Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D...B...a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler l'arrêté du 24 mai 2012 par lequel le maire de la commune de Saint-Amant-Tallende lui a infligé la sanction disciplinaire de l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois mois assortie d'un sursis de deux mois, ensemble la décision du 20 juillet 2012 rejetant son recours gracieux dirigé contre cet arrêté.
Par un jugement n° 1201605 du 19 décembre 2013, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté cette demande et a mis à la charge de M. B...une somme de 800 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 6 mars 2014, M. D...B..., représenté par la SELARL Pôle Avocats Limagne Fribourg, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 19 décembre 2013 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 24 mai 2012 du maire de la commune de Saint-Amant-Tallende, ensemble sa décision du 20 juillet 2012 ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Amant-Tallende le versement d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il a toujours contesté les faits d'appropriation de matériel communal qui lui sont reprochés et l'enquête pénale n'a pas permis de les établir ; il ne peut lui être infligé une sanction alors que la plainte déposée contre lui a été classée sans suite par le procureur de la République ;
- les faits de vol ne sont pas établis, dès lors que, s'il a pris une échelle de quatre mètres destinée à la déchetterie, il l'a coupée en deux en vue de la donner à un gendarme habitant la commune qui en avait besoin ; que les banderoles, anciennes, n'appartenaient pas à la commune mais à des associations de commerçants et de don du sang et que les panneaux routiers, également destinés à la déchetterie, étaient vétustes ; qu'il les a remis en état et donnés à une association communale et n'a tiré aucun profit personnel de la récupération de ces matériels, faite en vue de rendre service ;
- le tribunal administratif a retenu l'absence de respect de l'autorité territoriale alors que la commune a fondé la sanction sur le manquement à l'obligation de probité, l'atteinte à l'image et l'atteinte à la relation de confiance ; il a requalifié les faits en indiquant que le matériel en cause avait été mis à la disposition de la commune ; c'est à tort qu'il a estimé que les faits établissaient son manque de probité et étaient de nature à porter atteinte à l'image de sa fonction ;
- s'agissant de l'usage abusif qu'il aurait fait du téléphone portable mis à sa disposition, la sanction infligée est disproportionnée, dès lors qu'il a admis être débiteur des dépassements du forfait souscrit par la commune, lequel comprend l'envoi illimité de SMS ; que, s'il a procédé à l'échange gratuit de l'appareil mis à sa disposition par la commune en raison de sa vétusté et de ses dysfonctionnements, il a reconnu avoir commis une erreur et a modifié son comportement depuis ;
- la qualité de son travail n'a jamais été remise en cause, comme en atteste sa notation pour l'année 2010, et son action au service de la collectivité a toujours été saluée, y compris postérieurement aux faits en litige ;
- l'aggravation de la sanction par rapport à la proposition du conseil de discipline est injustifiée et constitue une forme d'humiliation ;
- c'est à tort que le tribunal administratif a mis à sa charge une somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, alors qu'il a dû engager des frais pour contester une sanction injustifiée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 avril 2014, la commune de Saint-Amant-Tallende, agissant par son maire en exercice et représentée par le cabinet Devès et associés, conclut, à titre principal, à l'irrecevabilité des conclusions à fin d'annulation, ou, à titre subsidiaire, à leur rejet comme non fondées et demande qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de M. B...sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- le recours gracieux présenté par M.B..., qui a eu pour effet de reporter le délai de recours contentieux, ne remet pas en cause le principe de la sanction mais uniquement son quantum ; les faits ne sont pas contestés et il est demandé l'application de la sanction proposée par le conseil de discipline ; dès lors, la demande tendant à l'annulation totale de l'arrêté du 24 mai 2012 était irrecevable, le tribunal administratif n'était en réalité saisi que d'une demande d'annulation de l'arrêté en tant qu'il prononçait une sanction plus lourde que celle qu'avait proposée le conseil de discipline, comme en témoignent les écritures de M. B...en première instance ; la demande présentée devant le tribunal administratif était en tout état de cause irrecevable, en application de l'article R. 411-1 du code de justice administrative, en ce qu'elle n'exposait aucun moyen propre à remettre en cause l'aggravation de la sanction proposée par le conseil de discipline ;
- les faits qui ont motivé la procédure disciplinaire ayant été retenus par le conseil de discipline, dont M. B...n'a pas contesté l'avis, il ne lui est plus possible de les mettre en cause ;
- la matérialité des faits est établie ; la circonstance que la plainte de l'intéressé ait été classée sans suite est sans incidence sur la procédure disciplinaire ; M. B...reconnaît s'être approprié les biens en question ; si les banderoles appartiennent à des associations, elles sont placées sous la garde de la commune et M. B...n'avait pas le droit d'en prendre possession, quand bien même elles seraient destinées à la déchetterie, ce qui n'était d'ailleurs pas le cas en l'espèce, l'accord du maire étant requis pour qu'un agent puisse récupérer des biens appartenant à la collectivité ;
- l'usage abusif du téléphone professionnel ne se caractérise pas seulement par les surcoûts engendrés, dont il n'est contesté que M. B...s'est engagé à les acquitter, mais par son usage excessif pendant les heures de travail ; M. B...a souscrit de son propre chef, à la place du forfait qu'avait choisi la commune, un abonnement comprenant l'accès à l'internet et les appels internationaux, puis a changé d'appareil sans l'autorisation du maire ; les relevés téléphoniques montrent qu'il a envoyé en moyenne 1 300 SMS par mois entre avril et octobre 2011, tant en dehors qu'au cours de ses heures de travail ;
- le comportement de M. B...au cours des années ayant précédé la sanction ne peut être qualifié d'irréprochable ; les faits reprochés constituent un manquement à la probité et portent atteinte à l'image de la fonction publique ; ils ont eu pour effet une perte de confiance du maire à l'égard de cet agent, dès lors qu'il a abusé des conditions de travail inhérentes à sa fonction ; les faits qui sont à l'origine de la sanction sont incompatibles avec son statut, qui lui impose d'adopter un comportement exemplaire ; la circonstance qu'il ait remis la médaille du travail à M. B...postérieurement aux faits est sans incidence sur la légalité de la sanction ;
- la sanction n'est pas disproportionnée ; il n'était pas tenu par la proposition du conseil de discipline ; il a modéré sa position, dès lors qu'il envisageait au départ de prononcer la révocation ; la sanction infligée n'aggrave pas la situation de M. B...par rapport à celle qu'a proposée le conseil de discipline.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- le décret n° 94-731 du 24 août 1994 portant statut particulier du cadre d'emplois des gardes champêtres ;
- le décret n° 89-677 du 18 septembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Peuvrel, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Clément, rapporteur public ;
- et les observations de Me A...C..., pour la commune de Saint-Amant-Tallende.
1. Considérant que M.B..., devenu garde-champêtre principal le 1er novembre 2005, exerce ses fonctions au sein de la commune de Saint-Amant-Tallende depuis le 1er mai 1993 ; qu'il a été suspendu de ses fonctions par arrêté du maire du 31 janvier 2012 ; qu'après avis du conseil de discipline, le maire de la commune de Saint-Amant-Tallende l'a, par arrêté du 24 mai 2012, exclu temporairement de ses fonctions pour une durée de trois mois assortie d'un sursis de deux mois, à compter du 26 mai 2012 ; que le recours gracieux présenté par M. B...contre cet arrêté a été rejeté par une décision du 20 juillet 2012 ; que, par un jugement du 19 décembre 2013, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté la demande de M. B... tendant à l'annulation de cet arrêté et de la décision de rejet de son recours gracieux ; que M. B...relève appel de ce jugement ;
Sur la légalité de la sanction :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret susvisé du 24 août 1994 : " (...) Les gardes champêtres assurent les missions qui leur sont spécialement confiées par les lois et les règlements en matière de police rurale. Ils exécutent les directives que leur donne le maire dans l'exercice de ses pouvoirs de police. " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, pour prononcer à l'encontre de M. B...une exclusion temporaire de fonctions d'une durée de trois mois assortie d'un sursis de deux mois, le maire de la commune de Saint-Amant-Tallende s'est fondé, d'une part, sur l'appropriation, par l'intéressé, de matériel communal constitué d'une échelle, de banderoles et de panneaux de signalisation et, d'autre part, sur son usage abusif et à des fins personnelles du téléphone portable mis à sa disposition pour les besoins du service ; qu'elle a considéré que ces faits étaient constitutifs d'un manquement à l'obligation de probité et d'une atteinte à l'image de l'administration et à la considération portée aux agents de la fonction publique, ainsi qu'à la relation de confiance entre la commune et son agent ;
4. Considérant, en premier lieu, que, dès lors que le prononcé de sanctions disciplinaires est indépendant de l'engagement et de l'aboutissement de procédures pénales pour les mêmes faits, M. B...ne peut utilement se prévaloir de ce que la plainte déposée contre lui a fait l'objet d'un classement sans suite par le procureur de la République ;
5. Considérant, en deuxième lieu, que le juge administratif, dans l'appréciation qu'il porte pour déterminer si une sanction a été légalement infligée, n'est pas tenu de reprendre textuellement les motifs retenus par l'autorité disciplinaire ; qu'ainsi, les premiers juges ont pu à bon droit estimer que les faits reprochés à M. B...révélaient un manque de respect de l'autorité territoriale, même si la commune ne les avait pas qualifiés comme tels ;
6. Considérant, en troisième lieu, d'une part, que, si M. B...récuse l'accusation de vol, il ne conteste pas s'être approprié des matériels communaux ; que, s'il soutient que ces matériels n'appartenaient pas tous à la commune, qu'il n'en a tiré aucun bénéfice personnel, ayant donné l'échelle à un tiers qui en avait besoin et d'autres biens, dont il fait valoir qu'ils étaient vétustes et destinés à la déchetterie, à des associations communales, ces circonstances ne l'autorisaient pas à soustraire des locaux de la commune, sans aucune autorisation, des matériels appartenant à la collectivité ; que, d'autre part, il ressort des pièces du dossier qu'en 2011, l'intéressé a, à plusieurs reprises, excédé le forfait téléphonique dont il disposait dans le cadre de ses activités professionnelles et envoyé, entre avril et octobre 2011, une moyenne de 1 300 SMS par mois ; qu'il a également, sans l'autorisation de la commune, souscrit un nouveau forfait, incluant l'accès à l'internet et les appels internationaux, et fait procéder au changement de l'appareil ; que, s'il soutient avoir admis qu'il était débiteur des communications passées hors forfait, s'il fait valoir que l'appareil était vétuste et dysfonctionnait et s'il reconnaît avoir commis une erreur, il ne conteste pas avoir fait usage, à des fins personnelles et de manière excessive, y compris pendant ses horaires de travail, du téléphone mis à sa disposition par la commune ; que, dès lors, M.B..., fonctionnaire assermenté, dont les fonctions relèvent du cadre d'emplois de police municipale et qui dispose, à ce titre, d'un agrément du procureur de la République, n'est pas fondé à soutenir que la commune de Saint-Amant-Tallende, en estimant que les faits qui lui étaient reprochés révélaient un manquement à son obligation de probité et étaient de nature à porter atteinte à l'image des agents de la fonction publique, et en prononçant pour ces motifs la sanction en litige, aurait commis une erreur d'appréciation ;
7. Considérant qu'il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire que l'autorité disciplinaire serait liée, dans le choix de la sanction qu'elle inflige, par l'avis du conseil de discipline ; qu'en l'espèce, ce conseil, réuni le 4 avril 2012, a voté à l'unanimité en faveur d'une exclusion temporaire de fonctions d'une durée d'un mois ; que la commune, qui avait initialement envisagé de prononcer la révocation de M.B..., justifie l'application d'une sanction d'exclusion de trois mois assortie d'un sursis de deux mois, plus sévère que la sanction proposée par le conseil de discipline, par la nécessité d'adapter la sanction aux faits reprochés et par la volonté, compte tenu de l'autonomie dont dispose l'intéressé dans l'exercice de ses fonctions, d'éviter toute récidive ; qu'au regard de la gravité des faits reprochés, la sanction retenue par le maire de la commune de Saint-Amant-Tallende n'apparaît pas disproportionnée, alors même qu'elle est plus sévère que la sanction proposée par le conseil de discipline ;
8. Considérant, en cinquième et dernier lieu, que si M. B...fait valoir que la qualité de son travail n'a jamais été remise en cause et que son action au service de la collectivité a toujours été saluée, y compris postérieurement aux faits en litige, ces circonstances sont sans incidence sur la légalité des actes attaqués ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir que la commune oppose à la demande de première instance, que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire de Saint-Amant-Tallende du 24 mai 2012 et de la décision du 20 juillet 2012 rejetant son recours gracieux contre cet arrêté ;
Sur les frais non compris dans les dépens :
10. Considérant, d'une part, qu'il ne résulte pas de l'instruction que les premiers juges auraient fait une évaluation erronée des frais exposés par la commune de Saint-Amant-Tallende en première instance, en mettant à la charge de M.B..., partie perdante, une somme de 800 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
11. Considérant, d'autre part, que ces mêmes dispositions font obstacle à ce que la somme que M. B...demande en appel au titre de ses frais non compris dans les dépens soit mise à la charge de la commune de Saint-Amant-Tallende qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B...le versement à la commune Saint-Amant-Tallende d'une somme de 1 000 euros à ce titre ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : M. D...B...versera une somme de 1 000 euros à la commune de Saint-Amant-Tallende au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...B...et à la commune de Saint-Amant-Tallende.
Délibéré après l'audience du 3 novembre 2015, à laquelle siégeaient :
M. Boucher, président de chambre ;
M. Drouet, président-assesseur ;
Mme Peuvrel, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 1er décembre 2015.
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N° 14LY00685