Vu la décision n° 358715 du 28 juin 2013 par laquelle le Conseil d'Etat a, sur le pourvoi du ministre du budget des comptes publics et de la réforme de l'Etat, annulé les articles 1er et 2 de l'arrêt n° 11LY01183 du 15 mars 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a déchargé la SAS Micel des cotisations de taxe professionnelle mises à sa charge au titre des années 2005 et 2006 ;
Vu la requête, enregistrée le 11 mai 2011 au greffe de la cour, présentée pour la société par actions simplifiée (SAS) Micel, dont le siège social est sis Parc d'activités Stelytec à Saint -Chamond (42400) ;
La SAS Micel demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0900348 en date du 8 mars 2011 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande en décharge des cotisations de taxe professionnelle mises à sa charge au titre des années 2005 à 2007 ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;
La SAS Micel soutient que :
- elle a fait le choix de s'installer sur le parc d'activités de Stelytec en raison de la forte incitation des autorités locales et il est anormal et injustifié que le régime appliqué et présenté comme incitatif fasse l'objet d'une remise en cause en contradiction avec le principe de sécurité juridique et que celle-ci soit banalisée de la sorte alors même que la société n'a apporté aucun changement significatif à ses activités ;
- comme l'a relevé le tribunal administratif de Lyon, son activité de fabrication/transformation n'est qu'accessoire à son activité principale d'achat/revente et, en conséquence, le critère de la nature de l'activité ne permet pas de donner à son activité une qualification autre que commerciale ;
- son activité de découpe ne peut, en aucun cas, être considérée comme une activité de " transformation des matières premières " au sens de l'article 1499, pas plus d'ailleurs que de fabrication ou de réparation d'objets ;
- quand bien même l'activité de découpe serait considérée comme une activité industrielle de transformation, son importance ne donnerait pas pour autant un caractère prépondérant aux activités de nature industrielle inférieures à 50 % du chiffre d'affaires ;
- son inscription au répertoire national des entreprises sous le code APE 252 H " fabrication de pièces techniques en matière plastique " ne saurait justifier, par elle-même, une requalification comme l'indique le décret n° 73-314 du 14 mars 1973 et alors que cette inscription est la conséquence de la fusion-absorption d'une société exerçant antérieurement cette activité ;
- la prépondérance de l'activité de négoce ressort du fait que 72 % des effectifs salariés y sont affectés ;
- l'argument tiré de l'étude des marges commerciales n'est pas pertinent ;
- l'importance du matériel utilisé doit être appréciée non pas in abstracto mais in concreto par rapport à l'ensemble des actifs de la société et ne représente en l'espèce que 19 % des actifs immobilisés et même 7 % si l'on prend en compte la valeur nette comptable du matériel industriel et la valeur de l'immeuble ;
- la condition de prépondérance n'est pas remplie dès lors qu'elle réalise plus de 53 % de son chiffre d'affaires avec des opérations d'achat revente pure et simple sans intervention d'aucune machine, lesquelles occupent a minima 54 % de la surface globale des locaux ;
- elle ne peut être rattachée à aucun autre secteur d'activité que celui de l'industrie.
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 30 septembre 2011, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat qui conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que :
- la réalisation des travaux de découpe spécialisés nécessite des moyens techniques très importants tant au regard du prix de revient des matériels et machines à découpe numérisée qu'au regard de la surface occupée ;
- l'activité de la SAS Micel nécessite de ce fait d'importants moyens techniques et les installations, matériels et outillages qu'elle met en oeuvre jouent un rôle prépondérant dans l'exercice de cette activité si bien que l'établissement qu'elle exploite revêt un caractère industriel, alors même qu'elle n'exerce pas à titre principal une activité de fabrication de biens corporels mobiliers ;
- l'importance des moyens techniques utilisés par une entreprise dans le cadre de son activité ne saurait se mesurer par rapport à la valeur de l'ensemble de l'actif immobilisé, ni se mesurer en se référant à une valeur du matériel après amortissement ou compte tenu de la valeur de remplacement ou de l'emprise éventuelle inférieure par rapport aux locaux ;
- les assurances non écrites, y compris d'ordre fiscal, qui auraient été données à la société par des autorités locales afin de l'inciter à s'implanter dans le parc d'activités ne sauraient être utilement opposées à l'administration fiscale sur le fondement des articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales.
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 29 novembre 2011, présenté pour la SAS Micel confirmant ses précédentes écritures ;
Vu la lettre en date du 7 février 2012 par laquelle la cour informe les parties qu'elle est susceptible de se fonder sur un moyen d'ordre public ;
Vu le mémoire, enregistré le 23 février 2012, présenté pour la SAS Micel, qui maintient ses conclusions ;
Vu l'ordonnance du 1er octobre 2013 fixant la clôture d'instruction au 4 novembre 2013, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;
Vu le mémoire, enregistré le 4 novembre 2013, présenté pour la SAS Micel qui maintient ses conclusions tendant à obtenir la décharge des cotisations de taxe professionnelle mises à sa charge au titre des années 2005 et 2006 ;
Elle soutient que son activité est de nature commerciale de sorte que sa situation doit être appréciée par référence à l'importance de son matériel et son caractère prépondérant dans le cadre de son activité ; que si elle procède à la fois à des opérations de fabrication et d'achat revente, cette seconde activité est largement majoritaire ; qu'en ce qui concerne l'activité découpe, elle ne procède à aucune transformation des produits ; que ces opérations de découpe sont considérées au plan douanier comme des opérations simples insuffisantes pour être assimilées à une transformation substantielle ; que la marge de 28 % dégagée au titre de l'activité d'achat revente après découpe est bien plus proche de celle d'achat revente pure et simple qui s'établit à 20,6 % que de l'activité de fabrication qui est de 63 % et qui ne représente que 8,4 % du chiffre d'affaires ; que le matériel utilisé représente entre 7 % et 19 % du total de l'actif immobilisé et ne peut être qualifié d'important ; qu'aucun matériel lourd ne concoure à l'activité découpe ; que la condition de prépondérance qui implique que l'activité dépende par définition à plus de 50 % de l'outillage et de la force motrice n'est pas remplie ; que 53 % de son activité correspond à une activité d'achat revente qui ne fait intervenir aucune machine ; que seuls 38 % de l'activité d'achat revente nécessite l'intervention de machines qui ne sont là que pour procéder à la découpe des matières vendues ; que l'emprise du matériel dans les locaux ne permet pas non plus de démontrer leur caractère prépondérant ; que la superficie du bâtiment affectée à l'activité de négoce, exclusive de toute découpe, représente a minima 3 077 m2, soit 54 %, en comptant les réserves de stockage à hauteur de 2 125 m2 sur les 5 699 m2 des locaux ; que si le Conseil d'Etat conclut que, pour apprécier la prépondérance des installations techniques, il n'est pas nécessaire de s'arrêter à apprécier l'importance des matériels et outillages par rapport aux activités développées dans les locaux, l'application de cette analyse ne peut au cas d'espèce qu'entraîner la confirmation de la décharge initialement retenue par la cour ; que le rôle des moyens de production n'est pas prépondérant dans les opérations pour lesquelles l'immeuble était principalement utilisé, soit à fin de stockage et de lieu de réunion pour l'activité d'achat-revente ; que la requalification en établissement industriel n'est donc pas justifiée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bouissac, président-assesseur,
- les conclusions de M. Besse, rapporteur public,
- et les observations de MeA..., représentant la SAS Micel ;
1. Considérant que la SAS Micel, qui a pour activité la distribution de composants pour les industries électrotechniques et électromécaniques, la transformation et la revente de produits isolants, a fait l'objet, au titre des années 2005 à 2007, d'un contrôle en matière de taxe professionnelle à l'issue duquel l'administration a estimé, qu'eu égard à l'importance et au rôle prépondérant des moyens techniques mis en oeuvre pour exercer ses activités, elle devait être regardée comme revêtant un caractère industriel au sens de l'article 1499 du code général des impôts ; que par un jugement du 8 mars 2011, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande en décharge des cotisations de taxe professionnelle mises à la charge de la SAS Micel au titre des années 2005 à 2007 ; que le ministre s'étant pourvu en cassation contre l'arrêt du 15 mars 2012 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a prononcé la décharge des cotisations de taxe professionnelle mises à la charge de la société Micel au titre des années 2005 et 2006, le Conseil d'Etat a, par décision du 28 juin 2013, annulé les articles 1er et 2 dudit arrêt et renvoyé, dans cette mesure, l'affaire à la cour ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 1447 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " La taxe professionnelle est due chaque année par les personnes physiques ou morales qui exercent à titre habituel une activité professionnelle non salariée " ; qu'aux termes de l'article 1448 de ce même code : " La taxe professionnelle est établie suivant la capacité contributive des redevables, appréciée d'après des critères économiques en fonction de l'importance des activités exercées par eux sur le territoire de la collectivité bénéficiaire ou dans la zone de compétence de l'organisme concerné " ; que, selon l'article 1467 du même code : " La taxe professionnelle a pour base : / 1º Dans le cas des contribuables autres que les titulaires de bénéfices non commerciaux, les agents d'affaires et les intermédiaires de commerce employant moins de cinq salariés : / a. la valeur locative (...) des immobilisations corporelles dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle (...) ; / b. les salaires (...) versés (...) " ; qu'aux termes de l'article 1499 du même code : " La valeur locative des immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties est déterminée en appliquant au prix de revient de leurs différents éléments, revalorisé à l'aide des coefficients qui avaient été prévus pour la révision des bilans, des taux d'intérêt fixés par décret en Conseil d'Etat (...) " ; que revêtent un caractère industriel, au sens de ces dispositions, les établissements dont l'activité nécessite d'importants moyens techniques, non seulement lorsque cette activité consiste en la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers, mais aussi lorsque le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en oeuvre, fut-ce pour les besoins d'une autre activité, est prépondérant ; qu'il incombe au juge de l'impôt de rechercher le rôle joué par ces moyens de production dans les opérations pour lesquelles l'immeuble à évaluer était principalement utilisé ;
3. Considérant que la société Micel qui exerce une activité de distribution de composants pour les industries électrotechniques et électromécaniques ainsi que la découpe et la fabrication de pièces techniques en matière plastique, dispose d'un établissement sur la commune de Saint-Chamond composé d'ateliers, d'espaces de stockage et de bureaux ; qu'il résulte de l'instruction que les ateliers de fabrication et de découpe occupent une surface de 2 622 mètres carrés, soit un peu moins de la moitié de la surface totale des locaux, de 5 699 mètres carrés, que les matériels mis en oeuvre pour ces activités consistent en huit machines de découpe en largeur, trois machines de découpe à format et trois machines de trancannage, dont le prix de revient est, selon les déclarations souscrites par la société, de 2 524 727 euros au titre de l'année 2005 et de 2 294 443 euros au titre de l'année 2006 ; qu'il résulte également de l'instruction que les espaces d'entreposage, d'une superficie de 2 125 m², accueillent tant les produits destinés à la revente en l'état que ceux élaborés sur place ou donnant lieu à découpe ; qu'ainsi, et sans qu'il y ait lieu de rapporter la valeur de ces matériels et outillage, à la valeur des immobilisations de l'établissement, et alors même que lesdits matériels et outillage seraient obsolètes, les installations de fabrication et de découpe nécessitent la mise en oeuvre d'importants moyens techniques qui jouent un rôle prépondérant dans l'activité exercée par la société Micel dans l'immeuble à évaluer et principalement utilisé pour les opérations susdécrites ; que, par suite, l'établissement en cause présente un caractère industriel au sens des dispositions de l'article 1499 du code général des impôts ;
4. Considérant que la SAS Micel ne peut utilement se prévaloir des assurances, y compris d'ordre fiscal, qui auraient pu lui être données par des autorités locales en vue de l'inciter à s'implanter dans le parc d'activités Stelytec à Saint-Chamond dès lors qu'elles n'émanent pas de l'administration fiscale et ne sauraient dès lors être opposées à celle-ci sur le terrain des articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SAS Micel n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lyon a, par le jugement attaqué, rejeté sa demande aux fins de décharge des impositions litigieuses ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SAS Micel est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Micel et au ministre des finances et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 9 juin 2015, à laquelle siégeaient :
- M. Bourrachot, président de chambre,
- Mme Bouissac, président-assesseur,
- Mme Duguit-Larcher, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 30 juin 2015.
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