La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/10/2015 | FRANCE | N°14LY00957

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 13 octobre 2015, 14LY00957


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...D...a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand :

- de retenir la responsabilité sans faute de La Poste au titre de l'accident de service dont il a été victime le 17 août 2010 ;

- d'ordonner, avant-dire-droit, une mesure d'expertise médicale portant sur les souffrances endurées ainsi que sur ses préjudices esthétique et d'agrément et de mettre les frais d'expertise à la charge de La Poste ;

- de condamner La Poste à lui verser une provision de 10 000 euros à val

oir sur l'indemnisation complémentaire qu'il sollicite ;

- de mettre à la charge de La Poste...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...D...a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand :

- de retenir la responsabilité sans faute de La Poste au titre de l'accident de service dont il a été victime le 17 août 2010 ;

- d'ordonner, avant-dire-droit, une mesure d'expertise médicale portant sur les souffrances endurées ainsi que sur ses préjudices esthétique et d'agrément et de mettre les frais d'expertise à la charge de La Poste ;

- de condamner La Poste à lui verser une provision de 10 000 euros à valoir sur l'indemnisation complémentaire qu'il sollicite ;

- de mettre à la charge de La Poste la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par jugement du 17 octobre 2013 le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a ordonné une expertise en vue d'apprécier l'existence et l'étendue des différents préjudices à caractère personnel invoqués par M.D....

Par mémoire complémentaire après expertise, M. D...a demandé la condamnation de La Poste et de la mutuelle générale de La Poste à lui verser une indemnité de 6 900 euros au titre de son préjudice esthétique temporaire, une indemnité de 5 000 euros au titre de son préjudice esthétique permanent, une indemnité de 10 000 euros au titre des souffrances endurées et une indemnité de 8 000 euros au titre du préjudice d'agrément.

Par un jugement n° 1201593 du 11 février 2014, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a :

- condamné La Poste à payer à M. D...une indemnité globale de 6 000 euros en réparation de ses souffrances physiques et morales ainsi que de ses préjudices esthétique et d'agrément ;

- mis à la charge de La Poste les frais d'expertise, d'un montant de 725,58 euros ;

- mis à la charge de La Poste une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 31 mars 2014, M.D..., représenté par MeC..., demande à la Cour :

1°) de réformer ce jugement du 11 février 2014 en ce qu'il a limité à la somme globale de 6 000 euros le montant de la condamnation prononcée à l'encontre de La Poste ;

2°) de condamner La Poste à lui verser les sommes de 6 900 euros, au titre de son préjudice esthétique temporaire, de 5 000 euros au titre de son préjudice esthétique permanent, de 10 000 euros au titre de souffrances qu'il a endurées et de 8 000 euros au titre de son préjudice d'agrément ;

3°) d'assortir cette condamnation des intérêts de droit à compter de sa réclamation préalable du 21 août 2012 ou, à défaut, à compter de l'enregistrement de sa demande de première instance ;

4°) de mettre à la charge de La Poste une somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les postes de préjudice esthétique temporaire et de préjudice esthétique permanent devaient être évalués de façon distincte : au titre du préjudice esthétique temporaire, il a droit à une indemnisation de 20 euros par jour pour la période du 18 août au 31 décembre 2010, soit 2 700 euros, et à 14 euros par jour, pour la période du 1er janvier au 31 octobre 2011, soit 4 200 euros ; au titre du préjudice esthétique permanent, il présente une boiterie visible et doit être indemnisé à hauteur de 5 000 euros ;

- au titre des souffrances physiques et morales, il convient de retenir l'épisode dépressif qu'il a subi et une somme de 10 000 euros devra lui être allouée ;

- au titre du préjudice d'agrément, et compte tenu de l'impossibilité dans laquelle il se trouve de pratiquer des activités sportives, la somme de 8 000 euros devra lui être allouée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 octobre 2014, La Poste conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. D...sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- le préjudice esthétique pouvait être évalué globalement ; le Tribunal n'a pas méconnu les différents éléments constitutifs de chaque préjudice esthétique en utilisant les éléments retenus par l'expert ; de plus, M. D...ne peut retenir pour l'évaluation du préjudice esthétique permanent le taux de déficit fonctionnel qui concerne un préjudice déjà indemnisé au titre de l'allocation temporaire d'invalidité, ni le préjudice d'agrément qui concerne un autre chef de préjudice ;

- M. D...ne démontre ni l'existence d'un épisode dépressif au sens clinique du terme, ni que cet épisode serait en lien direct avec l'accident de service ;

- s'agissant du préjudice d'agrément, M. D...n'établit pas de privation d'activités physiques et sportives autres que celles qui ont fondé l'évaluation retenue par le Tribunal ;

- les intérêts ne pourraient courir que pour le surplus des sommes réclamées en appel ; pour les préjudices esthétiques et ceux liés aux souffrances endurées, la date de départ des intérêts ne pourra courir à compter de la demande préalable.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dèche, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Clément, rapporteur public.

1. Considérant que M.D..., agent professionnel de La Poste qui a exercé les fonctions de facteur au centre courrier de Malauzat-Riom, a été victime d'un accident de service le 17 août 2010 alors qu'il conduisait une motocyclette pour effectuer sa tournée ; qu'il relève appel du jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 11 février 2014 en ce qu'il a limité à la somme globale de 6 000 euros l'indemnité mise à la charge de La Poste en réparation des préjudices consécutifs à son accident de service ; qu'il demande la condamnation de La Poste à lui verser les sommes de 6 900 euros au titre de son préjudice esthétique temporaire, de 5 000 euros au titre de son préjudice esthétique permanent, de 10 000 euros au titre des souffrances endurées et de 8 000 euros au titre de son préjudice d'agrément ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte du rapport d'expertise du DocteurB..., désigné par ordonnance du président du tribunal administratif de Clermont-Ferrand, que M. D... subit un préjudice esthétique lié à l'usage de béquilles pour se déplacer et à une claudication résiduelle, qu'il évalue à 3 sur une échelle de 7 pour la période du 18 août 2010 au 31 décembre 2010, à 2 sur 7 pour la période 1er janvier 2011 au 6 octobre 2011 et à 0,5 sur 7 au-delà de la période de consolidation ; que la seule circonstance que M. D...aurait été contraint de porter une botte pendant six semaines n'est pas de nature à établir qu'il aurait subi une altération de son apparence physique particulièrement importante de nature à justifier l'indemnisation d'un préjudice esthétique temporaire distinct à ce titre ; qu'ainsi, le Tribunal a fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en évaluant le préjudice esthétique subi par l'intéressé à hauteur de 2 000 euros ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'en se bornant à produire des attestations de proches indiquant qu'ils ont pu observer une baisse de son dynamisme et de son état moral après l'accident et une ordonnance d'un médecin prescrivant, sans autre précision, la prise d'antidépresseurs, M. D...n'établit pas l'existence d'un lien direct et certain entre cet état dépressif et l'accident de service dont il a été victime ; que, dans ces conditions, il y a lieu de confirmer l'indemnité fixée par les premiers juges à hauteur de 2 000 euros concernant la réparation des souffrances physiques et morales endurées, évaluées par l'expert à 2,5 sur une échelle de 7 ;

4. Considérant, en troisième et dernier lieu, que si M. D...fait valoir qu'il ne pourra plus pratiquer le rugby et le judo, il ressort des pièces du dossier qu'il avait cessé de pratiquer ces sports bien avant l'accident de service dont il a été victime ; que M. D...ne produit aucun document de nature à établir qu'il pratiquait habituellement la danse ou la natation avant son accident ; qu'il n'apporte pas plus d'élément justificatif permettant d'établir qu'il ne pourrait plus surveiller ses petits-enfants ou qu'il ne pourrait plus avoir d'activités sportives avec eux ; que, dans ces conditions et eu égard aux conclusions de l'expert qui a retenu l'existence d'un préjudice d'agrément en ce qui concerne les travaux de bricolage, notamment ceux nécessitant l'utilisation d'une échelle ainsi que pour la marche en terrain accidenté, le Tribunal a fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en évaluant ce chef de préjudice à hauteur de 2 000 euros ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de procéder à une expertise complémentaire, que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand n'a fait que partiellement droit à sa demande indemnitaire à hauteur d'une somme globale de 6 000 euros ;

Sur les intérêts :

6. Considérant que lorsqu'ils ont été demandés, et quelle que soit la date de cette demande, les intérêts moratoires dus en application de l'article 1153 du code civil courent à compter du jour où la demande de paiement du principal est parvenue au débiteur ou, en l'absence d'une telle demande préalablement à la saisine du juge, à compter du jour de cette saisine ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient La Poste en défense, M. D...peut demander pour la première fois en appel les intérêts à compter du jour où sa demande de paiement du principal a été reçue, y compris sur la somme qui lui a été versée en exécution du jugement du tribunal administratif ; qu'ainsi, il y a lieu de faire droit à la demande du requérant tendant à ce que l'indemnité qui lui est allouée soit assortie des intérêts au taux légal à compter du 21 août 2012, date de réception de sa demande préalable ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'une ou l'autre partie une somme quelconque au titre des frais non compris dans les dépens qu'elles ont exposés ;

DECIDE :

Article 1er : La somme de 6 000 euros que la société La Poste a été condamnée à verser à M. D... par jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 11 février 2014 portera intérêts au taux légal à compter du 21 août 2012.

Article 2 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...D...et à la société La Poste.

Copie en sera adressée à M. A...B..., expert.

Délibéré après l'audience du 15 septembre 2015 à laquelle siégeaient :

M. Boucher, président de chambre,

M. Drouet, président-assesseur,

Mme Dèche, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 octobre 2015.

''

''

''

''

1

5

N° 14LY00957


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY00957
Date de la décision : 13/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-13-03 Fonctionnaires et agents publics. Contentieux de la fonction publique. Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: M. CLEMENT
Avocat(s) : PETIT FRANCOISE

Origine de la décision
Date de l'import : 07/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-10-13;14ly00957 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award