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05/07/2016 | FRANCE | N°15LY02058

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 05 juillet 2016, 15LY02058


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...D...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 18 mai 2015 par laquelle le maire de Lyon a annulé son licenciement et prononcé sa réintégration et de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par une ordonnance n° 1504973 du 10 juin 2015, le président de la 8ème chambre du tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande comme manifestement irrecevable.

Procédure devant la Cour :

Par une requête

, enregistrée le 19 juin 2015, et un mémoire, enregistré le 15 avril 2016, Mme B...D..., rep...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...D...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 18 mai 2015 par laquelle le maire de Lyon a annulé son licenciement et prononcé sa réintégration et de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par une ordonnance n° 1504973 du 10 juin 2015, le président de la 8ème chambre du tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande comme manifestement irrecevable.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 19 juin 2015, et un mémoire, enregistré le 15 avril 2016, Mme B...D..., représentée par Helios Avocats, demande à la Cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du 10 juin 2015 du président de la 8ème chambre du tribunal administratif de Lyon ;

2°) d'annuler la décision du maire de Lyon du 18 mai 2015 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Lyon le versement d'une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle justifie d'un intérêt à agir contre la décision du 18 mai 2015, qui lui fait grief en ce qui concerne ses conditions de réintégration, et notamment le bref délai qui lui est donné pour reprendre ses fonctions, et en ce qu'elle ne peut être considérée comme répondant favorablement à une demande qu'elle a formulée, dès lors qu'elle procède au retrait tardif de la décision de licenciement, créatrice de droits ; cette décision ne correspond pas exactement à celle qu'aurait prise le juge s'il avait statué, dès lors qu'il aurait ordonné des modalités de réintégration plus favorables, notamment en terme de délai, et plus adaptées à sa situation ; elle a en réalité pour objet de l'inciter à abandonner son poste et de l'évincer sans avoir à respecter les procédures administratives et à répondre des fautes commises ;

- la décision du 18 mai 2015 est illégale, dès lors qu'elle est intervenue après expiration du délai dans lequel peut être retirée une décision créatrice de droit ; le retrait du licenciement ne pouvait légalement intervenir hors du délai de droit commun que si la réintégration était elle-même régulière ;

- elle a été prise par une autorité incompétente ; l'annulation d'une décision de licenciement ne constitue pas un acte de gestion du personnel ;

- la commune ne la réintègre ni dans l'emploi dont elle a été évincée, ni sur un poste identique à son poste précédent, qui est occupé par un agent dont le contrat arrivait à échéance ; les fonctions qui lui sont proposées sont vagues, sans lien avec ses fonctions antérieures et comportent moins de responsabilités ; s'agissant des conditions de reconstitution de sa carrière, elle ne mentionne aucun chiffre, prévoit la déduction des allocations de retour à l'emploi alors qu'elle n'en a pas perçues, celle de l'indemnité de licenciement alors que l'annulation d'une décision de licenciement n'entraîne pas le remboursement de l'indemnité perçue à ce titre, et omet de mentionner la reconstitution des droits sociaux ; la commune ne lui a jamais demandé de lui indiquer le montant des revenus qu'elle avait perçus pendant la période d'éviction illégale ; la décision contestée est également illégale en ce qu'elle omet de faire droit à sa demande de réparation intégrale des préjudices subis et n'intègre pas les primes et indemnités dont elle avait, pour la période en cause, une chance sérieuse de bénéficier ;

- cette décision a en réalité pour objet de l'inciter à abandonner son poste et de l'évincer sans que la commune n'ait à respecter les procédures administratives et à répondre des fautes qu'elle a commises ;

- la décision du 16 juillet 2014 prononçant son licenciement est insuffisamment motivée ;

- cette décision a été prise à la suite d'une procédure irrégulière au regard du caractère insuffisant du délai entre la convocation à l'entretien préalable à son licenciement et cet entretien, qui ne lui a pas permis de le préparer et de prendre connaissance de son dossier ;

- la perte de confiance ne pouvait légalement justifier son licenciement ;

- la décision de procéder à son licenciement est entachée d'un détournement de pouvoir ;

- elle a été prise en méconnaissance de l'obligation de rechercher un reclassement dans un autre emploi avant de procéder au licenciement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 janvier 2016, la commune de Lyon, représentée par la société d'exercice libéral par actions simplifiée (SELAS) Adamas, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de Mme D... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- à titre principal, c'est à bon droit que le premier juge a rejeté comme manifestement irrecevable la demande de MmeD... ; la décision d'annuler son licenciement et d'en tirer la conséquence en procédant à sa réintégration n'est pas différente de celle que prendrait le juge ; le litige relatif aux modalités de la réintégration, dont le principe n'est pas contesté, est distinct du litige relatif au principe de la réintégration et au retrait de la décision de licenciement ; la requérante, qui avait demandé au juge qu'il lui soit enjoint de procéder à sa réintégration en cas d'annulation du licenciement, ne conteste pas avoir obtenu satisfaction mais cherche en réalité à obtenir une satisfaction plus étendue ; qu'elle conteste non le principe de sa réintégration mais uniquement ses modalités ;

- l'intéressée ayant demandé l'annulation de la décision prononçant son licenciement, le retrait de cette décision pouvait légalement intervenir à tout moment, notamment en cours d'instance ;

- à titre subsidiaire, la décision contestée du 18 mai 2015 a été prise par une autorité compétente ; que l'indemnité de licenciement, en ce qu'elle vise à indemniser la perte de gain, doit être déduite de l'indemnité globale ayant pour objet d'indemniser cette même perte de gain, faute de quoi l'agent serait indemnisé deux fois pour le même préjudice ; que l'allocation de retour à l'emploi doit également être déduite, dès lors que, si Mme D...n'en a pas perçu, c'est uniquement parce qu'elle n'a pas accompli les démarches nécessaires ; que les revenus perçus au cours de la période d'éviction doivent, de même, être déduits et il appartient à l'intéressée de produire les éléments permettant d'en connaître le montant, ce qui permettrait également de procéder à la reconstitution des droits sociaux ; que le poste proposé à Mme D... est équivalent à celui qu'elle occupait précédemment, en termes de responsabilité et de temps de travail comme de rémunération ; que ses responsabilités et missions sont plus étendues que dans son poste précédent, lequel ne constitue pas un emploi unique et n'était pas vacant ;

- à titre infiniment subsidiaire, que les moyens soulevés par la requérante contre la décision de licenciement du 16 juillet 2014 sont inopérants.

La clôture de l'instruction a été fixée au 13 mai 2016 par ordonnance du 25 avril 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi du 22 avril 1905 portant fixation du budget des dépenses et des recettes de l'exercice 1905 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents contractuels de la fonction publique territoriale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Peuvrel, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Clément, rapporteur public ;

- et les observations de Me C...pour MmeD..., ainsi que celles de Me A..., pour la ville de Lyon.

1. Considérant que Mme D...a été recrutée comme collaborateur de cabinet occupant les fonctions de chargée de mission et nommée à ce poste par arrêté du 30 mai 2001 ; qu'il a été mis fin à ces fonctions ; qu'elle a ensuite exercé en qualité de chargée de mission rattachée au secrétariat des adjoints au bureau du cabinet du maire et bénéficié à ce titre de contrats de travail à durée déterminée temps incomplet à compter du 7 août 2001, régulièrement renouvelés, puis, à compter du 27 juillet 2005, d'un contrat à durée indéterminée à temps incomplet ; qu'elle a été licenciée par décision du 16 juillet 2014 à compter du 19 septembre 2014 dans l'intérêt du service, pour perte de confiance, alors qu'aucun poste de catégorie A à temps non complet n'était vacant ; que, par courrier du 8 septembre 2014, elle a sollicité le retrait de cette décision et, en cas de refus, le versement d'une indemnité de licenciement, de ses congés payés et de dommages-intérêts correspondant au préjudice qu'elle estimait avoir subi du fait de son éviction irrégulière ; qu'elle a saisi le tribunal administratif de Lyon le 12 septembre 2014 d'une demande tendant à l'annulation de la décision du 16 juillet 2014 du maire de Lyon prononçant son licenciement, de conclusions à fin d'injonction et de conclusions indemnitaires ; que, par courrier du 18 mai 2015, le maire de Lyon a retiré sa décision du 16 juillet 2014 et a prononcé la réintégration de Mme D...à compter du 1er juin 2014 ; que Mme D...relève appel de l'ordonnance du 10 juin 2015 du président de la 8ème chambre du tribunal administratif de Lyon ayant rejeté comme manifestement irrecevable sa demande tendant à l'annulation de la décision du 18 mai 2015 du maire de Lyon ;

Sur la régularité de l'ordonnance :

2. Considérant qu'il est constant que Mme D...a sollicité, par un recours gracieux exercé le 8 septembre 2014, puis par un recours contentieux exercé devant le juge administratif le 12 septembre 2014, d'une part, l'annulation de la décision du maire de Lyon du 16 juillet 2014 prononçant son licenciement et, d'autre part, sa réintégration ; qu'elle a fait valoir devant le tribunal administratif que la décision du 18 mai 2015, si elle donne une suite favorable à ses demandes, fixe des conditions de réintégration qui lui sont défavorables ; que, dans la mesure où cette décision précise les modalités financières de réintégration, affecte l'intéressée à de nouvelles fonctions, qui sont décrites dans une fiche de poste annexée et lui demande de se présenter le 1er juin 2015, toutes conditions qu'a contestées Mme D...dès la première instance, cette décision est susceptible de lui faire grief en tant qu'elle prononce sa réintégration ; que, par suite, la requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la 8ème chambre du tribunal administratif de Lyon a rejeté comme étant manifestement irrecevable sa demande dirigée contre la décision du 18 mai 2015 en tant qu'elle prononce sa réintégration et à en demander l'annulation dans cette mesure ;

3. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Lyon pour qu'il statue à nouveau sur la demande de Mme D... tendant à l'annulation de la décision du 18 mai 2015 en tant qu'elle prononce sa réintégration ;

Sur les frais non compris dans les dépens :

4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Lyon le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de MmeD..., qui n'est pas la partie perdante, la somme que demande la commune de Lyon en application de ces dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance du 10 juin 2015 du président de la 8ème chambre du tribunal administratif de Lyon est annulée en tant qu'elle rejette les conclusions de la demande de Mme D... dirigées contre la décision du 18 mai 2015 du maire de la commune de Lyon en ce qu'elle prononce sa réintégration.

Article 2 : Le jugement de l'affaire est renvoyé dans cette mesure au tribunal administratif de Lyon.

Article 3 : La commune de Lyon versera une somme de 1 500 euros à Mme D...en application en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...D...et à la commune de Lyon.

Délibéré après l'audience du 14 juin 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Drouet, président de la formation de jugement ;

- Mme Dèche, premier conseiller ;

- Mme Peuvrel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 juillet 2016.

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N° 15LY02058


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY02058
Date de la décision : 05/07/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-01-01 Procédure. Introduction de l'instance. Décisions pouvant ou non faire l'objet d'un recours.


Composition du Tribunal
Président : M. DROUET
Rapporteur ?: Mme Nathalie PEUVREL
Rapporteur public ?: M. CLEMENT
Avocat(s) : HELIOS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-07-05;15ly02058 ?
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