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17/11/2015 | FRANCE | N°14LY01624

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 17 novembre 2015, 14LY01624


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler la décision implicite de rejet opposée par le ministre du travail, de l'emploi et de la santé à sa réclamation, présentée le 13 septembre 2010, en vue de l'inscription de l'établissement des Ancizes (Puy-de-Dôme) de la société Aubert et Duval, sur la liste des établissements ouvrant droit au dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante.

Par un jugement n° 1002116 du 7 juin 2012, le tribunal

administratif de Clermont-Ferrand a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 12LY01895...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler la décision implicite de rejet opposée par le ministre du travail, de l'emploi et de la santé à sa réclamation, présentée le 13 septembre 2010, en vue de l'inscription de l'établissement des Ancizes (Puy-de-Dôme) de la société Aubert et Duval, sur la liste des établissements ouvrant droit au dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante.

Par un jugement n° 1002116 du 7 juin 2012, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 12LY01895 du 7 mai 2013, la cour administrative d'appel de Lyon a :

- annulé ce jugement en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande de M. B... tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet de sa réclamation en ce qu'elle porte sur la période antérieure au 8 février 2005 ;

- annulé la décision implicite de rejet de la réclamation présentée par M. B...le 13 septembre 2010 en ce qu'elle porte sur la période antérieure au 8 février 2005 ;

- enjoint au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social de procéder à l'inscription de l'aciérie des Ancizes sur la liste prévue au 1° du I de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998, pour la période allant de 1917 au 7 février 2005, dans le délai de deux mois suivant la date de notification de l'arrêt.

Par une décision n° 368468 du 19 mai 2014, le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt du 7 mai 2013 en tant qu'il a prononcé l'annulation du jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 7 juin 2012 et de la décision implicite de rejet de la réclamation de M. B... du 13 septembre 2010 et en tant qu'il a enjoint au ministre chargé du travail de procéder à l'inscription de l'aciérie des Ancizes sur la liste prévue au 1° du I de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998, pour la période allant de 1993 au 7 février 2005 et a renvoyé l'affaire à la Cour dans cette mesure.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 19 juillet 2012 et 31 octobre 2014, M. B..., représenté par la SCP Teissonnière et associés, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement n° 1002116 du 7 juin 2012, par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle le ministre chargé du travail a rejeté sa demande du 10 septembre 2010 tendant à l'inscription de l'établissement des Ancizes de la société Aubert et Duval sur la liste des établissements ouvrant droit au dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, pour la période allant de 1993 à 2005 ;

2°) d'annuler dans la même mesure la décision implicite de rejet né du silence gardé par le ministre chargé du travail sur sa demande du 10 septembre 2010 ;

3°) d'ordonner au ministre d'inscrire l'établissement des Ancizes, sur la liste des établissements susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante pour la période comprise entre 1993 et 2005, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- pendant toute la période de 1993 à 2005, des opérations de calorifugeage à l'amiante et de décalorifugeage ont perduré de façon très significative au sein de l'établissement, ainsi qu'en attestent les documents qu'il produit ;

- conformément à la décision du Conseil d'Etat du 19 mai 2014, il n'entend plus invoquer la méconnaissance de l'autorité de chose jugée s'attachant à un précédent arrêt de la Cour du 18 décembre 2008, pour la période postérieure à 1992.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 21 septembre 2012 et le 8 juillet 2014, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que l'activité principale de la société Aubert et Duval n'entre pas dans le champ d'application du dispositif législatif de la cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante ; de plus, le 24 décembre 2009, l'inspecteur du travail a mené une enquête qui précise que l'activité de calorifugeage n'a été essentielle que pour les postes de maçons fumistes représentant un effectif de trente-sept salariés ; ce rapport précise également que des activités de calorifugeage à l'amiante étaient effectuées ponctuellement par les salariés affectés sur des postes de sourciers, mouleurs sourciers, fondeurs, électriciens, et les personnes affectées au traitement thermique ; ainsi, la proportion de salariés exposés était marginale et donc insuffisamment significative au regard de l'effectif de l'établissement estimé à huit mille salariés présents sur une période de quarante-sept années s'étendant de 1945 à 1995 ; en outre, l'établissement a limité progressivement l'utilisation d'amiante dès 1977 pour en arrêter définitivement l'utilisation en 1992 ; enfin, le critère lié à l'existence de cas de maladies professionnelles liées à l'amiante au sein de l'établissement n'est pas à lui seul pertinent pour justifier une inscription sur la liste prévue à l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 ; la décision contestée n'est ainsi entachée d'aucune erreur manifeste d'appréciation.

Par des mémoires enregistrés, les 17 octobre et 9 novembre 2012 et les 10 juillet et 22 décembre 2014, la société Aubert et Duval, représentée par la SCP d'avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de Cassation Célice-C... -Soltner, conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que ces opérations accessoires de calorifugeage à l'amiante n'ont pas été pratiquées au-delà de 1992, ainsi que cela ressort des trois rapports d'enquêtes établis contradictoirement par la direction régionale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle d'Auvergne ainsi que des rapports d'activité du service médical d'entreprise, dont les conclusions ne sont pas utilement contredites par le document produit par M. B....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique du 13 octobre 2015 :

- le rapport de Mme Dèche ;

- les conclusions de M. Clément, rapporteur public ;

- et les observations de MeD..., pour M.B..., ainsi que celles Me C..., pour la société Aubert et Duval.

1. Considérant que par un arrêt du 18 décembre 2008, la présente Cour a confirmé le jugement du 24 novembre 2006 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand, sur la demande du syndicat CGT de l'aciérie des Ancizes de la société Aubert et Duval avait, d'une part, annulé une décision du ministre chargé du travail du 7 février 2005 refusant d'inscrire cette aciérie sur la liste des établissements ouvrant droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, prévue par l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999 et avait, d'autre part, enjoint au ministre de procéder à un nouvel examen de la demande du syndicat ; qu'un nouveau refus d'inscription a été opposé à cette demande par une décision du 27 février 2007 ; que, par un courrier adressé le 13 septembre 2010 au directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) d'Auvergne, M.B..., salarié de l'aciérie, a de nouveau sollicité l'inscription de l'établissement sur la même liste ; que par un jugement du 7 juin 2012, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté la demande de M. B...tendant à l'annulation du refus implicite opposé par l'administration à sa demande d'inscription ; que par un arrêt du 7 mai 2013, la Cour a annulé ce jugement ainsi que la décision implicite de rejet de la réclamation de M. B...du 13 septembre 2010, en tant que ce jugement et ce refus portent sur la période antérieure au 8 février 2005 et a enjoint au ministre chargé du travail de procéder à l'inscription de l'aciérie des Ancizes sur la liste prévue au 1° du I de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998, pour la période allant de 1917 au 7 février 2005, dans le délai de deux mois suivant la date de notification de son arrêt ; que par une décision n° 368468 du 19 mai 2014, le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt du 7 mai 2013 en tant qu'il se prononce sur la période allant de 1993 au 7 février 2005 et a renvoyé dans cette mesure le jugement de l'affaire à la Cour ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 : " I. Une allocation de cessation anticipée d'activité est versée aux salariés et anciens salariés des établissements de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, des établissements de flocage et de calorifugeage à l'amiante ou de construction et de réparation navales, sous réserve qu'ils cessent toute activité professionnelle, lorsqu'ils remplissent les conditions suivantes : / 1° Travailler ou avoir travaillé dans un des établissements mentionnés ci-dessus et figurant sur une liste établie par arrêté des ministres chargés du travail, de la sécurité sociale et du budget, pendant la période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante. L'exercice des activités de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, de flocage et de calorifugeage à l'amiante de l'établissement doit présenter un caractère significatif ; (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que peuvent seuls être légalement inscrits sur la liste qu'elles prévoient les établissements dans lesquels les opérations de fabrication de l'amiante, de calorifugeage ou de flocage à l'amiante ont, compte tenu notamment de leur fréquence et de la proportion de salariés qui y ont été affectés, représenté sur la période en cause une part significative de leur activité, peuvent être inscrits sur la liste des établissements ouvrant droit, sous certaines conditions, au versement de l'allocation de cessation anticipée d'activité au profit de leurs salariés et anciens salariés ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment de trois rapports de la direction régionale du travail en date des 8 octobre 2004, 4 janvier 2007 et 24 décembre 2009, que si la société Aubert et Duval a utilisé de l'amiante sur le site des Ancizes à des fins de calorifugeage, notamment dans le service de maintenance, l'amiante a été remplacée dès 1992, dans ce secteur, par des matériaux de substitution ; qu'il ressort également d'une note en date du 1er mars 1991 qu'était prévue la poursuite de l'utilisation, jusqu'à épuisement, de stocks de produits contenant de l'amiante dite "dormante" et l'arrêt de l'utilisation de l'amiante dite "de consommation courante" avec un remplacement très rapide des produits concernés par des matériaux de substitution ; qu'en 1992, une note du service "achat" a interdit l'approvisionnement en produits et matériaux contenant de l'amiante et qu'en 1995, un groupe de travail a été créé afin de recenser la présence d'amiante et d'organiser son remplacement ainsi que son élimination ; que M. B...produit une enquête réalisée en 2012 par des membres du personnel de la société concluant à une utilisation significative de l'amiante pour le calorifugeage et le décalorifugeage jusqu'en 1997 et à une utilisation fréquente de l'amiante jusqu'en 1997 ; que, toutefois, ce document, qui s'avère très insuffisamment circonstancié et précis sur la période concernée, ne permet pas de contredire utilement les rapports de la direction régionale du travail ; que le requérant fait valoir que des opérations de désamiantage ont eu lieu après 1997, date à partir de laquelle un plan de retrait de l'amiante a été mis en place dans le cadre de mesures de dépollution du four RS 14 et que ces opérations se sont poursuivies jusqu'en 2004, compte tenu de l'importance du chantier, une facture du transporteur faisant état de quatre tonnes de déchets d'amiante à évacuer ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que ces opérations n'étaient pas effectuées par des salariés de l'entreprise, mais par des sociétés extérieures spécialisées pour ce type d'opération ; qu'en outre, si les opérations évoquées par le requérant sont susceptibles de révéler la présence d'amiante dans les locaux de l'entreprise après 1992, elles ne permettent pas d'établir la persistance d'activités de calorifugeage ou de flocage à l'amiante postérieurement à cette date ; qu'enfin, les documents produits par le requérant, consistant en des bordereaux de commande de produits divers établis postérieurement à 1992, ne permettent pas à eux seuls d'établir que ces matériaux contiendraient de l'amiante ou qu'ils seraient utilisés pour des opérations de calorifugeage à l'amiante ; que, dans ces conditions, par les éléments qu'il produit, M. B...n'établit pas la persistance, dans l'établissement concerné, d'activités significatives de calorifugeage ou de flocage à l'amiante postérieurement à 1992 ; qu'il n'est ainsi pas fondé à soutenir qu'en rejetant sa demande d'inscription de l'établissement des Ancizes sur la liste des établissements ouvrant droit au dispositif de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante, le ministre chargé du travail aurait méconnu les dispositions précitées de la loi du 23 décembre 1998 ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif Clermont-Ferrand a rejeté sa demande d'annulation de la décision implicite de rejet de sa réclamation du 13 septembre 2010, en tant qu'elle portait sur la période allant de 1993 au 8 février 2005 ; que, par voie de conséquence, ses conclusions accessoires à fin d'injonction et celles qu'il présente au titre de ses frais non compris dans les dépens sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B..., au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et à la société Aubert et Duval.

Délibéré après l'audience du 13 octobre 2015 à laquelle siégeaient :

M. Boucher, président de chambre ;

M. Drouet, président-assesseur ;

Mme Dèche, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 novembre 2015.

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N° 14LY01624


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY01624
Date de la décision : 17/11/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Santé publique - Lutte contre les fléaux sociaux.

Travail et emploi - Conditions de travail.


Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: M. CLEMENT
Avocat(s) : TEISSONNIERE TOPALOFF LAFFORGUE

Origine de la décision
Date de l'import : 05/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-11-17;14ly01624 ?
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