La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/02/2016 | FRANCE | N°15LY02018

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 18 février 2016, 15LY02018


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

- d'une part, d'annuler la décision du 7 avril 2014 par laquelle le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant deux ans ;

- d'autre part, d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa situation.

Pa

r un jugement n° 1405148 du 20 mai 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

- d'une part, d'annuler la décision du 7 avril 2014 par laquelle le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant deux ans ;

- d'autre part, d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa situation.

Par un jugement n° 1405148 du 20 mai 2015, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 17 juin 2015, présentée pour M. A...B..., domicilié..., il est demandé à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1405148 du tribunal administratif de Grenoble du 20 mai 2015 en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Isère du 7 avril 2014 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer le certificat de résidence sollicité, dans un délai de 30 jours, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son conseil, sous réserve qu'il renonce à l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

S'agissant du refus de titre de séjour :

- il n'est pas démontré que le préfet aurait été absent ou empêché ni que le signataire avait reçu délégation régulière et publiée pour ce faire, ni que les conditions lui permettant de signer étaient remplies à la date du 18 décembre 2014 ;

- le préfet de l'Isère ne pouvait rejeter sa demande sans au préalable avoir saisi la commission du titre de séjour pour obtenir son avis ;

- il n'est pas démontré qu'un avis régulier du médecin de l'agence régionale de santé, permettant de déterminer l'identification de son auteur et sa compétence, a bien été émis aux fins d'examiner sa situation médicale, ni que le prétendu avis du 13 novembre 2013 indique si l'état de santé de l'intéressé lui permet de voyager sans risque vers l'Algérie ;

- le préfet de l'Isère a manqué à son obligation de motivation au regard des capacités réelles d'accès à un traitement adapté à son état de santé, en fonction des médicaments commercialisés en Algérie et de ses moyens financiers ;

- le refus de titre méconnaît les stipulations de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, eu égard à la gravité de sa santé mentale et à l'impossibilité de bénéficier d'un accès effectif à un traitement en Algérie, et celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; ce refus est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de destination :

- il est fondé à exciper de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français et de celle fixant le pays de destination ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français et celle fixant l'Algérie comme pays de destination portent une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France ; elles sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la décision portant interdiction de retour :

- il est fondé à exciper de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision d'interdiction de retour ;

- la décision d'interdiction de retour a été prise en violation des dispositions de l'article L. 511-1-III du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il présente des garanties de représentation incontestables, a toujours communiqué ses coordonnées à la préfecture et ne présente aucune menace pour l'ordre public ; elle porte une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Le préfet du Rhône a produit, le 24 août 2015, l'avis émis le 13 novembre 2013 par le médecin de l'agence régionale de santé Rhône-Alpes.

La demande de M. B... tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle a été rejetée par une décision du 2 juillet 2015, du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel).

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des moyens soulevés à l'encontre des décisions du 7 avril 2014 par lesquelles le préfet de l'Isère a obligé M. B... à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant deux ans, en l'absence de moyens soulevés contre lesdites décisions en première instance.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique du 28 janvier 2016 le rapport de M. Seillet, président.

1. Considérant que M. B..., ressortissant algérien, né le 21 novembre 1979 à Chlef (Algérie), a sollicité, en dernier lieu, le 11 octobre 2013, la délivrance d'un certificat de résidence sur le fondement des articles 6-5° et 6-7° de l'accord franco-algérien susvisé ; que le silence gardé pendant plus de quatre mois par l'administration a fait naître une décision implicite de rejet de sa demande ; que le préfet de l'Isère a ensuite adopté, le 7 avril 2014, un arrêté portant refus de certificat de résidence, obligation de quitter le territoire français sans délai et interdiction de retour sur le territoire français pendant deux ans ; que M. B... fait appel du jugement du 20 mai 2015 du tribunal administratif de Grenoble en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de ces décisions préfectorales du 7 avril 2014 ;

Sur les conclusions de la requête dirigées contre la décision du préfet de l'Isère du 7 avril 2014 portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, que Mme Pascale Préveirault, secrétaire général adjoint de la préfecture de l'Isère, signataire de la décision contestée, bénéficiait d'une délégation de signature du préfet de l'Isère en date du 20 décembre 2013, régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture du mois de décembre 2013, à l'effet de signer tous actes, arrêtés, décisions, documents et correspondances administratives diverses relevant des attributions de l'Etat dans le département de l'Isère, à l'exception d'actes au nombre desquels ne figurent pas les décisions relatives à la police des étrangers ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le refus de titre serait entaché d'incompétence n'est pas fondé ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 susvisé : " (...). / Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) / 7. Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 susvisé : " Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : / - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; / - la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays. (...) " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et en particulier de l'avis produit en appel par le préfet de l'Isère, que la décision par laquelle il a refusé à M. B... le titre de séjour qu'il avait sollicité sur le fondement de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 a été prise au vu de l'avis émis le 13 novembre 2013 par le Dr G...E..., médecin de l'agence régionale de santé, habilitée à cet effet par décision du directeur général de santé de Rhône-Alpes n° 2012/4881 du 31 octobre 2012, publiée au recueil des actes administratifs de la région Rhône-Alpes, qui mentionne que l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé, vers lequel il peut voyager sans risque ; qu'il résulte de ce qui précède que cet avis médical est complet et régulier au regard des prescriptions de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 ;

5. Considérant, en troisième lieu, que, contrairement à ce que soutient le requérant, la décision portant refus de titre, qui est motivée tant en fait qu'en droit, satisfait ainsi à l'obligation de motivation prescrite par les dispositions de la loi du 11 juillet 1979 susvisée ;

6. Considérant, en quatrième lieu, qu'ainsi qu'il a été dit, il résulte de l'avis rendu le 13 novembre 2013 par le médecin inspecteur de l'agence régionale de santé Rhône-Alpes que l'état de santé de M. B... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'il peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine vers lequel il peut voyager sans risque ; qu'il résulte des certificats médicaux établis les 4 septembre 2013 et 28 avril 2015 par le DrF..., produits par M. B..., que ce dernier souffre d'un syndrome anxio-dépressif sévère nécessitant un suivi régulier sur le plan médical notamment psychiatrique avec traitement au long cours et psychothérapie de soutien, compte tenu d'un risque suicidaire majeur ; que M. B... fait valoir que les médicaments nécessaires pour le soigner ne sont pas commercialisés en Algérie ; que, toutefois, les pièces produites, et en particulier les certificats du DrF..., qui mentionne au demeurant, le 28 avril 2015 que M. B... " a été suivi en Algérie en psychiatrie de janvier à juin 2006 pour syndrome de stress post traumatique ", qui ne comportent aucune appréciation sur l'accès au traitement dans le pays d'origine du requérant, sont insuffisamment circonstanciées pour infirmer l'avis du médecin inspecteur de la santé publique et l'appréciation portée par le préfet de l'Isère selon lequel M. B... peut bénéficier du traitement approprié à son état de santé en Algérie et peut voyager sans risque vers ce pays ; que M. B... n'établit pas ne pas pouvoir assumer le coût de son traitement médical ; que si M. B... produit des attestations de plusieurs laboratoires pharmaceutiques, établis au demeurant au cours des années 2005 et 2006, plus de huit années avant la décision en litige, indiquant que plusieurs des médicaments qui lui ont été prescrits ne sont pas commercialisés en Algérie, il n'est pas établi que des molécules équivalentes au traitement qui lui est prescrit n'y seraient pas disponibles ; que, par suite, la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ne méconnaît pas les dispositions précitées de l'article 6.7 de l'accord franco-algérien ;

7. Considérant, en dernier lieu, que les moyens, déjà soulevés en première instance, tirés de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et d'une erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés pour les motifs retenus par les premiers juges et qu'il y a lieu, pour la cour, d'adopter ;

Sur la légalité des décisions préfectorales portant obligation de quitter le territoire français, fixant le pays de destination et portant interdiction de retour :

8. Considérant qu'au soutien des conclusions de sa demande présentée devant le tribunal administratif de Grenoble, regardées par ledit tribunal d'une manière non contestée comme dirigées contre les décisions du 7 avril 2014 par lesquelles le préfet de l'Isère l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant deux ans, M. B... n'a soulevé aucun moyen ; qu'il n'est, dès lors, pas recevable à soulever, pour la première fois en cause d'appel, contre ces décisions, les moyens, qui ne sont pas d'ordre public, tirés de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour, d'une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France, d'une erreur manifeste d'appréciation de leurs conséquences sur sa situation personnelle et de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 511-1-III du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 28 janvier 2016 à laquelle siégeaient :

M. Seillet, président,

M. C...et MmeD..., premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 18 février 2016.

''

''

''

''

1

6

N° 15LY02018


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY02018
Date de la décision : 18/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. SEILLET
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : SELARL DESCHAMPS et VILLEMAGNE

Origine de la décision
Date de l'import : 05/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-02-18;15ly02018 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award