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22/11/2016 | FRANCE | N°16LY01213

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 22 novembre 2016, 16LY01213


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'entreprise agricole à responsabilité limitée (EARL) Valette, M. B...C...et l'association des victimes de la sharka ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté n° 2013-204-0044 du 23 juillet 2013, tel que modifié par l'arrêté n° 2013-282-0016 du 9 octobre 2013 par lequel le préfet de la Drôme a décidé de mesures de surveillance et de lutte contre le virus de la sharka (Plum Pox Virus).

Par un jugement n° 1306689 du 3 février 2016, le tribunal administratif de Grenobl

e a annulé l'article 4 de l'arrêté du 23 juillet 2013 du préfet de la Drôme et rejeté...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

L'entreprise agricole à responsabilité limitée (EARL) Valette, M. B...C...et l'association des victimes de la sharka ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté n° 2013-204-0044 du 23 juillet 2013, tel que modifié par l'arrêté n° 2013-282-0016 du 9 octobre 2013 par lequel le préfet de la Drôme a décidé de mesures de surveillance et de lutte contre le virus de la sharka (Plum Pox Virus).

Par un jugement n° 1306689 du 3 février 2016, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'article 4 de l'arrêté du 23 juillet 2013 du préfet de la Drôme et rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la cour

Par un recours, enregistré le 5 avril 2016, le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt demande à la cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 3 février 2016 et de rejeter la demande de l'EARL Valette et autres.

Il soutient que :

- l'arrêté contesté a été pris en application de l'arrêté du 17 mars 2011 modifié abrogeant celui du 27 novembre 2008 et prescrivant des mesures de surveillance et de lutte contre la sharka ; si le préfet n'était pas habilité, en application de l'article L. 251-8 du code rural et de la pêche maritime, à adopter des mesures de lutte contre ce virus, un arrêté ministériel ayant été pris en la matière, rien ne s'opposait à ce que le ministre prévoie la possibilité pour le préfet d'abaisser le seuil conduisant à la destruction des parcelles sur un périmètre donné, comme tel est le cas de l'arrêté du 17 mars 2011, ceci sans qu'une situation d'urgence ne soit nécessaire ;

- les mesures d'arrachage étant intervenues postérieurement à l'arrêté modificatif du 9 octobre 2013, et aussi postérieurement aux récoltes, l'arrêté contesté n'est pas rétroactif, alors que les prospections doivent nécessairement intervenir avant les mesures d'arrachage ;

- pour être efficace, le seuil d'arrachage des parcelles entières doit être fixé au taux de 5 % de contamination ; ce seuil, qui résulte de plusieurs recommandations et du bilan régional de lutte contre la sharka et qui a démontré son efficacité, est justifié par l'écart de 20 % existant, dans la région Rhône-Alpes, entre le nombre d'arbres manifestant les symptômes de la maladie et le nombre d'arbres réellement infectés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 juillet 2016, l'entreprise agricole à responsabilité limitée (EARL) Valette, M. B...C...et l'association des victimes de la sharka, agissant par son président en exercice, représentés par MeD..., demandent à la cour de rejeter la requête et de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils font valoir que :

- l'article L. 251-8 du code rural et de la pêche maritime ne donne compétence au préfet que dans le cadre de mesures d'urgence ; la souche M virulente du virus de la sharka étant présente dans la Drôme depuis plus de vingt ans, aucune situation d'urgence n'existe et l'arrêté du 23 juillet 2013 modifié a donc été pris par une autorité incompétente ;

- la compétence du ministre étant déterminée par la loi, laquelle encadre strictement les pouvoirs des préfets, le ministre ne peut légalement déléguer cette compétence ;

- la fixation du seuil de contamination à partir duquel l'arrachage est prescrit constitue une décision à part entière ; dans sa nouvelle rédaction, la loi ôte d'ailleurs toute compétence en la matière au préfet du département ;

- l'arrêté du 9 octobre 2013 modifie rétroactivement une disposition essentielle de l'arrêté du 23 juillet 2013 ; il a une portée rétroactive en ce qu'il modifie le taux de contamination à partir duquel l'arrachage doit intervenir après la saison culturale et les prospections en vue de détection de la sharka, et alors que l'arrêté ministériel fixait jusque là ce taux à 10 % ;

- le seuil de 5 %, appliqué illégalement dans la Drôme depuis plusieurs années, n'est pas justifié, notamment par des analyses scientifiques ; l'expert désigné par l'Etat, M.A..., préconisait en 2008 un seuil de 10 % ; les documents produits par le ministre sont anciens et ne concernent pas l'année 2013.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Peuvrel,

- les conclusions de M. Clément, rapporteur public,

- et les observations de MeD..., pour l'entreprise agricole à responsabilité limitée (EARL) Valette, M. B...C...et l'association des victimes de la sharka.

1. Considérant que l'entreprise agricole à responsabilité limitée (EARL) Valette exploite des vergers de pêchers et d'abricotiers à Saint-Marcel-les-Valence, dans une zone reconnue contaminée par le virus de la sharka depuis 1989 ; que, par un arrêté du 23 juillet 2013, dont l'article 4 a été modifié par arrêté du 9 octobre 2013, le préfet de la Drôme a prescrit des mesures de surveillance et de lutte contre le virus de la sharka (Plum Pox Virus) ; que, par jugement du 3 février 2016, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'article 4 de l'arrêté du 23 juillet 2013 modifié et rejeté comme tardives les conclusions dirigées contre les autres dispositions de cet arrêté ; que par son recours susvisé, le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt doit être regardé comme relevant appel de l'article 1er du jugement ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 251-8 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté contesté : " I. - Le ministre chargé de l'agriculture peut prescrire par arrêté les traitements et les mesures nécessaires à la prévention de la propagation des organismes nuisibles inscrits sur la liste prévue à l'article L. 251-3. Il peut également interdire les pratiques susceptibles de favoriser la dissémination des organismes nuisibles, selon les mêmes modalités. II. - En cas d'urgence, les mesures ci-dessus spécifiées peuvent être prises par arrêté préfectoral immédiatement applicable. L'arrêté préfectoral doit être soumis, dans la quinzaine, à l'approbation du ministre chargé de l'agriculture. " ;

3. Considérant que le ministre, chargé par l'article L. 251-8 précité du code rural et de la pêche maritime de prescrire les mesures de prévention de la propagation de virus comme celui de la sharka, ne tient d'aucune disposition législative ou réglementaire le pouvoir de déléguer la compétence qui lui a été ainsi attribuée ; que la délégation de compétence réglementaire accordée au préfet de la Drôme par l'arrêté ministériel du 23 juillet 2013 modifié est, par suite, illégale ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'article 4 de l'arrêté du 23 juillet 2013 modifié par l'arrêté du 9 octobre 2013 ;

Sur les frais non compris dans les dépens :

5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, à l'entreprise agricole à responsabilité limitée Valette, à M. B...C...et à l'association des victimes de la sharka..

Délibéré après l'audience du 3 novembre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Alfonsi, président de chambre,

- M. Drouet, président assesseur,

- Mme Peuvrel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 novembre 2016.

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N° 16LY01213


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