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12/07/2016 | FRANCE | N°15LY01129

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 12 juillet 2016, 15LY01129


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B..., épouseC..., a demandé au tribunal administratif de Lyon :

1°) d'annuler l'arrêté du 15 septembre 2014 par lequel la préfète de la Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français ;

2°) d'enjoindre à la préfète de la Loire de réexaminer sa situation et de lui délivrer une carte de séjour portant la mention "vie privée et familiale" ;

3°) de faire application des dispositions de l'article L.761-1 du code

de justice administrative.

Par un jugement n° 1407971 du 17 février 2015, le tribunal administrati...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B..., épouseC..., a demandé au tribunal administratif de Lyon :

1°) d'annuler l'arrêté du 15 septembre 2014 par lequel la préfète de la Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français ;

2°) d'enjoindre à la préfète de la Loire de réexaminer sa situation et de lui délivrer une carte de séjour portant la mention "vie privée et familiale" ;

3°) de faire application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1407971 du 17 février 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 1er avril 2015, MmeC..., représentée par Me Smiai, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 17 février 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 15 septembre 2014 de la préfète de la Loire ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Loire de réexaminer sa situation et de lui délivrer une carte de séjour portant la mention "vie privée et familiale" dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice au titre de la première instance.

Elle soutient que :

- les premiers juges n'ont pas respecté le principe du contradictoire, dès lors que son avocat n'a pas reçu le mémoire de la préfète de la Loire enregistré le 4 décembre 2014 et qui lui aurait été communiqué ;

- elle remplit les conditions pour bénéficier de la délivrance d'une carte de séjour temporaire sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; c'est à tort que les premiers juges ont retenu qu'elle n'avait pas informé les autorités françaises sur sa présence, dès lors que la préfète de la Loire ne lui a pas opposé ce défaut d'information ; son arrivée par l'aéroport de Lyon Saint-Exupéry vaut nécessairement signalisation de sa présence en France ;

- le refus de titre de séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, au sens de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et procède d'une erreur manifeste d'appréciation, l'état de santé de son époux nécessitant sa présence quotidienne à ses côtés ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale en ce qu'elle est fondée sur un refus de titre de séjour illégal.

MmeB..., épouseC..., a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du bureau d'aide juridictionnelle du 15 avril 2015.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 juin 2016, le préfet de la Loire conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'il s'en remet à ses écritures de première instance.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990 ;

- le règlement (CE) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006 établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen) ;

- le règlement (UE) n° 610/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 modifiant le règlement (CE) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen), la convention d'application de l'accord de Schengen, les règlements (CE) n° 1683/95 et (CE) n° 539/2001 du Conseil et les règlements (CE) n° 767/2008 et (CE) n° 810/2009 du Parlement européen et du Conseil ;

- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants marocains et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Peuvrel, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que Mme B...épouseC..., ressortissante marocaine née en 1959, entrée en France le 17 novembre 2011, a sollicité un titre de séjour portant la mention "vie privée et familiale" ; que la préfète de la Loire, par arrêté du 15 septembre 2014, a rejeté cette demande et a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français ; que Mme C... relève appel du jugement du 17 février 2015 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que si Mme C...soutient qu'elle n'a pas reçu communication du mémoire en défense produit par la préfète de la Loire, il ressort des mentions de la "fiche requête" jointe au dossier que le mémoire en défense, enregistré au greffe du tribunal administratif de Lyon le 8 décembre 2014, a été communiqué le lendemain à Me Smiai, avocat de la requérante ; qu'ainsi, les premiers juges n'ont pas méconnu à cet égard le principe du caractère contradictoire de la procédure ;

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...). " ; que selon l'article L. 311-7 du même code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour "compétences et talents" sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois. " ; qu'aux termes du sixième alinéa de l'article L. 211-2-1 du même code : " (...) Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour. / Dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat, par dérogation à l'article L. 311-1, le visa délivré pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois au conjoint d'un ressortissant français donne à son titulaire les droits attachés à la carte de séjour temporaire prévue au 4° de l'article L. 313-11 pour une durée d'un an. " ;

4. Considérant, d'une part, que la préfète de la Loire, pour refuser la délivrance du titre de séjour sollicité par MmeC..., a estimé que, si elle s'était mariée en France et y justifiait de six mois de séjour avec son conjoint, elle ne pouvait, bien que détentrice d'un visa de court séjour délivré par les autorités néerlandaises, justifier d'une entrée régulière sur le territoire français ; que, dans ses écritures en défense de première instance, la préfète de la Loire fait valoir que Mme C...n'est pas entrée régulièrement en France, dès lors qu'elle n'a pas déclaré sa présence aux autorités françaises, conformément, d'une part, aux stipulations de l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990, aux termes desquelles " I - Les étrangers entrés régulièrement sur le territoire d'une des Parties contractantes sont tenus de se déclarer, dans des conditions fixées par chaque Partie contractante, aux autorités de la Partie contractante sur le territoire de laquelle ils pénètrent. / Cette déclaration peut être souscrite au choix de chaque Partie contractante, soit à l'entrée, soit, dans un délai de trois jours ouvrables à partir de l'entrée, à l'intérieur du territoire de la Partie contractante sur lequel ils pénètrent (...) " et, d'autre part, à l'article 21 du règlement (CE) n° 562/2006 du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2006, reprises au deuxième alinéa de l'article L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté contesté ; qu'ainsi, contrairement à ce qu'allègue la requérante, en relevant qu'elle ne pouvait être regardée comme étant entrée régulièrement en France faute d'avoir informé les autorités françaises de sa présence, les premiers juges ne se sont pas fondés sur un motif différent de celui que lui a opposé la préfète de la Loire dans l'arrêté contesté, quand bien même le refus de titre de séjour ne se réfère pas expressément à cette absence de déclaration ;

5. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article R. 211-33 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La déclaration d'entrée sur le territoire français est souscrite auprès des services de la police nationale ou, en l'absence de tels services, des services des douanes ou des unités de la gendarmerie nationale. / A cette occasion, un récépissé est remis à l'étranger. Il peut être délivré par apposition d'une mention sur le document de voyage. / L'étranger assujetti à l'obligation de déclaration doit être en mesure de justifier, à toute réquisition des agents de l'autorité, qu'il a satisfait à cette obligation, par la production de ce récépissé. " ; qu'ainsi, MmeC..., qui ne justifie ni d'un récépissé, ni d'une mention sur son document de voyage, n'est pas fondée à soutenir que son arrivée par l'aéroport de Lyon Saint-Exupéry valait nécessairement signalisation de sa présence en France ; que, par suite, la préfète de la Loire a pu à bon droit estimer que Mme C...ne remplissait pas les conditions fixées au sixième alinéa de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour la délivrance en France d'un visa de long séjour, et n'a pas fait une inexacte application des dispositions du 4° de l'article L. 313-11 de ce même code en refusant de lui délivrer le titre sollicité ;

6. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales susvisée : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

7. Considérant que Mme B...a épousé M. C...le 3 mars 2012 ; que ce dernier s'est vu, par décision de la maison départementale des personnes handicapées de la Loire prise le 3 mars 2011, reconnaître un taux d'incapacité égal ou supérieur à 80 % et attribuer l'allocation aux adultes handicapés avec complément de ressources ; que Mme C...produit des certificats médicaux établis les 22 mai 2012 et 18 septembre 2014 indiquant, pour le premier, que l'état de santé de son époux nécessite l'aide quotidienne d'un tiers pour les gestes de la vie courante et la surveillance de l'observance thérapeutique et, pour le second, que cet état de santé justifie la présence de MmeC..., laquelle gère le régime strict auquel il est soumis ; que, toutefois, si ces pièces établissent que l'état de santé de M. C...nécessite une assistance quotidienne par une tierce personne, il n'en ressort pas, alors que les pathologies dont il souffre sont antérieures à son mariage, qu'il a nécessairement bénéficié d'une assistance avant cette date et qu'il n'est pas établi que son état de santé se serait dégradé depuis, que Mme C...serait la seule personne à même de lui apporter l'aide quotidienne dont il a besoin ; que, par ailleurs, MmeC..., dont la présence en France était récente à la date du refus de titre de séjour contesté et qui ne justifie pas d'une insertion particulière sur le territoire français, en dépit du fait qu'elle suivrait des cours de français, n'est pas fondée à soutenir que le refus de titre de séjour en litige porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des objectifs en vue desquels il a été pris ; qu'elle n'est pas davantage fondée à soutenir que ce refus procèderait d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

8. Considérant que MmeC..., n'ayant pas démontré l'illégalité du refus de titre de séjour, n'est pas fondée à s'en prévaloir, par la voie de l'exception, à l'appui des conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté préfectoral du 15 septembre 2014 lui refusant un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

10. Considérant que le présent arrêt, qui confirme le rejet des conclusions à fin d'annulation de l'arrêté préfectoral du 15 septembre 2014, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce la somme que Mme C...demande sur leur fondement au titre de ses frais non compris dans les dépens soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...épouse C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...épouse C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Loire.

Délibéré après l'audience du 30 juin 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Boucher, président de chambre ;

- M. Drouet, président-assesseur ;

- Mme Peuvrel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 juillet 2016.

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N° 15LY01129


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: Mme Nathalie PEUVREL
Rapporteur public ?: M. CLEMENT
Avocat(s) : SMIAI

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 12/07/2016
Date de l'import : 02/08/2016

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 15LY01129
Numéro NOR : CETATEXT000032949983 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-07-12;15ly01129 ?
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