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13/10/2015 | FRANCE | N°14LY01085

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 13 octobre 2015, 14LY01085


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Earl Chavet Michel et fils a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision du 19 mars 2013 par laquelle le préfet de Saône-et-Loire lui a refusé l'autorisation d'exploiter les parcelles B 499, B 730, B 808, B 809, B 810, B 953, B 954, B 956 et B 985 sur la commune de Vergisson pour une surface de 1,33 hectares.

Par un jugement n° 1301263 du 6 février 2014, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mém

oire, enregistrés les 7 avril et 24 septembre 2014, l'Earl Chavet Michel et fils, représent...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Earl Chavet Michel et fils a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler la décision du 19 mars 2013 par laquelle le préfet de Saône-et-Loire lui a refusé l'autorisation d'exploiter les parcelles B 499, B 730, B 808, B 809, B 810, B 953, B 954, B 956 et B 985 sur la commune de Vergisson pour une surface de 1,33 hectares.

Par un jugement n° 1301263 du 6 février 2014, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 7 avril et 24 septembre 2014, l'Earl Chavet Michel et fils, représentée par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Dijon du 6 février 2014 ;

2°) d'annuler la décision du préfet de Saône-et-Loire en date du 19 mars 2013 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le courrier du 11 février 2013 du préfet de Saône-et-Loire l'informant de la présentation d'autres demandes, ne lui a pas permis de connaître l'identité et l'adresse exactes des autres candidats ainsi que leur situation professionnelle, informations qui lui auraient permis d'apporter des observations pertinentes à la commission départementale d'orientation de l'agriculture ; de plus, ce courrier précise que la séance pourrait se tenir à une date ultérieure, sans préciser si elle en serait avertie ; cette absence de procédure contradictoire traduit une méconnaissance des dispositions de l'article R. 331-5 du code rural et de la pêche maritime ;

- la décision en litige se borne à faire état de la qualité de jeune agriculteur de M. A... ; elle ne mentionne ni l'identité précise de M.A..., ni sa situation actuelle et familiale ; elle ne fait pas état des autres critères énoncés à l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime ; elle est insuffisamment motivée en méconnaissance des dispositions de l'article R. 331-6 du code rural et de la pêche maritime ;

- sa demande répond à de nombreux critères énoncés à l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime concernant, notamment, la viabilité économique de l'installation, le maintien des exploitations existantes, l'agrandissement des exploitations et les emplois créés ou maintenus par l'exploitation ; au regard de ces critères, sa demande apparaissait comme la plus pertinente ; en outre, la propriétaire des parcelles et le syndicat USC Mâcon ont confirmé qu'elle était de loin le meilleur candidat ; enfin, M. A...devant être considéré comme un agriculteur déjà installé au sens des dispositions de l'article D. 343-8 du code rural et de la pêche maritime, il doit remplir les conditions de ressources prévues par ces dispositions, ce qui n'est pas démontré en l'espèce ; ainsi, M. A...ne pouvait bénéficier de la priorité n° 1 et elle aurait dû bénéficier de l'autorisation au regard des autres critères de l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime et des priorités prévues au schéma départemental des structures agricoles de Saône-et-Loire ; la décision contestée est dès lors entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 août 2014, le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- les dispositions de l'article R. 331-5 du code rural et de la pêche maritime font seulement obligation au préfet d'informer les personnes intéressées du dépôt d'une demande d'autorisation ; le courrier qui a été adressé à l'intéressée, à cette fin, est daté du 31 janvier 2013 et mentionne la date de la séance de la commission départementale d'orientation de l'agriculture chargée d'examiner l'ensemble des demandes ; aucune disposition du code rural et de la pêche maritime ne fait obligation au préfet de faire connaître à un candidat les éléments de la situation des autres candidats ;

- la décision litigieuse a donné des précisions sur la situation de M. A...en indiquant que son cas relevait de l'application de la priorité n° 1 du schéma directeur départemental des structures agricoles ; elle a également précisé que les autres candidatures n'entraient pas dans la priorité liée à l'agrandissement fixée par ce schéma ; elle est suffisamment motivée ;

- la situation de M. A...a été appréciée au regard des priorités du schéma directeur, sans se limiter à ne prendre en compte que le jeune âge de l'intéressé ; M. A...était également titulaire d'un baccalauréat professionnel "conduite de gestion de l'exploitation agricole, option vigne et vin" et il avait annoncé qu'il avait l'intention de "lancer un dossier d'installation dès que possible auprès de la chambre d'agriculture" ; sa situation relevait bien de l'application de la première priorité du schéma directeur ; le préfet n'était pas tenu de prendre en compte les avis de la propriétaire des parcelles et du syndicat agricole de l'union syndicale cantonale de Mâcon.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime;

- l'arrêté du 2 novembre 2006 portant schéma directeur départemental de Saône-et-Loire ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dèche, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Clément, rapporteur public.

1. Considérant que l'Earl Chavet Michel et fils relève appel du jugement n° 1301263 du 6 février 2014 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 19 mars 2013 par laquelle le préfet de Saône-et-Loire lui a refusé l'autorisation d'exploiter des parcelles situées sur la commune de Vergisson pour une surface de 1,33 hectares ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 331-5 du code rural dans sa rédaction issue du décret n° 2007-865 du 14 mai 2007 : " I. - Les demandes d'autorisation d'exploiter sont soumises à l'avis de la commission départementale d'orientation de l'agriculture instituée aux articles R. 313-1 et suivants. Lorsque des candidatures concurrentes ont été enregistrées sur tout ou partie des biens qui font l'objet de la demande, l'ensemble des dossiers portant sur ces biens est soumis à la même séance de la commission. / Les candidats, les propriétaires et les preneurs en place sont informés par lettre recommandée avec accusé de réception ou remise contre récépissé de la date d'examen des dossiers les concernant par la commission (...). " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'Earl Chavet Michel et fils a été informée, par lettre recommandée avec accusé de réception du 31 janvier 2013, de la date de la tenue de la réunion de la commission départementale d'orientation de l'agriculture (CDOA), prévue pour le 19 février 2013 ; que contrairement à ce que soutient la requérante, ce courrier n'avait pas à préciser d'autre date en cas d'ajournement éventuel de la séance de la CDOA, alors d'ailleurs qu'il ressort des pièces du dossier que la CDOA s'est bien réunie à la date prévue du 19 février 2013 ; que ni les dispositions précitées de l'article R. 331-5 du code rural et de la pêche maritime, ni aucune autre disposition ou principe n'imposait à l'administration d'informer l'Earl Chavet Michel et fils de l'identité, de l'adresse et de la situation professionnelle des autres candidats ou de mettre en oeuvre une quelconque procédure contradictoire ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime dans sa rédaction alors applicable : " L'autorité administrative se prononce sur la demande d'autorisation en se conformant aux orientations définies par le schéma directeur départemental des structures agricoles applicable dans le département dans lequel se situe le fonds faisant l'objet de la demande. Elle doit notamment : / 1° Observer l'ordre des priorités établi par le schéma départemental entre l'installation des jeunes agriculteurs et l'agrandissement des exploitations agricoles, en tenant compte de l'intérêt économique et social du maintien de l'autonomie de l'exploitation faisant l'objet de la demande ; / (...) 4° Prendre en compte la situation personnelle du ou des demandeurs, notamment en ce qui concerne l'âge et la situation familiale ou professionnelle et, le cas échéant, celle du preneur en place ; (...). " ; qu'aux termes du II de l'article R. 331-6 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " La décision d'autorisation ou de refus d'exploiter prise par le préfet doit être motivée au regard des critères énumérés à l'article L. 331-3 (...). " ;

5. Considérant que pour accorder à M. C...A...l'autorisation d'exploiter en litige, le préfet de Saône-et-Loire a indiqué notamment qu'il s'agit d'"un jeune agriculteur qui remplit les conditions d'âge et de capacité professionnelle nécessaires pour bénéficier des aides à l'installation" et que sa situation relève de l'application de la priorité n° 1 du schéma directeur départemental des structures agricoles ; que le préfet a également précisé les superficies de terres exploitées par les deux autres candidats avant de constater que leur candidature tendait à "réaliser un agrandissement au-dessus du seuil de contrôle" et que, de ce fait, ils n'entraient pas dans la liste des priorités retenues par ce schéma ; que la décision du préfet est ainsi suffisamment motivée au regard des 3° et 4° précités de l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime ; que, par suite, et alors que le préfet n'est pas tenu de se prononcer expressément sur chacun des éléments dont les dispositions de cet article prescrivent de tenir compte et qu'il n'était pas davantage tenu de préciser l'âge exact de M.A..., le moyen selon lequel la décision en litige ne serait pas suffisamment motivée doit être écarté ;

6. Considérant, en troisième et dernier lieu, qu'aux termes de l'article 2 de l'arrêté du 2 novembre 2006 portant schéma directeur départemental des structures agricoles de Saône-et-Loire : " (...) les priorités de la politique d'aménagement des structures des exploitations agricoles sont ainsi définies, et s'appliquent selon l'ordre strict suivant, quelle que soit la superficie du bien, objet de la demande : / 1° L'installation de nouveaux agriculteurs / l'installation de nouveaux exploitants répondant aux conditions d'âge de capacité professionnelle et de revenus nécessaires à l'obtention des aides à l'installation (D.J.A.) ; / le renforcement de l'exploitation de jeunes agriculteurs, chefs d'exploitations en phase de préinstallation répondant aux conditions d'âge et de capacité professionnelle pour l'obtention des aides à l'installation ; / la préinstallation de jeunes agriculteurs en vue d'une installation définitive et présentant un projet répondant aux conditions d'octroi des aides à la préinstallation ; / l'installation d'agriculteurs en pluriactivité répondant aux conditions d'octroi des aides à l'installation. / 2° La reconstitution, dans la limite du seuil de contrôle, des exploitations agricoles, dont la taille aurait été diminuée par suite d'un motif extérieur à l'exploitation (reprise de parcelles par un propriétaire, D.U.P. ...) ; / 3° La restructuration foncière des exploitations / 3.1. - Avec agrandissement, lorsqu'il s'agit d'exploitations dont la superficie est inférieure au seuil de contrôle, sous réserve du respect des conditions de distance fixées par le schéma directeur des structures agricoles. / Dans ce cas, priorité sera donnée aux agrandissements, effectués dans le cadre d'une procédure d'adaptation ou de modernisation de leur exploitation, agrées par la Commission Départementale d'Orientation de l'Agriculture et ceci dans la limite du seuil de contrôle des structures ; / 3.2. - Sans agrandissement définitif par suite d'échanges réalisés ultérieurement, lorsqu'il s'agit d'une exploitation ayant une superficie supérieure au seuil de contrôle ; / 4° Agrandissement des exploitations dans la limite du seuil de contrôle. / Pour chacune des priorités énoncées ci-dessus et à situation comparable, il sera tenu compte des critères définis à l'article L. 331-3 du code rural. / Notamment, la préférence sera donnée à l'exploitation dont la dimension socio-économique calculée selon le système d'équivalence prévu au Projet Agricole Départemental est la plus faible. " ;

7. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article L. 331-3 précité du code rural et de la pêche maritime que l'autorité administrative, après avis de la commission départementale d'orientation de l'agriculture, se prononce sur la demande d'autorisation en se conformant aux orientations définies dans le schéma directeur départemental des structures agricoles applicable dans le département dans lequel se situe le fonds faisant l'objet de la demande et que le préfet, saisi de demandes concurrentes d'autorisation d'exploiter portant sur les mêmes terres, doit, pour statuer sur ces demandes, observer l'ordre des priorités établi par le schéma directeur départemental des structures agricoles ;

8. Considérant que tant l'article L. 331-1 du code rural et de la pêche maritime que l'article 2 de l'arrêté préfectoral du 2 novembre 2006 portant schéma directeur départemental des structures agricoles de Saône-et-Loire fixent comme orientation prioritaire du contrôle des structures agricoles celle de favoriser l'installation d'agriculteurs ; qu'en l'espèce, il ressort des pièces du dossier que M.A..., âgé de vingt-sept ans, est titulaire d'un baccalauréat professionnel "conduite de gestion de l'exploitation agricole, option vigne et vin" et qu'il projette de lancer un dossier d'installation auprès de la chambre d'agriculture ; que la candidature de M. A... doit ainsi être analysée comme un projet d'installation, relevant du rang de priorité n° 1 du schéma départemental des structures agricoles de Saône-et-Loire ; qu'il est constant que le projet d'agrandissement de l'Earl Chavet Michel et fils, qui excède le seuil de contrôle mentionné au 4° du même schéma, ne relève d'aucune des priorités qu'il définit ; que contrairement à ce que soutient la requérante, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que M. A... ne serait éligible à aucune aide à l'installation ou à la préinstallation à raison des revenus qu'il tirerait de la surface de 0,89 hectares qu'il exploite déjà ; qu'enfin, la circonstance que la candidature de la requérante aurait recueilli la préférence de la propriétaire des parcelles concernées par la procédure et un avis favorable de l'union syndicale cantonale de Mâcon est, par elle-même, sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ; que la requérante n'est ainsi pas fondée à soutenir que le préfet a fait en l'espèce une inexacte application des dispositions du schéma départemental déterminant l'ordre des priorités, en accordant l'autorisation d'exploiter en litige à M.A... ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'Earl Chavet Michel et fils n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de l'Earl Chavet Michel et fils est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'Earl Chavet Michel et fils, à M. C...A...et au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.

Délibéré après l'audience du 15 septembre 2015 à laquelle siégeaient :

M. Boucher, président de chambre,

M. Drouet, président-assesseur,

Mme Dèche, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 octobre 2015.

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N° 14LY01085


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY01085
Date de la décision : 13/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

03-03-03 Agriculture et forêts. Exploitations agricoles. Cumuls et contrôle des structures.


Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: M. CLEMENT
Avocat(s) : DESILETS ROBBE ROQUEL

Origine de la décision
Date de l'import : 07/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-10-13;14ly01085 ?
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