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17/05/2016 | FRANCE | N°15LY00534

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 17 mai 2016, 15LY00534


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...J...et le GAEC de la Beaume ont demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand de condamner la commune de Bessay-sur-Allier à leur verser une indemnité de 206 995,58 euros en réparation d'une perte patrimoniale et d'une perte d'exploitation résultant de l'absence de remise d'une noyeraie en état d'exploitation attribuée par la commission départementale d'aménagement foncier de l'Allier dans le cade des travaux connexes à une opération d'aménagement liée à la réalisation d'une déviation

de la R.N. 7, en remplacement d'une noyeraie existante.

Par jugement n° 1201...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...J...et le GAEC de la Beaume ont demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand de condamner la commune de Bessay-sur-Allier à leur verser une indemnité de 206 995,58 euros en réparation d'une perte patrimoniale et d'une perte d'exploitation résultant de l'absence de remise d'une noyeraie en état d'exploitation attribuée par la commission départementale d'aménagement foncier de l'Allier dans le cade des travaux connexes à une opération d'aménagement liée à la réalisation d'une déviation de la R.N. 7, en remplacement d'une noyeraie existante.

Par jugement n° 1201634 du 16 décembre 2014 le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 16 février, 19 mai et 24 novembre 2015, M. J...et le GAEC de la Beaume, représentés par Me G..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 16 décembre 2014 ;

2°) de condamner la commune de Bessay-sur-Allier à leur verser une somme de 206 995 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 10 juillet 2012, et capitalisation des intérêts ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Bessay-sur-Allier une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- ils ont intérêt à agir contre le jugement contesté ;

- la commune de Bessay-sur-Allier s'est engagée à réaliser des travaux de plantation et d'entretien de la noyeraie jusqu'à son transfert ; en ne procédant pas au remplacement des végétaux morts après l'épisode de gel de 2009, elle a commis une faute de nature à engager sa responsabilité au titre des dommages de travaux publics ;

- le défaut de réalisation des travaux auxquels la commune s'était engagée, notamment à la suite de l'épisode de gel de 2009 est directement à l'origine du préjudice subi ;

- l'absence d'indemnisation à la suite de la dépossession de leur parcelle méconnait les dispositions de l'article 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, ainsi que les stipulations de l'article 1er du protocole additionnel n° 1 de la convention européenne des Droits de l'Homme ;

- le préjudice subi lié à la destruction de la plantation et à la perte de la récolte s'élève à 206 995,58 euros.

Par des mémoires, enregistrés les 30 avril et 5 octobre 2015, et le 2 avril 2016, dont le dernier n'a pas été communiqué, la commune de Bessay-sur-Allier, représentée par Me D... E... conclut :

1°) à titre principal, au rejet de la requête ;

2°) à titre subsidiaire, à ce que l'Etat, M. B...I...et l'entreprise "Amai natura la nature encore" la garantissent de toute condamnation prononcée à son encontre ;

3°) à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de M. J...et du GAEC de la Beaume au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- le préjudice dont se prévalent les requérants ne trouve pas son origine dans la décision de la commission départementale d'aménagement foncier du 6 juin 2005, mais dans la mauvaise exécution des travaux connexes visant à la reconstitution de sa noyeraie, et notamment dans l'absence d'entretien des plants par la société prestataire avec laquelle la commune de Bessay-sur-Allier avait passé un marché public ;

- M. J...a expressément demandé à la commission, en lieu et place d'une soulte, à ce que sa noyeraie soit reconstituée sur l'une de ses parcelles d'attribution ; dès lors que le financement des travaux connexes était mis à la charge du maître d'ouvrage du projet d'élargissement de la route nationale 7, et non pas de l'ensemble des propriétaires situés dans le périmètre du remembrement, la commission n'a pas commis d'illégalité ;

- le cahier des charges du maître d'oeuvre excluait le remplacement des noyers secs ou morts en raison du gel ; aucune mesure postérieure à l'épisode de gel de l'automne 2009 n'aurait permis de sauver la noyeraie ;

- M. J...bénéficie d'une convention temporaire d'occupation des parcelles sur lesquelles se situe l'ancienne noyeraie, dans les mêmes conditions qu'avant l'intervention de la décision du 6 juin 2005 : il ne saurait invoquer un quelconque préjudice d'exploitation à ce titre ; les conclusions tendant à l'indemnisation du préjudice tiré de la perte patrimoniale n'ont pas pour objet de l'indemniser de la perte de valeur de sa parcelle d'apport, mais uniquement d'assurer le financement de la reconstitution de sa noyeraie sur les parcelles attribuées ;

-si l'existence d'une obligation de résultat est retenue, elle ne peut peser que sur l'Etat, responsable des opérations d'aménagement ; la garantie de l'Etat doit être admise dans cette mesure ;

- M.I..., en sa qualité de maître d'oeuvre a commis une faute dans son devoir de conseil ; il doit la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre au titre de sa responsabilité contractuelle ;

- un défaut de conseil est également imputable à l'entreprise "Amai nature la nature encore" ; elle doit la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre, au titre de sa responsabilité contractuelle ;

- s'agissant du préjudice invoqué, la perte de marge brute n'est aucunement justifiée.

Par un mémoire, enregistré le 31 mars 2016, le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt conclut au rejet des conclusions d'appel en garantie présentées par la commune de Bessay-sur-Allier.

Il soutient que lorsque des travaux connexes ont été ordonnés par une commission d'aménagement foncier et que leur réalisation a été confiée à une commune, comme en l'espèce, la mauvaise exécution de ces travaux est de nature à engager la seule responsabilité de la commune ; la responsabilité de la mise en oeuvre des travaux de plantation de noyers incombait à la commune et non à l'Etat, dont la responsabilité ne peut être engagée.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dèche, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Clément, rapporteur public ;

- et les observations de MeC..., pour M. J...et le GAEC de la Beaume, ainsi que celles de Me D...E..., pour la commune de Bessay-sur-Allier.

Une note en délibéré, présentée pour M. J...et le GAEC de la Beaume, a été enregistrée le 8 avril 2016.

1. Considérant que M. J...et le GAEC de la Beaume relèvent appel du jugement du 16 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté leur demande tendant à la condamnation de la commune de Bessay-sur-Allier à leur verser une indemnité en réparation de préjudices résultant de ce qu'ils n'ont pas reçu la noyeraie en état d'exploitation qui devait leur être remise au titre des travaux connexes liés à une opération d'aménagement foncier ordonnée en vue d'un projet d'élargissement à deux fois deux voies de sections de la R.N. 7, concernant notamment le territoire de la commune de Bessay-sur-Allier ;

2. Considérant que, lors de sa séance du 6 juin 2005 la commission départementale d'aménagement foncier a décidé de reconstituer la noyeraie exploitée par les requérants sur la parcelle dont ils se trouvaient dépossédés, sur un nouveau terrain située sur le territoire de la commune de Bessay-sur-Allier ; que la maîtrise d'ouvrage de ces travaux a été assurée par la commune, avec le concours financier de l'Etat ; qu'ayant constaté un défaut d'entretien de la nouvelle plantation, les intéressés ont saisi le tribunal administratif de Clermont-Ferrand qui a ordonné une expertise, le 14 janvier 2011 ; que l'expert a remis son rapport, le 16 septembre 2011 ; que M. J...et le GAEC de la Beaume dont il est le co-gérant, ont alors demandé à la commune de Bessay-sur-Allier de les indemniser des préjudices qu'ils imputent au fait qu'ils n'ont pas reçu la noyeraie en état de production qui devait leur être remise ;

3. Considérant que la décision de la commission départementale d'aménagement foncier mentionnée au point 2, constitue, vis-à-vis des requérants, un engagement de l'Etat de réaliser des travaux qui ne pouvaient avoir le caractère de travaux connexes au sens des dispositions de l'article L. 123-8 du code rural et de la pêche maritime, alors même que leur réalisation a été confiée à la commune de Bessay-sur-Allier, maître d'ouvrage de ces travaux connexes ; que, dans ces conditions, l'engagement pris par la commission départementale d'aménagement foncier ne saurait engager que la seule responsabilité de l'Etat vis-à-vis des requérants ; que, par suite, ceux-ci ne sont pas fondés à rechercher la responsabilité de la commune Bessay-sur-Allier pour obtenir la réparation des préjudices qu'ils ont subis ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. J...et le GAEC de la Beaume ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté leur demande ;

Sur les frais non compris dans les dépens :

5. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que M. J...et le GAEC de la Beaume demandent sur leur fondement au titre de leurs frais non compris dans les dépens soit mise à la charge de la commune de Bessay-sur-Allier, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. J... et du GAEC de la Beaume, sur le fondement de ces mêmes dispositions, le versement à la commune de Bessay-sur-Allier d'une somme de 1 500 euros ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. J...et du GAEC de la Beaume est rejetée.

Article 2 : M. J...et le GAEC de la Beaume verseront à la commune de Bessay-sur-Allier une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...J..., au GAEC de la Beaume, à la commune de Bessay-sur-Allier, au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, à M. B...I...et à Me F...H..., liquidateur judicaire de la société "Amai natura la nature encore".

Délibéré après l'audience du 6 avril 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Boucher, président de chambre ;

- M. Drouet, président-assesseur ;

- Mme Dèche, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 mai 2016.

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N° 15LY00534


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY00534
Date de la décision : 17/05/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Agriculture et forêts - Exploitations agricoles - Calamités agricoles.

Responsabilité de la puissance publique - Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité - Fondement de la responsabilité - Responsabilité pour faute.


Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: M. CLEMENT
Avocat(s) : SEP LACHAUD MANDEVILLE COUTADEUR et ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-05-17;15ly00534 ?
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