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20/10/2016 | FRANCE | N°16LY00567

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 20 octobre 2016, 16LY00567


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du préfet de l'Isère en date du 28 avril 2015 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français, interdiction de retour sur le territoire français pendant un an et fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 1504944 du 19 novembre 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 15 février 2016

, présentée par Me Coutaz, Mme B... demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du préfet de l'Isère en date du 28 avril 2015 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français, interdiction de retour sur le territoire français pendant un an et fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 1504944 du 19 novembre 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 15 février 2016, présentée par Me Coutaz, Mme B... demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 19 novembre 2015 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de l'Isère du 28 avril 2015 ;

3°) d'enjoindre au préfet, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale ", et à titre subsidiaire de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois et dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans les deux jours à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, à verser à son conseil, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve de renonciation à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Elle soutient que :

- le refus de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français n'ont pas été précédés d'un examen sérieux de sa situation, dès lors que le médecin de l'agence régionale de santé ne s'est prononcé que sur l'existence d'un traitement approprié en Russie, et non en Arménie, alors qu'elle a la double nationalité ;

- le préfet s'est abstenu de saisir à nouveau le médecin de l'agence régionale de santé avant d'édicter la mesure d'éloignement, alors même que le médecin de l'agence régionale de santé avait précisé que son avis serait à revalider au moment du départ par un certificat médical ; le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est méconnu ;

- l'annulation de la mesure d'éloignement doit entraîner, par voie de conséquence, celle des décisions accordant un délai de départ volontaire de 30 jours, fixant le pays de renvoi et portant interdiction de retour ;

- l'interdiction de retour sur le territoire français est illégale dès lors qu'elle ne s'est pas soustraite à une mesure d'éloignement.

Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 janvier 2016.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Samson-Dye a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que Mme B... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet de l'Isère en date du 28 avril 2015 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français, interdiction de retour sur le territoire français pendant un an et fixant le pays de destination ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat " ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011, publié au journal officiel de la République française le 11 décembre 2011 : " Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : / si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays (...) " ;

3. Considérant que Mme B...soutient, pour la première fois en appel, qu'il n'a pas été procédé à un examen particulier de sa situation, car le médecin de l'agence régionale de santé ne s'est prononcé que sur l'existence d'un traitement approprié en Russie, et non en Arménie, alors qu'elle a la nationalité de ces deux Etats ;

4. Considérant tout d'abord qu'il n'est pas contesté que l'intéressée, qui produit un acte de naissance indiquant qu'elle est née en Russie, est ressortissante de cet Etat ; qu'il ressort par ailleurs de documents qu'elle produit, et en particulier du précédent jugement n° 1303734 du tribunal administratif de Grenoble et de l'arrêt de la Cour nationale du droit d'asile n° 13022701, qu'elle peut se prévaloir de la nationalité arménienne ;

5. Considérant ensuite que l'arrêté litigieux ne prend pas position sur sa nationalité, indiquant qu'elle serait née soit en Russie, soit en Arménie, et qu'elle se prétend de nationalité russe, et se borne à prévoir qu'elle peut être reconduite vers le pays dont elle a la nationalité, ou tout pays où elle établirait être légalement admissible, sans autre précision sur l'identification précise du ou des pays de renvoi ;

6. Considérant enfin que, par un avis du 10 février 2015, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que l'état de santé de Mme B...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'un traitement approprié existait dans son pays d'origine ; que le refus de titre de séjour en raison de l'état de santé est seulement fondé sur la disponibilité de traitements appropriés ; qu'il ne ressort pas de pièces du dossier que cet avis, qui mentionne que l'intéressée est née en Russie, aurait été émis en prenant en considération les deux pays dont la requérante a la nationalité ;

7. Considérant qu'il suit de là qu'en se prononçant au regard d'un tel avis, dans les circonstances particulières de l'espèce, le préfet n'a pas précédé son refus de séjour d'un examen particulier de la situation de l'intéressée ; que l'annulation du refus de titre de séjour entraîne, par voie de conséquence, l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et interdiction de retour et fixant le pays de renvoi en cas d'éloignement d'office ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

8. Considérant que, si le présent arrêt n'implique pas, eu égard au motif sur lequel il se fonde, que le préfet de l'Isère délivre une carte de séjour temporaire à MmeB..., il y a lieu, en revanche, de prescrire au préfet de se prononcer à nouveau sur sa demande de titre de séjour dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt après lui avoir délivré, dans un délai de quinze jours, une autorisation provisoire de séjour ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que Me Coutaz, avocat de Mme B..., peut se prévaloir des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; que, dès lors, dans les circonstances de l'espèce et sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros, au profit de Me Coutaz, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1504944 du tribunal administratif de Grenoble du 19 novembre 2015 et l'arrêté du préfet de l'Isère du 28 avril 2015 portant refus de titre de séjour à Mme A... B..., obligation de quitter le territoire français, interdiction de retour sur le territoire français pendant un an et fixant le pays de destination sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Isère de délivrer une autorisation provisoire de séjour à Mme A...B...dans le délai de quinze jours et de se prononcer sur sa demande de régularisation dans le délai de deux mois, suivant la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 1 000 euros à Me Coutaz sous réserve qu'il renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B...est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B..., à Me Coutaz, au ministre de l'Intérieur et au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 29 septembre 2016 à laquelle siégeaient :

M. d'Hervé, président,

M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur,

Mme Samson-Dye, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 octobre 2016.

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N° 16LY00567


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY00567
Date de la décision : 20/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. d'HERVE
Rapporteur ?: Mme Aline SAMSON DYE
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : COUTAZ

Origine de la décision
Date de l'import : 28/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-10-20;16ly00567 ?
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