Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Les syndicats des copropriétaires des immeubles " Le Signal ", " Le Belvédère ", " Le Panoramic ", " La Muzelle ", " Les Chanses et hauts lieux ", M. B... L..., M. M... K..., Mme C...F..., M. D... F..., Mme N... A...et l'association des propriétaires du site de l'Eclose ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler la délibération du 27 juin 2012 par laquelle le conseil municipal d'Huez a désaffecté et déclassé une emprise de 2 626 m2 du domaine public communal bordant la partie sud de l'avenue de l'Eclose et a autorisé le maire à signer tout document relatif à ce déclassement, ensemble la décision implicite de rejet du recours gracieux formé le 14 août 2012.
Par un jugement n° 1206537 du 10 avril 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leur demande, ainsi que l'intervention de M. J...et les conclusions de la commune d'Huez au titre des frais non compris dans les dépens.
Procédure devant la cour :
I) ) Par une requête enregistrée le 15 juin 2015 sous le n° 15LY01962, ainsi que par des mémoires enregistrés les 2 et 29 mars 2016, les syndicats des copropriétaires des immeubles " Le Signal ", " Le Belvédère ", " Le Panoramic ", " La Muzelle ", M. B... L..., M. M... K..., M. D... F..., Mme N...A..., l'association des propriétaires du site de l'Eclose et M. G...J..., représentés par MeI..., demandent à la cour :
- d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 10 avril 2015 ;
- d'annuler, pour excès de pouvoir, la délibération et la décision implicite en litige ;
- de mettre à la charge de la commune d'Huez une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- c'est à tort que les premiers juges ont écarté le moyen tiré de l'absence de désaffectation matérielle et préalable d'emprise publique ; le jugement est entaché de contradiction de motifs, d'erreur de droit et d'erreur d'appréciation sur ce point ;
- c'est à tort que le tribunal a écarté le moyen tiré de l'absence d'enquête préalable requise par l'article L. 141-3 du code de la voirie routière ; les premiers juges ont, à cet égard, commis une erreur de droit et une erreur d'appréciation ;
- les premiers juges ont entaché leur jugement d'une omission à statuer et d'une erreur d'appréciation s'agissant du défaut de but d'intérêt général poursuivi par le déclassement ;
- les premiers juges ont dénaturé les faits et commis une erreur d'appréciation en écartant le moyen tiré du détournement de pouvoir ;
- la requête est recevable en tant qu'elle émane de M.J..., dès lors qu'il aurait eu qualité pour introduire lui-même le recours et qu'il aurait eu qualité pour former tierce opposition contre le jugement ;
- les copropriétés avaient intérêt et qualité pour saisir le tribunal ;
- les copropriétaires et l'association justifient d'un intérêt pour agir.
Par des mémoires enregistrés les 23 juillet 2015, 3 août 2015 et 24 mars 2016, ainsi que par un mémoire enregistré le 20 avril 2016 et non communiqué, la commune d'Huez, représentée par MeE..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge des requérants une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est irrecevable en tant qu'elle émane de M. J..., intervenu volontairement en première instance, alors qu'un éventuel recours en annulation aurait été déclaré tardif et qu'il n'est pas justifié d'un intérêt à agir contre la délibération ;
- le jugement n'est pas entaché de contradiction de motifs ; les premiers juges n'ont pas commis d'erreur de droit sur le fait que la décision de déclassement portait par elle-même désaffectation ; en toute hypothèse, les mesures nécessaires à la désaffectation des biens avaient été prises à la date de la délibération litigieuse ;
- le deuxième alinéa de l'article L. 141-3 du code de la voirie routière dispense expressément d'enquête publique les opérations de classement et de déclassement qui ne portent pas atteinte aux fonctions de desserte et de circulation assurées, ce qui concerne également les rétrécissements, alors qu'en l'espèce la voie demeurera large de 8 mètres, ce qui est suffisant ;
- le jugement n'est pas entaché d'omission à statuer ; il est justifié d'un intérêt général ; il n'y a pas de détournement de pouvoir ;
- les demandes de première instance sont irrecevables pour défaut d'intérêt pour agir; la demande est irrecevable en tant qu'elle vise à obtenir l'annulation du déclassement d'un bien du domaine privé, s'agissant de la parcelle herbeuse située en contrebas de la voie.
II) Par une requête enregistrée le 16 juin 2015 sous le n° 15LY01980, Mme C... F..., représentée par MeI..., demande à la cour :
- d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 10 avril 2015 ;
- d'annuler, pour excès de pouvoir, la délibération et la décision implicite en litige ;
- de mettre à la charge de la commune d'Huez une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que les premiers juges ont écarté le moyen tiré de l'absence de désaffectation matérielle et préalable d'emprise publique ; le jugement est entaché de contradiction de motifs, d'erreur de droit et d'erreur d'appréciation sur ce point ;
- c'est à tort que le tribunal a écarté le moyen tiré de l'absence d'enquête préalable requise par l'article L. 141-3 du code de la voirie routière ; les premiers juges ont, à cet égard, commis une erreur de droit et une erreur d'appréciation ;
- les premiers juge ont entaché leur jugement d'une omission à statuer et d'une erreur d'appréciation s'agissant du défaut de but d'intérêt général poursuivi par le déclassement ;
- les premiers juges ont dénaturé les faits et commis une erreur d'appréciation en écartant le moyen tiré du détournement de pouvoir.
Par des mémoires enregistrés les 23 juillet et 3 août 2015, la commune d'Huez, représentée par MeE..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de Mme F...une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est irrecevable en tant qu'elle émane de M. J..., intervenu volontairement en première instance, alors qu'un éventuel recours en annulation aurait été déclaré tardif et qu'il n'est pas justifié d'un intérêt à agir contre la délibération ;
- le jugement n'est pas entaché de contradiction de motifs ; les premiers juges n'ont pas commis d'erreur de droit sur le fait que la décision de déclassement portait par elle-même désaffectation ; en toute hypothèse, les mesures nécessaires à la désaffectation des biens avaient été prises à la date de la délibération litigieuse ;
- le deuxième alinéa de l'article L. 141-3 du code de la voirie routière dispense expressément d'enquête publique les opérations de classement et de déclassement qui ne portent pas atteinte aux fonctions de desserte et de circulation assurées, ce qui concerne également les rétrécissements, alors qu'en l'espèce la voie demeurera large de 8 mètres, ce qui est suffisant ;
- le jugement n'est pas entaché d'omission à statuer ; il est justifié d'un intérêt général ; il n'y a pas de détournement de pouvoir ;
- les demandes de première instance sont irrecevables pour défaut d'intérêt pour agir ; la demande est irrecevable en tant qu'elle vise à obtenir l'annulation du déclassement d'un bien du domaine privé, s'agissant de la parcelle herbeuse située en contrebas de la voie.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code de la voirie routière ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Samson-Dye, rapporteur,
- les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public,
- les observations de Me H..., représentant les syndicats des copropriétaires des immeubles " Le Signal ", " Le Belvédère ", " Le Panoramic ", " La Muzelle ", M. B... L..., M. M... K..., M. D... F..., Mme N...A..., l'association des propriétaires du site de l'Eclose, M. G...J...et Mme C...F..., et de MeE..., représentant la commune d'Huez.
1. Considérant que les requêtes n° 15LY01962 et n° 15LY01980 sont dirigées contre le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un même arrêt ;
2. Considérant que les requérants contestent le jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de la délibération du 27 juin 2012 par laquelle le conseil municipal d'Huez a désaffecté et déclassé une emprise de 2 626 m2 du domaine public communal bordant la partie sud de l'avenue de l'Eclose et a autorisé le maire à signer tout document relatif à ce déclassement, ensemble la décision implicite de rejet du recours gracieux formé par eux contre cette délibération, le 14 août 2012 ;
Sur la recevabilité des appels :
3. Considérant que la commune fait valoir que la requête est irrecevable en tant qu'elle émane de M.J..., qui n'était qu'intervenant volontaire en première instance ; que, cependant, ce requérant agissant dans le seul dossier 15LY01962, cette circonstance est sans incidence sur la recevabilité de la requête 15LY01980 ; que, par ailleurs, les autres requérants dans le dossier 15LY01962 qui étaient demandeurs en première instance, et qui ont vu leur requête rejetée par le jugement en litige, ont qualité à en relever appel ; que, dans ces conditions, à supposer même que M. J...n'ait pas qualité pour agir en appel, cette circonstance est sans incidence sur la recevabilité des conclusions de la requête 15LY01962 tendant à l'annulation du jugement et des actes administratifs litigieux ;
Sur la régularité du jugement :
4. Considérant qu'en indiquant, au point 8 du jugement attaqué, que l'objectif de permettre la réalisation d'une résidence hôtelière et touristique et de redynamiser le quartier présentait un intérêt général, les premiers juges ont écarté le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation, qui était fondé sur l'absence d'intérêt général ; que, dès lors, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le tribunal a omis de répondre à l'un de leurs moyens ;
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
5. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que la parcelle déclassée est composée, pour partie, d'un espace comportant un revêtement bitumineux, correspondant à l'avenue de l'Eclose proprement dite, et, pour le surplus, d'un talus enherbé ; que cette parcelle herbeuse, qui n'est pas aménagée en vue de son affectation à la circulation ou au stationnement, ne constitue pas un accessoire de la voie publique nécessaire à son utilisation ou à la sécurité de ses usagers ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle serait affectée à l'usage direct du public ; qu'il suit de là que ce terrain faisait déjà partie du domaine privé de la commune, de sorte que la délibération litigieuse, en tant qu'elle prononce sa désaffectation et son déclassement, est superfétatoire ; qu'il en va de même s'agissant du rejet implicite du recours gracieux formé contre cette délibération, en tant qu'il porte sur cette parcelle herbeuse ; que, dans ces conditions, les actes litigieux de la commune, en ce qu'ils concernaient cet espace, ne font pas grief aux demandeurs ; que la commune est, par suite, fondée à soutenir que les conclusions des requérants sont, dans cette mesure, irrecevables ; que ceux-ci ne sont donc pas fondés à se plaindre du rejet de leur demande par le tribunal, en ce qui concerne ce terrain herbeux ;
6. Considérant, en second lieu, que la demande a été formée, notamment, par plusieurs copropriétaires d'immeubles desservis à partir de cette voie ou qui, s'agissant de l'immeuble " Le Signal ", sont situés près de l'extrémité de cette avenue ; que ces copropriétaires justifient ainsi d'un intérêt pour contester le déclassement d'une partie substantielle du domaine public routier de l'avenue de l'Eclose ; que, s'agissant spécifiquement de MmeF..., si la commune soutient qu'elle ne justifie pas de sa qualité de copropriétaire, il ressort du procès-verbal d'assemblée générale de la résidence " Le Signal " qu'elle est mentionnée comme étant l'une des copropriétaires de l'immeuble ; que l'authenticité de ce document n'est pas contestée ; qu'elle doit, par suite, être regardée comme justifiant de sa qualité de copropriétaire ; que la circonstance que la demande serait irrecevable en tant qu'elle émanerait des autres demandeurs, et en particulier des cinq syndicats de copropriétaires ou de l'association des propriétaires de l'Eclose, est, par elle-même, sans incidence sur la recevabilité des conclusions aux fins d'annulation ; qu'ainsi, et exception faite de ce qui a été précisé au point 5, les autres fins de non-recevoir opposées par la commune aux conclusions d'annulation doivent être écartées ;
Sur la légalité du déclassement :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens des requêtes ;
7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 141-3 du code de la voirie routière : " Le classement et le déclassement des voies communales sont prononcés par le conseil municipal. Ce dernier est également compétent pour l'établissement des plans d'alignement et de nivellement, l'ouverture, le redressement et l'élargissement des voies. /Les délibérations concernant le classement ou le déclassement sont dispensées d'enquête publique préalable sauf lorsque l'opération envisagée a pour conséquence de porter atteinte aux fonctions de desserte ou de circulation assurées par la voie. (...) " ;
8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la délibération litigieuse procède à une réduction substantielle de la dimension de l'avenue de l'Eclose, particulièrement s'agissant de la largeur de celle-ci, en supprimant des espaces antérieurement dédiés au stationnement et à l'arrêt des véhicules ; que, si un arrêté du maire du 27 avril 2012 avait interdit le stationnement sur ces espaces, cet arrêté n'interdisait pas pour autant l'arrêt sur l'avenue de l'Eclose dans son ensemble ; qu'une école est, à la date des actes en litige, toujours située à l'extrémité de cette avenue ; que la commune ne peut utilement se prévaloir de la perspective de déplacement de cet établissement scolaire, ce déplacement étant postérieur à la délibération en litige qui n'a pas prévu un effet différé ; que, dans la mesure où il n'est pas justifié que les parents disposeraient d'un autre espace pour déposer les enfants scolarisés, cette situation est susceptible de générer un arrêt intempestif de véhicules sur l'avenue de l'Eclose, ainsi que cela est corroboré par les photographies figurant aux dossiers ; que, dans ces conditions, et alors que cette avenue dessert également le centre d'incendie et de secours, le déclassement d'une partie de l'avenue de l'Eclose, même en conservant à celle-ci une largeur de 8 mètres, porte une atteinte aux fonctions de circulation et de desserte assurées par la voie ; qu'il est constant que le déclassement ainsi opéré n'a pas été précédé de l'enquête publique exigée, dans cette hypothèse, par l'article L. 141-3 du code de la voirie routière, et qui constitue une garantie dont les intéressés ont été, en l'espèce, privés ; que, par suite, les requérants sont fondés à soutenir que la délibération de déclassement été prise à l'issue d'une procédure irrégulière et à en demander l'annulation, en tant qu'elle porte sur la partie sud de l'avenue de l'Eclose proprement dite, à l'exclusion, ainsi qu'il a été dit, du talus enherbé attenant, ainsi que celle du rejet du recours gracieux contre cette délibération ; qu'ils sont ainsi fondés à soutenir que c'est à tort que le jugement attaqué a rejeté leurs demandes sur ce point ;
Sur les frais non compris dans les dépens :
9. Considérant, en premier lieu, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la cour fasse bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais exposés à l'occasion du litige soumis au juge et non compris dans les dépens ; que, dès lors, les conclusions de la commune d'Huez doivent être rejetées ;
10. Considérant, en second lieu, que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées à ce titre par les requérants ;
DECIDE :
Article 1er : La délibération du 27 juin 2012 du conseil municipal d'Huez est annulée en tant qu'elle porte sur la partie sud de l'avenue de l'Eclose proprement dite, à l'exclusion du talus enherbé attenant, ensemble la décision implicite portant rejet du recours gracieux, sur ce point.
Article 2 : Le jugement n° 1206537 du tribunal administratif de Grenoble du 10 avril 2015 est annulé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié aux syndicats des copropriétaires des immeubles " Le Signal ", " Le Belvédère ", " Le Panoramic ", " La Muzelle ", à M. B... L..., à M. M... K..., à M. D... F..., à Mme N...A..., à l'association des propriétaires du site de l'Eclose, à M. G...J..., à Mme C...F...et à la commune d'Huez.
Délibéré après l'audience du 23 juin 2016 où siégeaient :
- M. Mesmin d'Estienne, président,
- Mme Gondouin, premier conseiller,
- Mme Samson-Dye, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 7 juillet 2016.
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