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31/03/2016 | FRANCE | N°15LY03114

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 31 mars 2016, 15LY03114


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...A...et Mme C...B..., épouseA..., ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les arrêtés du 5 décembre 2014 par lesquels le préfet de la Drôme a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé leur pays de destination.

Par un jugement nos 1503216-1503217 du 9 septembre 2015, le tribunal administratif de Grenoble a joint les requêtes, a annulé les arrêtés du préfet de la Drôme du 5 décembre 2014, a enjoi

nt au préfet de la Drôme de délivrer à M. et Mme A...une carte de séjour temporaire dan...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...A...et Mme C...B..., épouseA..., ont demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les arrêtés du 5 décembre 2014 par lesquels le préfet de la Drôme a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé leur pays de destination.

Par un jugement nos 1503216-1503217 du 9 septembre 2015, le tribunal administratif de Grenoble a joint les requêtes, a annulé les arrêtés du préfet de la Drôme du 5 décembre 2014, a enjoint au préfet de la Drôme de délivrer à M. et Mme A...une carte de séjour temporaire dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement, a condamné l'Etat à verser à leur conseil la somme de 1 200 euros au titre des honoraires et frais non compris dans les dépens et a rejeté le surplus des conclusions.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 16 septembre 2015, le préfet de la Drôme demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble ;

2°) de rejeter la requête présentée par M. et Mme A...devant le tribunal administratif et tendant à l'annulation des arrêtés du 5 décembre 2014.

Il soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré, pour annuler les arrêtés du 5 décembre 2014, que le préfet de la Drôme s'était borné à faire état de l'existence en Albanie de deux centres hospitaliers prenant en charge les maladies psychiatriques dès lors qu'il a produit de nombreux éléments, notamment médicaux, permettant de justifier que Mme A...serait en mesure de bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;

- il persiste dans ses écritures et confirme l'ensemble des motifs développés en première instance pour rejeter les demandes.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 novembre 2015, Mme C...B...épouse A...et M. E...A..., représentés tous deux par MeD..., concluent au rejet de la requête, à ce que le jugement du tribunal administratif de Grenoble soit confirmé, sauf en son article 3 où il devra être alloué une somme de 2 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Drôme de leur délivrer une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travailler dans les dix jours à compter de la notification du jugement sous astreinte de 150 euros par jour et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat le versement à leur conseil d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve que ce dernier renonce au bénéfice de la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Ils soutiennent que :

- aucun motif d'appel ne permet d'annuler le jugement du tribunal administratif ;

- les nouveaux documents produits par le préfet de la Drôme, rédigés en langue étrangère, doivent être écartés en raison de leur non-conformité avec les dispositions de l'article R. 412-2 du code de justice administrative relatif à la production des pièces ;

- les nouveaux documents produits par le préfet de la Drôme ne justifient en rien que Mme A...pourrait bénéficier d'un traitement adapté à sa maladie en Albanie ;

- si la préfecture produit de nouveaux documents, elle ne justifie pas que l'avis du médecin de l'agence régionale de santé serait contestable s'agissant de l'impossibilité pour

Mme A...de bénéficier d'un traitement adapté à sa maladie en Albanie ;

- le médecin traitant de Mme A...certifie que même s'il existait des médicaments antidépresseurs en Albanie, ceux-ci ne suffiraient pas à soigner l'intimée puisque le succès de son traitement en France relève de l'association d'un traitement médicamenteux et psychothérapique et qu'un tel traitement serait impossible dans le contexte " ultra traumatisant des réminiscences vécues en Albanie ".

M. et Mme A...ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 octobre 2015.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur.

1. Considérant que M. E...A...et Mme C...B..., épouseA..., ressortissants albanais, déclarent être entrés en France en février 2013 pour fuir les menaces dont leur famille était victime ; que par décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 31 juillet 2013, que la Cour nationale du droit d'asile a confirmées du 11 juin 2014, leurs demandes d'asile ont été rejetées ; que par deux demandes formulées respectivement les 3 avril et 25 septembre 2014, M. et Mme A...ont sollicité leur admission au séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que par deux arrêtés en date du 5 décembre 2014, le préfet de la Drôme a rejeté leurs demandes de titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel ils seront renvoyés ; que le préfet de la Drôme demande l'annulation du jugement du 9 septembre 2015, par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé ses arrêtés du 5 décembre 2014 ;

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Considérant que le préfet de la Drôme soutient que c'est à tort que le tribunal administratif a retenu qu'en se bornant à faire état de l'existence, en Albanie, de deux centres hospitaliers prenant en charge les maladies psychiatriques, les pièces qu'il avait produites ne permettaient pas de regarder comme établie l'existence d'un traitement spécifique, notamment médicamenteux, que requiert l'état de santé de Mme A...;

3. Considérant qu'aux termes des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstances humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directe général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police (...) " ; que selon l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. (...) L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d' autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé (...) " ;

4. Considérant que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une partie à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle ; que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu des échanges contradictoires ;

5. Considérant que, par avis du 6 octobre 2014, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que l'état de santé de Mme A...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut de traitement pourrait avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'il n'existait pas en Albanie de traitement approprié à son état de santé et que les soins nécessités par son état de santé devaient être poursuivis pour une durée de 12 mois ; qu'il n'est pas contesté que Mme A..., originaire d'Albanie, souffre d'une névrose post-traumatique sévère nécessitant la prise de neuroleptiques et d'antidépresseurs ;

6. Considérant que, pour mettre en cause la présomption d'indisponibilité des soins résultant de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, le préfet de la Drôme produit des documents faisant état de l'existence dans ce pays de centres hospitaliers capables de prendre en charge les maladies psychiatriques ainsi que des documents indiquant que les services de santé publique sont gratuits et accessibles à tous, que l'Albanie dispose d'un système de sécurité sociale permettant le remboursement des soins et des médicaments et que les établissements de soins délivrent un nombre croissant de médicaments disponibles ; que contrairement à ce que soutient MmeA..., le préfet peut utilement se prévaloir au soutien de sa démonstration de la liste qu'il produit pour la première fois en appel, des médicaments disponibles en Albanie en 2014 dont il ressort qu'y existent des neuroleptiques et des antidépresseurs, alors même que ce document dont la production n'est nullement faite en méconnaissance des articles R. 412-1 et suivants du code de justice administrative et qui a été soumis au contradictoire, est rédigé en langue étrangère ; qu'il ressort ainsi des pièces du dossier que les pathologies psychiatriques et post-traumatiques sont susceptibles d'être soignées en Albanie ;

7. Considérant que pour retenir que l'existence d'un traitement médicamenteux n'est pas rapportée, il appartient à Mme A...de démontrer la nécessité que lui soit dispensé un traitement spécifique et que les traitements dont le préfet a établi l'existence dans son pays d'origine ne constitueraient pas pour autant des traitements appropriés à sa pathologie ou ne seraient pas adaptés à la particularité de sa situation médicale ; qu'en se bornant à faire valoir que l'existence de nombreux centres de santé ne permet pas de démontrer qu'une structure médicale pour le traitement de la pathologie dont elle souffre existe et qu'elle pourrait y avoir accès, Mme A...n'apporte ni la preuve que la névrose post-traumatique sévère nécessitant la prise de neuroleptiques et d'antidépresseurs dont elle entend seulement faire état au regard de la nécessité qu'elle invoque de protéger le secret entourant ses données médicales personnelles, ne pourrait être soignée en Albanie, ni qu'elle ne pourrait bénéficier dans ce pays d'un tel

traitement ; que si elle se prévaut devant la cour du contenu d'un certificat médical en date du 26 octobre 2015 qui indique que " ... même s'il existait des médicaments anti dépresseurs en Albanie, ceux-ci ne suffiraient pas à soigner l'intimée puisque le succès de son traitement relève de l'association d'un traitement médicamenteux et psychothérapique qui serait impossible dans le contexte ultra traumatisant de réminiscences vécues en Albanie ", cet avis n'est assorti d'aucune précision de nature à établir que la liste des médicaments destinés au traitement des pathologies psychiatriques et post-traumatiques produite par le préfet de la Drôme ne contient pas ceux qui pourraient lui être utilement prescrits y compris dans son pays d'origine ; que, par suite, c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que le préfet de la Drôme n'avait pas démontré l'existence en Albanie d'un traitement approprié à l'état de santé de Mme A...et qu'il a en conséquence jugé que celui-ci avait méconnu les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

8. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. et Mme A...devant le tribunal administratif ;

Sur la légalité des décisions :

En ce qui concerne le refus de délivrance d'un titre de séjour :

9. Considérant, en premier lieu, que M. et Mme A...soutiennent que les arrêtés du 5 décembre 2014 portant refus de titre de séjour sont entachés d'un vice de procédure au motif que le préfet n'a pas produit l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ; que l'avis du médecin de l'agence régionale de santé a cependant été produit devant le tribunal par le préfet de la Drôme ; que le moyen tiré du vice de procédure doit, dès lors, être écarté ;

10. Considérant, en deuxième lieu, qu'aucune disposition ne prévoit que les avis du médecin de l'agence régionale de santé soient regardés comme des actes administratifs ; que, par suite, ceux-ci n'ont pas à être motivés ; que le moyen tiré de l'illégalité des arrêtés attaqués pour défaut de motivation des avis du médecin de l'agence régionale de santé Rhône-Alpes du 25 avril et du 6 octobre 2014 doit, de même, être écarté ;

11. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue l'article L. 311-7 soi exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

12. Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier, que l'entrée de

M. et Mme A...sur le territoire français est récente ; qu'ils ne justifient de l'existence d'aucune autre attache familiale sur le territoire français que celle qu'ils pourraient avoir avec leur fils majeur qui séjourne de manière régulière sur le territoire français ; qu'ils ne sont pas dépourvus d'attaches dans leur pays d'origine, où ils ont vécu la plus grande partie de leur vie et où résident encore deux de leurs autres enfants ; qu'ils ne justifient pas, en outre, d'une insertion sociale particulière dans la société française ;

13. Considérant, d'autre part, que M.A..., qui ne peut bénéficier d'un titre de séjour en qualité d'accompagnant d'étranger malade et qui a également fait l'objet d'une décision d'éloignement, peut suivre son épouse dans leur pays d'origine pour apporter à celle-ci l'assistance que son état de santé peut rendre nécessaire ;

14. Considérant qu'eu égard à tous ces éléments, M. et Mme A...ne remplissent pas les conditions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, pour les mêmes motifs, les présentes décisions ne méconnaissent pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

15. Considérant qu'aux termes du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français " L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l 'agence régionale de santé (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 511-1 du même code : " L'état de santé défini au 10° de l'article L. 511-4 est constaté dans les mêmes conditions que celles qui sont prévues aux trois premiers alinéas de l'article R. 313-22 " ;

16. Considérant que la production par Mme A...d'un nouveau certificat médical en date du 26 octobre 2015 faisant état du risque qu'un retour dans son pays d'origine lui ferait courir en ravivant les symptômes des affections psychiatriques et post-traumatiques dont elle souffre, ne suffit pas à établir que le lien entre sa pathologie et les événements traumatisants vécus en Albanie ne permettrait pas, dans son cas, d'envisager un traitement effectivement approprié dans ce pays alors que l'existence d'un tel traitement a été démontré par le préfet de la Drôme ; que le moyen tiré de la méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit, dès lors, être écarté ;

En ce qui concerne la décision portant délai de départ volontaire :

17. Considérant, en premier lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi du 16 juin 2011 : " (...) II. Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours (...) " ;

18. Considérant que M. A...qui n'établit pas qu'un délai supérieur aurait dû lui être accordé, n'est pas fondé à soutenir qu'en fixant à trente jours la durée du délai de départ volontaire qui lui a été accordé, le préfet de la Drôme, qui a suffisamment motivé sa décision d'éloignement, aurait méconnu les dispositions précitées du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

19. Considérant, en second lieu, que M. A...ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance, par la décision contestée, des dispositions de l'article 7 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres, au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, lesquelles ont été transposées en droit national au II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, par la loi n°2011-672 du 16 juin 2011 ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

20. Considérant, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacés ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales " ;

21. Considérant que si M. et Mme A...dont les demandes d'asile ont été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides, puis par la Cour nationale du droit d'asile, soutiennent qu'un retour dans leur pays d'origine risquerait de les exposer à des traitements inhumains ou dégradants, ils n'apportent pas d'éléments suffisants de nature à établir le caractère réel et actuel de leurs craintes en se bornant à rapporter les circonstances dans lesquelles une vendetta aurait été engagée à l'encontre de leur famille ; qu'ils n'établissent pas l'incapacité des autorités du pays à leur assurer une protection ; que la seule circonstance que leur fils, ait quant à lui obtenu le statut de réfugié, le 3 mars 2015, ne suffit pas à établir le caractère personnel des risques auxquels ils pourraient, pour leur part, être exposés ; que, dès lors, le moyen tiré de la violation de l'article L. 513-2 du code précité doit être écarté ;

22. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'ordonner la mesure d'expertise sollicitée par M. et MmeA..., que le préfet de la Drôme est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement du 9 septembre 2015, le tribunal administratif de Grenoble a annulé ses arrêtés n° 14-260552 et n° 14-260553 du 5 décembre 2014 ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

23. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation des décisions attaquées, n'implique aucune mesure particulière d'exécution ; que, par suite, les conclusions susvisées ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

24. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, une quelconque somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que les conclusions présentées sur ce fondement par M. et Mme A...tant devant la cour que devant le tribunal doivent, par suite, être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble nos 1503216-1503217 du 9 septembre 2015 est annulé.

Article 2 : Les demandes présentées par M. et Mme A...devant le tribunal administratif de Grenoble sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions de M. et Mme A...tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 11 juillet 1991 sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. E...A...et à Mme C...B..., épouseA.... Copie en sera adressée au préfet de la Drôme.

Délibéré après l'audience du 10 mars 2016 à laquelle siégeaient :

Mme Verley-Cheynel, président de chambre,

M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur,

Mme Gondouin, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 31 mars 2016.

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N° 15LY03114


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY03114
Date de la décision : 31/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme VERLEY-CHEYNEL
Rapporteur ?: M. Olivier MESMIN d'ESTIENNE
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : LETELLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-03-31;15ly03114 ?
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