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15/10/2015 | FRANCE | N°11LY01862

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 15 octobre 2015, 11LY01862


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G...F...a demandé au tribunal administratif de Grenoble de lui accorder la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 1995 et 1996 et la restitution des sommes perçues, assorties des intérêts moratoires.

Par un jugement n° 0203468 du 16 décembre 2004, le tribunal administratif de Grenoble a prononcé une réduction de 210 000 francs de la base d'imposition de M. F...à l'impôt sur le revenu

au titre de l'année 1995 et réduit en conséquence les cotisations supplémentaires d'...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G...F...a demandé au tribunal administratif de Grenoble de lui accorder la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 1995 et 1996 et la restitution des sommes perçues, assorties des intérêts moratoires.

Par un jugement n° 0203468 du 16 décembre 2004, le tribunal administratif de Grenoble a prononcé une réduction de 210 000 francs de la base d'imposition de M. F...à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 1995 et réduit en conséquence les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1995, déchargé M. F...des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1996 et rejeté le surplus de sa demande.

Par un arrêt n° 05LY00621 du 10 juillet 2008, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté la requête de M.F....

Par une décision n° 330051 du 8 juin 2011 le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt n° 05LY00621 du 10 juillet 2008 et renvoyé l'affaire à la cour administrative d'appel de Lyon.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 18 avril 2005, et des mémoires complémentaires, enregistrés le 11 mai 2006, le 5 juin 2008 et le 9 décembre 2011, M.F..., représenté par Me E..., demande à la cour, dans le dernier état de ses conclusions :

1°) d'annuler l'article 4 du jugement n° 0203468 du 16 décembre 2004 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales maintenues à sa charge au titre de l'année 1995 et d'ordonner la restitution des sommes indûment perçues avec les intérêts de droit au taux légal ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 15 758,48 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les dépens de première instance et d'appel.

Il soutient que :

- sa requête n'est pas tardive, le jugement attaqué ne lui ayant pas été notifié, la signature d'un représentant du greffe pénitentiaire de la maison d'arrêt de Bois d'Arcy sur l'accusé de réception de la lettre de notification de ce jugement n'étant pas de nature à faire courir le délai de recours qui lui était imparti ;

- le jugement attaqué est irrégulier dès lors qu'il n'a pas été répondu aux moyens de sa demande relative à la taxation d'office d'une somme de 130 000 francs correspondant à quatre versements en espèces sur son compte bancaire au titre de l'année 1995 et que les premiers juges se sont prononcés au vu d'un dossier incomplet ;

- les dispositions de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales ont été méconnues eu égard à la durée de l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle dont il a fait l'objet, ce qui doit entraîner la décharge des impositions restant en litige sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales, l'administration fiscale n'ayant recueilli auprès de l'autorité judiciaire que des éléments intéressant l'année 1996, sans incidence sur les impositions restant en litige au titre de l'année 1995 et l'administration fiscale ne l'ayant au surplus pas informé de la prolongation du délai d'un an conformément aux dispositions de l'instruction administrative référencée 13 L 1314 dont il se prévaut eu égard aux dispositions de la charte du contribuable, de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 et de l'article 8 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 ;

- la procédure de taxation d'office mise en oeuvre est dépourvue de fondement, s'agissant des crédits d'un montant total de 202 000 francs correspondant à des remboursements de prêts pour lesquels l'administration fiscale a entendu se prévaloir de sa doctrine référencée 13 O 1221 en matière d'administration de la preuve ;

- un crédit de 130 000 francs, qui représente une partie des montants versés par le Crédit Mobilier de Monaco dans le cadre de prêts sur gages qui lui ont été consentis pour un montant total de 210 000 francs, a fait l'objet de deux taxations distinctes et que la décision de rejet de la réclamation contient une interprétation irrégulière de la notification de redressements ;

- des crédits d'un montant total de 202 000 francs correspondent à cinq prêts consentis par Mme B...A..., veuveC..., l'administration fiscale n'étant pas fondée à lui opposer une doctrine illégale pour imposer ces crédits, la procédure de taxation d'office n'étant pas applicable à ces crédits ;

- les premiers juges ont retenu à tort qu'il ne justifiait pas d'une somme de 11 000 francs imposée au titre de l'année 1995 alors que ce montant correspond à hauteur de 4 500 francs à la réalisation du gage objet du contrat de prêt n° 97182 en date du 17 mai 1994 et à hauteur de 6 500 francs au remboursement d'un prêt amical consenti à M.D....

Par des mémoires en défense enregistrés les 17 octobre 2005, 28 septembre 2011 et 7 février 2012, le ministre chargé du budget conclut au rejet de la requête en soutenant qu'elle est tardive et infondée.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 ;

- le décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983, alors en vigueur ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pourny,

- et les conclusions de Mme Chevalier-Aubert, rapporteur public.

1. Considérant que M.F..., qui a exercé une activité de conseil dans le département des Alpes-Maritimes, a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle portant sur les années 1994 à 1996, à l'issue duquel il a été assujetti à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales ; que, pour l'année 1995, restant seule en litige, ces cotisations résultent, d'une part, de la taxation d'office sur le fondement des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales de revenus d'origine indéterminée et, d'autre part, de l'imposition, selon la procédure contradictoire, de sommes d'un montant total de 210 000 francs provenant de Monaco sur le fondement de l'article 1649 A du code général des impôts ; que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a déchargé M. F...des compléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales et des pénalités correspondantes établis au titre de l'année 1996 et a réduit la base d'imposition de l'année 1995 d'un montant de 210 000 francs ; que M. F... relève appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande tendant à la décharge des impositions et contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1995 ;

Sur la fin de non recevoir opposée par le ministre :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 811-2 du code de justice administrative : " Sauf disposition contraire, le délai d'appel est de deux mois. Il court contre toute partie à l'instance à compter du jour où la notification a été faite à cette partie dans les conditions prévues aux articles R.751-3 et R.751-4 (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 751-3 du même code : " Sauf disposition contraire, les décisions sont notifiées le même jour à toutes les parties en cause et adressées à leur domicile réel, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception (...) " ; que, lorsque le pli recommandé contenant le jugement du tribunal administratif a été notifié à l'adresse que le destinataire a communiquée à la juridiction et qui correspond au lieu où il est incarcéré, la signature de l'avis de réception de ce pli par un agent de l'administration pénitentiaire atteste seulement que ce pli est bien parvenu à cette adresse ; que, compte tenu de la situation particulière dans laquelle se trouve une personne incarcérée, le délai d'appel de deux mois ouvert contre ce jugement ne court à l'encontre de cette personne qu'à compter du jour où l'administration pénitentiaire lui a remis effectivement ce pli ; que le juge établit la date de remise effective du pli à l'intéressé au vu des échanges entre les parties et des éventuelles mesures d'instruction qu'il ordonne ;

3. Considérant que si le ministre soutient que la requête de M. F...est tardive, il résulte de l'instruction que l'administration pénitentiaire n'a pas été en mesure d'apporter la preuve de la remise du pli contenant la notification du jugement attaqué à M.F..., qui n'a pas émargé le registre du vaguemestre de la maison d'arrêt de Bois d'Arcy où il était incarcéré ; que, par suite, le point de départ du délai d'appel ne pouvant être déterminé, la fin de non recevoir tirée de la tardiveté de la requête ne peut être retenue ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 611-10 du code de justice administrative, dans sa rédaction alors en vigueur : " Sous l'autorité du président de la formation de jugement à laquelle il appartient, le rapporteur fixe, eu égard aux circonstances de l'affaire, le délai accordé aux parties pour produire leurs mémoires. Il peut demander aux parties, pour être jointes à la procédure contradictoire, toutes pièces ou tous documents utiles à la solution du litige. " ; que si ces dispositions permettent au rapporteur chargé de l'instruction d'une affaire de demander aux parties de produire toute pièce utile à la formation de jugement pour rendre sa décision, elles ne lui imposent pas pour autant d'inviter les parties à justifier du bien-fondé de leur argumentation ; que, par suite, et contrairement à ce que soutient M.F..., le tribunal, qui a fondé sa décision sur les seules pièces versées au dossier par les parties, n'a entaché son jugement d'aucune irrégularité en s'abstenant de demander la production des pièces que M. F...a fournies à l'administration fiscale avant la saisine de la juridiction administrative ;

5. Considérant, en second lieu, que les impositions à l'impôt sur le revenu eet aux contributions sociales mises en recouvrement au titre de l'année 1995 font suite à la taxation d'office, selon la procédure prévue par les articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales, de revenus d'origine indéterminée d'un montant de 343 000 francs et à l'imposition, sur le fondement de l'article 1649 A du code général des impôts, de sommes d'un montant de 210 000 francs présentées comme provenant de Monaco ; que les revenus d'origine indéterminée se décomposent eux-mêmes en crédits bancaires d'un montant total de 202 000 francs, identifiés comme reçus de MmeC..., en versements d'espèces d'un montant total de 130 000 francs, qui proviendraient d'avances consenties au requérant à Monaco, et en un versement d'espèces d'un montant de 11 000 francs ; que, si le tribunal administratif s'est prononcé sur les impositions consécutives à la taxation sur le fondement de l'article 1649 A du code général des impôts des sommes de 210 000 francs présentées comme provenant de Monaco, il ne s'est pas prononcé sur la taxation distincte, sur le fondement des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales, des versements d'espèces, d'un montant total de 130 000 francs qui proviendraient de Monaco, constatés sur les comptes de l'intéressé ; que, par suite, il a insuffisamment motivé son jugement sur ce point ;

6. Considérant que, par suite, M. F...est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il rejette ses conclusions relatives aux impositions procédant de la taxation d'office de ce montant de 130 000 francs ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu pour la cour de statuer immédiatement par voie d'évocation sur le litige relatif à ces impositions et de se prononcer par la voie de l'effet dévolutif de l'appel sur le surplus des impositions restant en litige ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

En ce qui concerne la durée de l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle :

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Dans les conditions prévues au présent livre, l'administration des impôts peut procéder à l'examen contradictoire de la situation fiscale des personnes physiques au regard de l'impôt sur le revenu, qu'elles aient ou non leur domicile fiscal en France, lorsqu'elles y ont des obligations au titre de cet impôt. / A l'occasion de cet examen, l'administration peut contrôler la cohérence entre, d'une part les revenus déclarés et, d'autre part, la situation patrimoniale, la situation de trésorerie et les éléments du train de vie des membres du foyer fiscal. / Sous peine de nullité de l'imposition, un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle ne peut s'étendre sur une période supérieure à un an à compter de la réception de l'avis de vérification. / (...) / La période mentionnée au troisième alinéa est portée à deux ans en cas de découverte, en cours de contrôle, d'une activité occulte. Il en est de même lorsque, dans le délai initial d'un an, les articles L. 82 C ou L. 101 ont été mis en oeuvre. " ;

8. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que M. F...a fait l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle concernant les années 1994 et 1995 à compter du 19 mars 1997, date de réception de l'avis de vérification ; qu'il est constant que l'administration fiscale a mis en oeuvre les dispositions de l'article L. 101 du livre des procédures fiscales dans le délai d'un an suivant l'engagement de cet examen contradictoire de situation fiscale personnelle ; que, si les renseignements recueillis à cette occasion n'ont donné lieu à aucun redressement, cette circonstance n'affecte pas la régularité de l'allongement de la période de contrôle prévu par les dispositions de l'article L. 12 du même livre ; que, par suite, cet examen s'étant achevé au plus tard le 20 juillet 1998, date de la notification de redressements concernant l'année 1995, et donc moins de deux ans après l'engagement de cet examen, les dispositions de l'article L. 12 du livre des procédures fiscales relatives à la durée d'un tel contrôle n'ont pas été méconnues ;

9. Considérant, en deuxième lieu, qu'aucune disposition de la charte du contribuable vérifié ne prévoit que le contribuable soit informé de la prolongation de la durée de l'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle ;

10. Considérant, en troisième lieu, que les dispositions de la doctrine administrative contenue dans la documentation de base sous la référence 13 L 1314, qui prévoient une information du contribuable par lettre recommandée avec accusé de réception lorsque le délai de deux ans trouve à s'appliquer, ne peuvent être invoquées par un contribuable ni sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, dès lors qu'elles sont relatives à la procédure d'imposition, ni sur celui du décret du 28 novembre 1983, alors en vigueur, dès lors qu'elles ajoutent à la loi ;

11. Considérant, en quatrième lieu enfin, qu'aux termes de l'article 8 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978, dans sa rédaction alors en vigueur : " Sauf disposition prévoyant une décision implicite de rejet ou un accord tacite, toute décision individuelle prise au nom de l'Etat (...) n'est opposable à la personne qui en fait l'objet que si cette décision lui a été préalablement notifiée. " ; que la prolongation du délai, prévue à l'article L. 12 du livre des procédures fiscales en cas de mise en oeuvre des dispositions des articles L. 82 C ou L. 101 du livre des procédures fiscales, procède des dispositions législatives de cet article et non d'une décision individuelle de l'administration ; que, par suite, en l'absence de décision individuelle prise par l'administration, M. F... n'est, en tout état de cause, pas fondé à se prévaloir des dispositions de l'article 8 de la loi du 17 juillet 1978 pour soutenir que la prolongation du délai d'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle devait lui être notifiée pour lui être opposable ;

En ce qui concerne la mise en oeuvre de la procédure de taxation d'office :

12. Considérant qu'aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au présent litige : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements (...) / Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 16 A du même livre: " (...) Lorsque le contribuable a répondu de façon insuffisante aux demandes d'éclaircissements ou de justifications, l'administration lui adresse une mise en demeure d'avoir à compléter sa réponse dans un délai de trente jours en précisant les compléments de réponse qu'elle souhaite " ; qu'aux termes de l'article L. 69 du même livre : " (...) sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16 " ;

13. Considérant qu'il n'est pas contesté que M. F...avait déclaré 78 185 francs de revenus au titre de l'année 1995 alors que le total des crédits bancaires constatés sur ses comptes, hors virements de compte à compte, s'est élevé à 593 423 francs ; que l'administration fiscale était par suite en droit de lui adresser le 11 juin 1997, sur le fondement des dispositions de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, une demande de justifications concernant certains crédits constatés sur ses comptes bancaires ; que si M. F...a répondu à cette demande de justifications en fournissant des justificatifs de l'origine de certains des crédits constatés sur ses comptes bancaires, il n'a pas fourni des justificatifs suffisants pour établir le caractère non imposable d'autres crédits de sorte que l'administration a pu lui adresser le 27 août 1997 une mise en demeure lui demandant, sur le fondement des dispositions de l'article L. 16 A du livre des procédures fiscales, des précisions concernant ces crédits regardés comme insuffisamment justifiés ; que ce faisant, en l'invitant à justifier les remboursements de prêts allégués et en lui indiquant notamment qu' " à défaut de convention ayant date certaine ", il pouvait " justifier de ces prêts et de leur remboursement par tout document ", l'administration a fait application de la loi prévoyant l'envoi d'une mise en demeure préalable à la taxation d'office en cas de réponse insuffisante à une demande de justifications ; qu'il en résulte que, contrairement à ce que soutient le requérant, l'imposition ne peut être regardée comme ayant été établie sur le seul fondement de la doctrine administrative contenue dans la documentation de base sous la référence 13 O 1221, qui indique qu'un contribuable ne peut utilement se prévaloir d'attestations dépourvues de date certaine ; que le moyen invoqué doit par suite être écarté ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne les crédits d'un montant de 202 000 francs provenant de MmeC... :

14. Considérant que l'administration fiscale a procédé à la taxation d'office selon la procédure prévue par les articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales des crédits de 37 000 francs au 9 février 1995, 120 000 francs au 16 février 1995, 1 000 francs au 27 septembre 1995, 14 000 francs au 12 octobre 1995 et 30 000 francs au 19 décembre 1995 ; que ces sommes ont été remises par chèque de MmeC..., ressortissante italienne résidant en Suisse ;

15. Considérant, en premier lieu, que si Mme C...indique dans une attestation en date du 4 février 1995 avoir requis M. F..." à l'effet de lui consentir plusieurs avances en espèces ", d'un montant global de 37 000 francs, et l'avoir remboursé au moyen d'un chèque de même montant et si le requérant justifie de retraits d'espèces sur ses comptes au cours des années 1994 et 1995, il n'est pas établi que les sommes retirées aient été remises à MmeC... ; que, dès lors, cette attestation et les retraits opérés sur les comptes du requérant ne sauraient suffire à établir que le crédit de 37 000 francs constaté sur le compte de M. F...n'avait pas un caractère imposable ;

16. Considérant, en deuxième lieu, que si M. F...se prévaut d'une convention sous seing privé en date du 14 février 1995 indiquant que, suite à une fracture de la porte de son domicile, il a remis une somme de 120 000 francs en espèces à Mme C...qui lui a remis le même jour un chèque de même montant, il ne justifie pas de l'origine, et par suite du caractère non imposable des 120 000 francs, qu'il aurait remis à MmeC... ; que, dès lors, l'administration était fondée à taxer d'office ce montant de 120 000 francs ;

17. Considérant, en troisième lieu, que si Mme C...indique avoir fait un chèque de 1 000 francs à M.F..., le 25 septembre 1995, pour le rembourser de dépenses lui incombant qu'il aurait prises en charge, le montant de ce chèque ne correspond pas à celui de la facture de foie gras versée au dossier par le requérant ; qu'il n'est en outre pas établi que les produits achetés par le requérant ont été livrés à MmeC... ; qu'il n'est par suite pas établi que ce chèque correspond au remboursement d'une avance et que cette somme de 1 000 francs n'avait pas un caractère imposable ;

18. Considérant, en quatrième lieu, que si M. F...justifie de débits sur son compte correspondant à des dépenses réglées par carte bancaire, il n'est pas établi que ces dépenses ont été effectuées au profit de MmeC... ; que, dès lors, une attestation de cette dernière, indiquant que l'intéressé a pris en charge 14 246,09 francs de dépenses pour son compte et a été remboursé par un chèque de 14 000 francs, ne saurait suffire à établir que le montant de 14 000 francs encaissé sur le compte de M.F..., au demeurant distinct du montant des dépenses effectuées, avait le caractère d'un remboursement de frais non imposable ;

19. Considérant en dernier lieu qu'une attestation de Mme C...indiquant avoir bénéficié de plusieurs avances en espèces de la part de M. F...au cours de l'année 1995 et l'avoir remboursé par un chèque de 30 000 francs ne permet pas de justifier de l'origine des espèces que M. F... aurait remises à Mme C...et du caractère de remboursement d'avances du chèque de 30 000 francs encaissé sur le compte du requérant ;

En ce qui concerne le versement d'espèces de 11 000 francs opéré le 6 juillet 1995 :

20. Considérant que M. F...soutient que le versement de 11 000 francs effectué sur son compte le 6 juillet 1995 correspond, à hauteur de 6 500 francs, au remboursement partiel d'un prêt qu'il aurait consenti à M. D...et à hauteur de 4 500 francs au produit de la vente d'un objet mis en gage au Crédit municipal de Nice ;

21. Considérant que s'il est établi que M. D...a bénéficié d'un virement de 10 000 francs en provenance d'un compte de M. F...et qu'il a procédé à des retraits d'espèces au cours de l'année 1995, il n'est pas établi qu'il a remis tout ou partie de ces espèces à M. F...en remboursement du prêt que ce dernier lui aurait consenti ; que, dès lors, en l'absence d'échéancier concernant le remboursement du prêt qui aurait été consenti à M. D...et de concordance de dates et de montants entre les retraits effectués sur le compte de M. D...et le versement effectué sur le compte de M.F..., le moyen tiré de ce qu'un versement d'espèces de 11 000 francs sur le compte du requérant serait justifié à hauteur de 6 500 euros par un remboursement partiel du prêt de 10 000 francs qu'il aurait consenti à M. D...doit être écarté ;

22. Considérant de même que s'il est établi que M. F...a reçu le 29 juin 1995 un versement en espèces de 4 700 francs, suite à la vente d'un objet mis en gage en 1994 au crédit municipal de Nice, il n'est pas établi que ces espèces ont été versées, à hauteur d'un montant de 4 500 francs, sur son compte bancaire le 6 juillet 1995 ;

En ce qui concerne les crédits d'un montant total de 130 000 francs :

23. Considérant que pour justifier les versements en espèces de 20 000 francs le 6 septembre 1995, 10 000 francs le 10 octobre 1995, 90 000 francs le 2 novembre 1995 et 10 000 francs le 3 novembre 1995, le requérant soutient que ces espèces proviennent d'avances qui lui ont été accordées lors de la mise en gage de bijoux dans un établissement monégasque ; que s'il est établi que la maison Templier, établie à Monaco, a reçu en gages des lots de bijoux qui lui ont été remis par M.F..., en échange de prêts pour des montants de 20 000 francs le 4 septembre 1995, 40 000 francs le 21 septembre 1995 et 90 000 francs le 31 octobre 1995, il n'est pas établi que le requérant détenait les bijoux remis en gage auprès de la maison Templier avant le 1er janvier de l'année d'imposition alors qu'au surplus, il n'y a pas de concordance de dates et de montant entre le prêt de 40 000 francs obtenu le 21 septembre 1995 et les deux versements de 10 000 francs constatés sur les comptes du requérant les 10 octobre et 3 novembre 1995 ; que, par suite, le requérant n'établit pas le caractère non imposable de ces crédits ;

Sur la régularité de la décision prise sur la réclamation contentieuse :

24. Considérant que les irrégularités qui peuvent entacher la décision prise par le directeur des services fiscaux sur la réclamation du contribuable ou la procédure d'instruction de cette réclamation sont sans incidence sur le bien-fondé de l'impôt et la régularité de la procédure d'imposition ; que M. F...ne peut, dès lors, utilement se prévaloir de ce que l'auteur de la décision de rejet de sa réclamation aurait illégalement modifié le cadre et les limites de l'imposition envisagée dans la notification de redressements du 20 juillet 1998 concernant la taxation d'office de sommes d'un montant total de 130 000 francs ;

25. Considérant qu'il résulte de l'ensemble ce qui précède que M. F...n'est ni fondé à demander la décharge des compléments d'impôt sur le revenu et des contributions sociales consécutifs à la taxation d'office de revenus d'origine indéterminée d'un montant total de 130 000 francs ni fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

26. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, verse à M. F... une somme au titre des frais exposés en cours d'instance et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble en date du 16 décembre 2004 est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de M. F...concernant les impositions procédant du redressement relatif à la taxation d'office d'une somme de 130 000 francs au titre de l'année 1995.

Article 2 : Les conclusions de la demande de M. F...relative aux impositions procédant de ce redressement de 130 000 francs notifié au titre de l'année 1995 et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. G...F...et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 24 septembre 2015 à laquelle siégeaient :

- M. Pruvost, président de chambre,

- M. Pourny, président-assesseur,

- Mme Bourion, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 octobre 2015.

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N° 11LY01862


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11LY01862
Date de la décision : 15/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-01-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: M. François POURNY
Rapporteur public ?: Mme CHEVALIER-AUBERT
Avocat(s) : LAETITIA DALBOURG

Origine de la décision
Date de l'import : 07/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-10-15;11ly01862 ?
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