La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/01/2016 | FRANCE | N°15LY02880

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 28 janvier 2016, 15LY02880


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté en date du 15 janvier 2015 par lequel le préfet de la Drôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination, a interdit son retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans et l'a informé qu'il faisait l'objet d'un signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen.

Par un jugement

n° 1501037 du 13 mai 2015, le tribunal administratif de Grenoble l'a admis au béné...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté en date du 15 janvier 2015 par lequel le préfet de la Drôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination, a interdit son retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans et l'a informé qu'il faisait l'objet d'un signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen.

Par un jugement n° 1501037 du 13 mai 2015, le tribunal administratif de Grenoble l'a admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 août 2015, M.C..., représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Drôme en date du 15 janvier 2015 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Drôme, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié " dans un délai de 30 jours à compter de l'arrêt à intervenir, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans les deux jours suivant la notification de l'arrêt ;

4°) d'enjoindre au préfet de la Drôme de procéder, dans le délai de sept jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, à l'effacement de son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est entaché d'erreurs de fait sur ses relations avec ses enfants et sur sa présence en France depuis 2005 ;

- les premiers juges et le préfet ont commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant de lui délivrer un titre de séjour et méconnu l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le tribunal a méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation familiale et de son insertion professionnelle ;

- le jugement méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation sur sa séparation avec ses enfants ;

- le jugement est entaché d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation en ce qu'il a considéré que le refus d'octroi d'un délai de départ volontaire ne méconnaissait pas les dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- en confirmant l'interdiction de territoire français, le tribunal a méconnu les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et commis une erreur manifeste d'appréciation.

Par des mémoires en défense enregistrés les 14 septembre et 5 novembre 2015, le préfet de la Drôme conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens invoqués par le requérant n'est fondé.

Par décision du 2 juillet 2015, le bureau d'aide juridictionnelle a constaté la caducité de la demande de M.C....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'article 7 du décret n° 2010-569 du 28 mai 2010;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Samson-Dye.

1. Considérant que M.C..., ressortissant turc, relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 janvier 2015 par lequel le préfet de la Drôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination, a interdit son retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans et l'a informé qu'il faisait l'objet d'un signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. I1 ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. C...est entré pour la première fois en France en 2005, même s'il ne justifie pas de la continuité de son séjour depuis lors ; qu'il a eu trois filles, nées respectivement en 2004, en Turquie, et en 2008 et 2014, en France, avec une compatriote ; qu'il n'est pas contesté que la mère de ses filles, qui réside en France depuis 2007, était à la date de l'arrêté litigieux titulaire d'un titre de séjour, le tribunal administratif de Grenoble ayant, par jugement devenu définitif du 20 novembre 2012, annulé le refus de titre de séjour qui lui avait été opposé, pour atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, au motif qu'elle disposait d'attaches familiales intenses en France, tenant notamment à la présence régulière de ses parents et de ses frères et soeurs ; que, si M. C... a vécu séparé de la mère de ses filles, le préfet ne conteste pas sérieusement dans ses écritures d'appel que le couple réside ensemble, avec ses trois enfants, depuis août 2013 ; que M. C..., à la date de l'acte litigieux, justifie d'un emploi en tant que façadier, dans l'entreprise de son beau-père, exercé depuis août 2014, et qu'il n'est pas établi qu'il aurait abandonné cet emploi à la date de l'arrêté litigieux ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, et qu'il n'est d'ailleurs pas allégué, que M. C...représenterait un risque pour l'ordre public ; que, dans ces conditions, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, le refus de titre de séjour porte une atteinte disproportionnée au droit de M. C... au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que cette illégalité, qui justifie l'annulation du refus de titre de séjour, entraîne, par voie de conséquence, l'annulation des décisions par lesquelles le préfet de la Drôme lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination, a interdit son retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans et l'a informé qu'il faisait l'objet d'un signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen ; que, dès lors, M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. " ;

5. Considérant que le présent arrêt implique nécessairement, eu égard au motif sur lequel il se fonde et en absence de changement significatif de circonstances, que l'autorité compétente délivre le titre sollicité à M. C...; que, par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Drôme de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;

6. Considérant par ailleurs qu'aux termes de l'article R. 511-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Les modalités de suppression du signalement d'un étranger effectué au titre d'une décision d'interdiction de retour prise en application du III de l'article L. 511-1 sont celles qui s'appliquent, en vertu de l'article 7 du décret n° 2010-569 du 28 mai 2010, aux cas d'extinction du motif d'inscription au fichier des personnes recherchées " ; et qu'aux termes de l'article 7 du décret du 28 mai 2010 susmentionné : " Les données à caractère personnel enregistrées dans le fichier sont effacées sans délai en cas d'aboutissement de la recherche ou d'extinction du motif de l'inscription (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'annulation de la décision qui prolonge l'interdiction de retour sur le territoire français implique nécessairement l'effacement sans délai du signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen résultant de cette décision ; qu'il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Drôme de procéder à cet effacement à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par M. C...et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1501037 du tribunal administratif de Grenoble en date du 13 mai 2015 et l'arrêté en date du 15 janvier 2015 par lequel le préfet de la Drôme a refusé de délivrer un titre de séjour à M. A...C..., lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination, a interdit son retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans et l'a informé qu'il faisait l'objet d'un signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Drôme de délivrer à M. A...C...une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de procéder à l'effacement du signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen.

Article 3 : L'Etat versera, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 1 000 euros à M.C....

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. C...est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C..., au ministre de l'intérieur et au préfet de la Drôme.

Délibéré après l'audience du 7 janvier 2016, où siégeaient :

- Mme Verley-Cheynel, président de chambre,

- Mme Gondouin, premier conseiller,

- Mme Samson-Dye, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 28 janvier 2016.

''

''

''

''

N° 15LY02880 3


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY02880
Date de la décision : 28/01/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme VERLEY-CHEYNEL
Rapporteur ?: Mme Aline SAMSON DYE
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : COUTAZ

Origine de la décision
Date de l'import : 24/02/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-01-28;15ly02880 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award