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24/09/2015 | FRANCE | N°14LY03876

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 24 septembre 2015, 14LY03876


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Lyon :

- d'une part, d'annuler les décisions du 4 juillet 2014 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné ;

- d'autre part, d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée

et familiale " ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation.

Par un juge...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Lyon :

- d'une part, d'annuler les décisions du 4 juillet 2014 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné ;

- d'autre part, d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation.

Par un jugement n° 1405433 du 22 octobre 2014, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 18 décembre 2014 présentée pour M. B...A..., domicilié..., il est demandé à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1405433 du Tribunal administratif de Lyon du 22 octobre 2014 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour "vie privée et familiale" ou de réexaminer sa situation sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement à son conseil, sous réserve qu'il renonce à l'aide juridictionnelle, d'une somme de 1 200 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :

- elle a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il réside en France avec son épouse qui souffre d'un stress post traumatique et d'un syndrome dépressif qui nécessitent une prise en charge médicale sous peine de conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui n'est pas disponible au Kosovo, qu'il bénéficie d'un contrat à durée indéterminée, qu'il est père de trois enfants, dont l'un né en France a vocation à devenir français et que deux de ses enfants sont scolarisés depuis trois ans en école maternelle et élémentaire ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

En ce qui concerne la décision d'obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- elle est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour et d'obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire, enregistré le 20 août 2015, le préfet du Rhône conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 janvier 2015, du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel).

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- Vu la convention relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique du 3 septembre 2015 le rapport de M. Seillet, président-assesseur.

1. Considérant que M. B...A..., ressortissant du Kosovo né le 21 mars 1976, entré en France le 21 septembre 2010, selon ses déclarations, en compagnie de son épouse Mme D...A..., également originaire du Kosovo, et leurs deux enfants mineurs, a sollicité le bénéfice de l'asile, qui lui a été refusé par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 31 mars 2011, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 29 septembre 2011 ; que M. A..., à la suite de la demande de titre de séjour qu'il avait présentée le 17 novembre 2011, en qualité de conjoint d'un étranger malade, a bénéficié, sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'une carte de séjour temporaire valable du 19 décembre 2011 au 18 décembre 2012, renouvelée jusqu'au 18 décembre 2013 ; qu'il en a sollicité le renouvellement par une demande du 4 décembre 2013 ; que par un arrêté du 4 juillet 2014, le préfet du Rhône a refusé le renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné à l'expiration de ce délai ; que M. A... fait appel du jugement du 22 octobre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation desdites décisions préfectorales ;

Sur la légalité de la décision de refus de renouvellement du titre de séjour :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le séjour en France de M.A..., lequel déclare être entré sur le territoire français le 21 septembre 2010, était récent à la date de la décision en litige ; que par une décision du même jour, le préfet du Rhône a refusé le renouvellement du titre de séjour, en qualité d'étranger malade, dont était jusqu'alors titulaire son épouse, qui n'avait dès lors plus vocation à demeurer sur le territoire français ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, eu égard aux pièces produites par le préfet du Rhône au soutien de sa décision refusant le renouvellement du titre de séjour de l'épouse de M.A..., que celle-ci ne pourrait disposer dans son pays d'origine d'un traitement adapté à son état de santé ; que les trois enfants du couple, âgés de huit, six et un ans à la date de la décision en litige, étaient scolarisés en école maternelle et primaire ; qu'il n'est pas allégué que le requérant serait dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de vingt-quatre ans ; que, dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que la cellule familiale ne pourrait pas se reformer au Kosovo ni que la scolarité des enfants ne pourrait se poursuivre dans leur pays d'origine ; que, par suite, alors même que l'intéressé se prévaut de son insertion professionnelle, la décision de refus de renouvellement du titre de séjour de M.A..., qui n'a ni pour objet ni pour effet de le séparer de ses enfants, n'a méconnu ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou celles de l'article 3-1 de la convention internationale susvisée relative aux droits de l'enfant ; que ladite décision n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant ;

Sur la légalité de la décision préfectorale portant obligation de quitter le territoire français :

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...) " ;

5. Considérant qu'ainsi qu'il vient d'être exposé, le préfet du Rhône a refusé le 4 juillet 2014 la délivrance d'un titre de séjour à M. A... ; qu'ainsi, à la date de la décision litigieuse, celui-ci était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit que M. A... ne peut exciper de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d' un titre de séjour au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

7. Considérant, en dernier lieu, qu'il convient d'écarter, pour les mêmes motifs que ceux précédemment indiqués dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision de refus de titre de séjour, les moyens dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, et tirés de l'erreur manifeste d'appréciation et de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale et de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

8. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit que M. A... ne peut exciper de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour et de celle portant obligation de quitter le territoire français au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de destination ;

9. Considérant, en second lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ; qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ;

10. Considérant que si M. A... soutient qu'il court des risques dans son pays d'origine, l'intéressé, dont au demeurant la demande d'asile a été rejetée, ainsi qu'il a été dit, ne démontre pas, notamment par des documents probants, la réalité des persécutions dont il prétend avoir été victime dans son pays d'origine, et dont au demeurant il n'indique pas la nature ; que, dans ces conditions, M. A... n'est pas fondé à soutenir qu'en désignant le Kosovo comme pays à destination duquel il serait reconduit, le préfet du Rhône a méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et de libertés fondamentales ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 3 septembre 2015 à laquelle siégeaient :

M. Faessel, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

Mme Cottier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 septembre 2015.

Le rapporteur,

Ph. SeilletLe président,

X. Faessel

Le greffier,

M. C...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition,

Le greffier,

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N° 14LY03876

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY03876
Date de la décision : 24/09/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. FAESSEL
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 07/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-09-24;14ly03876 ?
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