Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SARL Chaumeil Rhône-Alpes a demandé au tribunal administratif de Lyon de lui accorder la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée restant à sa charge au titre de la période du 1er octobre 2005 au 28 février 2009 et des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1004260 du 5 novembre 2013, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 3 janvier 2013, la SARL Chaumeil, représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon, en date du 5 novembre 2013 ;
2°) de lui accorder la décharge de ces rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la Cour de justice de l'Union européenne a distingué dans sa décision Graphic Procédé du 11 février 2010 aff. 88/09 l'activité de reprographie, d'une part, et l'activité de reprographie avec prestations de services, d'autre part ;
- cette distinction invalide la doctrine administrative 3 A-114 qui fait du nombre de photocopies le critère de distinction entre livraison de biens et prestations de services ;
- sa propre activité, destinée presqu'exclusivement à des professionnels, s'accompagne régulièrement de prestations de services complémentaires susceptibles de revêtir un caractère prédominant par rapport à l'opération de livraison de biens ;
- les prestations complémentaires font partie intégrante de sa prestation sans qu'il soit besoin de les décliner dans la facture récapitulative ;
- elle propose des solutions réduisant les coûts d'impression, de la création graphique avec conception et mise en page, de la dématérialisation, des prestations clés en main de numérisation, l'administration n'apportant pas la preuve qui lui incombe que ses prestations se limitaient à de simples opérations de reproduction de documents sur divers supports ;
- un tableau synthétique du chiffre d'affaires réalisé pour la période du 1er octobre 2012 au 30 septembre 2013 démontre que la part des services représente plus des trois quarts de son chiffre d'affaires.
Par un mémoire en défense, enregistré le 25 avril 2014, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- le litige porte sur un montant de 49 159 euros, soit 48 576 euros de droits et 583 euros de pénalités ;
- la requérante a donné de son activité une présentation répondant aux caractéristiques d'une livraison de biens en indiquant qu'elle se bornait à reproduire un document original, la taxe collectée étant de ce fait exigible dès la livraison des reprographies aux clients, alors qu'elle l'a acquittée sur les encaissements ;
- la requérante ne saurait valablement invoquer la répartition chiffrée de son chiffre d'affaires réalisé au cours de l'exercice clos en 2013 pour justifier l'existence de prestations complémentaires au cours de la période vérifiée ;
- en se référant à l'activité décrite par la requérante dans ses propres écritures, l'administration estime démontrer que cette activité répond aux caractéristiques d'une livraison de biens.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pourny,
- et les conclusions de Mme Chevalier-Aubert, rapporteur public.
1. Considérant que la SARL Chaumeil Rhône-Alpes, qui déclare exercer une activité de photocopie, de reprographie et d'impression numérique, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant en matière de taxe sur la valeur ajoutée sur la période du 1er octobre 2005 au 28 février 2009 ; que le vérificateur ayant relevé qu'elle avait retenu au cours de la période vérifiée comme date d'exigibilité de la taxe sur la valeur ajoutée collectée la date d'encaissement des créances détenues sur ses clients, au lieu de la date de livraison des documents reproduits, a assujetti la SARL Chaumeil Rhône-Alpes à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 84 787 euros, outre 583 euros d'intérêts de retard, au titre de la période antérieure au 30 septembre 2008, tout en procédant au dégrèvement des droits acquittés à concurrence de 36 211 euros au titre de la fin de la période du 1er octobre 2008 au 28 février 2009 ; qu'elle conteste le jugement du 5 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits et pénalités, d'un montant total de 49 159 euros, mis à sa charge ;
Sur le bien fondé des rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. / II. 1° Est considéré comme livraison d'un bien, le transfert du pouvoir de disposer d'un bien corporel comme un propriétaire. (...) / IV. 1° Les opérations autres que celles qui sont définies au II, notamment la cession ou la concession de biens meubles incorporels, (...) les opérations de façon, (...) sont (...) des prestations de services (...) " ; qu'aux termes de l'article 269 du même code : " 1. Le fait générateur de la taxe se produit : / a) Au moment où la livraison, l'acquisition intracommunautaire du bien ou la prestation de services est effectué ; (...) / 2. La taxe est exigible : / a) Pour les livraisons et les achats visés au a du 1 (...) lors de la réalisation du fait générateur ; (...) / c) Pour les prestations de services, lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération ou, sur option du redevable, d'après les débits. (...) " ;
3. Considérant que, dans l'arrêt du 11 février 2010 par lequel elle s'est prononcée sur la question dont le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, l'avait saisie à titre préjudiciel, la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que l'activité de reprographie répond aux caractéristiques d'une livraison de biens dans la mesure où elle se limite à une simple opération de reproduction de documents sur des supports, le pouvoir de disposer de ceux-ci étant transféré du reprographe au client qui a commandé les copies de l'original, et qu'une telle activité doit toutefois être qualifiée de prestation de services lorsqu'il apparaît que celle-ci s'accompagne de prestations de services complémentaires susceptibles, eu égard à l'importance qu'elles revêtent pour leur destinataire, au temps que nécessite leur exécution, au traitement que requièrent les documents originaux et à la part du coût total que ces prestations de services représentent, de revêtir un caractère prédominant par rapport à l'opération de livraisons de biens, de sorte qu'elles constituent une fin en soi pour leur destinataire ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment des descriptions de l'activité de la requérante dans la proposition de rectification et les observations du contribuable, que celle-ci consistait principalement, au cours de la période en litige, à reproduire sur divers supports des documents originaux qui lui étaient fournis par ses clients ; que si la requérante soutient qu'elle réalisait de multiples prestations annexes comme en témoigne un tableau synthétique de son chiffre d'affaires réalisé pour la période du 1er octobre 2012 au 30 septembre 2013, ce tableau concerne une période postérieure à la période vérifiée et il ne résulte pas de l'instruction que, durant la période d'imposition en litige, les opérations de reprographie qu'elle effectuait s'accompagnaient déjà de services complémentaires, comme le conseil, la modification des originaux en fonction des souhaits des clients ou de contraintes techniques, la diffusion par courriers ou par voie électronique, dont l'importance pour le commanditaire, l'ampleur du traitement effectué sur l'original, le temps nécessaire à l'exécution de ces services et la part qu'ils représentent dans le coût total de la prestation étaient tels qu'ils puissent conférer à ces prestations complémentaires un caractère prédominant par rapport à la simple livraison des documents reproduits et constituer une fin en soi pour les clients ; que l'activité de reprographie de la requérante au cours de la période vérifiée répondait ainsi aux caractéristiques d'une livraison de biens ; que, par suite, l'administration fiscale a pu à bon droit estimer qu'en application de l'article 269 du code général des impôts, la taxe sur la valeur ajoutée était exigible au moment de la délivrance des produits ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL Chaumeil Rhône-Alpes n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, verse à la SARL Chaumeil Rhône-Alpes une somme au titre des frais exposés en cours d'instance et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SARL Chaumeil Rhône-Alpes est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Chaumeil Rhône-Alpes et au ministre des finances et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 18 février 2016 à laquelle siégeaient :
M. Pruvost, président de chambre,
M. Pourny, président-assesseur,
Mme Bourion, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 17 mars 2016.
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N° 14LY00030