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24/09/2015 | FRANCE | N°14LY03772

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 24 septembre 2015, 14LY03772


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E...D...épouse Siraja demandé le 24 juillet 2014 au Tribunal administratif de Lyon :

-.d'annuler les décisions en date du 4 juillet 2014 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

- d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée ou familiale " ou, à titre

subsidiaire, de réexaminer sa demande, à compter du jugement à intervenir, sous astreinte d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E...D...épouse Siraja demandé le 24 juillet 2014 au Tribunal administratif de Lyon :

-.d'annuler les décisions en date du 4 juillet 2014 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

- d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée ou familiale " ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande, à compter du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

Par un jugement n° 1405496 du 13 novembre 2014, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par requête enregistrée le 11 décembre 2014, Mme Sirajdemande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 13 novembre 2014 du Tribunal administratif de Lyon ;

2°) d'annuler lesdites décisions du préfet du Rhône ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée ou familiale " ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande, à compter du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros à verser à son conseil au titre des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la décision lui refusant un titre de séjour :

- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- la décision est dépourvue de base légale, compte tenu de l'illégalité du refus de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- la décision est dépourvue de base légale, compte tenu de l'illégalité du refus de séjour et de la décision portant obligation de quitter le territoire ;

Mme Siraja été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 janvier 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 portant application de cette loi ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Cottier, premier conseiller.

1. Considérant que Mme E...D...épouseC..., ressortissante marocaine née le 22 janvier 1987, est entrée en France le 3 juin 2011 sous couvert d'un visa de court séjour portant la mention " étudiant-concours " ; qu'elle a sollicité, le 6 juillet 2011, la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " étudiant " ; que, le 22 août 2012, elle a épousé M. A... Siraj, ressortissant marocain titulaire d'un titre de séjour de 10 ans valable jusqu'au 18 février 2018 ; que, par décisions en date du 27 août 2012, le préfet du Rhône a refusé de faire droit à sa demande de titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français ; que la légalité de ces décisions a été confirmée par jugement du Tribunal administratif de Lyon, le 19 février 2013, et par arrêt de la cour administrative de céans, le 29 novembre 2013 ; que Mme Siraj, qui s'est maintenue irrégulièrement sur le territoire, a sollicité le 27 janvier 2014, la délivrance d'un titre de séjour en se prévalant de sa " vie privée et familiale " et en produisant un certificat de grossesse dont le terme était fixé en avril 2014 ; que le 3 avril 2014, elle a donné naissance à un enfant ; que par décisions, en date du 4 juillet 2014, le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ; que Mme Siraja saisi le Tribunal administratif de Lyon d'une demande tendant à l'annulation desdites décisions préfectorales du 4 juillet 2014 ; qu'elle fait appel du jugement du 13 novembre 2014 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour de étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...)." ; qu'aux termes de l'article R. 313-21 dudit code : " Pour l'application du 7º de l'article L. 313-11, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de la vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine. " ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

4. Considérant que Mme Sirajfait valoir qu'elle réside en France depuis le 3 juin 2011, qu'elle s'est mariée à Vénissieux le 22 août 2012 avec un compatriote marocain titulaire d'un titre de séjour valable jusqu'en février 2018 et que de cette union est née une fille le 3 avril 2014 ; qu'elle indique que si elle venait à être effectivement éloignée, son retour en France dans le cadre du regroupement familial serait excessivement retardé à raison de la fragilité économique de l'activité artisanale créée par son époux et de la faiblesse des ressources de ce dernier ; que toutefois, il ressort des pièces du dossier que MmeC..., qui s'est maintenue en France irrégulièrement notamment après l'arrêt de la Cour du 29 novembre 2013, ne résidait sur le territoire national que depuis trois ans au 4 juillet 2014, date de ce deuxième refus de titre de séjour ; que Mme Sirajqui est entrée en France à l'âge de 24 ans, a vécu l'essentiel de sa vie au Maroc, pays où demeurent... ; qu'il n'est pas établi par les pièces du dossier qu'il y aurait obstacle à ce que son mari, qui est également de nationalité marocaine, puisse l'accompagner ou la rejoindre au Maroc, pays où il a lui-même vécu jusqu'en 2008 ; que dès lors, dans les circonstances de l'espèce, eu égard à la durée et aux conditions du séjour en France de l'intéressée, le refus de séjour qui lui a été opposé par le préfet du Rhône ne peut être regardé comme portant au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs de cette décision ; que, par suite, le préfet n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, pour les mêmes motifs, la décision du préfet n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de MmeC... ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 313- 4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ;

6. Considérant que si la requérante évoque sans autre précision une méconnaissance par le préfet du Rhône des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il ne ressort pas des pièces au dossier qu'elle a présenté une demande de titre de séjour sur ce fondement, ni que le préfet a examiné sa demande de titre de séjour au regard d'un tel fondement ; que par suite un tel moyen est inopérant ;

7. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention susvisée relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent des enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces dernières stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir formé contre une décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

8. Considérant que la décision de refus de titre de séjour n'implique pas, par elle-même, la séparation de Mme Sirajet de sa fille ; que si la requérante indique qu'en cas de demande de regroupement familial, sa fille et elle-même pourraient être séparées pendant plusieurs mois de leur père et mari, le refus de titre de séjour en litige n'implique pas la séparation durable de la famille ni la rupture des liens entre la requérante, son conjoint et leur fille ; qu'il existe, en l'espèce, notamment des possibilités de reconstitution de la cellule familiale au Maroc, pays dont la requérante et son époux possèdent la nationalité ; que, dès lors, dans les circonstances de l'espèce, la décision contestée n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire :

9. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...). / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. / L'obligation de quitter le territoire français fixe le pays à destination duquel l'étranger est renvoyé en cas d'exécution d'office. " ; que le 4 juillet 2014, MmeC..., à qui le préfet du Rhône avait refusé un titre de séjour, se trouvait dans le cas prévu par ces dispositions, dans lequel le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ;

10. Considérant, en deuxième lieu, que, compte tenu de ce qui a été dit plus haut, le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour doit être écarté ;

11. Considérant, en troisième et dernier lieu, que pour les mêmes motifs que ceux précédemment énoncés dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour, les moyens dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention de New York du 26 janvier 1990, doivent être écartés ; que pour les mêmes motifs, doit être écarté le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision sur la situation de MmeC... ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

12. Considérant que, comme il vient d'être dit ci-dessus les décisions refusant de délivrer un titre de séjour à Mme Sirajet lui faisant obligation de quitter le territoire français ne sont pas entachées d'illégalité ; qu'il s'ensuit que le seul moyen soulevé à l'encontre de la décision fixant le pays de destination, tiré, par voie d'exception, de l'illégalité des décisions précitées, doit, en tout état de cause être écarté ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme Sirajn'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles de son conseil tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme D...épouse Sirajest rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E...D...épouse Sirajet au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 3 septembre 2015 à laquelle siégeaient :

M. Faessel, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

Mme Cottier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 septembre 2015.

Le rapporteur,

C. Cottier

Le président,

X. Faessel

La greffière,

M. B...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition,

La greffière,

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N° 14LY03772

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY03772
Date de la décision : 24/09/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. FAESSEL
Rapporteur ?: Mme Cécile COTTIER
Rapporteur public ?: Mme VIGIER-CARRIERE
Avocat(s) : SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 07/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-09-24;14ly03772 ?
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