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17/05/2016 | FRANCE | N°15LY01190

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 17 mai 2016, 15LY01190


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...A...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 8 janvier 2015 par lequel le préfet de la Drôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé.

Par un jugement n° 1500292 du 31 mars 2015, le tribunal administratif de Grenoble a prononcé l'annulation de cet arrêté du préfet de la Drôme du 8 janvier 2015, a enjoint au pré

fet de délivrer à M. A...un récépissé de demande de titre de séjour l'autorisant à trava...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...A...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 8 janvier 2015 par lequel le préfet de la Drôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé.

Par un jugement n° 1500292 du 31 mars 2015, le tribunal administratif de Grenoble a prononcé l'annulation de cet arrêté du préfet de la Drôme du 8 janvier 2015, a enjoint au préfet de délivrer à M. A...un récépissé de demande de titre de séjour l'autorisant à travailler et de prendre une nouvelle décision et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 7 avril 2015, le préfet de la Drôme demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 31 mars 2015 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant ce Tribunal.

Il soutient que :

- M. A...étant ressortissant tunisien et relevant des stipulations de l'article 10 de l'accord franco-tunisien, c'est à tort que le tribunal a considéré qu'il remplissait les conditions prévues par le 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; si la Cour ne retient pas la régularité du séjour de l'intéressé et estime que sa situation relève des dispositions du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, elle pourrait opérer une substitution de base légale ;

- M. A...représente une menace grave pour l'ordre public et ne remplit donc pas les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour, tant sur le fondement des dispositions du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que des stipulations de l'article 10 de l'accord franco-tunisien ; ainsi, la commission du titre de séjour ne devait pas être consultée ;

- il s'en rapporte à ses écritures de première instance en ce qui concerne les autres moyens soulevés par l'intéressé devant le Tribunal.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 juillet 2015, M. D...A..., représenté par MeC..., conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- il n'est pas démontré que M. E...avait reçu délégation régulière et publiée pour former appel, ni que les conditions lui permettant de signer cet appel étaient remplies à la date de son enregistrement, ni que le préfet était empêché ;

- le préfet n'avait pas intérêt à agir dès lors qu'il avait déjà opéré le réexamen de sa situation ;

- il n'est pas démontré que M. B...avait reçu délégation régulière et publiée pour signer les décisions en litige, ni que les conditions lui permettant de signer étaient remplies à la date de ces décisions ;

- le préfet ne pouvait lui refuser la délivrance du titre de séjour sans saisir préalablement la commission du titre de séjour, alors qu'il est en mesure de bénéficier de plein droit d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions des articles 7 quater de l'accord franco-tunisien et L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il remplit les conditions posées par les dispositions des articles 7 quater de l'accord franco-tunisien et L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et ne représente plus de menace pour l'ordre public ;

- il réside en France avec son épouse qu'il a rencontrée en 2004 ; il justifie d'attaches fortes en France ainsi que d'une parfaite intégration sur le plan social et professionnel, bénéficiant d'un contrat à durée indéterminée en qualité de pâtissier ; le refus de titre de séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; ce refus est également entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de renvoi sont illégales du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- ces décisions méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; ces décisions sont également entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire est insuffisamment motivée ;

- cette décision est illégale du fait de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;

- il ne saurait constituer une menace pour l'ordre public et en se fondant sur les dispositions de l'article L. 511-1 II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet a commis une erreur de droit et a entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation ;

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Dèche, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que le préfet de la Drôme relève appel du jugement du 31 mars 2015 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé ses décisions du 8 janvier 2015 par lesquelles il a refusé de délivrer un titre de séjour à M.A..., ressortissant tunisien, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi en cas d'éloignement forcé ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 312-2 de ce code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le préfet (...) saisit pour avis la commission lorsqu'il envisage de refuser de délivrer ou de renouveler l'un des titres mentionnés aux articles L. 313-11, L. 314-11 et L. 314-12 à l'étranger qui remplit effectivement les conditions qui président à leur délivrance (...) " ; que si l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 susvisé régit d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants tunisiens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, ainsi que les règles concernant la nature et la durée de validité des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, il n'a toutefois pas entendu écarter, sauf dispositions contraires expresses, l'application des dispositions de procédure qui s'appliquent à tous les étrangers en ce qui concerne la délivrance, le renouvellement ou le refus de titres de séjour, dès lors que ces ressortissants tunisiens se trouvent dans une situation entrant à la fois dans les prévisions de l'accord et dans celles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, au nombre desquelles figurent notamment celles des articles L. 312-2 et R. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il en résulte que le préfet doit consulter la commission du titre de séjour lorsqu'il envisage de refuser d'accorder un titre de séjour à ressortissant tunisien marié à une personne de nationalité française qui remplit effectivement les conditions prévues au a) de l'article 10 de l'accord franco-tunisien, dont la portée est équivalente sur ce point à celles des dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

3. Considérant qu'aux termes du I de l'article 10 de l'accord franco-tunisien susvisé : " Un titre de séjour d'une durée de dix ans, ouvrant droit à l'exercice d'une activité professionnelle, est délivré de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour sur le territoire français : / a) au conjoint tunisien d'un ressortissant français, marié depuis au moins un an, à condition que la communauté de vie entre époux n'ait pas cessé, que le conjoint ait conservé sa nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; (...) " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et n'est au demeurant pas contesté par le préfet de la Drôme, que M. A..., marié avec une ressortissante française depuis le 26 juin 2013, remplissait, à la date du refus de séjour en litige, les conditions prévues au a) de l'article 10 précité de l'accord franco-tunisien pour l'obtention d'un titre de séjour d'une durée de dix ans en qualité de conjoint d'une ressortissante française ; que, par suite, le préfet était tenu de saisir la commission du titre de séjour avant d'opposer ce refus, alors même qu'il estimait que la présence de l'intéressé sur le territoire constitue une menace pour l'ordre public ; que faute d'avoir été précédé de cette consultation, le refus de titre de séjour opposé à M. A... par arrêté du 8 janvier 2015 est intervenu au terme d'une procédure irrégulière et est, ainsi, entaché d'illégalité ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non recevoir opposées en défense, que le préfet de la Drôme n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé ses décisions du 8 janvier 2015 par lesquelles il a refusé de délivrer un titre de séjour à M. A..., lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ;

6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 1 000 euros au A...au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête du préfet de la Drôme est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à M. A...une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Drôme.

Délibéré après l'audience du 6 avril 2016 à laquelle siégeaient :

M. Boucher, président de chambre ;

M. Drouet, président-assesseur ;

Mme Dèche, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 mai 2016.

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N° 15LY01190


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY01190
Date de la décision : 17/05/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: M. CLEMENT
Avocat(s) : SELARL DESCHAMPS et VILLEMAGNE

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-05-17;15ly01190 ?
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