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12/07/2016 | FRANCE | N°15LY00907

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 12 juillet 2016, 15LY00907


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 1er août 2014 par lesquelles le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a interdit son retour sur le territoire français pour une durée d'un an et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1405151 du 4 décembre 2014, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :
>Par une requête enregistrée le 18 mars 2015, M. B...demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugeme...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 1er août 2014 par lesquelles le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a interdit son retour sur le territoire français pour une durée d'un an et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1405151 du 4 décembre 2014, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 18 mars 2015, M. B...demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 4 décembre 2014 du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées du 1er août 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travailler, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le refus de titre de séjour est insuffisamment motivé ; le préfet, qui s'est estimé lié par les décisions de l'office français de protection des réfugiés et apatrides et de la cour nationale du droit d'asile, n'a pas procédé à un examen attentif et particulier de son cas ;

- cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'obligation de quitter le territoire français a été prise sans qu'il ait pu préalablement bénéficier du droit d'être entendu tel que consacré par l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 et l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne dans la mesure où il a été privé de la possibilité de présenter ses observations ; elle est privée de base légale, compte tenu de l'illégalité entachant le refus de titre de séjour du même jour ; elle méconnaît les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision le privant de délai de départ volontaire est insuffisamment motivée ; elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de renvoi est privée de base légale, compte tenu de l'illégalité entachant le refus de titre de séjour du même jour ; elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an n'est pas justifiée par le seul motif que l'intéressé n'a pas exécuté une précédente mesure d'éloignement, dès lors que seul le motif, non allégué par le préfet, que la présence en France de M. B... aurait constitué une menace pour l'ordre public, aurait été de nature à fonder une telle décision.

Par une ordonnance du 30 décembre 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 22 janvier 2016.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 11 février 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Lévy Ben Cheton a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.B..., de nationalité macédonienne, né en 1994, est entré en France au plus tard le 2 avril 2013, date à laquelle il a déposé une demande d'asile ; que le préfet de l'Isère a refusé de l'admettre provisoirement au séjour le 15 avril 2013, puis, le 8 août 2013, a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français, après que l'office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande d'asile le 24 juin 2013 ; que, par jugement du 30 avril 2014, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision fixant le pays de renvoi et a enjoint au préfet d'examiner de nouveau la situation du requérant après que soit intervenue la décision de la cour nationale du droit d'asile ; que, par décision du 29 avril 2014, cette cour a confirmé la décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides ; que M. B...a déposé, le 11 juillet 2014, une demande de titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le 1er août 2014, le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus de l'obligation de quitter le territoire français sans délai, a interdit son retour sur le territoire français pour une durée d'un an et a fixé le pays de renvoi ; que M. B... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande dirigée contre ces décisions du 1er août 2014 ;

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

2. Considérant que la décision en litige énonce de façon détaillée les considérations de droit et de fait qui la fondent ; que le moyen tiré d'une insuffisante motivation au regard des articles 1er et 2 de loi du 11 juillet 1979, alors en vigueur, doit être écarté ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et en particulier des motifs mêmes de la décision contestée, que le préfet a, contrairement à ce que prétend M.B..., procédé à un examen individuel de son cas particulier, et ne s'est notamment pas estimé lié par le sens des décisions par lesquelles l'office français de protection des réfugiés et apatrides, puis la cour nationale du droit d'asile, ont rejetées sa demande d'asile ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). 2. Il ne peut y avoir d'ingérence dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

5. Considérant qu'à la date de la décision contestée, M. B...ne résidait en France que depuis seize mois ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que sa compagne, entrée en France avec lui, serait dans une situation différente de la sienne au regard du droit au séjour ; que s'il fait état d'un enfant né en France, il n'établit pas, en tout état de cause, la réalité de cette allégation ; que, compte tenu de ces éléments, et notamment de l'âge du requérant, entré en France à l'âge adulte, la seule circonstance que ses parents, entrés en France en 2012, y bénéficient depuis 2013 de la protection subsidiaire, ne suffit pas à faire regarder la décision en litige comme ayant porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'apparaît pas davantage être entachée d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences qu'elle est susceptible de comporter pour la situation personnelle de l'intéressé ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) " ;

7. Considérant que M.B..., à qui le droit au séjour a été refusé par décision du 1er août 2014, entrait ainsi, à cette date, dans le champ des dispositions précitées du 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

8. Considérant que le moyen tiré de la méconnaissance des droits de la défense et son droit à être entendu prévu par le 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne doit être écarté par les mêmes motifs que ceux retenus par les premiers juges, qu'il y a lieu pour la cour d'adopter ;

9. Considérant que l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative au droit des citoyens dans leurs relations avec les administrations, alors en vigueur, qui fixe les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979 en prévoyant que ces décisions " n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales (...) ", ne saurait être utilement invoqué à l'encontre d'une décision portant obligation de quitter le territoire français prise sur le fondement du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

10. Considérant que, compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus s'agissant de la légalité de la décision de refus de titre de séjour, M. B... n'est fondé ni à invoquer, par voie d'exception, l'illégalité de ce refus, ni à invoquer la violation de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme ou une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la légalité de la décision refusant un délai de départ volontaire :

11. Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui transpose l'article 7 de la directive susvisée du 16 décembre 2008 : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification (...). Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement (...) " ;

12. Considérant que la décision en litige refusant un délai de départ volontaire, qui énonce les considérations de droit et de fait qui la fondent, est suffisamment motivée ;

13. Considérant que par arrêté du 8 août 2013, le préfet de l'Isère a pris, à l'encontre de M. B..., une précédente obligation de quitter le territoire français ; que si, par jugement n° 1306526, du 30 avril 2014, le tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision fixant le pays de renvoi, il a, en revanche, rejeté les conclusions d'annulation dirigées contre cette obligation de quitter le territoire français ; qu'en s'abstenant d'exécuter spontanément cette mesure d'éloignement, qui demeurait exécutoire, l'intéressé entrait dans les prévisions du 3)° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité ; qu'ainsi, le préfet de l'Isère était fondé à le priver, pour ce motif, d'un délai de départ volontaire ;

14. Considérant que le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dirigé contre cette décision, par lequel le requérant se borne à soutenir que " ses motifs sont inopérants contre M.B... ", n'est pas assorti des précisions suffisantes pour permettre à la cour d'en apprécier le bien-fondé ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de renvoi :

15. Considérant que les moyens tirés respectivement d'une exception d'illégalité du refus de titre de séjour, de la violation de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme, et d'une erreur manifeste d'appréciation, doivent être écartés par les mêmes motifs que ceux retenus par le tribunal, qu'il y a lieu pour la cour d'adopter ;

Sur la légalité de l'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an :

16. Considérant qu'aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. / (...) / (...) / Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger obligé de quitter le territoire français, l'autorité administrative peut prononcer l'interdiction de retour pour une durée maximale de trois ans à compter de sa notification. / (...) / (...) / L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. / (...) " ;

17. Considérant que pour prendre à l'encontre du requérant une décision d'interdiction de retour sur le territoire français, le préfet de l'Isère s'est notamment fondé sur le fait que M. B... s'est maintenu en France alors qu'il avait fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français en 2013, qu'il ne justifie pas de liens intenses, stables, et anciens sur le territoire national, et qu'il a conservé des liens avec son pays, où il a vécu jusqu'à l'âge de dix-neuf ans ; que, dès lors, le préfet de l'Isère a pu, sans commettre d'erreur de droit, ni d'appréciation, prononcer à son encontre cette mesure d'interdiction de retour sur le territoire français et en fixer la durée à un an, alors même que la présence de l'intéressé ne constituerait pas une menace à l'ordre public ;

18. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M.B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 21 juin 2016, à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Picard, président-assesseur,

M. Lévy Ben Cheton, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 juillet 2016.

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N° 15LY00907

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Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Laurent LEVY BEN CHETON
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : MARCEL

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Date de la décision : 12/07/2016
Date de l'import : 02/08/2016

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 15LY00907
Numéro NOR : CETATEXT000032949974 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-07-12;15ly00907 ?
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