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26/01/2016 | FRANCE | N°15LY02783

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 26 janvier 2016, 15LY02783


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F...D...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 7 avril 2015 par laquelle le préfet du Rhône a refusé de l'admettre provisoirement au séjour et les décisions du 23 juillet 2015 par lesquelles le préfet du Rhône a ordonné sa remise aux autorités lituaniennes et prononcé son assignation à résidence.

Par un jugement n° 1506825 du 31 juillet 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé les décisions du 23 juillet 2015

du préfet du Rhône et rejeté le surplus de la demande de M.D....

Procédure devant la co...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F...D...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 7 avril 2015 par laquelle le préfet du Rhône a refusé de l'admettre provisoirement au séjour et les décisions du 23 juillet 2015 par lesquelles le préfet du Rhône a ordonné sa remise aux autorités lituaniennes et prononcé son assignation à résidence.

Par un jugement n° 1506825 du 31 juillet 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé les décisions du 23 juillet 2015 du préfet du Rhône et rejeté le surplus de la demande de M.D....

Procédure devant la cour :

I - Par une requête enregistrée sous le numéro 15LY02783 le 7 août 2015, le préfet du Rhône demande à la cour d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 31 juillet 2015 en tant qu'il a annulé ses décisions du 23 juillet 2015.

Le préfet du Rhône soutient que :

- en décidant de remettre M. D...aux autorités lituaniennes il n'a pas méconnu les dispositions de l'article 35 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; en effet, d'une part, il n'avait pas été informé de l'état de santé du requérant avant que celui-ci ne saisisse le tribunal, d'autre part, le traitement et le suivi de l'intéressé sont possibles en Lituanie ; il appartenait à l'intéressé d'apporter la preuve de ce qu'il avait informé avant la décision litigieuse le préfet de son état de santé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 septembre 2015, M.D..., représenté par MeB..., conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de l'Etat, à payer à son conseil, la somme de 600 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à charge pour ce dernier de renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat à sa mission d'aide juridictionnelle.

M. D...soutient que c'est à bon droit, eu égard à la pathologie dont il est atteint, que le tribunal a annulé les décisions litigieuses en retenant la violation de l'article 35 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne.

Par ordonnance du 3 septembre 2015, la clôture de l'instruction a été fixée au 30 septembre 2015. Par ordonnance du 25 septembre 2015, l'instruction a été rouverte.

M. D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 octobre 2015.

II - Par une requête enregistrée sous le numéro 15LY02784 le 7 août 2015, le préfet du Rhône demande à la cour de prononcer, en application de l'article R. 811-17 du code de justice administrative, le sursis à exécution du jugement n° 1506825 du 31 juillet 2015 du tribunal administratif de Lyon.

Le préfet du Rhône soutient que :

- le moyen qu'il présente en appel est sérieux ;

- le jugement risque d'entrainer des conséquences difficilement réparables puisque en matière de remise l'exécution est subordonnée à un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre Etat membre de la requête aux fins de reprise.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er septembre 2015, M.D..., représenté par MeB..., conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de l'Etat, à payer à son conseil, la somme de 600 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à charge pour ce dernier de renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat à sa mission d'aide juridictionnelle.

M. D...soutient que :

- le moyen du préfet n'est pas sérieux ;

- le préfet ne justifie pas de conséquences difficilement réparables.

Par ordonnance du 3 septembre 2015, la clôture de l'instruction a été fixée au 30 septembre 2015.

M. D...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 13 octobre 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres par un ressortissant d'un pays tiers ;

- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 relatif à la création d'Eurodac pour la comparaison des empreintes digitales aux fins de l'application efficace du règlement (UE) n° 604/2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride et relatif aux demandes de comparaison avec les données d'Eurodac présentées par les autorités répressives des États membres et Europol à des fins répressives, et modifiant le règlement (UE) n° 1077/2011 portant création d'une agence européenne pour la gestion opérationnelle des systèmes d'information à grande échelle au sein de l'espace de liberté, de sécurité et de justice (refonte) ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Duguit-Larcher, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Besse, rapporteur public.

1. Considérant que M.D..., né en 1984, de nationalité tadjike, est entré en France le 11 novembre 2014, muni d'un visa délivré par les autorités lituaniennes, afin d'y solliciter l'asile ; que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé les décisions du 23 juillet 2015 par lesquelles le préfet du Rhône a ordonné sa remise aux autorités lituaniennes et prononcé son assignation à résidence et rejeté le surplus de la demande de l'intéressé ; que le préfet du Rhône relève appel de ce jugement, en tant qu'il a annulé ses décisions, et demande qu'il soit sursis à exécuter sur ce jugement ;

2. Considérant que les requêtes susvisées du préfet du Rhône sont dirigées contre le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt ;

3. Considérant que le transfert d'un demandeur d'asile vers l'Etat membre responsable de l'examen de sa demande en vertu du règlement (CE) n° 604/2013 du Conseil du 26 juin 2013 doit intervenir, en vertu de l'article 29 du règlement du 26 juin 2013, au plus tard, dans un délai de six mois à compter de l'acceptation par un autre Etat membre de la requête aux fins de la prise en charge ou de reprise en charge de la personne concernée ou de la décision définitive sur le recours ou la révision lorsque l'effet suspensif est accordé conformément à l'article 27 du règlement ; qu'en cas de mesure de placement en rétention administrative ou d'assignation à résidence prise en vue de l'exécution de la décision de transfert, le recours introduit sur le fondement du III de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile contre l'arrêté ordonnant la remise du demandeur d'asile aux autorités de l'Etat responsable de l'examen de sa demande, qui a par lui-même pour effet de suspendre l'exécution de la mesure d'éloignement, doit être regardé comme interrompant le délai de six mois prévu à l'article 29 du règlement ; que lorsque le délai de six mois fixé pour l'exécution de la mesure de transfert a été interrompu par l'introduction d'un recours sur le fondement du III de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il recommence à courir à compter de la décision juridictionnelle qui n'est plus susceptible de faire obstacle à la mise en oeuvre de la procédure de remise ; qu'en cas de rejet du recours par le premier juge, ce délai court à compter du jugement qui, l'appel étant dépourvu de caractère suspensif, rend à nouveau la mesure de transfert susceptible d'exécution ; qu'en cas d'annulation de la mesure de transfert par le premier juge, comme c'est le cas en l'espèce, le délai prévu à l'article 29 ne peut être déclenché, en cas d'appel introduit contre le jugement de première instance, qu'à compter, le cas échéant, de l'intervention de la décision juridictionnelle infirmant cette annulation et rejetant la demande de première instance ;

Sur la requête n° 15LY02783 :

En ce qui concerne le bien-fondé du jugement attaqué :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 35 de la charte des droits fondamentaux de l'Union Européenne : " Toute personne a le droit d'accéder à la prévention en matière de santé et de bénéficier de soins médicaux dans les conditions établies par les législations et pratiques nationales. Un niveau élevé de protection de la santé humaine est assuré dans la définition et la mise en oeuvre de toutes les politiques et actions de l'Union. " ; qu'aux termes de l'article 51 de la charte, relatif à son champ d'application : " 1. Les dispositions de la présente Charte s'adressent aux institutions et organes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux États membres uniquement lorsqu'ils mettent en oeuvre le droit de l'Union. En conséquence, ils respectent les droits, observent les principes et en promeuvent l'application, conformément à leurs compétences respectives. " ;

5. Considérant que pour annuler la décision ordonnant la remise aux autorités lituaniennes de M.D..., atteint d'une insuffisance rénal chronique terminale, nécessitant deux séances hebdomadaires d'hémodialyse et un traitement médicamenteux, dont le défaut serait, selon un certificat médical établi le 22 avril 2015, susceptible d'entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité, avec risque de décès, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a retenu que, dès lors qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier que les autorités lituaniennes avaient été informées par le service instructeur de l'état de santé de M.D..., ce qui permettrait d'assurer la continuité de la prise en charge médicale de ce patient entre la France et la Lituanie, cette décision méconnaissait l'article 35 précité de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et était entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

6. Considérant, toutefois, que les articles 31 et 32 du règlement 604/2013 du Parlement et du Conseil du 26 juin 2013, dont M. D...s'était également prévalu devant le tribunal, mettent en oeuvre l'article 35 de la Charte en cas de remise et ont spécifiquement prévu une procédure permettant de s'assurer, dans ce type de situation, que l'Etat membre procédant au transfert du ressortissant étranger communique à l'Etat membre responsable de l'examen de sa demande les données à caractère personnel le concernant afin de s'assurer que l'Etat membre responsable soit en mesure d'apporter une assistance suffisante à cette personne, y compris les soins de santé urgents indispensables à la sauvegarde de ses intérêts essentiels ; que ces articles, relatifs aux modalités d'exécution du transfert de la personne qui fait l'objet d'une décision de remise, prévoient qu'une fois la décision prise les données sont communiquées à l'Etat membre responsable dans un délai raisonnable avant l'exécution du transfert et renvoient notamment au point 9 de l'article 34, relatif au partage d'information, qui prévoit que le demandeur a le droit de former un recours ou de déposer une plainte devant les autorités ou les juridictions compétentes de l'Etat membre qui lui a refusé le droit d'accès aux données le concernant ou le droit d'en obtenir la rectification ou l'effacement ; qu'ainsi, d'une part, l'absence de transmission de données relatives à l'état de santé est sans incidence sur la légalité de la décision de remise et, d'autre part, le respect de ces dispositions est sanctionné par une procédure spécifique ; que, par suite, c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a annulé la décision contestée de remise aux autorités lituaniennes, ainsi que, par voie de conséquence, la décision du même jour prononçant l'assignation à résidence de M. D...au motif que l'Etat français, qui n'aurait pas transmis les informations relatives à son état de santé, aurait méconnu l'article 35 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, alors que le règlement 604/2013 du Parlement et du Conseil du 26 juin 2013, conformément aux droits énoncés à l'article 35 de la charte des droits fondamentaux, a prévu les modalités selon lesquelles ces informations sont, après que la décision de remise a été prise, transmises entre Etats membres et a prévu un recours spécifique permettant au demandeur d'asile de contester les modalités selon lesquelles ces informations sont échangées ainsi que leur teneur, et alors au surplus qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à la date de la décision litigieuse M. D...avait porté à la connaissance du préfet du Rhône ces informations ;

7. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. D...devant la juridiction administrative, à l'encontre de ces deux décisions ;

En ce qui concerne les autres moyens dirigés contre la remise aux autorités lituaniennes :

8. Considérant que la décision litigieuse a été signée par M. A...C..., chef du service de l'immigration et de l'intégration à la préfecture du Rhône, lequel est titulaire d'une délégation à effet de signer de manière permanente les actes administratifs établis par sa direction, sauf diverses exceptions parmi lesquelles ne figurent pas les droits des étrangers, que lui a accordé le préfet du Rhône par un arrêté n° 2015082-0010 du 2 avril 2015, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du Rhône ; que par suite M. D... n'est pas fondé à soutenir que la décision litigieuse a été signée par une personne qui n'avait pas compétence pour le faire ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 susvisé : " Droit à l'information /1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un État membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment: /a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un État membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un État membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'État membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée; /b) des critères de détermination de l'État membre responsable (...); /c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 (...) ; /d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert;/e) du fait que les autorités compétentes des États membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement; /f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant (...). /2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les États membres utilisent la brochure commune (...). Cette brochure commune comprend également des informations relatives à l'application du règlement (UE) n° 603/2013 et, en particulier, à la finalité pour laquelle les données relatives à un demandeur peuvent être traitées dans Eurodac. La brochure commune est réalisée de telle manière que les États membres puissent y ajouter des informations spécifiques aux États membres. Ces actes d'exécution sont adoptés en conformité avec la procédure d'examen visée à l'article 44, paragraphe 2, du présent règlement. " ; qu'aux termes de l'article 20 de ce règlement : " (...) 2. une demande de protection internationale est réputée introduite à partir du moment où un formulaire présenté par le demandeur (...) est parvenu aux autorités compétentes de l'Etat membre concerné (...). " ; qu'il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement du 26 juin 2013 doit se voir remettre, dès le moment où le préfet est informé de ce qu'il est susceptible d'entrer dans le champ d'application de ce règlement, et, en tous cas, avant la décision par laquelle l'autorité administrative décide de refuser l'admission provisoire au séjour de l'intéressé au motif que la France n'est pas responsable de sa demande d'asile, une information complète sur ses droits, par écrit et dans une langue qu'il comprend ; que cette information doit comprendre l'ensemble des éléments prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement ; qu'eu égard à la nature desdites informations, la remise par l'autorité administrative de la brochure prévue par les dispositions précitées constitue pour le demandeur d'asile une garantie ; qu'en l'espèce, il ressort des pièces du dossier que le préfet du Rhône a remis à M.D..., le 6 janvier 2015, la brochure A intitulée " J'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - quel pays sera responsable de ma demande d'asile ", et la brochure B intitulée " Je suis sous procédure Dublin - Qu'est-ce-que cela signifie ' ", ce qui lui a permis de bénéficier d'une information complète sur l'application du règlement du 26 juin 2013 ;

10. Considérant qu'aux termes de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 susvisé : " Entretien individuel /1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. (...). /3. L'entretien individuel a lieu en temps utile et, en tout cas, avant qu'une décision de transfert du demandeur vers l'État membre responsable soit prise conformément à l'article 26, paragraphe 1. /(...) /6. L'État membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. L'État membre veille à ce que le demandeur et/ou le conseil juridique ou un autre conseiller qui représente le demandeur ait accès en temps utile au résumé. " ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'entretien prévu à l'article 5 du règlement précité a eu lieu le 6 janvier 2015 ; que, par suite, et alors même que M. D..., qui en avait la possibilité, n'a formulé aucune observation à l'issue de l'entretien, le moyen tiré de ce que cet entretien n'aurait pas eu lieu manque en fait ;

11. Considérant qu'aux termes de l'article 18 du règlement (CE) n° 2725/2000 du Conseil du 11 décembre 2000 concernant la création du système "Eurodac" pour la comparaison des empreintes digitales aux fins de l'application efficace de la convention de Dublin : " Toute personne visée par le présent règlement est informée par l'Etat membre d'origine : / a) de l'identité du responsable du traitement et de son représentant, le cas échéant ; b) de la raison pour laquelle les données vont être traitées par Eurodac ; / c) des destinataires des données ; / d) dans le cas des personnes visées à l'article 4 ou à l'article 8, de l'obligation d'accepter que ses empreintes digitales soient relevées ; / e) de l'existence d'un droit d'accès aux données la concernant et d'un droit de rectification de ces données. / Dans le cas de personnes visées à l'article 4 ou à l'article 8, les informations visées au premier alinéa sont fournies au moment où les empreintes digitales sont relevées (...) " ; qu'aux termes de l'article 29 du même règlement : " Toute personne relevant de l'article 9, paragraphe 1, ou de l'article 14, paragraphe 1, ou de l'article 17, paragraphe 1est informée par l'Etat membre d 'origine par écrit et, si nécessaire oralement, dans une langue qu'elle comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'elle la comprend : / a) de l'identité du responsable du traitement au sens de l'article 2, point d), de la directive 95/46CE et de son représentant, le cas échéant ; b) de la raison pour laquelle les données vont être traitées par Eurodac, y compris une description des objectifs du règlement (CE) n° 604/2013 conformément à l'article 4 dudit règlement, et des explications, sous une forme intelligible, dans un langage clair et simple quand au fait que les états membres et Europol peuvent avoir accès à Eurodac à des fins répressives ; / c) des destinataires des données ; / d) dans le cas des personnes relevant de l'article 9, paragraphe 1, ou de l'article 14, paragraphe 1, de l'obligation d'accepter que ses empreintes digitales soient relevées ; / e) de son droit d'accéder aux données la concernant et de demander que les données inexactes la concernant soient rectifiées, ou que des données la concernant qui ont fait l'objet d'un traitement illicite soient effacées, ainsi que du droit d'être informée des procédures à suivre pour exercer ces droits, y compris les coordonnées du responsable du traitement et des autorités nationales de contrôle visées à l'article 30, paragraphe 1 " ; qu'il ressort des pièces du dossier que la brochure A intitulée " J'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - quel pays sera responsable de l'analyse de ma demande ' ", dont une copie en français a été produite au dossier, comporte l'ensemble des informations prévues par les stipulations précitées de l'article 18 du règlement (CE) n° 2725/2000 et de l'article 29 du règlement (UE) n° 603/2013 ; que cette brochure a été remise à M. D...en langue russe qui est une langue qu'il comprend ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que ces stipulations auraient été méconnues doit être écarté ;

12. Considérant que les dispositions de l'article 31 du règlement 604/2013 sont relatives à l'" Échange d'informations pertinentes avant l'exécution d'un transfert " et celles de l'article 32 à l'" Échange de données concernant la santé avant l'exécution d'un transfert " ; que de telles dispositions, qui concernent l'exécution de la mesure, sont en conséquence sans incidence sur la régularité de la décision portant réadmission ;

13. Considérant qu'aux termes de l'article 17 du règlement 604/2013, relatif aux " Clauses discrétionnaires " : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / L'État membre qui décide d'examiner une demande de protection internationale en vertu du présent paragraphe devient l'État membre responsable et assume les obligations qui sont liées à cette responsabilité. " ; que M. D... fait grief au préfet de ne pas avoir décidé, eu égard à son état de santé, en application de l'article 17 précité, de faire usage de la clause discrétionnaire afin que la France soit responsable de sa demande d'asile ; que s'il ressort des pièces du dossier que l'état de santé de M. D...nécessite deux séances hebdomadaires d'hémodialyse et un traitement médicamenteux, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en ne faisant pas application de l'article 17 précité dès lors, notamment, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. D...ne pourrait bénéficier d'un tel traitement en Lituanie et alors que son état de santé n'avait pas fait obstacle à ce qu'il voyage du Tadjikistan à la France alors qu'il bénéficiait déjà, dans son pays, d'un traitement par dialyse ;

En ce qui concerne l'assignation à résidence :

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à exciper, à l'encontre de la décision d'assignation à résidence, de l'illégalité de la décision de remise aux autorités lituaniennes ;

15. Considérant que pour les mêmes motifs que ceux évoqués au point 8, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'assignation à résidence manque en fait ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Rhône est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon a, d'une part, annulé ses décisions du 23 juillet 2015 par lesquelles il a ordonné la remise de M. D...aux autorités lituaniennes et prononcé son assignation à résidence et, d'autre part, mis à la charge de l'Etat la somme de 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 susvisée ;

17. Considérant que les dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 susvisée font obstacle à ce qu'une somme quelconque soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, au titre des frais d'instance non compris dans les dépens ;

Sur la requête n° 15LY02784 :

18. Considérant que le présent arrêt statuant sur la requête en annulation présentée contre le jugement n° 1506825 du tribunal administratif de Lyon du 31 juillet 2015, la requête n° 15LY02784 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution dudit jugement est devenue sans objet ; qu'il n'y a plus lieu d'y statuer ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les articles 2, 3 et 4 du jugement n° 1506825 du 31 juillet 2015 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Lyon sont annulés.

Article 2 : Les conclusions de M. D...tendant à l'annulation des décisions du 23 juillet 2015 de remise aux autorités lituaniennes et d'assignation à résidence prises à son encontre par le préfet du Rhône ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Il n'y a plus lieu à statuer sur la requête n° 15LY02784.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au préfet du Rhône, à M. F...D...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 5 janvier 2016, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Mear, président-assesseur,

Mme Duguit-Larcher, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 janvier 2016.

2

Nos 15LY02783 - 15LY02784


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY02783
Date de la décision : 26/01/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

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Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : BOUILLET

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2016-01-26;15ly02783 ?
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