Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C...a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler la décision du 5 février 2014 du directeur interrégional des services pénitentiaires de Lyon rejetant son recours administratif préalable exercé contre la sanction de 14 jours de confinement en cellule dont 2 jours en prévention prononcées par le président de la commission de discipline du centre pénitentiaire de Moulins le 18 mars 2014 et la décision née du silence gardé par la même autorité sur son recours administratif préalable exercé contre les sanctions de 20 jours de confinement en cellule, de 14 jours de confinement en cellule et de 30 jours de confinement en cellule prononcées par le président de la commission de discipline du centre pénitentiaire de Moulins le 18 mars 2014.
Par un jugement nos 1401102 et 1401274 du 12 mars 2015, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé la décision du 5 février 2014 du directeur interrégional des services pénitentiaires de Lyon et rejeté le surplus des conclusions des demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 27 juillet 2015, M. A...C..., représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 12 mars 2015 en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision née du silence gardé par le directeur interrégional des services pénitentiaires de Lyon sur son recours administratif préalable exercé contre les sanctions de 20 jours de confinement en cellule, de 14 jours de confinement en cellule et de 30 jours de confinement en cellule prononcées par le président de la commission de discipline du centre pénitentiaire de Moulins le 18 mars 2014 ;
2°) d'annuler cette décision implicite du directeur interrégional des services pénitentiaires de Lyon ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à MeB..., au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et de 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Il soutient que :
- si le tribunal a retenu qu'une copie de son dossier disciplinaire lui avait été délivrée le 13 mars 2014, il ressort toutefois dudit dossier qu'aucune copie ne lui a été remise, en méconnaissance des droits de la défense et de l'article R. 57-7-16 du code de procédure pénale ;
- les sanctions qui lui ont été infligées reposent sur des faits matériellement inexacts ;
- le tribunal a commis une erreur de qualification juridique des faits en qualifiant le crachat reproché de violence alors qu'il n'est constitutif que d'une insulte ;
- le tribunal a commis une erreur de droit sur le quantum de la peine encourue, dès lors que les faits de crachat ne relèvent pas du 1° de l'article R. 57-7-1 du code de procédure pénale ;
- le tribunal a commis une erreur de droit en limitant son contrôle à l'erreur manifeste d'appréciation sur la sanction prononcée alors qu'eu égard à la faible gravité des faits, la sanction de 30 jours infligée pour ce crachat est entachée d'erreur d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 29 mars 2016, le ministre de la justice conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens invoqués par M. C...ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 31 mars 2016, la clôture d'instruction a été fixée au 2 mai 2016.
M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 mai 2015.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de procédure pénale ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Michel,
- et les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public.
1. Considérant que M.C..., alors qu'il était incarcéré au centre pénitentiaire de Moulins, a fait l'objet, par trois décisions du 18 mars 2014 du président de la commission de discipline de l'établissement, de 20, 14 et 30 jours de confinement en cellule pour avoir le 11 janvier 2014, respectivement, causé ou tenté de causer délibérément aux locaux ou au matériel affecté à l'établissement un dommage de nature à compromettre la sécurité de l'établissement ou le fonctionnement normal de celui-ci, formulé des insultes, des menaces ou des outrages à l'encontre d'un membre du personnel de l'établissement, d'une personne en mission ou en visite au sein de l'établissement pénitentiaire ou des autorités administratives ou judiciaires et exercé ou tenté d'exercer des violences physiques à l'encontre d'un membre du personnel de l'établissement, d'une personne en mission ou en visite au sein de l'établissement ; que la sanction de 30 jours de confinement en cellule a été confondue avec les autres sanctions de 20 et de 14 jours ; que, par une décision du 9 avril 2014, la directrice interrégionale des services pénitentiaires de Lyon a rejeté le recours administratif préalable obligatoire exercé par M. C...contre ces sanctions ; que, par le jugement du 12 mars 2015 dont M. C...relève appel, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande dirigée contre la décision de la directrice interrégionale des services pénitentiaires de Lyon ;
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 57-7-16 du code de procédure pénale : " En cas d'engagement des poursuites disciplinaires, les faits reprochés ainsi que leur qualification juridique sont portés à la connaissance de la personne détenue. Le dossier de la procédure disciplinaire est mis à sa disposition. / La personne détenue est informée de la date et de l'heure de sa comparution devant la commission de discipline ainsi que du délai dont elle dispose pour préparer sa défense. Ce délai ne peut être inférieur à vingt-quatre heures (...) " ;
3. Considérant qu'à la suite des incidents survenus le 11 janvier 2014, des comptes-rendus d'incident puis des rapports d'enquêtes ont été dressés et les décisions de passage en commission de discipline ont été prises le 10 mars 2014 ; que la convocation à cette commission pour le 8 avril a été selon les pièces du dossier présentée le 12 mars 2014 à 9 heures 43 à M. C... ; qu'il ressort des mentions portées sur la copie du dossier disciplinaire de l'intéressé que celui-ci a refusé de se déplacer et qu'une copie de son dossier lui a été remise le 13 mars 2014 à 17 heures 15 ; que le requérant n'apporte pas d'éléments permettant de mettre en doute ces mentions ; qu'au demeurant, M.C..., qui a refusé de se présenter devant la commission de discipline, a pu s'entretenir avec son avocat au moins 24 heures avant la réunion de la commission et a ainsi bénéficié du délai requis pour préparer sa défense ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les droits de la défense auraient été méconnus et que les sanctions disciplinaires infligées auraient été prises au terme d'une procédure irrégulière doit être écarté ;
4. Considérant, en deuxième lieu, que si M. C...n'a pas signé les comptes-rendus d'incidents, les rapports d'enquêtes du 6 février 2014 ou les procès-verbaux de la commission de discipline décrivent, toutefois, avec suffisamment de précisions les faits reprochés pour permettre de tenir pour établi que le 11 janvier 2014 de midi à 18 h 30 l'intéressé a bloqué le système d'interphonie de sa cellule, a, vers 18 h 30, insulté et menacé les agents qui procédaient à une fouille à corps lors de son changement de cellule et à 18 h 40 a craché dans le dos d'un agent qui sortait de sa cellule ; qu'à aucun moment de la procédure le requérant, qui se borne à faire valoir que les surveillants auraient inventé les faits qui lui sont reprochés par représailles d'une dénonciation pénale antérieure d'un fonctionnaire, n'a apporté un quelconque élément permettant de démentir les faits en cause ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que les sanctions infligées reposent sur des faits matériellement inexacts doit être écarté ;
5. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article R. 57-7-33 du code de procédure pénale : " Lorsque la personne détenue est majeure, peuvent être prononcées les sanctions disciplinaires suivantes : (...) 6° Le confinement en cellule individuelle ordinaire assorti, le cas échéant, de la privation de tout appareil acheté ou loué par l'intermédiaire de l'administration pendant la durée de l'exécution de la sanction (...) " ; qu'en vertu de l'article R. 57-7-41 du même code, la durée du confinement en cellule pour les personnes majeures ne peut excéder vingt jours pour une faute du premier degré, quatorze jours pour une faute du deuxième degré et sept jours pour une faute du troisième degré ; qu'il résulte des dispositions combinées de cet article avec celle du 1° de l'article R. 57-7-1 dudit code que cette durée peut être portée à trente jours pour une faute du premier degré lorsque les faits commis consistent pour une personne détenue à avoir exercé ou tenter d'exercer des violences physiques à l'encontre d'un membre du personnel ;
6. Considérant que la commission de discipline ayant estimé que le fait de cracher sur un surveillant était constitutif d'une violence physique à l'encontre d'un membre du personnel, son président a prononcé en conséquence la sanction de confinement en cellule pendant une durée de 30 jours ; que si l'action de cracher sur un surveillant n'est pas exempte d'une certaine forme de violence, au moins symbolique, un tel agissement n'est pas qualifiable de violence physique à l'encontre d'un membre du personnel de l'établissement au sens des dispositions du 1° de l'article R. 57-7-1 du code de procédure pénale ; que, dès lors, la durée du confinement en cellule de M. C...à raison de ce crachat ne pouvait excéder 20 jours en vertu de l'article R. 57-7-41 du même code ; que, par suite, l'appelant est fondé à soutenir d'une part que cette faute n'était pas de nature à justifier que la sanction de confinement en cellule retenue à son encontre soit portée à 30 jours et que d'autre part le cumul des sanctions rappelées au point 1 prononcées le même jour ne pouvait excéder 20 jours de confinement en cellule ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens dirigés contre la sanction de confinement en cellule pour une durée de 30 jours, que M. C...est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de la décision de la directrice interrégionale des services pénitentiaires de Lyon en tant qu'elle maintient la décision du 18 mars 2014 du président de la commission de discipline de l'établissement prononçant à son encontre une sanction de 30 jours, autorisant par suite le cumul des trois sanctions pour cette durée et rejette dans cette mesure son recours préalable obligatoire ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme que M. C...demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La décision du 9 avril 2014 de la directrice interrégionale des services pénitentiaires de Lyon est annulée en tant qu'elle a confirmé la sanction de mise en confinement en cellule pour une durée de 30 jours et rejeté dans cette mesure le recours préalable obligatoire exercé par M. C....
Article 2 : L'article 2 du jugement nos 1401102 et 1401274 du 10 avril 2014 du tribunal administratif de Clermont-Ferrand est réformé en ce qu'il est contraire à l'article 1er du présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C...est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C...et au ministre de la justice.
Délibéré après l'audience du 13 octobre 2016, où siégeaient :
- M. d'Hervé, président de chambre,
- Mme Michel, président-assesseur,
- Mme Samson Dye, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 10 novembre 2016.
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N° 15LY02610