infection qu'elle a présentée " est liée aux soins ", ce rapport précisant que " le caractère nosocomial c'est-à-dire lié au soin et contracté pendant l'hospitalisation et non pas au domicile de la patiente semble confirmé par l'apparition rapide après l'intervention de signes généraux de sepsis : grosse jambe douloureuse rouge tendue après élimination par échodoppler le 07/07/05 d'une phlébite ou d'un syndrome des loges ", et que " l'atteinte en profondeur du site opératoire est un argument pour prétendre que l'origine de l'infection a pris naissance pendant l'intervention d'autant qu'il n'y a pas eu d'antibioprophylaxie " ; qu'ainsi il ne résulte pas de l'instruction que l'intéressée était porteuse d'un foyer infectieux avant l'intervention ; que, dès lors, l'infection contractée par Mme A... doit être regardée comme présentant un caractère nosocomial puisqu'elle est survenue au cours ou au décours de la prise en charge par le centre hospitalier de Valence et qu'elle n'était ni présente, ni en incubation au début de celle-ci et ce, quand bien même les complications générées par la défaillance du matériel métallique mis en place antérieurement ont conduit à ce que les tissus soient traumatisés, avec des lésions de nécrose musculaire ayant pu favoriser une telle infection ; que le centre hospitalier de Valence, en se bornant à se prévaloir des lésions de nécrose résultant de la défaillance du matériel métallique, ne rapporte pas la preuve d'une cause étrangère ; que dès lors l'intéressée est fondée à demander la condamnation du centre hospitalier de Valence à réparer les dommages résultant de cette infection nosocomiale ;

6. Considérant que, dès lors que la responsabilité du centre hospitalier de Valence doit être retenue, la prise en charge par l'ONIAM des préjudices de Mme A...au titre de la solidarité nationale doit, eu égard à ce qui a été dit au point 3, être écartée ;

Sur les préjudices :

En ce qui concerne les préjudices à caractère patrimonial :

S'agissant de frais divers :

7. Considérant, en premier lieu, que Mme A... ne démontre, pas plus en appel qu'en première instance, l'existence d'un lien de causalité direct et certain entre, d'une part, l'infection contractée lors de son hospitalisation au centre hospitalier de Valence et, d'autre part, les dépenses qu'elle a dû exposer au titre de frais de pressing, d'acquisition de vêtements et de chaussures adaptées, de timbres et d'articles de papèterie, alors au demeurant qu'ainsi qu'il résulte du rapport d'expertise, l'ablation de matériel après ostéosynthèse d'une fracture de la jambe, même sans complication, aurait entraîné nécessairement une hospitalisation suivie d'une période d'incapacité temporaire totale pouvant aller jusqu'à une durée de deux mois ;

8. Considérant, en deuxième lieu, qu'ainsi que l'ont relevé les premiers juges, Mme A... ne peut réclamer le remboursement par le centre hospitalier de Valence des frais qu'elle a dû exposer au titre de l'assistance par un médecin conseil, dès lors que ces frais ont été pris en charge par son assureur au titre d'un contrat de protection juridique et que la circonstance qu'en cas de condamnation de l'établissement hospitalier à lui verser une somme à ce titre elle serait alors tenue d'en reverser le montant à cet assureur, reste à ce jour purement hypothétique ;

S'agissant des frais liés au handicap :

9. Considérant que lorsque, au nombre des conséquences dommageables d'un accident engageant la responsabilité d'une personne publique, figure la nécessité pour la victime de recourir à l'assistance d'une tierce personne à domicile pour les actes de la vie courante, la circonstance que cette assistance serait assurée par un membre de sa famille est, par elle-même, sans incidence sur le droit de la victime à en être indemnisée ; que, toutefois, la mise à la charge d'une personne publique d'une indemnité à ce titre suppose que l'assistance d'une tierce personne a été effectivement apportée à la victime, le cas échéant par un membre de sa famille ; que dès lors que Mme A... indique elle-même n'avoir pas effectivement eu recours à l'assistance d'une tierce personne à hauteur du nombre total d'heures évalué par les experts, en raison de difficultés financières, elle n'est pas fondée à solliciter la condamnation du centre hospitalier de Valence à lui verser une indemnité d'un montant supérieur à celui mis à la charge de cet établissement par le jugement attaqué, correspondant au nombre d'heures d'assistance dont avait effectivement bénéficié la requérante, ainsi qu'elle l'établissait par la production de pièces justificatives, pour un montant de 382,50 euros ;

S'agissant des pertes de revenus :

10. Considérant que Mme A... est fondée à réclamer le remboursement des pertes de revenus subies en conséquence de l'infection contractée à l'hôpital, correspondant à des primes d'intéressement, de participation et d'assiduité, pour un montant, en 2006, de 4 075,64 euros et, en 2007, de 1 973,67 euros, dont elle justifie, contrairement à ce que soutient le centre hospitalier de Valence, par la production d'attestations de son employeur, pour un montant total arrondi à 6 049 euros ; qu'elle n'est toutefois pas fondée à demander le versement d'une indemnité au titre de la perte de ses chèques déjeuner, qui correspondent à la compensation du surcoût d'un repas pris à l'extérieur de son domicile ; que de même les préjudices qui résulteraient de la perte de congés payés et de jours d'ARTT, à les supposer établis, ne peuvent être regardées comme résultant directement de la dégradation de son état de santé ;

S'agissant de l'incidence professionnelle :

11. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et en particulier du rapport d'expertise, que, du fait de l'infection contractée par Mme A...à l'hôpital, l'exercice de son activité professionnelle, qui exigeait de nombreux déplacements et l'amenait à se trouver de manière prolongée en station debout, a été rendu plus pénible, du fait de la paralysie du sciatique poplité externe avec déficit des releveurs de la jambe, qui rend la station debout prolongée douloureuse ; qu'en raison de l'augmentation de la pénibilité de l'emploi qu'elle occupe, l'intéressée est fondée à réclamer une indemnisation de l'incidence professionnelle de son infection ; que ce préjudice peut être évalué à la somme de 3 000 euros ;

En ce qui concerne les préjudices à caractère non-patrimonial :

S'agissant des souffrances endurées :

12. Considérant que l'intensité des souffrances physiques et psychologiques endurées par Mme A... a été évaluée par l'expert à 5 sur une échelle de 1 à 7, en raison en particulier de quatre interventions sous anesthésie générale au niveau de la plaie, ainsi que d'une hospitalisation de deux mois à temps plein, puis en centre de jour jusqu'au 9 décembre 2005, avec de nombreuses séances de rééducation ; qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice qu'elle a ainsi subi en lui allouant une indemnité de 10 000 euros ;

S'agissant des déficits fonctionnels :

13. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et en particulier du rapport d'expertise, que Mme A... a subi, du fait de son infection, une période de déficit fonctionnel temporaire total du 14 juillet 2005 au 3 décembre 2006, puis partiel à hauteur de 50 %, du 4 décembre 2006 au 10 janvier 2007, date de consolidation de son état de santé ; que l'infection a également provoqué un déficit fonctionnel permanent évalué par l'expert à 20 % en tenant compte, d'une part, d'un " préjudice psychologique qui est constitué par l'impossibilité de réaliser certains projets et des changements importants dans sa vie personnelle " et, d'autre part, d'une atteinte partielle au nerf sciatique poplité externe ; qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice qu'elle a ainsi subi en lui allouant une indemnité globale de 40 000 euros ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, d'une part, que le centre hospitalier de Valence n'est pas fondé à contester la mise à sa charge d'une indemnité en réparation des préjudices subis par Mme A... en conséquence de l'infection nosocomiale contractée lors de son hospitalisation dans cet établissement en juillet 2005 et, d'autre part, que Mme A... est seulement fondée à soutenir que l'indemnité totale mise à la charge du centre hospitalier de Valence par le jugement attaqué doit être portée à la somme arrondie de 65 432 euros ;

Sur les conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge du centre hospitalier de Valence la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés à l'occasion de la présente instance par Mme A... et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de l'ONIAM tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : Le montant d'indemnité de 47 432 euros mis à la charge du centre hospitalier de Valence par l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 18 juillet 2014 est porté à la somme de 65 432 euros.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 18 juillet 2014 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le centre hospitalier de Valence versera à Mme A... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête, les conclusions incidentes du centre hospitalier de Valence et les conclusions de l'ONIAM tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A..., au centre hospitalier de Valence, à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme.

Délibéré après l'audience du 10 novembre 2016 à laquelle siégeaient :

M. Faessel, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

Mme Cottier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 1er décembre 2016.

1

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N° 14LY02882


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY02882
Date de la décision : 01/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01-01 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de santé. Établissements publics d'hospitalisation.


Composition du Tribunal
Président : M. FAESSEL
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : BOURGIN

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-12-01;14ly02882 ?
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