La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/10/2015 | FRANCE | N°14LY02709

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 13 octobre 2015, 14LY02709


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 29 novembre 2013 par lesquelles le préfet de la Drôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1401390 du 22 juillet 2014, le tribunal administratif de Grenoble a annulé ces décisions, a enjoint au préfet de la Drôme de délivrer à l'intéressé un titre de séjour mention " vie privée

et familiale " dans le délai d'un mois, et condamné l'Etat à lui verser la somme de 1 000 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 29 novembre 2013 par lesquelles le préfet de la Drôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1401390 du 22 juillet 2014, le tribunal administratif de Grenoble a annulé ces décisions, a enjoint au préfet de la Drôme de délivrer à l'intéressé un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois, et condamné l'Etat à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 26 août 2014, le préfet de la Drôme demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 22 juillet 2014 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. C...devant le tribunal administratif de Grenoble.

Le préfet de la Drôme soutient que le jugement est entaché d'irrégularité, dès lors que la demande, à laquelle il a fait droit, ne pouvait qu'être jugée irrecevable, faute d'avoir été introduite dans le délai de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 octobre 2014, M.C..., représenté par MeA..., conclut au rejet de la requête, et à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient :

- à titre principal, que sa demande de première instance était recevable, et que le jugement est par suite régulier, dès lors qu'il n'a jamais été directement avisé de la mise en instance de la lettre recommandée par laquelle lui avait été notifiées les décisions attaquées ;

- à titre subsidiaire, que son droit au séjour n'est plus contesté, dès lors que le préfet, en appel, ne discute pas le bien-fondé des motifs du jugement attaqué, par lesquels le tribunal a considéré que ce refus de titre de séjour en litige a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, compte tenu d'une vie maritale en France de 8 ans ainsi que de la présence de ses trois enfants, qui y sont nés et y sont scolarisés.

M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 novembre 2014.

Par ordonnance du 11 août 2015 la clôture d'instruction a été fixée au 26 août 2015.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

- le code des postes et des communications électroniques ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Lévy Ben Cheton, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Besse, rapporteur public.

1. Considérant que M.C..., ressortissant turc née en 1980, déclare être entré en France en 2008 ; qu'il s'est maintenu sur le territoire français en dépit d'un précédent arrêté de reconduite à la frontière en date du 2 avril 2011, et a sollicité, le 19 novembre 2013, sa régularisation, sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par arrêté du 29 novembre 2013, le préfet de la Drôme a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le pays de destination ; que, par un jugement du 22 juillet 2014, le tribunal administratif de Grenoble a annulé cet arrêté, enjoint au préfet de la Drôme de délivrer à M. C... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois, et mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles ; que le préfet de la Drôme relève appel de ce jugement, qu'il estime irrégulier ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I- L'étranger qui fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français et qui dispose du délai de départ volontaire mentionné au premier alinéa du II de l'article L. 511-1 peut, dans le délai de trente jours suivant sa notification, demander au tribunal administratif l'annulation de cette décision, ainsi que l'annulation de la décision relative au séjour, de la décision mentionnant le pays de destination et de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français qui l'accompagnent le cas échéant. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 776-1 du code de justice administrative : " Sont présentées, instruites et jugées selon les dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et celles du présent code, sous réserve des dispositions du présent chapitre, les requêtes dirigées contre : /1° Les décisions portant obligation de quitter le territoire français, prévues au I de l'article L. 511-1 et à l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les décisions relatives au séjour notifiées avec les décisions portant obligation de quitter le territoire français ;(...) " ; qu'aux termes de l'article R. 776-2 du même code : " I.-Conformément aux dispositions du I de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la notification d'une obligation de quitter le territoire français avec délai de départ volontaire fait courir un délai de trente jours pour contester cette obligation ainsi que les décisions relatives au séjour, au délai de départ volontaire, au pays de renvoi et à l'interdiction de retour notifiées simultanément (...) " ; qu'enfin, l'article 39 du décret susvisé du 19 décembre 1991 susvisé dispose que : " Lorsqu'une demande d'aide juridictionnelle en vue de se pourvoir en matière civile devant la Cour de cassation est adressée au bureau d'aide juridictionnelle établi près cette juridiction avant l'expiration du délai imparti pour le dépôt du pourvoi ou des mémoires, ce délai est interrompu. Un nouveau délai court à compter du jour de la réception par l'intéressé de la notification de la décision du bureau d'aide juridictionnelle ou, si elle est plus tardive, de la date à laquelle un auxiliaire de justice a été désigné. Ce dernier délai est interrompu lorsque le recours prévu à l'article 23 de la loi du 10 juillet 1991 est régulièrement formé par l'intéressé. (...) / Le délai alors imparti pour le dépôt du pourvoi ou des mémoires court à compter de la date de la réception par l'intéressé de la notification de la décision prise sur recours confirmant la décision déférée ou, si elle est plus tardive, de la date à laquelle un auxiliaire de justice a été désigné. / Les délais de recours sont interrompus dans les mêmes conditions lorsque l'aide juridictionnelle est sollicitée à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat ou une juridiction administrative statuant à charge de recours devant le Conseil d'Etat. " ;

3. Considérant qu'en cas de retour à l'administration, au terme du délai de mise en instance, du pli recommandé contenant la décision attaquée, la notification est réputée avoir été régulièrement accomplie à la date à laquelle ce pli a été présenté à l'adresse de l'intéressé, dès lors du moins qu'il résulte soit de mentions précises, claires et concordantes portées sur l'enveloppe, soit, à défaut, d'une attestation du service postal ou d'autres éléments de preuve, que le préposé a, conformément à la réglementation en vigueur, déposé un avis d'instance informant le destinataire que le pli était à sa disposition au bureau de poste ;

4. Considérant qu'il résulte de la réglementation postale, et notamment de l'instruction postale du 6 septembre 1990, qu'en cas d'absence du destinataire d'une lettre remise contre signature, le facteur doit, en premier lieu, porter la date de vaine présentation sur le volet " preuve de distribution " de la liasse postale, cette date se dupliquant sur les autres volets, en deuxième lieu, détacher de la liasse l'avis de passage et y mentionner le motif de non distribution, la date et l'heure à partir desquelles le pli peut être retiré au bureau d'instance et le nom et l'adresse de ce bureau, cette dernière indication pouvant résulter de l'apposition d'une étiquette adhésive, en troisième lieu, déposer l'avis ainsi complété dans la boîte aux lettres du destinataire et, enfin, reporter sur le pli le motif de non distribution et le nom du bureau d'instance ;

5. Considérant que, compte tenu de ces modalités, doit être regardé comme portant des mentions précises, claires et concordantes suffisant à constituer la preuve d'une notification régulière le pli recommandé retourné à l'administration auquel est rattaché un volet " avis de réception " sur lequel a été apposée par voie de duplication la date de vaine présentation du courrier, et qui porte, sur l'enveloppe ou sur l'avis de réception, l'indication du motif pour lequel il n'a pu être remis ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et, en particulier, de la copie du pli recommandé contenant l'arrêté litigieux, produit par le préfet de la Drôme en cause d'appel, que ce courrier a été adressé à l'adresse déclarée par M. C...à l'occasion de sa demande de titre de séjour, et qui demeurant... ; qu'il ressort des mentions portées sur ce pli, qui ne sont pas contestées, que M. C...a été avisé de ce que ce pli était en instance au bureau de poste et ne l'a pas réclamé ; que, dans ces conditions, la notification de l'arrêté attaqué, qui portait mention des voies et délais de recours, doit être regardée comme ayant été effectuée le 30 novembre 2013, date de présentation du pli, et a ainsi fait courir le délai de trente jours dont disposait M. C...pour saisir le tribunal administratif ; que si l'intimé fait valoir que les boîtes aux lettres de son quartier sont fréquemment dégradées, et qu'il n'avait pas eu connaissance de cette notification avant son passage en préfecture le 20 février 2014, le caractère général et non justifié de ses explications, comme celui des témoignages qu'il produit à leur soutien, ne saurait, en l'espèce, fragiliser la preuve d'une notification régulière résultant des informations susanalysées, portées sur le pli lui-même par l'administration postale ; que le délai de recours dont il disposait pour demander l'annulation des décisions en litige expirait donc le mardi 31 décembre 2013 ; qu'il en résulte que la demande présentée par M. C...devant le Tribunal administratif de Grenoble, enregistrée par télécopie le 12 mars 2014, était tardive et, par suite, irrecevable, le délai de recours n'ayant pas été interrompu par sa demande d'aide juridictionnelle, présentée le 14 mars 2014, et donc tardivement, au regard des dispositions susrappelées, ainsi d'ailleurs que l'indiquait à juste titre la présidente du bureau d'aide juridictionnelle pour motiver son refus ; que compte tenu de ces éléments, le préfet de la Drôme est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a fait droit à cette demande, qui était irrecevable ;

7. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif et, ainsi qu'il a été dit au point précédent, de rejeter celle-ci comme irrecevable ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

8. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie perdante ou son conseil du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par M. C...doivent, dès lors, être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1401390 du tribunal administratif de Grenoble du 22 juillet 2014 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. C...devant le tribunal administratif de Grenoble, ainsi que ses conclusions devant la Cour, sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B...C.est restée la sienne durant toute l'instance contentieuse Copie en sera adressée au Préfet de la Drôme.

Délibéré après l'audience du 22 septembre 2015 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président,

M. Lévy Ben Cheton, premier conseiller,

Mme Duguit-Larcher, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 octobre 2015.

''

''

''

''

2

N° 14LY02709

ld


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY02709
Date de la décision : 13/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: M. Laurent LEVY BEN CHETON
Rapporteur public ?: M. BESSE
Avocat(s) : JEAN-YVES BRET -PATRICK BERAS

Origine de la décision
Date de l'import : 10/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-10-13;14ly02709 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award