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03/12/2015 | FRANCE | N°15LY00597

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 03 décembre 2015, 15LY00597


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision du 4 février 2015 par laquelle le préfet de Saône-et-Loire a ordonné sa remise aux autorités italiennes.

Par un jugement n° 1500369 du 9 février 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon a annulé la décision du 4 février 2015.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 19 février 2015 sous le n° 15LY00597, le préfet de Saône-et-Loire dema

nde à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Dijon du 9 février 2015 ;

2°)...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision du 4 février 2015 par laquelle le préfet de Saône-et-Loire a ordonné sa remise aux autorités italiennes.

Par un jugement n° 1500369 du 9 février 2015, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon a annulé la décision du 4 février 2015.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 19 février 2015 sous le n° 15LY00597, le préfet de Saône-et-Loire demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Dijon du 9 février 2015 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. C... A...devant le tribunal administratif de Dijon.

Il soutient que :

- à titre principal, l'article 13 du règlement " Dublin III " du 26 juin 2013 n'était pas applicable à M. A...qui, ayant formulé une demande d'asile en Italie, relevait des dispositions de l'article 18 de ce même règlement ; c'est par suite à tort que le premier juge a annulé sa décision de remise aux autorités italiennes pour violation de l'article 13 du règlement " Dublin III " du 26 juin 2013 ;

- à titre subsidiaire, il ne saurait lui être fait grief de n'avoir envisagé que de manière formelle la possibilité de lui accorder le bénéfice de la clause discrétionnaire prévue à l'article 17 dudit règlement ;

- l'intéressé a tenté d'induire en erreur l'administration en alléguant être mineur.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 mars 2015, M. A..., représenté par Me B..., conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- il n'est pas justifié par le préfet du dépôt d'une demande d'asile en Italie dont l'examen serait pendant, qui aurait été retirée ou qui aurait fait l'objet d'un rejet ;

- l'article 23 du règlement UE n° 604/2013 prévoit un délai de deux mois à compter du résultat positif EURODAC pour saisir les autorités d'un autre Etat membre d'une demande de reprise en charge ;

- l'article 13 du règlement susmentionné s'applique en cas de dépôt d'une demande d'asile dans un autre Etat membre ;

- le préfet n'a pas procédé à l'entretien individuel dans les conditions prévues à l'article 5 du règlement UE n° 604/2013, le privant ainsi d'une garantie ;

- le préfet, qui n'a envisagé que de manière formelle l'application de l'article 17 du règlement UE n° 604/2013, ne motive pas régulièrement son refus de faire application de ces dispositions ;

- ayant bénéficié d'une mesure de prise en charge au titre de l'aide sociale à l'enfance et poursuivant toujours des études, il aurait dû se voir appliquer l'article 17 de ce règlement, alors au demeurant que les autorités italiennes, débordées par l'afflux de migrants, ne sont pas en mesure d'accorder aux demandeurs d'asile des conditions d'accueil satisfaisantes.

Par décision du 18 mars 2015 M. A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

II. Par une requête, enregistrée le 19 février 2015 sous le n° 15LY00598, le préfet de Saône-et-Loire demande à la cour d'ordonner, sur le fondement de l'article R. 811-15 du code de justice administrative, le sursis à exécution du jugement du magistrat désigné par le tribunal de Dijon n° 1500369 du 9 février 2015.

Il soutient que le premier juge a commis une erreur de droit en considérant les dispositions de l'article 13 du règlement UE n° 604/2013 applicables.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 mars 2015, M. A..., représenté par Me B..., conclut au rejet de la requête.

Il reprend les mêmes moyens que ceux énoncés dans son mémoire enregistré dans le cadre de la requête enregistrée sous le n° 15LY00597.

Par décision du 18 mars 2015 M. A...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale .

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le règlement (CE) n° 2725/2000 du Conseil du 11 décembre 2000 concernant la création du système " Eurodac " pour la comparaison des empreintes digitales aux fins de l'application efficace de la convention de Dublin ;

- le règlement (UE) 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le règlement UE n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride (refonte) ;

- le règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014 modifiant le règlement (CE) n° 1560/2003 portant modalités d'application du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des États membres par un ressortissant d'un pays tiers ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Mesmin d'Estienne, rapporteur.

1. Considérant que M. A..., ressortissant malien né le 12 juillet 1993, est entré sur le territoire français le 24 avril 2014, selon ses déclarations ; qu'il a déposé une demande d'asile le 26 novembre 2014 ; que, par une décision du 1er décembre 2014, l'admission provisoire au séjour en qualité de demandeur d'asile lui a été refusée ; qu'estimant que l'Italie doit être regardée comme responsable de sa demande d'asile, le préfet de Saône-et-Loire a, par arrêté du 4 février 2015, décidé sa remise aux autorités italiennes ; que M. A... a contesté cette décision devant le tribunal administratif de Dijon, qui l'a annulée par jugement du 9 février 2015 ; que, par deux requêtes, le préfet de Saône-et-Loire, d'une part, relève appel de ce jugement et, d'autre part, en demande le sursis à exécution ;

2. Considérant que les requêtes susvisées du préfet de Saône-et-Loire sont dirigées contre le même jugement et présentent à juger des questions semblables ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur la requête n° 15LY00597 :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation aux articles L. 213-2 et L. 213-3, L. 511-1 à L. 511-3, L. 512-1, L. 512-3, L. 512-4, L. 513-1 et L. 531-3, l'étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne qui a pénétré ou séjourné en France sans se conformer aux dispositions des articles L. 211-1, L. 211-2, L. 311-1 et L. 311-2 peut être remis aux autorités compétentes de l'Etat membre qui l'a admis à entrer ou à séjourner sur son territoire, ou dont il provient directement, en application des dispositions des conventions internationales conclues à cet effet avec les Etats membres de l'Union européenne. / L'étranger visé au premier alinéa est informé de cette remise par décision écrite et motivée prise par une autorité administrative définie par décret en Conseil d'Etat. (...) " et qu'aux termes de l'article L. 531-2 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " Les dispositions de l'article L. 531-1 sont applicables, sous la réserve mentionnée à l'avant-dernier alinéa de l'article L. 741-4, à l'étranger qui demande l'asile, lorsqu'en application des dispositions des conventions internationales conclues avec les Etats membres de l'Union européenne l'examen de cette demande relève de la responsabilité de l'un de ces Etats. (...) " ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 7 du règlement n° 604-2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 : " 1. Les critères de détermination de l'État membre responsable s'appliquent dans l'ordre dans lequel ils sont présentés dans le présent chapitre. / 2. La détermination de l'État membre responsable en application des critères énoncés dans le présent chapitre se fait sur la base de la situation qui existait au moment où le demandeur a introduit sa demande de protection internationale pour la première fois auprès d'un État membre. (...) " ; qu'aux termes de l'article 13 de ce règlement : " 1. Lorsqu'il est établi, sur la base de preuves ou d'indices tels qu'ils figurent dans les deux listes mentionnées à l'article 22, paragraphe 3, du présent règlement, notamment des données visées au règlement (UE) n° 603/2013, que le demandeur a franchi irrégulièrement, par voie terrestre, maritime ou aérienne, la frontière d'un État membre dans lequel il est entré en venant d'un État tiers, cet État membre est responsable de l'examen de la demande de protection internationale. Cette responsabilité prend fin douze mois après la date du franchissement irrégulier de la frontière. / 2. Lorsqu'un État membre ne peut pas, ou ne peut plus, être tenu pour responsable conformément au paragraphe 1 du présent article et qu'il est établi, sur la base de preuves ou d'indices tels qu'ils figurent dans les deux listes mentionnées à l'article 22, paragraphe 3, que le demandeur qui est entré irrégulièrement sur le territoire des États membres ou dont les circonstances de l'entrée sur ce territoire ne peuvent être établies a séjourné dans un État membre pendant une période continue d'au moins cinq mois avant d'introduire sa demande de protection internationale, cet État membre est responsable de l'examen de la demande de protection internationale. / Si le demandeur a séjourné dans plusieurs États membres pendant des périodes d'au moins cinq mois, l'État membre du dernier séjour est responsable de l'examen de la demande de protection internationale. " et qu'aux termes de l'article 18 dudit règlement relatif aux obligations de l'Etat membre responsable : " 1. L'État membre responsable en vertu du présent règlement est tenu de : / a) prendre en charge, dans les conditions prévues aux articles 21, 22 et 29, le demandeur qui a introduit une demande dans un autre État membre ; / b) reprendre en charge, dans les conditions prévues aux articles 23, 24, 25 et 29, le demandeur dont la demande est en cours d'examen et qui a présenté une demande auprès d'un autre État membre ou qui se trouve, sans titre de séjour, sur le territoire d'un autre État membre ; / c) reprendre en charge, dans les conditions prévues aux articles 23, 24, 25 et 29 le ressortissant de pays tiers ou l'apatride qui a retiré sa demande en cours d'examen et qui a présenté une demande dans un autre État membre ou qui se trouve, sans titre de séjour, sur le territoire d'un autre État membre ; / d) reprendre en charge, dans les conditions prévues aux articles 23, 24, 25 et 29, le ressortissant de pays tiers ou l'apatride dont la demande a été rejetée et qui a présenté une demande auprès d'un autre État membre ou qui se trouve, sans titre de séjour, sur le territoire d'un autre État membre. (...) " ; qu'enfin, en application du 4. de l'article 24 du règlement 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, les demandeurs d'une protection internationale visés à l'article 9 paragraphe 1 dudit règlement qui font l'objet d'un relevé d'empreintes digitales, sont enregistrés dans le système central EURODAC sous la catégorie 1 ;

5. Considérant qu'il résulte clairement des dispositions précitées de l'article 7 du règlement UE n° 604/2013 que la détermination de l'Etat membre en principe responsable de l'examen de la demande de protection internationale s'effectue une fois pour toutes à l'occasion de la première demande d'asile, au vu de la situation prévalant à cette date ; qu'il résulte également de la combinaison des dispositions précitées, que les critères prévus à l'article 13 du règlement ne sont susceptibles de s'appliquer que lorsque le ressortissant d'un pays tiers présente une demande d'asile pour la première fois depuis son entrée sur le territoire de l'un ou l'autre des Etats membres et qu'en particulier, les dispositions de cet article ne s'appliquent pas, lorsque le ressortissant d'un pays tiers présente, fût-ce pour la première fois, une demande d'asile dans un Etat membre après avoir déposé une demande d'asile dans un autre Etat membre, que cette dernière ait été rejetée ou soit encore en cours d'instruction ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du courrier des services du ministère de l'intérieur du 26 novembre 2014 communiquant au préfet le résultat positif des recherches effectuées dans le fichier EURODAC, sous la catégorie 1, que M. A...a sollicité l'asile en Italie, où ses empreintes digitales ont été relevées les 3 et 16 janvier 2014 ; que, par suite, les critères précités de l'article 13 du règlement (UE) n° 604/2013 n'étaient pas applicables à la demande d'asile présentée postérieurement par M. A...en France, le 26 novembre 2014, qui ne constituait pas une première demande d'asile présentée sur le territoire de l'Union Européenne ; qu'en conséquence, le préfet de Saône-et-Loire est fondé à soutenir que c'est à tort que le premier juge, par le jugement attaqué, a annulé sa décision du 4 février 2015 décidant de la remise de M. A...aux autorités italiennes, au motif qu'elle méconnaissait les dispositions de l'article 13 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

7. Considérant toutefois qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M.A..., tant en première instance que devant la cour ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 susvisé : " Droit à l'information / 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment: / a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un Etat membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un Etat membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'Etat membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée; / b) des critères de détermination de l'Etat membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu'une demande de protection internationale introduite dans un Etat membre peut mener à la désignation de cet Etat membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n'est pas fondée sur ces critères; / c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les Etats membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations; / d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert; / e) du fait que les autorités compétentes des Etats membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement; / f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits, y compris des coordonnées des autorités visées à l'article 35 et des autorités nationales chargées de la protection des données qui sont compétentes pour examiner les réclamations relatives à la protection des données à caractère personnel. / 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. / Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5.FR 29.6.2013 Journal officiel de l'Union européenne L. 180/37/3. La commission rédige, au moyen d'actes d'exécution, une brochure commune ainsi qu'une brochure spécifique pour les mineurs non accompagnés, contenant au minimum les informations visées au paragraphe 1 du présent article. Cette brochure commune comprend également des informations relatives à l'application du règlement (UE) n° 603/2013 et, en particulier, à la finalité pour laquelle les données relatives à un demandeur peuvent être traitées dans Eurodac. La brochure commune est réalisée de telle manière que les Etats membres puissent y ajouter des informations spécifiques aux Etats membres. Ces actes d'exécution sont adoptés en conformité avec la procédure d'examen visée à l'article 44, paragraphe 2, du présent règlement. " ; qu'aux termes de l'article 20 de ce règlement : " (...) 2. une demande de protection internationale est réputée introduite à partir du moment où un formulaire présenté par le demandeur (...) est parvenu aux autorités compétentes de l'Etat membre concerné (...). " ; qu'il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit se voir remettre, dès le moment où le préfet est informé de ce qu'il est susceptible d'entrer dans le champ d'application de ce règlement, et, en tous cas, avant la décision par laquelle l'autorité administrative décide de refuser l'admission provisoire au séjour de l'intéressé au motif que la France n'est pas responsable de sa demande d'asile, une information complète sur ses droits, par écrit et dans une langue qu'il comprend ; que cette information doit comprendre l'ensemble des éléments prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement ; qu'eu égard à la nature desdites informations, la remise par l'autorité administrative de la brochure prévue par les dispositions précitées constitue pour le demandeur d'asile une garantie ;

9. Considérant que si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou s'il a privé les intéressés d'une garantie ; que la délivrance par l'autorité administrative de la brochure prévue par les dispositions précitées constituant pour le demandeur d'asile une garantie, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi du moyen tiré de l'omission ou de l'insuffisance d'une telle information à l'appui de conclusions dirigées contre un refus d'admission au séjour ou une décision de remise, d'apprécier si l'intéressé a été, en l'espèce, privé de cette garantie ou, à défaut, si cette irrégularité a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de cette décision ;

10. Considérant que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention de l'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'administration a satisfait à l'obligation qui lui incombe en application des dispositions précitées ; que, dans un premier temps, seul le préfet est en mesure d'apporter les éléments relatifs à la délivrance d'une information écrite au demandeur ;

11. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, que le 26 novembre 2014, le préfet de Saône-et-Loire a remis à M. A...le volet B du guide du demandeur d'asile intitulé " Je suis sous procédure Dublin - qu'est-ce que cela signifie ' " ; que, toutefois, seule la remise des deux volets de la brochure, dont le volet A intitulé " J'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - quel pays sera responsable de ma demande d'asile ' ", qui constituent la brochure commune prévue par les dispositions de l'article 4 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013, figurant en annexe au règlement du 30 janvier 2014 susvisé, permet aux demandeurs d'asile de bénéficier d'une information complète sur l'application du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 ; qu'ainsi, en l'absence de communication alléguée du volet A, des informations écrites essentielles à la compréhension de sa situation et à l'exercice de ses droits n'ont pas été portées à la connaissance de M. A...alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait bénéficié par ailleurs de telles informations ; que, dès lors, dans les circonstances de l'espèce, cette omission a été de nature à priver effectivement l'intéressé de la garantie prévue par les dispositions précitées ; que, par suite, l'arrêté ordonnant sa remise aux autorités italiennes est intervenu au terme d'une procédure irrégulière et est, pour ce motif, entaché d'illégalité ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de Saône-et-Loire n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Dijon a annulé sa décision du 4 février 2015 par laquelle il a ordonné la remise de M. A...aux autorités italiennes ;

Sur la requête n° 15LY00598 :

13. Considérant que le présent arrêt statuant sur les conclusions présentées par le préfet de Saône-et-Loire tendant à l'annulation du jugement n° 1500369 du 9 février 2015 du tribunal administratif de Dijon, la requête n° 15LY00598 tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution dudit jugement est devenue sans objet ; qu'il n'y a plus lieu d'y statuer ;

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur la requête du préfet de Saône-et-Loire enregistrée sous le n° 15LY00598.

Article 2 : La requête du préfet de Saône-et-Loire enregistrée sous le n° 15LY00597 est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de Saône-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 12 novembre 2015 à laquelle siégeaient :

Mme Verley-Cheynel, président de chambre,

M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur,

Mme Samson-Dye, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 3 décembre 2015.

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N°s 15LY00597 - 15LY00598


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY00597
Date de la décision : 03/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme VERLEY-CHEYNEL
Rapporteur ?: M. Olivier MESMIN d'ESTIENNE
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : CLEMANG

Origine de la décision
Date de l'import : 24/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-12-03;15ly00597 ?
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