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31/05/2016 | FRANCE | N°14LY04099

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 31 mai 2016, 14LY04099


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au tribunal administratif de Grenoble la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2007 au 30 novembre 2009 et des pénalités y afférentes.

Par un jugement n° 1105004 du 27 octobre 2014, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 24 décembre 2014, M.D..., représenté par la société d'avocats Juri

sophia Savoie, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au tribunal administratif de Grenoble la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2007 au 30 novembre 2009 et des pénalités y afférentes.

Par un jugement n° 1105004 du 27 octobre 2014, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 24 décembre 2014, M.D..., représenté par la société d'avocats Jurisophia Savoie, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 27 octobre 2014 ;

2°) de le décharger de ces impositions et des pénalités y afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M.D... soutient que :

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

- en méconnaissance de la charte du contribuable, il n'a pas bénéficié d'un véritable débat oral et contradictoire en raison de la présence du directeur du pôle de recouvrement spécialisé lors de la réunion de synthèse ayant clos la procédure de vérification, ce qui a constitué une pression ;

- la présence de ce fonctionnaire à cette réunion méconnait les règles de compétence relatives aux agents compétents pour fixer les bases d'imposition, liquider les impôts et proposer les rectifications, comme cela est prévu par l'article 1er, I du décret n° 96-804 du 12 septembre 1996 ;

Sur les pénalités :

- la majoration pour manquement délibéré n'est pas suffisamment motivée, ni dans la proposition de rectification, ni dans la réponse aux observations du contribuable, en droit et en fait en violation de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 ainsi que de la doctrine administrative 13 L-1-80 du 6 février 1980 et des paragraphes 1 et 2 de la doctrine administrative 13 L-1611 du 1er juillet 2002 ;

- l'administration ne justifie pas de l'application de cette majoration.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 mars 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Le ministre des finances et des comptes publics soutient que les moyens soulevés par M. D...ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 26 novembre 2015 la clôture d'instruction a été fixée au 14 janvier 2016, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le décret n°96-804 du 12 septembre 1996 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Duguit-Larcher, premier conseiller,

- les conclusions de M. Besse, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant M.D....

1. Considérant que M. D...exerce à titre individuel une activité d'expert comptable ; que cette activité a fait l'objet d'une vérification de comptabilité ayant porté sur la taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2007 au 30 novembre 2009, ainsi que sur les bénéfices non commerciaux des années 2007 et 2008 ; qu'à l'issue de cette vérification des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, notifiés selon la procédure de redressement contradictoire, lui ont été réclamés au titre de cette période ; que les impositions litigieuses, assorties de la majoration pour manquement délibéré prévue à l'article 1729 du code général des impôts, ont été mises en recouvrement le 23 mai 2011 ; que M. D...relève appel du jugement du 27 octobre 2014 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales : " Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables " ; que, dans le cas où la vérification de la comptabilité d'une entreprise a été effectuée, comme il est de règle, dans ses propres locaux, il appartient au contribuable qui allègue que les opérations de vérification ont été conduites sans qu'il ait eu la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur, de justifier que ce dernier se serait refusé à un tel débat ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'au cours de la procédure de vérification, qui s'est déroulée au lieu de l'établissement professionnel de M.D..., celui-ci a rencontré le vérificateur à quatre reprises, les 27 janvier, 8 février, 10 juin et 11 juin 2010 ; que la circonstance qu'au cours de la réunion de synthèse, qui s'est déroulée le 30 juin 2010 dans les locaux de l'administration, le chef du service comptable du pôle de recouvrement d'Annecy soit ponctuellement intervenu, sans que M. D...n'en ait été préalablement informé, pour évoquer avec lui les garanties qu'il pourrait apporter au stade du recouvrement n'est pas, par elle-même, de nature à démontrer que l'intéressé aurait été privé de tout débat oral et contradictoire avec le vérificateur au cours de la vérification de comptabilité ;

4. Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales : " Avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L. 12 et L. 13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration. " ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose à l'administration de respecter les indications contenues dans la charte du contribuable, publiée le 17 octobre 2005 sur son site internet par le ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique, à la différence de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié dont les dispositions précitées prévoient qu'elle est opposable à l'administration ; qu'à supposer qu'à l'appui de son moyen tiré de ce qu'il aurait été privé d'un débat oral et contradictoire, M. D... ait entendu se prévaloir de la méconnaissance de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, dont il n'invoque pas une disposition en particulier, ce moyen doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 3 ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 45 du livre des procédures fiscales : " Les agents de l'administration des impôts peuvent assurer le contrôle et l'assiette de l'ensemble des impôts et taxes dus par le contribuable qu'ils vérifient " ; qu'aux termes de l'article 350 terdecies de l'annexe III au code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige, issue du décret n° 2004-283 du 25 mars 2004 ayant modifié le décret n° 96-804 du 12 septembre 1996 : " I. Sous réserve des dispositions des articles 409 et 410 de l'annexe II au code général des impôts, seuls les fonctionnaires de la direction générale des impôts appartenant à des corps des catégories A et B peuvent fixer les bases d'imposition et liquider les impôts, taxes et redevances ainsi que proposer les rectifications. / Les fonctionnaires mentionnés au premier alinéa peuvent se faire assister pour les opérations de contrôle par des fonctionnaires stagiaires et par tout autre fonctionnaire des impôts affecté ou non dans le même service déconcentré ou service à compétence nationale. " ;

6. Considérant que la vérification de comptabilité à laquelle l'activité de M. D... a été soumise a été diligentée par MmeA..., inspectrice de la première brigade départementale de vérification en charge du contrôle, qui a adressé l'avis de vérification, a participé aux différentes réunions sur place avec le requérant, s'est chargée des demandes de renseignement, a exercé le droit de communication auprès des clients et a signé la proposition de rectification ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que le chef du pôle de recouvrement spécialisé, qui s'est contenté d'intervenir à l'issue de la réunion de synthèse pour évoquer avec le contribuable les garanties qu'il pourrait présenter dans le cadre d'un futur recouvrement, serait intervenu dans la vérification de comptabilité elle-même ; que, par suite, dans les circonstances de l'espèce, la seule présence de ce fonctionnaire à cette réunion n'a pas méconnu les règles de compétence prévues par l'article 350 terdecies de l'annexe III au code général des impôts ;

Sur les pénalités pour manquement délibéré :

7. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la date à laquelle les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée devaient être faites : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'État entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré " ; qu'aux termes de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales : " Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable (...) " ; que ces dispositions imposent à l'administration d'énoncer les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision d'infliger une sanction fiscale ;

8. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration fiscale a indiqué dans la proposition de rectification du 23 juillet 2010 qu'elle entendait appliquer une majoration de 40% pour manquement délibéré, en application des dispositions de l'article 1729 du code général des impôts, au motif que M.D..., qui exerçait la profession d'expert-comptable, ne pouvait ignorer les règles comptables et fiscales en matière de taxe sur la valeur ajoutée et que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée litigieux avaient présenté un caractère répétitif et sur des montants importants ; que la décision d'appliquer la pénalité litigieuse comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'elle est, par suite, suffisamment motivée au regard des exigences posées par l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales ; que l'administration n'était pas tenu, dans la réponse aux observations du contribuable, pour laquelle le contribuable n'allègue pas que l'administration n'aurait pas complètement répondu à ses observations, de reprendre cette motivation ;

9. Considérant qu'en se prévalant des faits ci-dessus rappelés, l'administration apporte la preuve qui lui incombe du caractère délibéré du manquement de M.D... ;

10. Considérant qu'avant sa modification par la loi du 30 décembre 2008 portant loi de finances rectificative pour 2008, le second alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales était ainsi rédigé : " Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente " ; que l'article 47 de cette loi l'a complété par la phrase suivante : " Sont également opposables à l'administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l'impôt et aux pénalités fiscales " ; que si cette dernière disposition, applicable aux instances en cours pour ce qui concerne les pénalités fiscales, institue une garantie contre les changements de doctrine de l'administration permettant, en particulier, aux contribuables auteurs d'infractions fiscales de se prévaloir des énonciations contenues dans les notes ou instructions publiées, c'est à la condition, notamment, que ces notes ou instructions aient été susceptibles d'influencer le comportement des intéressés au regard de leurs obligations fiscales ; que tel n'est pas le cas de notes ou instructions administratives relatives à la procédure d'établissement d'une amende fiscale ;

11. Considérant qu'à supposer qu'en citant, au soutien de son moyen relatif au caractère insuffisamment motivé des pénalités qui lui ont été infligées, l'instruction administrative 13 L-1-80 du 6 février 1980 et les paragraphes 1 et 2 de la doctrine administrative 13 L-1611 du 1er juillet 2002, M. D...ait entendu s'en prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, les prévisions qu'il invoque n'ont pas pu avoir d'influence sur son comportement au regard de ses obligations fiscales et il ne peut, par suite, utilement les invoquer ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que, par suite, les conclusions qu'il présente sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. C...D...et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 10 mai 2016 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Mear, président-assesseur,

Mme Duguit-Larcher, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 31 mai 2016.

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N° 14LY04099


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY04099
Date de la décision : 31/05/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Contrôle fiscal - Vérification de comptabilité - Garanties accordées au contribuable.

Contributions et taxes - Règles de procédure contentieuse spéciales - Réclamations au directeur.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : JURISOPHIA SAVOIE - BUREAU D'AIX LES BAINS

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-05-31;14ly04099 ?
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