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31/05/2016 | FRANCE | N°15LY03313

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 31 mai 2016, 15LY03313


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du préfet du Rhône du 20 janvier 2015, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignant le pays à destination duquel il serait reconduit d'office.

Par un jugement n° 1502693 du 15 juillet 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 14 octo

bre 2015, M.C..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du trib...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du préfet du Rhône du 20 janvier 2015, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et désignant le pays à destination duquel il serait reconduit d'office.

Par un jugement n° 1502693 du 15 juillet 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 14 octobre 2015, M.C..., représenté par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 15 juillet 2015 ;

2°) d'annuler les décisions susmentionnées pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " dans le délai de trente jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision de refus de délivrance de titre de séjour est insuffisamment motivée en fait dans sa réponse à la demande d'admission exceptionnelle au séjour qu'il a formulée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'un vice de procédure au regard des dispositions du 2e alinéa de l'article L. 313-14 du même code ;

- elle viole les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du même code ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle a été prise en violation des stipulations du point 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour qui la fonde ;

- elle méconnaît les dispositions du 4° de l'article L. 511-4 du code précité ;

- la décision fixant le pays de renvoi sera annulée en conséquence de l'annulation des décisions susmentionnées.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 décembre 2015, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les pièces produites par M. C..., dont l'authenticité ne peut être vérifiée et dont il n'est pas établi qu'elles se rapportent à l'intéressé, ne permettent en tout état de cause pas d'établir de manière probante une durée de résidence habituelle en France de plus de dix ans ;

- pour le surplus, il s'en remet à ses écritures de première instance.

M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 septembre 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Mesmin d'Estienne, président,

- et les observations de MeA..., représentant M.C....

1. Considérant que M. B... C..., né le 2 septembre 1976 à Uroševac (Yougoslavie), de nationalité kosovare, est entré en France le 20 février 2002, selon ses déclarations ; que sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 5 août 2002, confirmée par la Commission de recours des réfugiés le 18 février 2003 ; qu'il a fait l'objet d'un premier refus de séjour le 10 juin 2004 ; que, le 23 juillet 2004, il a sollicité le réexamen de sa demande d'asile ; que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté sa demande par décision du 30 août 2004, confirmée par la Commission de recours des réfugiés le 19 novembre 2004 ; qu'il a fait l'objet d'une invitation à quitter le territoire national le 1er février 2005 et d'un arrêté de reconduite à la frontière le 25 novembre 2008 ; que, le 28 juillet 2009, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'un refus lui a été opposé le 3 novembre 2009, dont la légalité a été confirmée par le tribunal administratif de Lyon le 7 février 2012 ; qu'il a à nouveau sollicité, le 25 juillet 2010, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du même code ; que, par arrêté du 21 décembre 2012, le préfet du Rhône a une nouvelle fois refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité et a assorti sa décision d'une obligation de quitter le territoire français et d'une interdiction de retour sur le territoire français durant un an ; que la légalité de ces décisions a été confirmée en dernier lieu par un arrêt de la cour administrative d'appel de Lyon du 30 janvier 2014 ; que le requérant a enfin sollicité, le 4 avril 2013, la délivrance d'un titre de séjour en se prévalant d'une promesse d'embauche en qualité de salarié ; que, par arrêté du 20 janvier 2015, le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que M. C... fait appel du jugement du 15 juillet 2015 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces dernières décisions ;

Sur la légalité des décisions attaquées :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans " ; qu'aux termes de l'article L. 312-1 du même code : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour (...) " et qu'aux termes de l'article L. 312-2 de ce code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 (...) " ;

3. Considérant que le préfet du Rhône soutient que les pièces produites par M. C... ne permettent pas d'établir de manière probante une durée de résidence habituelle en France de plus de dix ans ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que le requérant produit suffisamment de documents pour démontrer sa présence habituelle en France à compter de l'année 2003, soit au moins douze ans à la date de l'arrêté en litige ; que sa présence sur le territoire français au cours des années 2003 à 2007 est ainsi attestée tant par la preuve des recours qu'il a engagés devant l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Commission de recours des réfugiés que par les attestations de justifications de droits à l'assurance maladie notamment au titre des années 2004 et 2006 et par divers courriers reçus des organismes de sécurité sociale ou de preuves de rendez-vous médicaux pris durant ces périodes ; que sa présence sur le territoire français au cours des années 2008 à 2011 est pareillement attestée par la production de diverses factures établies à son nom ou par des ordonnances médicales, des quittances d'assurances ou encore des attestations de renouvellement de droits à l'aide médicale d'État ; qu'au titre des années 2011 à 2015, les documents médicaux qu'il produit sont en outre accompagnés à compter de l'année 2012 de récépissés d'opérations bancaires et pour les années 2013 et 2014 de bulletins de paye ainsi que des avis d'impôt sur le revenu et des appels de la taxe d'habitation ; que, dans ces conditions, M. C... justifiant qu'il résidait habituellement en France depuis plus de dix ans, le préfet ne pouvait statuer sur la demande qu'il a présentée sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 313-14 sans avoir préalablement consulté la commission du titre de séjour, comme l'imposent ces mêmes dispositions ; que le défaut de cette consultation, qui a privé l'intéressé d'une garantie et, en outre, est susceptible en l'espèce d'avoir eu une incidence sur le sens de la décision, entache d'illégalité le refus de titre de séjour opposé à M.C... ; qu'en conséquence, l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de renvoi, également contestées, sont elles-mêmes entachées d'illégalité ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, M. C...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet du Rhône du 20 janvier 2015 ; qu'il y a lieu en conséquence d'annuler ce jugement, ainsi que cet arrêté ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

5. Considérant qu'au vu de son motif, l'annulation de l'arrêté contesté implique nécessairement que le préfet du Rhône prenne une nouvelle décision sur la demande de M. C... ; que, par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet de statuer à nouveau sur cette demande, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans un délai de 15 jours à compter de cette même date ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par M. C...sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1502693 du tribunal administratif de Lyon du 15 juillet 2015 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 20 janvier 2015 par lequel le préfet du Rhône a refusé de délivrer un titre de séjour à M.C..., l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays de destination est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet du Rhône de prendre une nouvelle décision sur la demande de M.C..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, dans un délai de 15 jours à compter de cette même date.

Article 4 : Les conclusions présentées par M. C... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C..., au ministre de l'intérieur et au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 12 mai 2016 à laquelle siégeaient :

M. Mesmin d'Estienne, président,

Mme Gondouin, premier conseiller,

Mme Samson-Dye, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 31 mai 2016.

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N° 15LY03313


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY03313
Date de la décision : 31/05/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. MESMIN d'ESTIENNE
Rapporteur ?: M. Olivier MESMIN d'ESTIENNE
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : BIDAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 06/09/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-05-31;15ly03313 ?
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