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23/06/2016 | FRANCE | N°15LY03984

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 23 juin 2016, 15LY03984


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...A...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 5 décembre 2014, par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé un délai de départ volontaire de trente jours, et a désigné un pays de destination.

Par un jugement n° 1503604 du 16 septembre 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enreg

istrée le 17 décembre 2015, M.A..., représenté par la SCP C...-B..., demande à la cour :

1°) d'an...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...A...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 5 décembre 2014, par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé un délai de départ volontaire de trente jours, et a désigné un pays de destination.

Par un jugement n° 1503604 du 16 septembre 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 17 décembre 2015, M.A..., représenté par la SCP C...-B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 16 septembre 2015 ;

2°) d'annuler les décisions du préfet du Rhône du 5 décembre 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", ou à défaut la mention " salarié ", dans le mois suivant la décision à intervenir, et de le munir sans délai d'un récépissé l'autorisant à travailler, ou, à titre subsidiaire, de lui délivrer, dans le même délai, une autorisation provisoire de séjour avec droit au travail jusqu'à réinstruction de sa demande ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le refus de titre de séjour est insuffisamment motivé ;

- le refus de titre de séjour n'a pas été précédé d'un examen particulier de sa situation personnelle ;

- le refus de titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et est à tout le moins entaché d'erreur manifeste d'appréciation, au regard de son insertion et de la durée de son séjour en France ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- la mesure d'éloignement méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- les décisions fixant le délai de départ volontaire et le pays de destination sont illégales en raison de l'illégalité du refus de séjour et de la mesure d'éloignement.

Par un mémoire enregistré le 15 mars 2015, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de M. A...une somme de 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa décision est suffisamment motivée ;

- M. A...est célibataire, ses parents, son frère et sa soeur résident en Chine, où il peut retourner ; il se maintient volontairement en France en situation irrégulière et ne justifie pas de son intégration, ou de considérations humanitaires ou motifs exceptionnels ;

- les conclusions du requérant présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont irrecevables car MeC..., pour le compte de qui ces conclusions doivent être réputées présentées, n'allègue pas avoir exposé d'autres frais que ceux pris en charge par l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle totale qui lui a été allouée et il n'a pas demandé que lui soit versée la somme correspondant aux frais qui auraient été réclamés à son client s'il n'avait pas bénéficié de l'aide juridictionnelle ; l'Etat n'est pas partie perdante, il a droit à une somme sur le même fondement.

Par décision du 17 novembre 2015, le bureau d'aide juridictionnelle a constaté la caducité de la demande de M.A....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Samson-Dye,

- et les observations de MeB..., représentant M.A....

1. Considérant que M.A..., ressortissant chinois, relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône du 5 décembre 2014 refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de 30 jours et désignant un pays de destination ;

Sur la légalité de l'arrêté litigieux :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) " ;

3. Considérant qu'en présence d'une demande de régularisation présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " ; que, dans cette hypothèse, il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour ; qu'il appartient en conséquence au préfet de motiver sa décision de refus de titre de séjour, comme toute décision défavorable entrant dans le champ d'application de la loi du 11 juillet 1979, en énonçant les faits de l'espèce qu'il retient ou écarte, notamment, au regard de la qualification, de l'expérience et des diplômes du demandeur ainsi que des caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même qu'au regard de tout élément de sa situation personnelle dont le demandeur aurait fait état ;

4. Considérant que le refus de titre de séjour litigieux, en tant qu'il statue sur une demande de carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", se borne à évoquer un maintien en France en situation irrégulière, un défaut de justification d'intégration et de moyens d'existence et conclut que la situation de l'intéressé ne répond pas à des considérations humanitaires ou à des motifs exceptionnels justifiant une admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " au titre de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

5. Considérant que, dans ces conditions, et alors que M.A..., qui réside en France depuis 1999, produisait une promesse d'embauche en qualité de cuisinier, ainsi que divers documents établissant l'exercice d'une activité professionnelle sur le territoire national au cours de plusieurs années pour cette même activité, le refus de titre de séjour litigieux est insuffisamment motivé ;

6. Considérant que, par suite, M. A...est fondé à soutenir que la décision du préfet du Rhône en date du 5 décembre 2014 doit être annulée en tant qu'elle a refusé de prononcer sa régularisation au titre d'une activité salariée ; que doivent être annulées, par voie de conséquence, les décisions du même jour lui faisant obligation de quitter le territoire français, lui accordant un délai de départ volontaire de trente jours et désignant le pays de destination ;

7. Considérant, en revanche, qu'il ressort des pièces du dossier qu'il y a lieu, par adoption des motifs des premiers juges, d'écarter les moyens, soulevés en première instance et repris en appel, tirés de ce que le refus de titre de séjour, opposé au regard de la vie privée et familiale de M. A..., est insuffisamment motivé, n'a pas été précédé d'un examen personnel de sa situation, méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; que, par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté ses conclusions tendant à l'annulation du refus de titre de séjour, en tant qu'il refuse de lui délivrer un titre portant la mention " vie privée et familiale " ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Considérant que, si le présent arrêt n'implique pas, eu égard au motif sur lequel il se fonde, que le préfet du Rhône délivre une carte de séjour temporaire à M.A..., il y a lieu, en revanche, de prescrire au préfet de se prononcer à nouveau sur sa demande de régularisation en qualité de salarié dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt après lui avoir délivré, dans un délai de quinze jours, une autorisation provisoire de séjour ;

Sur les conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant, d'une part, que l'Etat, partie perdante, n'est pas fondé à demander le remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens ;

10. Considérant, d'autre part, qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de M. A...présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sans qu'il soit besoin de statuer sur leur recevabilité ;

DECIDE :

Article 1er : La décision du 5 décembre 2014 du préfet du Rhône est annulée en tant qu'elle rejette la demande de carte de séjour portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " de M. D... A....

Article 2 : Les décisions du 5 décembre 2014 du préfet du Rhône obligeant M. D... A...à quitter le territoire français, lui accordant un délai de départ volontaire de trente jours et fixant le pays de destination sont annulées.

Article 3 : Le jugement n° 1503604 en date du 16 septembre 2015 du tribunal administratif de Lyon est annulé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Il est enjoint au préfet du Rhône de délivrer une autorisation provisoire de séjour à M. D... A...dans le délai de quinze jours et de se prononcer sur sa demande de régularisation en qualité de salarié dans le délai de deux mois, suivant la notification du présent arrêt.

Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A..., au ministre de l'intérieur et au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 9 juin 2016 à laquelle siégeaient :

M. Mesmin d'Estienne, président,

Mme Gondouin, premier conseiller,

Mme Samson-Dye, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 23 juin 2016.

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N° 15LY03984


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY03984
Date de la décision : 23/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Validité des actes administratifs - Forme et procédure - Questions générales - Motivation.

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour - Motivation.


Composition du Tribunal
Président : M. MESMIN d'ESTIENNE
Rapporteur ?: Mme Aline SAMSON DYE
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : SCP COUDERC - ZOUINE

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-06-23;15ly03984 ?
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