La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/07/2015 | FRANCE | N°13LY02865

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 02 juillet 2015, 13LY02865


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...D...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté, en date du 10 juillet 2012, par lequel le préfet de l'Isère lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays à destination duquel elle serait reconduite d'office.

Par un jugement n° 1302854 du 2 octobre 2013, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une r

equête enregistrée par télécopie le 2 novembre 2013 et régularisée le 7 du même mois, MmeD..., rep...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...D...a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté, en date du 10 juillet 2012, par lequel le préfet de l'Isère lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays à destination duquel elle serait reconduite d'office.

Par un jugement n° 1302854 du 2 octobre 2013, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée par télécopie le 2 novembre 2013 et régularisée le 7 du même mois, MmeD..., représentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Grenoble du 2 octobre 2013 ;

2°) d'annuler l'arrêté susvisé du préfet de l'Isère pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " l'autorisant à travailler, dès la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation sans délai ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée.

Elle soutient que :

- la décision portant refus de délivrance de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français sont entachées d'un vice d'incompétence, insuffisamment motivées, entachées d'un défaut d'examen particulier de sa situation personnelle et d'une erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation ;

- ces décisions méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant ;

- l'obligation de quitter le territoire a été prise en méconnaissance de son droit à être entendu, reconnu par le droit de l'Union européenne ;

La requête a été notifiée au préfet de l'Isère qui n'a pas produit d'observations.

Mme D...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 décembre 2013.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention relative aux droits de l'enfant ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pruvost.

1. Considérant que MmeD..., ressortissante kosovare née le 26 mars 1986, est entrée en France le 25 mars 2010 selon ses déclarations ; que sa demande d'asile a été rejetée par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 28 janvier 2011, confirmée le 17 octobre 2011 par la Cour nationale du droit d'asile ; que, par un arrêté du 10 juillet 2012, le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ; que Mme D... relève appel du jugement du 2 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur le refus de délivrance de titre de séjour :

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la décision de refus de délivrance de titre de séjour contestée a été prise en réponse à la demande d'admission au séjour au titre de l'asile présentée par Mme D...; que, dès lors que le bénéfice de la protection subsidiaire ou la reconnaissance de la qualité de réfugié avait été refusé à la requérante, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, le préfet de l'Isère était tenu de refuser à cette dernière la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-13 ou des dispositions du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sans avoir à porter une appréciation sur les faits de l'espèce ; que le préfet de l'Isère se trouvant ainsi en situation de compétence liée pour refuser le titre de séjour sollicité, les moyens tirés du défaut de motivation, de l'absence d'examen particulier de la situation de la requérante et de l'incompétence du signataire sont inopérants ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme D...est arrivée sur le territoire français deux ans et quatre mois avant l'intervention du refus d'admission au séjour en litige, après avoir vécu jusqu'à l'âge de 24 ans au Kosovo ; que Mme D...ne justifie pas d'une insertion sociale ou professionnelle particulière en France ; que rien ne fait obstacle à ce que la cellule familiale, composée du couple et de ses quatre enfants mineurs, se reconstitue hors de France, et notamment au Kosovo, pays dont tous les membres du foyer ont la nationalité, où la requérante n'établit pas être dépourvue d'attaches familiales, où ses enfants pourront poursuivre leur scolarité et où il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle encourrait des risques qui ne lui permettraient pas d'y mener une vie privée et familiale normale ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, en particulier de la durée et des conditions de séjour de l'intéressée en France, la décision lui refusant l'admission au séjour n'a pas porté au droit de Mme D...au respect de sa vie privée et familiale, une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs du refus ; qu'elle n'a, dès lors, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que rien ne s'oppose à ce que les quatre enfants mineurs E...D...repartent avec leurs parents au Kosovo, où leur scolarité pourra être poursuivie ; que dès lors, le préfet de l'Isère n'a pas porté, à l'intérêt supérieur de ces enfants, une atteinte méconnaissant les stipulations l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. (...) " ;

6. Considérant que le préfet de l'Isère a, par le même arrêté, refusé de délivrer un titre de séjour à Mme D...et lui a fait obligation de quitter le territoire français ; que la décision d'obligation de quitter le territoire français, prise sur le fondement des dispositions du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, visées par l'arrêté attaqué et applicables à MmeD..., n'avait pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour qui, en l'espèce, est suffisamment motivée ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que l'arrêté contesté a été signé par M. Bruno Charlot, secrétaire général adjoint de la préfecture de l'Isère, qui disposait d'une délégation de signature du préfet de l'Isère, par arrêté du 9 janvier 2012, publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le 10 janvier 2012, à l'effet de signer notamment, en cas de permanence, les obligations de quitter le territoire français assorties ou non d'une interdiction de retour et fixant le pays de destination d'un ressortissant étranger ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. C...n'assurait pas de permanence le 10 juillet 2012 ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte attaqué doit être écarté comme manquant en fait ;

8. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier et en particulier des mentions de l'arrêté, que le préfet de l'Isère n'a pas procédé à un examen attentif de la situation personnelle de l'intéressée avant de faire obligation à Mme D...de quitter le territoire français ;

9. Considérant, en quatrième lieu, qu'en se bornant à faire valoir, sans autre précision, qu'elle n'a pas été entendue préalablement à l'édiction de l'obligation de quitter le territoire français, MmeD..., qui a été à même de faire valoir tout élément utile tenant à sa situation personnelle à l'occasion du dépôt de sa demande de titre de séjour et tout au long de l'instruction de sa demande et ne fait état d'aucun élément pertinent qu'elle aurait été empêchée de porter à la connaissance de l'administration et qui aurait été susceptible d'influer sur le prononcé ou les modalités d'exécution de la mesure d'éloignement prise à son encontre, n'est pas fondée à soutenir que son droit à être entendue préalablement à une décision administrative défavorable, énoncé au paragraphe 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, a été méconnu ;

10. Considérant, en cinquième lieu, que pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 4 et 5 ci-avant, l'obligation faite à Mme D...de quitter le territoire français n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles du l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

11. Considérant, en sixième et dernier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Isère a commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'appréciation des conséquences de la mesure d'éloignement sur la situation personnelle de l'intéressée ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

13. Considérant que le présent arrêt, qui rejette la requête de Mme D...n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint audit préfet de délivrer un tel titre de séjour à Mme D...ou de réexaminer sa situation doivent être rejetées ;

Sur les frais exposés en cours d'instance et non compris dans les dépens :

14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les frais exposés en cours d'instance par la requérante soient mis à la charge de l'Etat, qui dans la présente instance, n'est pas la partie perdante ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...D...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 18 juin 2015 à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président,

Mme Mear, président-assesseur,

Mme Bourion, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 2 juillet 2015.

''

''

''

''

1

2

N° 13LY02865


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY02865
Date de la décision : 02/07/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: M. Dominique PRUVOST
Rapporteur public ?: Mme CHEVALIER-AUBERT
Avocat(s) : ALAMPI

Origine de la décision
Date de l'import : 15/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-07-02;13ly02865 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award