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15/12/2015 | FRANCE | N°14LY03290

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 15 décembre 2015, 14LY03290


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F...D...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 3 juin 2014 par lesquelles le préfet de la Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 1403860 du 9 octobre 2014, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 octobre 2014, M.D..., représenté par Me B... C..., demand

e à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 9 octobre 2014 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F...D...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 3 juin 2014 par lesquelles le préfet de la Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 1403860 du 9 octobre 2014, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 octobre 2014, M.D..., représenté par Me B... C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 9 octobre 2014 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions du 3 juin 2014 par lesquelles le préfet de la Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Savoie de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. D...soutient que :

- le tribunal administratif n'a pas répondu à l'ensemble des moyens qu'il avait soulevé devant lui ;

- le refus de titre de séjour n'est pas motivé en faits au regard de sa demande de titre présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet s'étant contenté de viser cet article ; le préfet, qui a seulement vérifié s'il pouvait obtenir un titre de séjour en qualité de salarié sur le fondement de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, a omis de statuer sur sa demande de titre de séjour " salarié " présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il justifie de circonstances exceptionnelles qui auraient dû conduire le préfet à lui délivrer un titre de séjour sur ce fondement ; en refusant de lui délivrer un titre de séjour, alors qu'il a fait preuve de son intégration en France où il travaille et où il doit demeurer pour mener à bien sa procédure de divorce par consentement mutuel, le préfet a méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 novembre 2015, le préfet de la Savoie conclut au rejet de la requête.

Il soutient, comme il l'avait fait en première instance, que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés et que M. D...dispose désormais d'un titre de séjour en qualité de salarié.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Duguit-Larcher, premier conseiller.

1. Considérant que M.D..., né le 13 décembre 1986, de nationalité sénégalaise, qui s'est marié le 28 janvier 2013, avec Mme E...A..., de nationalité française, est entré pour la dernière fois en France le 30 avril 2013, muni d'un visa de long séjour ; que M. D...relève appel du jugement en date du 9 octobre 2014, par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 3 juin 2014 par lesquelles le préfet de la Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours ;

Sur l'étendue du litige :

2. Considérant qu'il résulte des écritures en défense du préfet de la Savoie que M. D... a obtenu un titre de séjour ; que la délivrance d'un titre de séjour à M. D...a implicitement mais nécessairement abrogé la décision du 3 juin 2014 portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours ; que, par suite, il n'y a plus lieu à statuer sur sa légalité ;

Sur les autres conclusions :

S'agissant de la régularité du jugement :

3. Considérant que M. D...fait valoir que le tribunal n'a pas répondu à l'ensemble des moyens qu'il avait soulevé devant lui ; que devant le tribunal, M. D...a notamment soutenu que le préfet a omis de statuer sur sa demande de titre de séjour " salarié " présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le tribunal administratif n'a pas visé le moyen ainsi présenté et n'y a pas répondu ; que son jugement a, dès lors, été rendu dans des conditions irrégulières et doit, par suite, être annulé ;

4. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. D...devant le tribunal administratif de Grenoble ;

Sur le refus de séjour :

5. Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que M. D...a présenté une demande de titre de séjour en qualité de conjoint de français ; que, contrairement à ses allégations, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait présenté une demande de titre de séjour mention " salarié " sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dans la décision litigieuse, le préfet de la Savoie après avoir refusé de délivrer à M. D...le titre de séjour qu'il avait sollicité en qualité de conjoint de français, a examiné d'office, ainsi que cela ressort des visas et des motifs de ladite décision, si l'intéressé pouvait prétendre à la délivrance d'une carte de séjour sur le fondement des articles L. 313-10, L. 313-11 7° ou L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors même qu'il n'avait pas été saisi de telles demandes ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui (...) restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) " et qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ; que la décision portant refus de titre de séjour est une mesure de police ; qu'en application des dispositions précitées, elle doit, dès lors, être motivée ;

7. Considérant que la décision du 3 juin 2014 par laquelle le préfet de la Savoie a refusé la délivrance d'un titre de séjour à M. D...sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est régulièrement motivée en droit par le visa de ces dispositions et en fait par l'indication que la communauté de vie de M. D... avec son épouse a été rompue ; que si le préfet a par ailleurs décidé, compte tenu des éléments dont il avait connaissance sur la situation familiale et personnelle de M.D..., d'examiner d'office la possibilité de délivrer à M. D...un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi qu'en atteste le visa de ces dispositions, la motivation en fait du refus opposé par le préfet sur ce fondement se confond, ainsi qu'en atteste la rédaction de la décision, avec les considérations que le préfet a portées sur sa vie privée et familiale ; que, dans ces conditions, et alors même que la décision n'indique pas que ces faits ne constituent pas des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels, elle est suffisamment motivée ;

8. Considérant que si M. D...soutient que le préfet a omis de statuer sur sa demande d'admission exceptionnelle au séjour en qualité de " salarié " en application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, M. D...n'avait pas, ainsi qu'il a été précédemment indiqué, présenté une telle demande de titre ; que, par suite, et alors au demeurant que le préfet a examiné d'office la possibilité de délivrer un titre de séjour à M. D...sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ce moyen ne peut qu'être écarté ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. " ; que si M. D...se prévaut de son expérience professionnelle, de ses bonnes relations avec son employeur et des circonstances particulières de sa rupture avec son épouse, son divorce par consentement mutuel nécessitant, selon lui, qu'il demeure sur le sol français, toutefois, le préfet de la Savoie n'a pas, en refusant de régulariser sa situation au motif qu'une telle mesure ne répondrait ni à des considérations humanitaires ni à des motifs exceptionnels, entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;

10. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'il ressort des pièces du dossier que M.D..., qui n'a pas d'enfant et était en instance de divorce avec son épouse française, ne résidait en France que depuis un peu plus d'un an à la date de la décision litigieuse ; que l'intéressé ne disposait pas d'un contrat de travail à durée indéterminée, mais seulement de contrats à durée déterminée en qualité de saisonnier dans des clubs de vacances ; qu'enfin, il n'est pas dépourvu d'attaches familiales au Sénégal ; que, dans ces conditions, la décision contestée n'a pas porté au droit de M. D...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; que le préfet de la Savoie n'a, ainsi, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision du 3 juin 2014 par laquelle le préfet de la Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction doivent être rejetées ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande de M. D...présentée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a plus lieu à statuer sur la décision du 3 juin 2014 par laquelle le préfet de la Savoie a obligé M. D...à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Article 2 : Le jugement n° 1403860 du 9 octobre 2014 du tribunal administratif de Grenoble est annulé en tant qu'il a statué sur le refus de titre de séjour.

Article 3 : La demande présentée par M. D...devant le tribunal administratif de Grenoble tendant à l'annulation du refus de titre de séjour et le surplus des conclusions de la requête de M. D... sont rejetés.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. F...D...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Savoie.

Délibéré après l'audience du 24 novembre 2015, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Mear, président-assesseur,

Mme Duguit-Larcher, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 décembre 2015.

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N° 14LY03290


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY03290
Date de la décision : 15/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : CALVO PARDO

Origine de la décision
Date de l'import : 20/01/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-12-15;14ly03290 ?
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