Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme C...E...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté, en date du 19 décembre 2014, par lequel le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé un délai de départ volontaire de trente jours et a désigné le pays à destination duquel elle pourra être renvoyée d'office, d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer, à titre principal, un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, en cas d'annulation de l'obligation de quitter le territoire français, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans le délai de huit jours à compter de la notification du jugement, jusqu'à nouvelle instruction de sa demande dans un délai de deux mois, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à titre infiniment subsidiaire, en cas d'annulation de la décision fixant le pays de destination, une assignation à résidence et de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Par un jugement n° 1503524 du 13 octobre 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête, enregistrée sous le n° 16LY00318, le 25 janvier 2016, et des pièces complémentaires enregistrées le 24 mai 2016, MmeE..., représentée par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 13 octobre 2015 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;
3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, en cas d'annulation de l'obligation de quitter le territoire français, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans le délai de huit jours à compter de la notification du jugement, jusqu'à nouvelle instruction de sa demande dans un délai de deux mois, sous astreinte de 150 euros par jour de retard et, à titre infiniment subsidiaire, en cas d'annulation de la décision fixant le pays de destination, de l'assigner à résidence ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 800 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve que ce dernier renonce au bénéfice de la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
- la décision de refus de titre de séjour est insuffisamment motivée en ce qu'elle comporte une motivation stéréotypée révélant un défaut d'examen particulier de la demande ;
- la décision de refus de titre de séjour est entachée d'erreur de droit dès lors que le préfet s'est cru tenu par l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ;
- le jugement est irrégulier faute d'avoir répondu au moyen tiré de l'irrégularité de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé qui n'a pas été transmis à la préfecture sous couvert du directeur de l'agence régionale de santé et de l'irrégularité de la procédure suivie du fait de l'absence d'avis du directeur de l'agence régionale de santé, pourtant saisi d'une demande de carte de séjour comportant des éléments de nature à caractériser l'existence de " circonstances humanitaires exceptionnelles ", moyens qui sont repris en appel ;
- c'est à tort que les premiers juges ont écarté le moyen tiré de la méconnaissance par la décision des dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et celui tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dont celle-ci est entachée alors que la requérante démontre que le traitement médicamenteux qui lui est nécessaire associant trois produits spécifiques n'est pas disponible en Bosnie ;
- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de séjour ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, les dispositions de l'article L. 514-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le délai de départ volontaire à trente jours méconnaît les dispositions de l'article L. 511-1 II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 avril 2016, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- les certificats médicaux établis par la requérante le 2 décembre et le 17 décembre 2015, postérieurs à la décision attaquée, ne sont pas de nature à contredire cette dernière et ne remettent pas en question l'existence d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;
- s'agissant des autres moyens soulevés par MmeE..., il s'en remet à ses écritures de première instance.
Mme E...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 décembre 2015.
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant du 20 novembre 1989, signée par la France le 26 janvier 1990 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article L. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur,
- et les observations de Me D...représentant MmeE....
1. Considérant que Mme C...B..., épouseE..., née le 27 août 1985 à Zvornik (Yougoslavie) et son mari M. A...E...né le 17 octobre 1980 à Zvornik (Yougoslavie), tous deux de nationalité bosnienne, sont entrés en France une première fois le 21 novembre 2004 ; qu'à la suite du rejet de leurs demandes d'asile par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides par des décisions que la Cour nationale du droit d'asile a confirmées, ils ont quitté la France le 17 mai 2006 puis sont revenus en France le 31 mai 2012 ; que, par des décisions du 13 juin 2012, le préfet du Rhône leur a refusé la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour en qualité de demandeurs d'asile avant que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, saisi dans le cadre de la procédure prioritaire, ne rejette leurs demandes le 6 septembre 2012, décisions confirmées par la Cour nationale du droit d'asile le 22 mai 2013 ; que le préfet du Rhône a pris à leur encontre un refus de titre de séjour assorti de l'obligation de quitter le territoire français, le 22 novembre 2012, décisions confirmées par jugements du tribunal administratif de Lyon du 21 mai 2013 ; que, par l'intermédiaire de son conseil, Mme E... a en dernier lieu sollicité le 29 novembre 2013, la délivrance d'un titre de séjour en raison de son état de santé ; que, par décisions en date du 19 décembre 2014, le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français, a fixé un délai de départ volontaire de trente jours, et a fixé le pays dont elle a la nationalité, ou tout autre pays où elle démontrerait être légalement admissible, comme pays de destination en cas d'éloignement d'office ; que Mme E...demande l'annulation du jugement n° 1503524 du 13 octobre 2015, par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône du 19 décembre 2014 ;
Sur la régularité du jugement du tribunal administratif de Lyon :
2. Considérant que devant le tribunal administratif de Lyon, Mme E...a invoqué le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'instruction de sa demande de titre de séjour en raison de son état de santé résultant de l'absence de transmission de l'avis du médecin de l'Agence régionale de santé publique à la préfecture par un courrier adressé à celui-ci sous couvert du directeur de l'agence régionale de santé ; que le tribunal administratif a omis de répondre à ce moyen, qui n'était pas inopérant ; que, dès lors, en tant qu'il statue sur les conclusions de Mme E...dirigées contre la décision du préfet du Rhône lui refusant un titre de séjour, le jugement attaqué, qui est irrégulier, doit être annulé ;
3. Considérant qu'il y a lieu de se prononcer immédiatement par la voie de l'évocation sur ces conclusions de Mme E...dirigées contre la décision du préfet du Rhône lui refusant un titre de séjour et de statuer, par l'effet dévolutif de l'appel, sur le surplus de ses conclusions ;
Sur la légalité des décisions attaquées :
En ce qui concerne les refus de délivrance d'un titre de séjour :
4. Considérant, en premier lieu, que la décision attaquée vise les différents textes dont le préfet a fait application et rappelle de manière détaillée les conditions dans lesquelles Mme E... séjourne en France ; qu'elle énonce suffisamment les éléments de fait et de droit qui en sont le soutien ; qu'ainsi, elle procède d'un examen particulier de la situation de la requérante et est suffisamment motivée ;
5. Considérant, en deuxième lieu, que le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public " À l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'État " ; que selon l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général (...) / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé (...) / Le préfet peut, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, prendre en considération une circonstance humanitaire exceptionnelle pour délivrer la carte de séjour temporaire même s'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 précité : " Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant :- si l'état de santé de l 'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ;- s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; - la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays. / Cet avis est transmis au préfet sous couvert du directeur général de l'agence régionale de santé. Celui-ci, s'il estime, sur la base des informations dont il dispose, qu'il y a lieu de prendre en compte des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission de séjour, transmet au préfet un avis complémentaire motivé (...) " ;
6. Considérant, que la procédure administrative définie par les dispositions précitées a pour objet de permettre au préfet d'être suffisamment éclairé quant à la décision à prendre au regard des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la circonstance que l'avis du médecin de l'agence régionale de santé n'a pas été adressé au préfet, en méconnaissance des dispositions de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011, sous couvert du directeur général de l'agence régionale de santé alors que ce dernier est amené à transmettre au préfet un avis complémentaire motivé s'il estime, au vu des informations dont il dispose, que des circonstances humanitaires exceptionnelles peuvent justifier l'admission de séjour, constitue une irrégularité affectant le déroulement de cette procédure ;
7. Considérant toutefois que si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie ;
8. Considérant que, comme le fait valoir MmeE..., l'avis du médecin de l'agence régionale de santé du 30 décembre 2013 la concernant n'a pas été transmis au préfet sous couvert du directeur général de l'agence régionale de santé ; que, toutefois, cet avis ne contient aucune information relative à des considérations humanitaires exceptionnelles au sens des dispositions précitées, pouvant fonder une décision d'admission au séjour si cet avis venait à ne pas être suivi ; qu'il ne ressort pas non plus des pièces du dossier qu'il existait, en l'espèce, de telles circonstances humanitaires exceptionnelles ; que, par suite, cette irrégularité n'a pas exercé d'influence sur le sens de la décision contestée et n'a pas davantage privé l'intéressée d'une garantie ; que le moyen tiré de l'absence d'avis du directeur général de l'agence régionale de santé sur les circonstances exceptionnelles qui auraient pu accompagner la demande de titre de séjour formulée par Mme E...et de l'irrégularité de la procédure suivie pour sa transmission au préfet doit être écarté ;
9. Considérant d'autre part, que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle ; que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé qui lui est favorable, doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ;
10. Considérant qu'il n'est pas contesté que, dans son avis du 30 décembre 2015, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que l'état de santé de Mme E...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, que l'intéressée peut avoir accès à un traitement approprié dans son pays d'origine, que les soins doivent être poursuivis en l'état actuel pendant 24 mois et que la présence de son époux auprès d'elle est nécessaire ; qu'il ressort des pièces du dossier que Mme E... souffre d'un syndrome anxio-dépressif sévère et fait l'objet d'une prise en charge psychothérapeutique accompagnée de la prise d'un traitement médicamenteux comportant notamment la prise de trois médicaments, le Seroplex 10 mg, l'Alprazolam 0,25 mg et le Seresta 50 mg entrant dans la catégorie des neuroleptiques ; que, si elle soutient que ces médicaments, dont la prise régulière demeurerait pour elle indispensable, ne sont pas disponibles en Bosnie et qu'elle produit, à cet effet, une télécopie du laboratoire Biodim du 5 novembre 2011 faisant état de la non commercialisation du Seresta(r) en Bosnie, une télécopie du laboratoire Lundbeck du même jour faisant état de la non commercialisation du Seroplex(r) et indique qu'il en est de même s'agissant de l'Alprazolam, aucune pièce du dossier ne démontre néanmoins de manière précise que Mme E...ne pourrait leur substituer une des molécules équivalentes disponibles dans son pays d'origine ; que la simple circonstance que les produits précités ne seraient pas disponibles dans ce pays sous forme de " médicaments génériques " ne saurait à elle seule faire obstacle à ce que d'autres médicaments aux mêmes effets puissent être prescrits et délivrés à la requérante ; que le préfet par la production d'un message en date du 5 août 2013 de l'ambassade de France à Sarajevo, du tableau récapitulatif de l'offre de soins en Bosnie, notamment en matière psychiatrique, de la " fiche pays relative à la Bosnie-Herzégovine " établie par Caritas international et datée de janvier 2010, des tableaux récapitulatifs de l'offre de soins dans ce pays dressé par le ministère de l'intérieur de la Hollande en 2011, de la fiche Bosnie de l'atlas de santé mentale de l'Organisation mondiale de la santé, des notices relatives à la clinique de psychiatrie de la ville de Sarajevo et de celle de la commune de Tuzla, démontre l'existence d'un ensemble de structures spécialisées en matière de santé mentale, pouvant être en mesure de prescrire à la requérante les produits médicamenteux adaptés au traitement des manifestations anxieuses sévères et invalidantes qu'elle indique présenter ; qu'ainsi, les écritures et les pièces produites par Mme E...tant devant le tribunal que devant la cour, ne permettent pas de remettre en cause l'avis du médecin de l'agence régionale de santé que corrobore le préfet par les pièces qu'il produit, quant à la possibilité pour elle de bénéficier de traitements appropriés dans son pays ;
11. Considérant, enfin, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et des termes mêmes de la décision attaquée que le préfet du Rhône se soit estimé tenu par l'avis du médecin de l'agence régionale de santé de refuser à Mme E...la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le moyen doit, dès lors, être écarté ;
12. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " et qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
13. Considérant que Mme E...résidait depuis seulement deux ans et sept mois sur le territoire français à la date de la décision attaquée ; que son époux fait également l'objet d'une décision de refus de titre de séjour et d'une mesure d'éloignement ; que, par décision de ce jour dans l'instance enregistrée sous le n° 16LY00321, la cour administrative de Lyon a rejeté la requête de M. E...tendant à l'annulation de ce refus ; que, par ailleurs, la circonstance que les deux filles du couple ont été scolarisées dès leur arrivée sur le territoire français ne suffit pas à conférer un droit de séjour à leurs parents ; que, dans les circonstances de l'espèce, en dépit des efforts d'intégration de Mme E...et de son époux, de l'apprentissage de la langue française ainsi que la promesse d'embauche dont celui-ci se prévaut, et alors que ses affirmations ne suffisent pas à établir qu'elle ne pourrait pas poursuivre sa vie familiale en Bosnie-Herzégovine, la décision attaquée ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; que, par suite, Mme E...n'est pas fondée à soutenir que la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale et les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
14. Considérant, en quatrième lieu, que la décision portant refus de délivrance de titre de séjour n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
15. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ;
16. Considérant que Mme E...fait valoir que ses deux enfants sont scolarisés depuis plus de deux ans et n'ont connu que l'école française ; que, toutefois, dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la scolarité de ceux-ci ne pourrait pas se poursuivre en Bosnie-Herzégovine, elle n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée méconnaît leur intérêt supérieur et est contraire aux stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
17. Considérant, en premier lieu, que, compte tenu de ce qui précède, Mme E... n'est pas fondée à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour ;
18. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : " L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé " ; que, pour les raisons énoncées au point 10, Mme E...n'est pas fondée à soutenir que le préfet du Rhône a méconnu ces dispositions en l'obligeant à quitter le territoire français ;
19. Considérant, en troisième lieu, que pour les mêmes motifs qu'exposés précédemment au point 13 du présent arrêt, la décision d'obligation de quitter le territoire français n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
20. Considérant, en dernier lieu, que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
En ce qui concerne la décision fixant à trente jours le délai de départ volontaire :
21. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes des dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. (...) Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. " ;
22. Considérant, d'une part, qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose au préfet de motiver spécifiquement l'octroi du délai de départ volontaire quand celui-ci correspond à la durée légale fixée à trente jours ;
23. Considérant, d'autre part, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à la date de la décision attaquée, le suivi médical de Mme E...nécessitait qu'un délai de départ volontaire supérieur à trente jours lui soit accordé ; que, par ailleurs, la scolarisation des enfants de M. et Mme E...ne révèle pas des circonstances exceptionnelles justifiant qu'un délai supérieur à trente jours lui soit à ce titre spécifiquement accordé ; que, par suite, la décision attaquée n'est pas contraire aux dispositions de l'article L. 511-1, II, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
24. Considérant, en deuxième lieu, que, pour les mêmes raisons que celles énoncées aux points 13 et 16 du présent arrêt, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision attaquée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
25. Considérant, en dernier lieu, que la décision fixant à trente jours le délai de départ volontaire n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
26. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à soulever, à l'appui de sa demande dirigée contre la décision fixant le pays à destination duquel elle pourra être éloignée, le moyen tiré de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
27. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui est obligé de quitter le territoire français (...) est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " ; qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ; qu'il y a lieu d'écarter le moyen tiré de la violation de ces stipulations par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;
28. Considérant, en dernier lieu, que la décision fixant le pays de destination n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
29. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme E...n'est fondée ni à demander l'annulation de la décision du préfet du Rhône du 19 décembre 2014 lui refusant un titre de séjour, ni fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 13 octobre 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté les autres conclusions de sa demande ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
30. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation des décisions attaquées, n'implique aucune mesure particulière d'exécution ; que, par suite, les conclusions susvisées ne peuvent être accueillies ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
31. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, une quelconque somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que les conclusions présentées sur ce fondement par Mme E...doivent, par suite, être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1503524 du tribunal administratif de Lyon du 13 octobre 2015 est annulé en tant qu'il statue sur les conclusions de Mme E...dirigées contre la décision du préfet du Rhône lui refusant un titre de séjour.
Article 2 : La demande d'annulation de la décision du préfet du Rhône du 19 décembre 2014 lui refusant un titre de séjour présentée par Mme E...et le surplus des conclusions de sa requête n° 16LY0318 sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B..., épouseE..., et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.
Délibéré après l'audience du 15 septembre 2016 à laquelle siégeaient :
M. d'Hervé, président,
M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur,
Mme Gondouin, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 6 octobre 2016.
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N° 16LY00318