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29/09/2015 | FRANCE | N°14LY00835

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 29 septembre 2015, 14LY00835


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler la délibération du 11 avril 2012 par laquelle le conseil municipal de Montmorin a fixé à 584,71 euros le montant de la participation des propriétaires pour le raccordement au réseau d'assainissement.

Par un jugement n° 1201024 du 21 janvier 2014, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé cette délibération.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 20 mars 2014, la commune de

Montmorin, représentée par la SCP Michel Arsac, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugemen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'annuler la délibération du 11 avril 2012 par laquelle le conseil municipal de Montmorin a fixé à 584,71 euros le montant de la participation des propriétaires pour le raccordement au réseau d'assainissement.

Par un jugement n° 1201024 du 21 janvier 2014, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé cette délibération.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 20 mars 2014, la commune de Montmorin, représentée par la SCP Michel Arsac, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 21 janvier 2014 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de M. B...le versement d'une somme de 2 500 euros, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le coût des branchements ne comprend pas seulement les éléments physiques constitués par le tabouret de branchement et les tuyaux, mais aussi les coûts induits, à savoir la maîtrise d'oeuvre, les frais généraux de chantier et frais financiers ;

- le coût physique des branchements figurant au marché de travaux publics passé avec l'entreprise Delavet, qui intègre celui des liaisons entre les tabourets et la canalisation principale, représente, pour les deux tranches de travaux, une somme de 71 450,70 euros toutes taxes comprises (TTC) ; la part affectable des frais de maîtrise d'oeuvre, du remboursement des intérêts d'emprunt et des frais généraux de chantier (installation, signalisation, déviation ...) devant venir s'additionner au coût physique des branchements a été estimée, au regard du coût total des chantiers, à 10 %, correspondant au rapport entre ce dernier et le montant total des deux marchés de travaux, soit un coût réel des branchements particuliers de 103 907 euros ; la part déductible des subventions a été déterminée par application au montant total des subventions perçues pour les réseaux, de 27 885 euros, du taux de 10 % ; le montant obtenu, de 76 022 euros, majoré du taux de 10 % de frais de gestion et administratifs prévu par l'article L. 1331-2 du code de la santé publique, donne un total de 83 624 euros, soit 593,07 euros de participation individuelle, somme légèrement supérieure à celle qui a été effectivement demandée aux cent quarante et un bénéficiaires des branchements.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 juin 2014, M. A... B..., représenté par la SCP Gounel-Jaubourg et associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 000 euros soit mise à la charge de la commune de Montmorin sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la méthode de calcul du coût des branchements retenue par la commune inclut une partie du coût de réalisation du réseau public alors que seule la réalisation des branchements particuliers peut être mise à la charge des propriétaires ; à cet égard, les longueurs de canalisation retenues par la commune pour les branchements en diamètre 125 montrent des incohérences ;

- les sommes de 290 euros pour la première tranche et de 340 euros pour la seconde correspondent au prix forfaitaire de réalisation du branchement particulier dans sa partie publique ;

- la commune ne peut légalement solliciter des bénéficiaires des branchements la prise en charge des intérêts d'emprunt sur le fondement de l'article L. 1331-2 du code de la santé publique, dès lors qu'ils lui seront alors remboursés deux fois, la première sur ce fondement et la seconde par application de l'article R. 2224-19-10 du code général des collectivités territoriales ;

- les taux de subvention à retirer sont plus élevés que ce qu'indique la commune ;

- les différences de chiffres entre les pièces produites et le mémoire de la commune démontrent qu'elle procède à de la manipulation comptable ; la méthode de calcul appliquée est illégale.

Par ordonnance du 7 janvier 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 6 février 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Peuvrel,

- et les conclusions de M. Clément, rapporteur public.

1. Considérant que, pour le raccordement au réseau d'eaux usées des propriétés sises en aval de la canalisation principale située sous la voirie, la commune de Montmorin, qui compte six cent dix-neuf habitants répartis dans trente-deux villages et hameaux, a créé des canalisations relais dites " antennes " se déversant à l'aval et sur lesquelles ont été effectués, en deux tranches de travaux, la première dans les hameaux du Clos, du Fournet, du Masson et de la Vialle et la seconde dans ceux de La Martre et du Perrier, les branchements particuliers de cent quarante et un propriétaires ; que, par délibération du 11 avril 2012, le conseil municipal de Montmorin a fixé le montant de la participation demandée à ces propriétaires pour leur raccordement au réseau d'assainissement à la somme de 584,71 euros ; que cette délibération a été annulée par jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 21 janvier 2014 ; que la commune de Montmorin relève appel de ce jugement ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1331-2 du code de la santé publique dans sa rédaction applicable à la date de la délibération contestée : " Lors de la construction d'un nouveau réseau public de collecte ou de l'incorporation d'un réseau public de collecte pluvial à un réseau disposé pour recevoir les eaux usées d'origine domestique, la commune peut exécuter d'office les parties des branchements situées sous la voie publique, jusque et y compris le regard le plus proche des limites du domaine public. / Pour les immeubles édifiés postérieurement à la mise en service du réseau public de collecte, la commune peut se charger, à la demande des propriétaires, de l'exécution de la partie des branchements mentionnés à l'alinéa précédent. / Ces parties de branchements sont incorporées au réseau public, propriété de la commune qui en assure désormais l'entretien et en contrôle la conformité. / La commune est autorisée à se faire rembourser par les propriétaires intéressés tout ou partie des dépenses entraînées par ces travaux, diminuées des subventions éventuellement obtenues et majorées de 10 % pour frais généraux, suivant des modalités à fixer par délibération du conseil municipal. " ; qu'il résulte de ces dispositions que les communes qui mettent en service un réseau d'assainissement sont en droit d'imposer aux propriétaires intéressés le remboursement de tout ou partie des dépenses entraînées par les travaux de construction des parties des branchements situées sous la voie publique ;

3. Considérant que, pour calculer le montant de la participation demandée aux propriétaires intéressés, la commune de Montmorin a identifié le coût spécifique de l'installation des tabourets de branchement et des canalisations, de diamètre 125, entre ces tabourets et la canalisation principale, a calculé la part de ces dépenses dans le coût total des travaux de création du réseau d'assainissement, puis a, par application de ce taux aux coûts de maîtrise d'oeuvre, aux intérêts des emprunts souscrits pour la réalisation du réseau d'assainissement et aux " prix généraux de chantier ", entendus comme des frais non compris dans le marché, tels que, par exemple, les frais de contrôle de l'étanchéité des réseaux, déterminé la part de ces différents coûts affectable aux travaux de branchements particuliers ; que l'ajout des montants ainsi obtenus au coût d'installation des équipements particuliers a permis de déterminer les dépenses totales consacrées aux raccordements particuliers ; que, pour établir le montant des subventions déductibles, la commune de Montmorin a appliqué le même taux au montant des subventions perçues en vue de la réalisation du réseau d'assainissement, hors station d'épuration ; que la somme obtenue après déduction des subventions a été majorée de 10 % au titre des frais généraux ; que, contrairement à ce que soutient M.B..., la méthode de calcul ainsi retenue, consistant à prendre en compte, pour évaluer le montant total des travaux consacrés aux raccordements particuliers, non seulement les dépenses spécifiques d'installation des tabourets et des canalisations correspondantes, mais également, à due proportion, les coûts de maîtrise d'oeuvre, de remboursement des intérêts d'emprunts et les frais généraux de chantier, ne contrevient pas aux prescriptions de l'article L. 1331-2 précité du code de la santé publique ;

4. Considérant, toutefois, que la commune de Montmorin, qui a calculé le montant de la participation des propriétaires intéressés par référence à la part du coût des branchements particuliers dans le coût total des travaux, dont elle soutient qu'elle s'élève à 10 %, ne justifie pas, ce faisant, du taux de 9,6 % retenu dans la délibération du 11 avril 2012, alors, au demeurant, que la mise en rapport des chiffres qu'elle mentionne dans sa requête fait apparaître un taux de 10,12 % ; qu'ensuite, si la commune de Montmorin soutient que doivent être pris en compte, pour le calcul du coût des branchements particuliers au titre de la première phase de travaux, en plus des tabourets, les canalisations de diamètre 125, elle y ajoute, sans justification, une canalisation d'un diamètre différent, pour un montant de 937,48 euros toutes taxes comprises (TTC) ; que, sans davantage d'explication, la commune retient, s'agissant de ce même marché, un coût total de 396 839,84 euros, lequel n'est pas vérifiable dans le décompte final, même en en retirant les coûts des travaux portant sur les " réseaux secs " ; qu'en outre, pour calculer la part des coûts de maîtrise d'oeuvre affectés à la réalisation des branchements particuliers, la commune retient, s'agissant du second marché de maîtrise d'oeuvre, un montant hors taxe (HT) et non le montant TTC ; que, par ailleurs, elle ne justifie pas du montant de 23 783 euros qu'elle avance au titre des frais de chantier, somme qui, contrairement à ce qu'elle allègue, ne ressort pas des décomptes finaux des marchés des première et deuxième phases de travaux ; que, si la commune produit les éléments relatifs à des marchés " essais d'étanchéité, de compactage et inspection télévisée des réseaux d'assainissement " et " coordonateur en matière de sécurité chantier et protection de la santé des travailleurs " au titre de la première phase, et au marché " inspection télévisée et tests d'étanchéité " au titre de la deuxième phase, elle ne précise pas si ou dans quelle mesure elle les a pris en compte dans le calcul de la participation ; que, par ailleurs, si la commune de Montmorin soutient qu'elle a, pour financer ses installations d'assainissement, souscrit deux emprunts ayant donné lieu à 261 470 euros d'intérêts, les documents produits ne permettent pas de vérifier l'exactitude de ce montant, ni que le premier de ces emprunts pouvait être pris en compte, alors que la convention qui le concerne mentionne que les fonds sont destinés à la station d'épuration et que l'ajout manuscrit du mot " réseaux ", dont ni l'auteur ni la date ne sont précisés, ne permet pas de tenir pour acquis que ce prêt aurait également contribué au financement des travaux litigieux et, en particulier, des branchements particuliers ; qu'enfin, il résulte de l'instruction que, s'agissant des subventions déductibles, et en particulier de celles que lui a consenties le ministère de l'intérieur, si la commune de Montmorin a affirmé en première instance, y compris dans une note en délibéré consacrée à ce sujet, que les subventions de ce ministère avaient eu pour seul objet le financement de la station d'épuration, elle porte, en appel, le montant des aides qu'elle aurait perçues à ce titre de 272 853 euros à 278 853 euros en alléguant, dans sa requête, que le ministère de l'intérieur lui aurait accordé une subvention de 6 000 euros au titre des réseaux ; qu'au regard du caractère contradictoire des écritures de la commune sur ce point et en l'absence de document probant sur la destination des subventions du ministère de l'intérieur, le montant précis des subventions déductibles ne peut être regardé comme établi ; qu'au regard de l'ensemble de ces éléments, la commune de Montmorin ne peut être regardée comme justifiant que le montant de 584,71 euros mis à la charge des propriétaires intéressés n'excède pas le coût réel des travaux de raccordement au réseau d'assainissement collectif réalisés sous la voie publique ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Montmorin n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 21 janvier 2014, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé la délibération de son conseil municipal du 11 avril 2012 fixant le montant de la participation des propriétaires au raccordement au réseau d'assainissement ;

6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que la commune de Montmorin demande sur leur fondement, au titre de ses frais non compris dans les dépens, soit mise à la charge de M. B... qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Montmorin une somme de 100 euros au titre des frais exposés par M. B...et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Montmorin est rejetée.

Article 2 : La commune de Montmorin versera à M. B...une somme de 100 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Montmorin et à M. A...B....

Délibéré après l'audience du 1er septembre 2015, à laquelle siégeaient :

M. Boucher, président de chambre,

M. Drouet, président-assesseur,

Mme Peuvrel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 septembre 2015.

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N° 14LY00835


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY00835
Date de la décision : 29/09/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Collectivités territoriales - Dispositions générales - Contrôle de la légalité des actes des autorités locales - Recours direct d'une personne lésée.

Collectivités territoriales - Commune - Finances communales.


Composition du Tribunal
Président : M. BOUCHER
Rapporteur ?: Mme Nathalie PEUVREL
Rapporteur public ?: M. CLEMENT
Avocat(s) : SCP D'AVOCATS J.F. JAUBOURG - A. GOUNEL - VERICEL

Origine de la décision
Date de l'import : 10/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-09-29;14ly00835 ?
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