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23/06/2016 | FRANCE | N°14LY02399

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 23 juin 2016, 14LY02399


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Ennemond Preynat a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté, en date du 16 octobre 2012, par lequel la préfète de la Loire a ordonné la fermeture, dans le délai de trois mois, de l'installation de traitement de surface exploitée rue de l'Ondaine, au Chambon-Feugerolles, et lui a fait obligation, d'une part, de remettre le site en état, d'autre part, de transmettre dans les six mois un mémoire détaillant les mesures prises à cet effet, ensemble la décision implicite de r

ejet de son recours gracieux formé contre cet arrêté et la décision explicite...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Ennemond Preynat a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté, en date du 16 octobre 2012, par lequel la préfète de la Loire a ordonné la fermeture, dans le délai de trois mois, de l'installation de traitement de surface exploitée rue de l'Ondaine, au Chambon-Feugerolles, et lui a fait obligation, d'une part, de remettre le site en état, d'autre part, de transmettre dans les six mois un mémoire détaillant les mesures prises à cet effet, ensemble la décision implicite de rejet de son recours gracieux formé contre cet arrêté et la décision explicite du 4 mars 2013 ayant le même objet.

Par une ordonnance n° 1303510 du 11 avril 2014, le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une ordonnance n° 1405358 du 22 juillet 2014, le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Lyon a, en application de l'article R. 351-3 alinéa 1 du code de justice administrative, transmis à la Cour la requête présentée pour la société Ennemond Preynat, enregistrée le 17 juillet 2014 au greffe du tribunal administratif de Lyon.

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 18 juillet 2014 au greffe du tribunal administratif de Lyon et les 8 octobre 2014 et 30 avril 2015 au greffe de la Cour, la société Ennemond Preynat, représentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Lyon du 11 avril 2014 ;

2°) de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Lyon ou, à titre subsidiaire, d'annuler l'arrêté de la préfète de la Loire du 16 octobre 2012 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'ordonnance attaquée est insuffisamment motivée en ce qu'elle ne mentionne pas la décision de la préfète de la Loire du 4 mars 2013 ;

- la lettre de la préfète de la Loire du 4 mars 2013 qui rejette le recours gracieux présenté à l'encontre de la décision contestée a prorogé le délai de recours contentieux à l'encontre de celle-ci alors que les dispositions de l'article R. 514-3-1 du code de l'environnement ne dérogent pas à la règle générale de la prorogation des délais issue des dispositions des articles R. 421-2 et 3 du code de justice administrative ; cette prorogation du délai de recours contentieux est d'autant plus applicable que la décision du 4 mars 2013 ne mentionne aucune voie et délais de recours ; l'ordonnance attaquée viole le droit constitutionnellement garanti du justiciable à un recours effectif ; elle méconnaît également les stipulations de l'article 13 de la convention européenne des droits de l'homme, ainsi que les dispositions de l'article 47 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- l'administration a méconnu les dispositions de l'article 19 de la loi du 12 avril 2000 en n'accusant pas réception de son recours gracieux ; ainsi, aucun délai de recours ne lui était opposable ;

- l'arrêté contesté ne mentionne pas d'éventuelle exception de procédure à la règle issue de l'article R. 421-2 du code de justice administrative ; ainsi, cette exception ne peut lui être opposée ;

- la Cour devra, à titre principal, renvoyer l'affaire devant les premiers juges ;

- subsidiairement, l'inspection des installations classées n'était pas compétente pour la mettre en demeure de se prononcer sur le devenir de ses installations, ainsi qu'elle l'a fait verbalement lors de sa visite du 28 octobre 2010 ; or, cette mise en demeure a fondé les décisions ultérieures qui ont abouti à l'arrêté contesté ;

- l'arrêté contesté ne pouvait lui imposer la suppression pure et simple des installations ; la circulaire du ministre de l'écologie du 19 juillet 2013 indique que la fermeture n'entraîne pas la disparition des éléments matériels de l'installation ;

- les risques invoqués ne reposent sur aucune base sérieuse, alors qu'il n'y a plus d'installation de traitements chimiques des matériaux, qu'il n'est pas établi de risque sur les eaux souterraines et que le vieillissement des installations est inexistant ;

- les intérêts mentionnés à l'article L. 511-1 du code de l'environnement ne sont pas méconnus ;

- aucune régularisation ne peut lui être demandée, dès lors que l'installation ne fonctionne plus ;

- l'administration n'est pas en droit de lui demander de se justifier sur son avenir et sur la gestion interne de l'entreprise ; sa démarche est arbitraire et fait une interprétation abusive de la notion de déchets ;

- les dispositions de l'article R. 512-39-1 du code de l'environnement ont été détournées ;

- la décision contestée constitue une véritable voie de fait.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 avril 2015, la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que :

- la requête d'appel est tardive ;

- elle n'a pas été régularisée en temps utile au regard de l'obligation de ministère d'avocat ;

- il n'est pas établi que la contribution à l'aide juridique aurait été acquittée ;

- la société disposait, en qualité d'exploitant d'une installation classée, d'un délai de deux mois pour contester la légalité de la décision en litige ; la circonstance que l'autorité administrative a répondu, le 4 mars 2013, au recours gracieux présenté par la société, est sans incidence sur le délai de deux mois qui lui était imparti pour exercer son recours contentieux ;

- subsidiairement, sur le fond, il a lieu de se reporter aux écritures de première instance.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dèche, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Clément, rapporteur public.

1. Considérant que la société Ennemond Preynat relève appel de l'ordonnance du 11 avril 2014 par laquelle le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Lyon a, par application du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, rejeté, comme tardive et donc manifestement irrecevable, sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 16 octobre 2012 par lequel la préfète de la Loire a ordonné la fermeture, dans le délai de trois mois, de l'installation de traitement de surface qu'elle exploite, rue de l'Ondaine, au Chambon-Feugerolles et lui a fait obligation, d'une part, de remettre le site en état, d'autre part, de transmettre dans les six mois un mémoire détaillant les mesures prises à cet effet, ainsi que de la décision implicite de rejet de son recours gracieux contre cet arrêté et de la décision explicite du 4 mars 2013 confirmant ce rejet ;

2. Considérant qu'en mentionnant les dispositions pertinentes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, ainsi que celles des articles L. 514-2, L. 514-6 et R. 514-3-1 du code de l'environnement, et en rappelant que l'exercice d'un recours administratif ne peut avoir pour effet d'interrompre le délai de recours contentieux à l'encontre des décisions relatives aux installations classées, le premier juge, qui a également indiqué que le recours gracieux formé par la société Ennemond Preynat le 3 janvier 2013 à l'encontre de l'arrêté préfectoral du 16 octobre 2012 n'avait pas eu pour effet d'interrompre le délai de recours contentieux, a suffisamment motivé son ordonnance ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 514-6 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable aux faits de l'espèce : " I.-Les décisions prises en application des articles L. 512-1, (...) L. 514-2, (...) L. 516-1 sont soumises à un contentieux de pleine juridiction. / Un décret en Conseil d'Etat précise les délais dans lesquels ces décisions peuvent être déférées à la juridiction administrative " ; qu'aux termes de l'article R. 514-3-1 du même code : " Sans préjudice de l'application des articles L. 515-27 et L. 553-4, les décisions mentionnées au I de l'article L. 514-6 et aux articles L. 211-6, L. 214-10 et L. 216-2 peuvent être déférées à la juridiction administrative : (...) par les demandeurs ou exploitants, dans un délai de deux mois à compter de la date à laquelle la décision leur a été notifiée. " ;

4. Considérant qu'eu égard aux particularités des procédures applicables aux installations classées, d'une part, et à la nature des pouvoirs de pleine juridiction conférés au juge en la matière, d'autre part, l'exercice d'un recours administratif, qu'il soit gracieux ou hiérarchique, pour contester les décisions relatives aux installations, ouvrages, travaux et activités entrant dans le champ d'application des dispositions du code de l'environnement citées au point précédent, ne peut avoir pour effet d'interrompre le délai de recours contentieux ;

5. Considérant que la société Ennemond Preynat soutient que c'est à tort que le premier juge a déclaré sa requête tardive dès lors qu'il a formé un recours gracieux qui a prorogé le délai de recours contentieux ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que l'arrêté en litige a été pris sur le fondement des dispositions de l'article L. 514-2 du code de l'environnement, alors en vigueur, au regard de la nécessité pour la société appelante de régulariser la situation de son exploitation ; que c'est donc à bon droit que le premier juge a estimé que cet arrêté était soumis à un contentieux de pleine juridiction et qu'il devait être déféré à la juridiction administrative dans un délai de deux mois ne pouvant être prorogé par l'exercice du recours gracieux de l'exploitant ; qu'il est par ailleurs constant que l'arrêté en cause, qui a été notifié à la société requérante le 6 novembre 2012, comportait la mention des voies et délais de recours, conformément aux dispositions de l'article R. 421-5 du code de justice administrative ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose à l'administration d'apporter d'autres précisions concernant les voies et délais de recours contentieux ; que la demande de la société Ennemond Preynat, enregistrée au greffe du tribunal administratif le 17 mai 2013, a ainsi été présentée après l'expiration du délai de recours contentieux de deux mois ayant commencé à courir à compter du 6 novembre 2012, date de notification de l'arrêté contesté du 16 octobre 2012 ; que la circonstance que l'administration n'a pas accusé réception du recours gracieux de la société requérante selon les modalités prévues par l'article 19 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 est, à cet égard, sans incidence, ce recours gracieux n'ayant pas eu pour effet de proroger le délai recours de contentieux ;

6. Considérant que les modalités particulières d'exercice d'un recours contentieux en matière d'installations classées résultent des dispositions législatives et réglementaires précitées du code de l'environnement ; que, par suite, la requérante ne peut, en tout état de cause, invoquer l'incompétence du juge administratif pour créer des exceptions de procédure, au regard de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et des articles 34 et 37 de la Constitution ; que ces modalités de recours contentieux, notamment celles relatives au délai de recours, qui se bornent à en organiser l'exercice, ne sauraient, en tout état de cause, être regardées comme portant atteinte au droit à un recours effectif garanti par la Constitution, l'article 13 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ni, par suite, comme constituant à cet égard une voie de fait ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non recevoir opposées à la requête d'appel, que la société Ennemond Preynat n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande comme manifestement irrecevable ;

Sur les frais non compris dans les dépens :

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que la société Ennemond Preynat demande sur leur fondement au titre de ses frais non compris dans les dépens soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Ennemond Preynat est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Ennemond Preynat et au ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Loire.

Délibéré après l'audience du 31 mai 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Boucher, président de chambre ;

- M. Drouet, président-assesseur ;

- Mme Dèche, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 23 juin 2016.

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