La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

01/12/2015 | FRANCE | N°14LY01936

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 01 décembre 2015, 14LY01936


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 24 décembre 2012 par lequel le maire de la commune de Tonnerre a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la maladie pour laquelle il lui a été prescrit un arrêt de travail du 2 mars 2012 au 11 décembre 2012.

Par un jugement n° 1300919 du 25 février 2014, le tribunal administratif de Dijon a annulé cet arrêté du maire de la commune de Tonnerre du 24 décembre 2012.

Procédure devant la Cour :
r>Par une ordonnance du 12 juin 2014, enregistrée le 25 juin 2014 au greffe de la Cour, le préside...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 24 décembre 2012 par lequel le maire de la commune de Tonnerre a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la maladie pour laquelle il lui a été prescrit un arrêt de travail du 2 mars 2012 au 11 décembre 2012.

Par un jugement n° 1300919 du 25 février 2014, le tribunal administratif de Dijon a annulé cet arrêté du maire de la commune de Tonnerre du 24 décembre 2012.

Procédure devant la Cour :

Par une ordonnance du 12 juin 2014, enregistrée le 25 juin 2014 au greffe de la Cour, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis à la Cour la requête présentée pour la commune de Tonnerre.

Par une requête, enregistrée au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 30 mai 2014, et un mémoire complémentaire, enregistré le 27 août 2014 au greffe de la Cour, la commune de Tonnerre, représentée par Me Balat, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Dijon du 25 février 2014 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Dijon ;

3°) de mettre à la charge de M. A... la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle n'a pas reçu communication de l'ensemble des écritures de première instance de M. A... ;

- les parties n'ont pas été régulièrement avisées de la date de l'audience du tribunal administratif ;

- le jugement ne contient pas l'analyse de l'ensemble des conclusions et mémoires des parties ;

- le jugement est irrégulier en ce qu'il est insuffisamment motivé ;

- le tribunal a commis une erreur de droit en considérant que les fonctions d'agent technique polyvalent exercées par M. A... depuis 1993 et jusqu'en 2009 étaient susceptibles d'avoir provoqué le syndrome de canal carpien bilatéral dont il est atteint, alors qu'une simple probabilité ne suffit pas à caractériser le lien de causalité direct et certain requis par les dispositions de l'article 57 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée ;

- le jugement attaqué est entaché d'erreur de droit en ce que le tribunal a retenu une définition des travaux susceptibles de provoquer le syndrome du canal carpien qui ne figure pas au tableau n° 57 des maladies professionnelles relatif aux affections péri-articulaires provoquées par certains gestes et postures de travail, annexé au livre IV du code de la sécurité sociale ;

- le jugement attaqué a fait une inexacte application des dispositions du 2° de l'article 57 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée, dès lors qu'il ne prend pas en compte le changement d'affectation de M. A... en 2010, dont les nouvelles fonctions ne comportent plus d'activité manuelle répétitive, et qu'il n'est pas établi de lien de causalité certain entre l'affection dont il souffre et les fonctions polyvalentes qu'il exerçait avant 2010.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 octobre 2014, M. B... A..., représenté par MeC..., conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la commune de Tonnerre au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- le syndrome dont il souffre se rattache bien au tableau n° 57 des maladies professionnelles relatif aux affections péri-articulaires provoquées par certains gestes et postures de travail annexé au livre IV du code de la sécurité sociale ;

- le lien de causalité entre sa pathologie et ses fonctions au sein de la commune de Tonnerre est établi.

Par une ordonnance du 3 septembre 2015, la clôture de l'instruction a été fixée au 25 septembre 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Drouet ; président-assesseur ;

- et les conclusions de M. Clément, rapporteur public.

1. Considérant que la commune de Tonnerre relève appel du jugement du 25 février 2014 par lequel le tribunal administratif de Dijon a annulé l'arrêté de son maire du 24 décembre 2012 refusant de reconnaître l'imputabilité au service de la maladie pour laquelle des arrêts de travail ont été prescrits à M. A...du 2 mars au 11 décembre 2012 ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " (...) / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes (...). / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux. " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier de première instance que la demande de M. A...devant le tribunal administratif de Dijon et les pièces qui y étaient jointes, son mémoire en réplique et la pièce complémentaire, enregistrés respectivement les 11 et 15 juin 2013 au greffe de ce tribunal, ont été communiqués à la commune de Tonnerre ; que celle-ci n'est dès lors pas fondée à soutenir qu'elle n'aurait pas reçu communication de l'ensemble des écritures de M.A... ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 711-2 du code de justice administrative : " Toute partie est avertie, par une notification faite par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou par la voie administrative mentionnée à l'article R. 611-4, du jour où l'affaire sera appelée à l'audience. / (...) / L'avertissement est donné sept jours au moins avant l'audience. / (...) " ; que selon l'article R. 431-1 du même code : " Lorsqu'une partie est représentée devant le tribunal administratif par un des mandataires mentionnés à l'article R. 431-2, les actes de procédure, à l'exception de la notification de la décision prévue aux articles R. 751-3 et suivants, ne sont accomplis qu'à l'égard de ce mandataire. " ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier de première instance que M. A... et la commune de Tonnerre, qui n'avaient pas d'avocat en première instance, ont été convoqués à l'audience publique du 4 février 2014 dans les conditions prévues par ces dispositions ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : " La décision mentionne que l'audience a été publique, sauf s'il a été fait application des dispositions de l'article L. 731-1. Dans ce dernier cas, il est mentionné que l'audience a eu lieu ou s'est poursuivie hors la présence du public. / Elle contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait application. / (...) " ;

7. Considérant qu'il résulte de l'examen de la minute du jugement attaqué que celui-ci vise la requête et le mémoire en réplique de M. A... devant le tribunal administratif de Dijon, l'unique mémoire en défense de la commune de Tonnerre dans la même instance, et qu'il analyse les conclusions et moyens présentés par les parties dans leurs écritures ;

8. Considérant, en dernier lieu, qu'en relevant qu'il ressort des pièces du dossier que la commission de réforme a rendu le 27 septembre 2012 un avis favorable à la reconnaissance de l'origine professionnelle de la maladie de M. A... en se fondant sur l'avis d'un médecin-expert du 27 août 2012, que ce dernier a notamment relevé que M. A...a eu depuis 1993 "une activité professionnelle répétitive, qu'il a été amené à utiliser des outils, y compris des outils vibrants, à porter des charges et s'est exposé à développer des troubles musculo-squelettiques des membres supérieurs" et que les fonctions d'agent technique polyvalent exercées depuis 1993 et jusqu'en 2009 par M. A... sont susceptibles d'avoir provoqué le syndrome de canal carpien bilatéral dont il est atteint, le tribunal administratif de Dijon a suffisamment motivé son jugement ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Tonnerre n'est pas fondée à soutenir que le jugement dont elle relève appel est entaché d'irrégularité ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

10. Considérant qu'aux termes de l'article 57 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) " ; que le droit, prévu par ces dispositions, de conserver l'intégralité du traitement est soumis à la condition que la maladie mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'accomplir son service soit en lien direct, mais non nécessairement exclusif, avec l'exercice des fonctions ;

11. Considérant que M. A..., qui a été recruté par la commune de Tonnerre en qualité d'agent d'entretien par contrat emploi-solidarité à compter du 1er novembre 1993, a été nommé agent d'entretien territorial par arrêté du 31 octobre 2001, puis adjoint technique territorial de première classe à compter du 1er août 2008 ; qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport du 27 août 2012 de l'expertise médicale réalisée à la demande de la commune de Tonnerre en vue de l'examen par la commission de réforme de la demande de reconnaissance d'imputabilité au service présentée par M. A..., que celui-ci a exercé de 1993 à 2009 une activité presque exclusivement manuelle et répétitive, associant travaux de réparations divers, travaux de serrurerie et travaux de maçonnerie avec utilisation d'outils multiples et d'outils vibrants et port régulier de charges ; que ces constatations ne sont pas remises en cause par les mentions figurant sur le document intitulé " Fiche de poste - Agent polyvalent des services techniques" concernant M. A... et établi par la commune de Tonnerre ; que l'expert, qui estime dans son rapport que l'intéressé est exposé, au vu de cette activité professionnelle habituelle, à développer des troubles musculo-squelettiques des membres supérieurs, conclut à un lien entre le syndrome du canal carpien bilatéral développé par M. A... à compter de 2011 et son activité professionnelle à la commune de Tonnerre depuis 1993 ; que, dans son avis du 27 septembre 2012, la commission de réforme des agents territoriaux a émis un avis favorable à la reconnaissance de l'imputabilité au service de la maladie de M. A... ; que la commune de Tonnerre ne produit aucun élément de nature à remettre en cause l'appréciation du médecin expert ; que, dans ces conditions, alors même que les fonctions exercées par l'agent ne comportent plus d'activité manuelle répétitive depuis 2010, l'existence d'un lien de causalité direct entre le syndrome du canal carpien bilatéral dont souffre M. A... et l'exercice de ses fonctions au sein de la commune de Tonnerre de 1993 à 2009 doit être regardé comme établie ; que, par suite, en refusant de reconnaître comme imputable au service la maladie pour laquelle des arrêts de travail ont été prescrits du 2 mars 2012 au 11 décembre 2012, le maire de la commune de Tonnerre a fait une inexacte application des dispositions précitées du 2° de l'article 57 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Tonnerre n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a annulé l'arrêté du 24 décembre 2012 par lequel son maire a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la maladie de M. A... ;

Sur les frais non compris dans les dépens :

13. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que la commune de Tonnerre demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens soit mise à la charge de M. A... qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante ; qu'il y a lieu, en application de ces dispositions, de mettre à la charge de la commune de Tonnerre une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Tonnerre est rejetée.

Article 2 : La commune de Tonnerre versera à M. A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Tonnerre et à M. B... A....

Délibéré après l'audience du 3 novembre 2015, à laquelle siégeaient :

M. Boucher, président de chambre ;

M. Drouet, président-assesseur ;

Mme Peuvrel, premier conseiller.

Lu en audience publique le 1er décembre 2015.

''

''

''

''

2

N° 14LY01936


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY01936
Date de la décision : 01/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Congés - Congés de maladie - Accidents de service.

Fonctionnaires et agents publics - Statuts - droits - obligations et garanties - Garanties et avantages divers - Protection en cas d'accident de service.


Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: M. Hervé DROUET
Rapporteur public ?: M. CLEMENT
Avocat(s) : JEAN-CHRISTOPHE BALAT

Origine de la décision
Date de l'import : 24/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-12-01;14ly01936 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award