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01/12/2015 | FRANCE | N°15LY00464

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 01 décembre 2015, 15LY00464


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...épouse C...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les décisions du 20 décembre 2013 par lesquelles le préfet de la Côte-d'Or a refusé de renouveler le titre de séjour dont elle était titulaire, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office.

Par un jugement n° 1400406-1400407 du 16 décembre 2014, le tribunal administratif de Dijon a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :>
Par une requête enregistrée le 11 février 2015, présentée pour Mme B...épouseC..., celle-ci de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...épouse C...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler les décisions du 20 décembre 2013 par lesquelles le préfet de la Côte-d'Or a refusé de renouveler le titre de séjour dont elle était titulaire, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office.

Par un jugement n° 1400406-1400407 du 16 décembre 2014, le tribunal administratif de Dijon a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 11 février 2015, présentée pour Mme B...épouseC..., celle-ci demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 16 décembre 2014 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions du préfet de la Côte-d'Or du 20 décembre 2013 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Côte-d'Or de lui délivrer un titre de séjour ou de procéder au réexamen de sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre une somme de 1 500 euros à la charge de l'Etat en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le refus de titre de séjour méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;

- le refus de titre de séjour méconnaît l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 dès lors qu'elle n'a pas été informée de ce qu'une décision défavorable pouvait être prise à son encontre en dépit de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ;

- le refus de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français méconnaissent les stipulations des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et sont entachés d'une erreur manifeste d'appréciation de leurs conséquences sur sa situation personnelle ;

- l'obligation de quitter le territoire français a été édictée en méconnaissance du droit d'être entendu ;

- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'un vice de procédure dès lors que le médecin de l'agence régionale de santé ne s'est pas prononcé sur les possibilités pour elle de voyager vers son pays d'origine ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision par laquelle le préfet a décidé de ne pas lui octroyer un délai supérieur à un mois pour quitter le territoire français est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de destination méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'elle est menacée de persécutions au Kosovo du fait de ses origines gorani.

Par un mémoire enregistré le 30 juin 2015, présenté par le préfet de la Côte-d'Or, celui-ci conclut au non-lieu à statuer sur la requête de Mme B...épouseC....

Il soutient qu'il a muni Mme B...épouse C...d'un récépissé de demande de titre de séjour valable du 9 mars 2015 au 8 septembre 2015.

Par une décision du 24 février 2015, le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à Mme B...épouseC....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- la loi n° 91-64 7 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Vaccaro-Planchet a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que, par un jugement du 16 décembre 2014, le tribunal administratif de Dijon a rejeté les demandes de Mme B...épouse C...tendant à l'annulation des décisions du 20 décembre 2013 par lesquelles le préfet de la Côte-d'Or a refusé de renouveler le titre de séjour dont elle était titulaire, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office ; que Mme B...épouse C...relève appel de ce jugement ;

Sur l'étendue du litige :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet de la Côte-d'Or a délivré à Mme B...épouseC..., postérieurement aux décisions contestées, un récépissé de demande de titre de séjour valable du 9 mars 2015 au 8 septembre 2015 ; que contrairement à ce que soutient le préfet de la Côte-d'Or, compte tenu de l'objet et de la durée d'un tel récépissé, sa délivrance ne prive pas d'objet les conclusions de la requête dirigées contre le refus de titre de séjour qui a été opposé à l'intéressée ; qu'en revanche, la délivrance postérieure à l'introduction de la requête d'un récépissé de demande de titre de séjour a pour effet d'abroger la mesure d'éloignement et la décision fixant le pays destination prises à son encontre et rend, par suite, sans objet les conclusions à fin d'annulation de ces décisions ;

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales (...) " ; qu'il résulte des termes mêmes de ces dispositions qu'elles ne peuvent être utilement invoquées à l'encontre d'une décision de refus de titre de séjour, qui est prise en réponse à une demande formulée par l'intéressée ;

4. Considérant qu'il ressort de la décision en litige que le préfet de la Côte-d'Or a procédé à un examen particulier de la situation de Mme B...épouse C...;

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. (...) " ;

6. Considérant que sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle ; que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par un avis du 20 novembre 2013, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que l'état de santé de Mme B...épouse C...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité au vu de l'absence de traitement approprié dans son pays d'origine ; que le préfet de la Côte-d'Or s'est écarté de l'avis du médecin de l'agence régionale de santé en se fondant notamment sur des rapports établis les 11 mars 2009, 22 août 2010 et 6 mai 2011 par les services de l'ambassade de France au Kosovo à la suite des informations recueillies auprès des autorités sanitaires locales, selon lesquels l'ensemble des pathologies psychiatriques sont prises en charge dans plusieurs établissements ou services spécialisés au Kosovo et les médicaments nécessaires au traitement de l'ensemble de ces pathologies sont disponibles dans toutes les pharmacies de ce pays, ainsi que sur la liste des médicaments essentiels disponibles au Kosovo ; que, si certains des médicaments prescrits à Mme B... épouse C...ne figurent pas sur cette liste des médicaments essentiels au Kosovo produite par le préfet, il ne ressort pas des pièces des dossiers qu'aucune autre substance active équivalente ne serait disponible dans ce pays ; que les certificats médicaux produits par la requérante, ne suffisent pas à établir qu'elle ne pourrait pas bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

8. Considérant que le moyen tiré de ce que la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

10. Considérant que la décision contestée n'a pas pour effet de séparer Mme B...épouse C...de ses enfants, nés le 14 mai 2009 et le 30 avril 2012, et que la requérante n'apporte aucun élément de nature à établir que ces derniers, dont l'aîné est scolarisé à l'école maternelle en France, ne pourraient pas être scolarisés au Kosovo ; que, dès lors, il n'apparaît pas que l'intérêt supérieur de ses enfants aurait été insuffisamment pris en compte par la décision en litige ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...épouse C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté ses conclusions dirigées contre le refus de titre de séjour ; que ses conclusions aux fins d'injonction doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

12. Considérant que les conclusions que Mme B...épouse C...a présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, dans les circonstances de l'espèce, être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête dirigées contre les décisions du préfet de la Côte-d'Or du 20 décembre 2013 faisant obligation à Mme B...épouse C...de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B...épouse C...est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...épouse C...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Côte-d'Or.

Délibéré après l'audience du 10 novembre 2015, à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Picard, président-assesseur,

Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 1er décembre 2015.

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N° 15LY00464

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15LY00464
Date de la décision : 01/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: Mme Véronique VACCARO-PLANCHET
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : GRENIER

Origine de la décision
Date de l'import : 24/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-12-01;15ly00464 ?
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