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17/03/2016 | FRANCE | N°15LY01117

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 17 mars 2016, 15LY01117


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 19 novembre 2013 par lequel le préfet de la Côte d'Or a décidé de transférer dans le domaine de la commune de Marcilly-sur-Tille la propriété des terrains sur lesquels est aménagée la voie dite " rue de l'Ignon " dont une partie lui appartient.

Par le jugement n° 1400135 du 8 janvier 2015, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enr

egistrés les 23 mars et 21 décembre 2015, M. E..., représenté par MeG..., demande à la cour :

1°)...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 19 novembre 2013 par lequel le préfet de la Côte d'Or a décidé de transférer dans le domaine de la commune de Marcilly-sur-Tille la propriété des terrains sur lesquels est aménagée la voie dite " rue de l'Ignon " dont une partie lui appartient.

Par le jugement n° 1400135 du 8 janvier 2015, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 23 mars et 21 décembre 2015, M. E..., représenté par MeG..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 8 janvier 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Côte d'Or du 19 novembre 2013 ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. E... soutient que :

- la commune n'a pas la qualité de partie, mais seulement d'intervenante à l'instance, par conséquent ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont irrecevables ;

- l'arrêté préfectoral du 19 novembre 2013 est illégal en raison des irrégularités de la procédure de consultation prévue par l'article R. 318-10 du code de l'urbanisme, l'ensemble des propriétaires de la rue de l'Ignon auraient dû être informés ;

- le recours à la procédure prévue par l'article L. 318-3 du code de l'urbanisme est illégal dès lors que plusieurs propriétaires ont expressément manifesté leur absence de consentement à l'ouverture de la voie à la circulation ; la formulation du règlement de lotissement de 1934 invoqué par la commune est insuffisante pour démontrer une réelle volonté, même à l'époque, d'ouvrir à la circulation publique la voie en question ; une ouverture de fait à la circulation ne suffit pas à écarter l'opposition qui serait formulée par les propriétaires de la voie au titre des conditions posées par l'article L. 318-3 du code de l'urbanisme.

Par un mémoire en défense enregistré le 25 juin 2015, la commune de Marcilly-sur-Tille, ayant pour avocat MeC..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. E... la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune fait valoir que :

- s'agissant de la légalité externe de l'arrêté attaqué, le tribunal administratif de Dijon a fait une exacte application de la jurisprudence Danthony en retenant que les erreurs procédurales invoquées n'étaient pas établies et que, quand bien même elles le seraient, elles n'auraient pas eu d'influence sur le sens de la décision ni privé les propriétaires d'une garantie ;

- la rue de l'Ignon était, à la date de la décision attaquée, ouverte à la circulation publique en raison, d'une part, de l'existence d'un traité de lotissement et, d'autre part, de l'absence de tout élément de nature à contredire ce fait ; la circonstance que M. E... s'est opposé au transfert n'a pas eu d'autre conséquence que de transférer la compétence de l'auteur de l'acte à intervenir du maire au préfet de la Côte d'Or ; le fait qu'il ait saisi le tribunal de grande instance de Dijon pour faire reconnaître une hypothétique voie de fait commise par la commune, outre qu'il s'agit là d'une action mal fondée, ne permet pas de remettre en cause la " réalité factuelle " d'ouverture de la voie à la circulation publique ni davantage le consentement au moins tacite mais non équivoque de l'ensemble des propriétaires.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de la voirie routière ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Gondouin, rapporteur,

- les conclusions de M. Dursapt, rapporteur public,

- les observations de Me A...substituant MeG..., représentant M. E... ;

1. Considérant que l'article L. 162-5 du code de la voirie routière prévoit que la propriété des voies privées ouvertes à la circulation publique dans des ensembles d'habitation peut être transférée dans le domaine public de la commune sur le territoire de laquelle sont situées ces voies, dans les conditions fixées à l'article L. 318-3 du code de l'urbanisme ; qu'aux termes des trois premiers alinéas de cet article L. 318-3 dans leur rédaction applicable aux faits de l'espèce : " La propriété des voies privées ouvertes à la circulation publique dans des ensembles d'habitations peut, après enquête publique ouverte par l'autorité exécutive de la collectivité territoriale ou de l'établissement public de coopération intercommunale et réalisée conformément au code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, être transférée d'office sans indemnité dans le domaine public de la commune sur le territoire de laquelle ces voies sont situées. / La décision de l'autorité administrative portant transfert vaut classement dans le domaine public et éteint, par elle-même et à sa date, tous droits réels et personnels existant sur les biens transférés. / Cette décision est prise par délibération du conseil municipal. Si un propriétaire intéressé a fait connaître son opposition, cette décision est prise par arrêté du représentant de l'État dans le département, à la demande de la commune " ;

2. Considérant que le conseil municipal de Marcilly-sur-Tille a décidé, par une délibération du 29 octobre 2012, d'engager la procédure prévue par l'article L. 318-3 précité en vue du transfert d'office de la voie privée dénommée rue de l'Ignon dans le domaine public communal ; que, par un arrêté du 20 mars 2013, le maire de Marcilly-sur-Tille a prescrit l'ouverture de l'enquête publique préalable à ce transfert d'office ; qu'à la suite des résultats de l'enquête publique au cours de laquelle des propriétaires intéressés ont manifesté leur désaccord à ce transfert, le conseil municipal, par une délibération du 10 juillet 2013, a sollicité du préfet de la Côte d'Or le transfert d'office de la rue de l'Ignon dans le domaine public communal ; que, par un arrêté du 19 novembre 2013, le préfet a prononcé le transfert d'office, sans indemnité, de cette voie privée ainsi que des réseaux qui l'alimentent dans le domaine public de la commune ; que M. E..., propriétaire d'une partie de cette voie, a saisi le tribunal administratif de Dijon d'une demande tendant à l'annulation de cette décision ; qu'il relève appel du jugement du 8 janvier 2015 qui a rejeté sa demande ;

3. Considérant, en premier lieu, que l'article R. 318-10 du code de l'urbanisme prévoit que " L'enquête prévue à l'article L. 318-3 en vue du transfert dans le domaine public communal de voies privées ouvertes à la circulation publique dans un ensemble d'habitation est ouverte à la mairie de la commune sur le territoire de laquelle ces voies sont situées " et qu'" avis du dépôt du dossier à la mairie est notifié dans les conditions prévues par l'article R. 141-7 du code de la voirie routière aux personnes privées ou publiques propriétaires des voies dont le transfert est envisagé " ; qu'aux termes de l'article R. 141-7 du code de la voirie routière : " Une notification individuelle du dépôt du dossier à la mairie est faite aux propriétaires des parcelles comprises en tout ou partie dans l'emprise du projet, sous pli recommandé, avec demande d'avis de réception lorsque leur domicile est connu ou à leurs mandataires, gérants administrateurs ou syndics. / Lorsque leur domicile est inconnu la notification est faite, le cas échéant, aux locataires et preneurs à bail rural " ;

4. Considérant que, d'une part, si, selon M.E..., l'ouverture de l'enquête publique n'a pas été notifiée aux véritables propriétaires, en particulier parce que la commune a établi la liste des propriétaires à partir d'un état parcellaire reprenant des données cadastrales, pour certaines erronées, il n'établit pas quelle portée auraient les erreurs ainsi relevées sur l'identité des propriétaires, ni que la société connue sous le nom F...souterrains ", membre de l'union industrielle de Blanzy-Ouest, ou celle qui lui a succédé, était encore propriétaire en 2013 ; que, d'autre part, la circonstance, à la supposer établie, que des personnes qui ne sont pas des propriétaires intéressés au sens de l'article L. 318-3 du code de l'urbanisme auraient été associées sans raison à la procédure, n'est pas de nature à entacher d'illégalité la procédure suivie ; qu'enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que c'est à tort que les ayants droit de M. D...ont été désignés comme propriétaires et ont reçu notification individuelle du dépôt du dossier en mairie conformément à ce que prévoit l'article R. 141-7 du code de la voirie routière ; que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles R. 318-10 du code de l'urbanisme et R. 141-7 du code de la voirie routière doit être écarté ;

5. Considérant, en second lieu, que le transfert des voies privées dans le domaine public communal prévu par les dispositions précitées des articles L. 162-5 du code de la voirie routière et L. 318-3 du code de l'urbanisme est subordonné à l'ouverture de ces voies à la circulation publique, laquelle traduit la volonté de leurs propriétaires d'accepter l'usage public de leur bien et de renoncer à son usage purement privé ; que le propriétaire d'une voie privée ouverte à la circulation est en droit d'en interdire à tout moment l'usage au public ; que par suite, l'administration ne peut transférer d'office des voies privées dans le domaine public communal si les propriétaires de ces voies ont décidé de ne plus les ouvrir à la circulation publique et en ont régulièrement informé l'autorité compétente avant que l'arrêté de transfert ne soit pris, quand bien même cette décision serait postérieure à l'engagement de la procédure de transfert ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, en particulier des nombreux courriers produits en première instance tant par le requérant que par la commune, que la voie privée dénommée rue de l'Ignon est ouverte depuis longtemps à la circulation publique et que, selon l'arrêté préfectoral contesté, elle est notamment empruntée quotidiennement par les transports scolaires selon le plan de circulation élaboré en concertation avec le conseil général de la Côte d'Or ; qu'il ne ressort en revanche pas des pièces du dossier que les propriétaires de cette voie ou certains d'entre eux ont clairement manifesté leur volonté de ne plus l'ouvrir à la circulation publique ; que si le rapport du commissaire enquêteur fait état de l'opposition de certains propriétaires au transfert de la voie dans le domaine public communal, cette circonstance a eu pour seule conséquence, conformément à l'article L. 318-3 du code de l'urbanisme, de conférer compétence au préfet pour prononcer ledit transfert ; qu'il ressort en outre des pièces du dossier, en particulier de l'échange de correspondances entre la mairie et certains propriétaires que si ceux-ci, parfois de façon ambiguë, se sont montrés favorables à une réglementation de la circulation des véhicules voire à une interdiction de la circulation dans cette voie, ils ne se sont pour autant pas opposés à tout usage public de leur bien ni n'ont fait obstacle à un tel usage ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le préfet de la Côte d'Or ne pouvait procéder au transfert d'office de la voie privée rue de l'Ignon dans le domaine public communal sans méconnaître l'article L. 318-3 du code de l'urbanisme doit être écarté ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. E...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté du préfet de la Côte d'Or en date du 19 novembre 2013 ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas en l'espèce partie perdante, quelle que somme que ce soit à verser à M.E... ;

9. Considérant, d'autre part, que la commune de Marcilly-sur-Tille avait été appelée en première instance à produire des observations en qualité de bénéficiaire du transfert d'office de la voie privée dans son domaine public ; qu'elle aurait eu qualité pour former tierce opposition si elle n'avait pas été mise en cause ; que, par suite, et contrairement à ce que soutient le requérant, elle doit être regardée comme une partie pour l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu de mettre à la charge de M. E...la somme de 1 500 euros à verser à la commune sur le fondement de ces dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...E...est rejetée.

Article 2 : M. B...E...versera à la commune de Marcilly-sur-Tille la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4: Le présent arrêt sera notifié à M. B...E..., au ministre de l'intérieur et à la commune de Marcilly-sur-Tille.

Copie en sera adressée au préfet de la Côte d'Or.

Délibéré après l'audience du 18 février 2016 où siégeaient :

- Mme Verley-Cheynel, président de chambre,

- M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur,

- Mme Gondouin, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 mars 2016.

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15LY01117


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY01117
Date de la décision : 17/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

135-02-02-05 Collectivités territoriales. Commune. Biens de la commune. Voirie communale.


Composition du Tribunal
Président : Mme VERLEY-CHEYNEL
Rapporteur ?: Mme Genevieve GONDOUIN
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : CLEMANG

Origine de la décision
Date de l'import : 01/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-03-17;15ly01117 ?
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