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29/09/2015 | FRANCE | N°14LY02550

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 29 septembre 2015, 14LY02550


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 25 février 2013 par lesquelles le préfet de la Haute-Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1303741 et n° 1304081 du 15 octobre 2013, le tribunal administratif de Grenoble a, notamment, annulé ces décisions.

Par un arrêt n° 13LY03031 du 22 mai 2014, la cour de

céans a annulé ce jugement du 15 octobre 2013 du tribunal administratif de Grenoble et a ren...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler les décisions du 25 février 2013 par lesquelles le préfet de la Haute-Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1303741 et n° 1304081 du 15 octobre 2013, le tribunal administratif de Grenoble a, notamment, annulé ces décisions.

Par un arrêt n° 13LY03031 du 22 mai 2014, la cour de céans a annulé ce jugement du 15 octobre 2013 du tribunal administratif de Grenoble et a renvoyé les deux affaires devant ce tribunal.

Par un jugement n° 1403170 du 4 juillet 2014, le tribunal administratif de Grenoble a de nouveau annulé les décisions du 25 février 2013.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 4 août 2014, le préfet de la Haute-Savoie demande à la cour d'annuler ce jugement du 4 juillet 2014 du tribunal administratif de Grenoble.

Il soutient que :

- contrairement à ce que le tribunal a estimé, M. B...n'entre pas dans le champ d'application des articles L. 313-11 11° et L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que l'offre de soins nécessaire au traitement de son état de santé existe dans son pays d'origine ;

- dès lors qu'il n'est pas démontré que les problèmes dont souffre l'intéressé seraient liés à son pays d'origine, un traitement dans ce pays serait possible.

Par une ordonnance du 26 janvier 2015, la clôture de l'instruction a été fixée au 18 février 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Chenevey.

1. Considérant que, par un jugement du 4 juillet 2014, le tribunal administratif de Grenoble a annulé les décisions du 25 février 2013 par lesquelles le préfet de la Haute-Savoie a refusé de délivrer un titre de séjour à M.B..., ressortissant kosovar, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que le préfet relève appel de ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé (...) " ;

3. Considérant qu'il n'est pas contesté que l'état de santé de M. B...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que si le médecin de l'agence régionale de santé, saisi par le préfet de la Haute-Savoie, a estimé, dans un avis du 7 décembre 2012, que le traitement approprié à l'état de santé de M. B...n'est pas disponible au Kosovo, le préfet produit toutefois des documents, émanant de l'ambassade de France au Kosovo et du ministère de la santé de ce pays, qui tendent à établir que ce dernier dispose de structures sanitaires psychiatriques aptes à prendre en charge l'affection dont souffre l'intéressé ; qu'en revanche, celui-ci se borne à produire un seul certificat médical, daté du 10 octobre 2012, qui ne comporte aucune précision sur la question de la disponibilité des soins que nécessite son état de santé ; que M. B... ne soutient pas que la pathologie dont il souffre présente des spécificités nécessitant un traitement particulier ; qu'enfin, si le requérant fait valoir que le lien entre cette pathologie et les événements traumatisants qu'il a vécus au Kosovo ne permet pas d'envisager un traitement effectivement approprié dans ce pays, il ne produit aucun élément de justification à l'appui de ses allégations pour démontrer l'exactitude des évènements ainsi invoqués, alors que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides puis la Cour nationale du droit d'asile ont rejeté sa demande d'asile, en relevant le caractère peu sérieux de ses affirmations ; que, dans ces conditions, en refusant de délivrer un titre de séjour à M. B..., le préfet de la Haute-Savoie n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées de l'article L. 313-11, 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'en conséquence, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a estimé que le refus de titre de séjour litigieux méconnaît ces dispositions et, pour cette raison, a annulé ce refus, ainsi que, par voie de conséquence, l'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de renvoi, également contestées ;

4. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M.B... ;

5. Considérant, en premier lieu, que le refus de titre de séjour en litige, qui comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, est, dès lors, suffisamment motivé ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour, que M. B...soulève à l'encontre de l'obligation de quitter le territoire français qui lui a été opposée, ne peut qu'être écarté ;

7. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; / (...). La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I (...) " ;

8. Considérant que l'arrêté contesté vise l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et énonce que la délivrance d'un titre de séjour est refusée à M. B...; que ces énonciations de fait permettent de connaître précisément les circonstances qui justifient qu'il soit fait application à l'intéressé des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, et alors même que la décision ne mentionne pas explicitement qu'elle est prise sur le fondement du 3° du I de cet article, le moyen tiré du défaut de motivation de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté ;

9. Considérant, en quatrième lieu, que si M. B...fait valoir qu'il n'a pas été invité à formuler ses observations préalablement à l'édiction de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait été privé de la possibilité de présenter tous éléments utiles lors de l'instruction de sa demande de titre de séjour ; que l'obligation de quitter le territoire français ayant été prise concomitamment et en conséquence du refus de titre de séjour dont l'intéressé a fait l'objet, le moyen tiré de ce que cette mesure serait intervenue en méconnaissance du droit d'être entendu, consacré par l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ne peut qu'être écarté ;

10. Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne (peut) faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi (...) " ;

11. Considérant que, pour les mêmes raisons que celles qui ont été exposées au point 3 ci-dessus, le moyen tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français litigieuse méconnaît ces dispositions ne peut être accueilli ; que, pour ces mêmes raisons, le moyen tiré de ce que cette obligation serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation doit également être écarté ;

12. Considérant, en sixième lieu, que la décision fixant le pays de renvoi est suffisamment motivée en droit par le visa des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui prévoient que la décision portant obligation de quitter le territoire français " fixe le pays à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office " ; que cette décision doit par ailleurs être regardée comme suffisamment motivée en fait par l'indication de la nationalité de l'intéressé et de ce que celui-ci pourra être reconduit d'office à la frontière du pays dont il a la nationalité ou de tout autre pays dans lequel il établirait être légalement admissible ;

13. Considérant, en septième et dernier lieu, qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " ; qu'aux termes de cet article : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines et traitements inhumains et dégradants. " ;

14. Considérant que si le requérant soutient qu'il encourait des risques de persécutions au Kosovo, il n'apporte toutefois aucun élément de nature à permettre d'établir la réalité des risques auxquels il serait personnellement exposé en cas de retour dans son pays d'origine, alors d'ailleurs que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides puis la Cour nationale du droit d'asile ont rejeté sa demande d'asile ; que, par suite, la décision fixant le pays à destination duquel l'intéressé est susceptible d'être reconduit d'office ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

15. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le préfet de la Haute-Savoie est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a annulé ses décisions du 25 février 2013 par lesquelles il a refusé de délivrer un titre de séjour à M.B..., l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 4 juillet 2014 est annulé.

Article 2 : La demande de M. B...devant le tribunal administratif de Grenoble est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A...B....

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Savoie et au procureur de la République près le tribunal de grande instance d'Annecy.

Délibéré après l'audience du 8 septembre 2015, à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Picard, président-assesseur,

M. Chenevey, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 septembre 2015.

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N° 14LY02550

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY02550
Date de la décision : 29/09/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Jean-Pascal CHENEVEY
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA

Origine de la décision
Date de l'import : 10/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-09-29;14ly02550 ?
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