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13/10/2015 | FRANCE | N°14LY02712

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 13 octobre 2015, 14LY02712


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

- d'annuler des décisions en date du 5 mars 2014 par lesquelles le préfet de la Drôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de destination ;

- d'enjoindre au préfet de la Drôme de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

- de mettre à la charge de l'Etat une somm

e de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un j...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Grenoble :

- d'annuler des décisions en date du 5 mars 2014 par lesquelles le préfet de la Drôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de destination ;

- d'enjoindre au préfet de la Drôme de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

- de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1402420 du 24 juillet 2014, le tribunal administratif de Grenoble :

- a annulé ces décisions du 5 mars 2014 ;

- a enjoint au préfet de la Drôme de délivrer à M. A...un titre de séjour dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement ;

- a mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 18 août 2014, le préfet de la Drôme demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 24 juillet 2014 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A...devant le tribunal administratif de Grenoble.

Il soutient que :

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, il n'a pas commis une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle de M. A...dès lors que l'intéressé ne s'est jamais prévalu de son état de santé à l'appui de sa demande de titre, que le certificat médical qu'il a produit a été établi postérieurement aux décisions en litige, qu'aucun élément du dossier n'établit que l'état de santé de M. A...et notamment sa gravité serait antérieur à sa décision, que le certificat médical ne donne aucune indication sur l'existence d'un traitement en Algérie où résident l'épouse et les trois enfants de l'intéressé ;

- si la cour devait estimer que l'état de santé de l'intimé s'opposait à son retour dans son pays, ce motif ne peut entraîner que l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire et fixant le pays de destination, le refus de séjour étant fondé en droit et n'impliquant aucun éloignement ni aucune interruption de la prise en charge médicale ;

- les autres moyens exposés par l'intimé dans sa demande devant le Tribunal administratif de Grenoble devront être écartés conformément à ses écritures de première instance.

Par un mémoire enregistré le 7 novembre 2014, M. A... conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'Etat d'une somme de 1 500 euros au titre de L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à bon droit que le tribunal a estimé que le préfet avait commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- il reprend en outre ses moyens soulevés devant le Tribunal tirés de ce que :

* la décision de refus de titre de séjour est insuffisamment motivée, est entachée d'un vice de procédure en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour prévue aux articles L. 313-2 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, méconnaît les stipulations des 1, 5 et 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien dès lors qu'il en remplit les conditions et que le préfet n'a pas consulté le médecin de l'agence régionale de la santé, est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

* l'obligation de quitter le territoire est illégale en raison de l'illégalité dont est entaché le refus de titre de séjour, est insuffisamment motivée, ne résulte pas d'un examen particulier de sa situation le préfet s'étant estimé en situation de compétence liée, est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

* la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire, est insuffisamment motivée, est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Segado.

1. Considérant que M.A..., ressortissant algérien né le 28 août 1957, déclare être entré en France le 27 octobre 2001 sous couvert d'un passeport algérien muni d'un visa de court séjour ; qu'à la suite d'une nouvelle demande de délivrance d'un certificat de résidence algérien présentée par l'intéressé, le préfet de la Drôme, par des décisions en date du 5 mars 2014, a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de destination ; que par jugement du 24 juillet 2014, le tribunal administratif de Grenoble a annulé ces décisions ; que le préfet de la Drôme relève appel de ce jugement ;

2. Considérant que, pour annuler les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire, le tribunal a estimé que le préfet de la Drôme avait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ces décisions, compte tenu de la présence en France de M. A...depuis au moins neuf années et de son état de santé, alors même qu'il n'avait pas sollicité de titre de séjour en qualité d'étranger malade ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : 1) au ressortissant algérien, qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...) " ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment des certificats médicaux établis les 1er février 2013 et 25 mars 2014, qu'à la date des décisions litigieuses M. A... souffrait de diabète depuis de nombreuses années, qu'il était pris en charge en hémodialyse chronique trois fois par semaine, que toute interruption de traitement engagerait un risque vital pour l'intéressé, et qu'il était inscrit sur la liste d'attente de greffe rénale au centre hospitalier de Grenoble selon ce second certificat médical établi peu de temps après les décisions contestées ; que toutefois, comme l'expose le préfet en appel, il ne ressort pas des pièces du dossier que M.A..., qui fait notamment état dans ses écritures de l'existence de dispositifs pour procéder aux greffes de reins en Algérie en 2014, ne pourrait accéder à un traitement approprié et sans mettre sa vie en danger en raison de ressources insuffisantes ou du niveau de qualité de soins de son pays comme il le prétend ou pour toute autre raison, et que sa présence en France serait ainsi justifiée en raison de son état de santé ;

5. Considérant qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que M. A...justifie résider habituellement en France depuis plus de dix ans à la date des décisions litigieuses, en produisant notamment, outre des attestations établies par des connaissances, des membres de sa famille et des commerçants, des courriers et récépissés établis par la préfecture ou par son conseil concernant ses démarches effectuées pour l'obtention d'un titre de séjour, des pièces médicales comme des résultats d'analyses réalisées par les laboratoires d'analyses médicales, des ordonnances, des certificats médicaux ou des bulletins d'hospitalisation, des relevés de remboursement de dépenses de santé établis par la caisse primaire d'assurance maladie ainsi que des courriers de cet organisme concernant l'octroi de l'aide médicale d'Etat ou d'autres organismes tels que la maison départementale des personnes handicapées, des factures d'eau et d'électricité, couvrant particulièrement l'ensemble de la période 2004 à 2014 ; que, concernant les années 2004, 2005, 2006 et 2012 contestées plus particulièrement par le préfet dans ses écritures de première instance, l'intéressé a notamment produit des documents relatifs à des démarches effectuées auprès de la préfecture et du tribunal administratif de Grenoble ainsi que des documents médicaux dont l'un attestant de son hospitalisation au cours de l'année 2004, de nombreuses pièces médicales concernant les années 2005 et 2006 ainsi que des relevés de remboursement de dépenses de santé de la caisse primaire d'assurance maladie pour l'année 2005 et des courriers de la caisse primaire d'assurance maladie concernant l'attribution de l'aide médicale d'Etat pour l'année 2006, et enfin, pour l'année 2012, des pièces médicales faisant état de son hospitalisation entre le 5 septembre et le 23 octobre 2012, une ordonnance du 13 décembre 2012 jointe à son dossier établie ce même jour adressée à la maison départementale des personnes handicapées et sur lequel cet établissement a statué en 2013, des factures d'électricité portant sur les deux semestres 2012 ainsi que des pièces justifiant la réalisation de démarches auprès de la préfecture au cours du premier semestre 2012 en vue de l'obtention d'un titre de séjour et qui ont donné lieu à la décision de refus de titre litigieux ; que, par suite, le préfet de la Drôme ne pouvait légalement prendre à son encontre un refus de titre de séjour, ainsi que par voie de conséquence des décisions portant obligation de quitter le territoire et fixant le pays de destination, sans méconnaître les dispositions du 1. de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet de la Drôme n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé ses décisions en date du 5 mars 2014;

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante dans la présente instance, une somme de 1 000 euros à verser à M. A... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête du préfet de la Drôme est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à M. A...la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Drôme.

Délibéré après l'audience du 17 septembre 2015, à laquelle siégeaient :

M. Faessel, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

M. Segado, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 octobre 2015.

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N° 14LY02712


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY02712
Date de la décision : 13/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. FAESSEL
Rapporteur ?: M. Juan SEGADO
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : PIGEON

Origine de la décision
Date de l'import : 07/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-10-13;14ly02712 ?
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