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27/09/2016 | FRANCE | N°16LY01272

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 27 septembre 2016, 16LY01272


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Itas Tim a demandé au tribunal administratif de Grenoble l'annulation de l'arrêté du 7 novembre 2013 par lequel le maire de La Muraz a fait opposition à la déclaration préalable qu'elle avait déposée le 14 octobre 2013.

Par un jugement n° 1400040 du 11 février 2016 le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 12 avril et 21 juin 2016, la commune de La Muraz demande à la Cour :<

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1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 11 février 2016 ;

2°) de rejete...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Itas Tim a demandé au tribunal administratif de Grenoble l'annulation de l'arrêté du 7 novembre 2013 par lequel le maire de La Muraz a fait opposition à la déclaration préalable qu'elle avait déposée le 14 octobre 2013.

Par un jugement n° 1400040 du 11 février 2016 le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 12 avril et 21 juin 2016, la commune de La Muraz demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 11 février 2016 ;

2°) de rejeter la demande de la société Itas Tim ;

3°) de mettre à la charge de la société Itas Tim le paiement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le maire était tenu de s'opposer à la déclaration préalable, compte tenu des dispositions de la directive paysagère du Mont-Salève et du plan d'occupation des sols faisant obstacle au projet, qui n'est pas indispensable au fonctionnement du service public et de la télévision numérique terrestre ;

- l'arrêté, auquel étaient annexés les documents référencés, est suffisamment motivé ;

- d'autres motifs de refus peuvent être substitués aux motifs initiaux, tirés de la méconnaissance de l'article 11 de la zone NC et de ce que le plan masse comporte de fausses indications ne permettant pas de s'assurer de la bonne insertion du projet.

Par des mémoires, enregistrés les 27 avril et 22 juin 2016, la société Itas Tim conclut au non-lieu à statuer ou, subsidiairement, au rejet de la requête, et demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la commune de La Muraz au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est privée d'objet dès lors qu'elle est titulaire d'une autorisation de construire tacite devenue définitive ;

- le maire n'était pas en situation de compétence liée ;

- le projet relève de l'article 3.3.2 des orientations et principes fondamentaux de la directive paysagère du Mont-Salève, qui ne lui est en outre pas opposable ;

- les installations projetées sont nécessaires à un service public ou d'intérêt collectif ;

- aucune substitution de motif ou de base légale ne peut être réalisée.

Par une ordonnance du 6 juin 2016 la clôture de l'instruction a été fixée au 23 juin 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le décret n° 2008-189 du 27 février 2008 portant approbation de la directive de protection et de mise en valeur des paysages du Mont-Salève ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Gille, président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public.

1. Considérant que, le 14 octobre 2013, la société Itas Tim a déposé une déclaration préalable à la construction d'une antenne relais pour la diffusion de la télévision numérique terrestre (TNT) sur un terrain cadastré section C n° 1112 situé, au lieu-dit Le Molliet-Le Feu, sur le territoire de commune de La Muraz ; que, par un arrêté du 7 novembre 2013, le maire de La Muraz a fait opposition à ce projet aux motifs, d'une part, que la construction envisagée est située dans la zone NC du plan local d'urbanisme et, d'autre part, que ce projet méconnaît la directive de protection et de mise en valeur des paysages du Mont-Salève approuvée par le décret du 27 février 2008 ; que la commune de La Muraz relève appel du jugement du tribunal administratif de Grenoble du 11 février 2016 qui, à la demande de la société Itas Tim, a annulé cet arrêté ;

Sur les conclusions à fin de non-lieu à statuer de la société Itas Tim :

2. Considérant qu'en admettant même que la société Itas Tim soit désormais titulaire, pour le même projet, d'une décision implicite de non-opposition née le 18 mars 2016 du silence conservé par l'autorité administrative, sur confirmation de sa déclaration préalable à la suite de l'annulation de la décision d'opposition en litige par le jugement attaqué, une telle circonstance n'a pas pour effet de priver d'objet l'appel de la commune de La Muraz contre le jugement qui a prononcé cette annulation ;

Sur le bien-fondé du jugement du 11 février 2016 :

3. Considérant que, pour annuler l'arrêté du maire de La Muraz du 7 novembre 2013 portant opposition au projet en litige, le tribunal administratif de Grenoble a retenu comme fondés trois moyens de la société Itas Tim, tirés de ce que cet arrêté était insuffisamment motivé, de ce que la directive de protection et de mise en valeur des paysages du Mont-Salève n'était pas opposable à son projet et de ce que, l'ouvrage projeté étant nécessaire au fonctionnement du service public de la diffusion de la télévision numérique terrestre, celui-ci était admis en zone NC du plan d'occupation des sols de la commune ;

4. Considérant, en premier lieu, que, prise au visa des dispositions du code de l'urbanisme ainsi que du document d'urbanisme approuvé par la commune le 5 novembre 1998 modifié le 5 avril 2001, la décision d'opposition du 7 novembre 2013 énonce que le projet " se situe dans la zone NC " et que " le projet est en contradiction avec le décret n° 2008-189 approuvant la directive de protection du Mont-Salève ", après avoir rappelé que " cette zone ne sera pas équipée pour des usages autres que ceux indispensables à l'activité agricole, pastorale et forestière " ; qu'elle comporte ainsi l'énoncé des motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'elle est, dès lors, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, suffisamment motivée au regard des exigences des articles L. 424-3 et R. 424-5 du code de l'urbanisme ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article NC 1 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de La Muraz approuvé le 5 avril 2001 : " Parmi les occupations et utilisations du sol nécessitant une autorisation, seules celles qui suivent sont admises : / - Les bâtiments nécessaires à l'exploitation agricole, forestière ou pastorale. / - Les annexes touristiques des exploitations agricoles (...). / Le camping à la ferme. / Les annexes (...) des bâtiments principaux. / Les ouvrages techniques nécessaires au fonctionnement des services publics " ; qu'aux termes de l'article NC 2 de ce document : " Les occupations et utilisations nécessitant une autorisation et qui ne figurent pas à l'article NC1 sont interdits " ;

6. Considérant, d'une part, que la commune de La Muraz expose que le tribunal administratif, en se fondant sur la circonstance que le terrain d'assiette du projet critiqué ne se trouvait ni dans un cône, ni dans un axe de vue, a fait une application erronée des prescriptions de la directive de protection et de mise en valeur des paysages du Mont-Salève et en particulier de son principe fondamental 3.3.2 relatif au maintien des ambiances ouvertes et à la préservation des crêtes ; qu'elle fait également valoir que les crêtes sont visées par d'autres principes fondamentaux tendant à leur préservation, et en particulier par les principes 3.1.17, 3.3.1, 3.3.2 et 3.3.4 de cette directive ; que, ce faisant, la commune de La Muraz ne conteste cependant pas utilement le motif du jugement attaqué tiré de ce que, dès lors que les dispositions du règlement d'urbanisme de la commune appliquées en l'espèce n'étaient pas incompatibles avec l'orientation relative à la préservation de la structure paysagère du piémont que définit cette directive, celle-ci n'était, en vertu du IV de l'article L. 350-1 du code de l'environnement, pas opposable au projet en litige ;

7. Considérant, d'autre part, qu'il ressort du formulaire de déclaration renseigné par la société Itas Tim que les installations projetées ont pour objet la " mise en oeuvre d'un site destiné à diffuser les programmes de télévision, de radio, accueillir les services de télécommunication privés, accueillir les services d'intérêt général et collectifs " ; qu'un tel ouvrage ne saurait, en lui-même, être regardé comme étant nécessaire au fonctionnement d'un service public ; que, si le projet en litige s'inscrit dans la perspective du déploiement, planifié et piloté par les autorités publiques, de la télévision numérique terrestre sur le territoire français et si la société Itas Tim expose que l'implantation de pylônes de télédiffusion de la TNT remplit un rôle d'utilité publique et que ses installations sont appelées à diffuser des multiplex, dont GR1 qui regroupe notamment les chaînes appartenant au groupe public France Télévision auprès duquel elle remporte régulièrement des marchés suite à des appels d'offres publics, il est constant que la société Itas Tim, personne privée, qui n'est pas elle-même chargée d'une mission de service public, ne se prévaut en l'espèce d'aucune mission particulière qui lui aurait été confiée en vue de l'exécution d'un tel service et pour l'exécution de laquelle la réalisation des installations en litige serait nécessaire ; que, dans ces conditions, ces installations ne sauraient être regardées comme des ouvrages techniques nécessaires au fonctionnement des services publics au sens de l'article NC 1 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de La Muraz ; qu'ainsi, et contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif de Grenoble, ces installations ne sont pas au nombre de celles qui sont admises en zone NC du plan d'occupation des sols de La Muraz ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le maire de la commune de La Muraz, qui ne pouvait légalement autoriser la réalisation en zone NC de constructions n'y étant pas admises par le règlement d'urbanisme, aurait pris la même décision d'opposition s'il ne s'était fondé que sur ce seul motif ; que, par suite, la commune de La Muraz est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé l'arrêté de son maire portant opposition à la déclaration de travaux de la société Itas Tim du 7 novembre 2013 ;

9. Considérant que, s'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société Itas Tim devant le tribunal administratif de Grenoble, il ressort des pièces du dossier que celle-ci n'invoquait, outre ceux qu'a retenus le tribunal administratif, que la conformité de son projet à la directive de protection et de mise en valeur des paysages du Mont-Salève et l'incohérence du changement de position du maire de Muraz, qui ne s'était pas opposé à une déclaration préalable analogue au mois de février 2011 ; que, d'une part, le moyen fondé sur la directive de protection ne peut qu'être écarté pour les motifs exposés au point 6 ; que, d'autre part, la circonstance que le maire ne s'est pas opposé à un projet antérieur analogue est, par elle-même, sans incidence sur la légalité de la décision d'opposition en litige ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner sa demande de substitution de motif, la commune de La Muraz est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision de son maire du 7 novembre 2013 ;

Sur les frais non compris dans les dépens :

11. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Itas Tim, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le paiement à la commune de La Muraz d'une somme de 1 500 euros au titre de ses frais non compris dans les dépens ; que ces mêmes dispositions font obstacle à ce que la somme que la société Itas Tim demande au même titre soit mise à la charge de la commune de La Muraz qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 11 février 2016 est annulé.

Article 2 : La demande de la société Itas Tim devant le tribunal administratif de Grenoble et ses conclusions en appel tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La société Itas Tim versera à la commune de La Muraz une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de La Muraz et à la société Itas Tim.

Copie pour information en sera adressée au préfet de la Haute-Savoie.

Délibéré après l'audience du 6 septembre 2016 à laquelle siégeaient :

M. Boucher, président de chambre,

M. Gille, président-assesseur,

Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 septembre 2016.

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N° 16LY01272

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16LY01272
Date de la décision : 27/09/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: M. Antoine GILLE
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : MERMET-BALTAZARD-LUCE et NOETINGER-BERLIOZ

Origine de la décision
Date de l'import : 07/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-09-27;16ly01272 ?
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