La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/06/2015 | FRANCE | N°14LY03624

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 18 juin 2015, 14LY03624


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au Tribunal administratif de Lyon :

- d'annuler les décisions en date du 1er juillet 2014 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office ;

- d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour temporaire, portant la mention " vie priv

ée et familiale ", sans délai, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à titre s...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au Tribunal administratif de Lyon :

- d'annuler les décisions en date du 1er juillet 2014 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office ;

- d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour temporaire, portant la mention " vie privée et familiale ", sans délai, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation sans délai et sous la même astreinte ;

- de mettre à la charge de l'Etat le versement, à son conseil, d'une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à charge pour Me C...de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

Par un jugement n° 1405317 du 23 octobre 2014, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande et les conclusions du préfet du Rhône tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 novembre 2014, Mme B...A..., représentée par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 23 octobre 2014 ;

2°) d'annuler les décisions du préfet du Rhône du 1er juillet 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un certificat de résidence temporaire portant la mention "vie privée et familiale" ou de réexaminer sa situation, sous astreinte de cent euros par jour de retard à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement, à son conseil, d'une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à charge pour Me C...de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Elle soutient que :

- le refus de titre de séjour n'a pas été précédé de la saisine de la commission du titre de séjour ; cette décision méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les premiers juges ont entaché leur jugement d'erreur de droit en ce qui concerne la charge de la preuve de la disponibilité d'un traitement approprié et dénaturé les pièces du dossier ; le refus de titre de séjour méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ; cette décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; elle méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de renvoi est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour et de la mesure d'éloignement.

Par ordonnance du 21 janvier 2012, la clôture de l'instruction de l'affaire a été fixée au 9 février 2015.

Le mémoire du préfet du Rhône enregistré le 8 avril 2015, postérieurement à la clôture de l'instruction, n'a pas été communiqué.

Mme A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale le 18 décembre 2014.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950,

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- le code de justice administrative ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 mai 2015 le rapport de Mme Samson-Dye, premier conseiller ;

1. Considérant que MmeA..., originaire de la République Démocratique du Congo, relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions en date du 1er juillet 2014 par lesquelles le préfet du Rhône lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a désigné le pays à destination duquel elle pourra être reconduite d'office ;

Sur la légalité des décisions préfectorales :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat " ; qu'aux termes de l'article L. 511-4 du même code : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé (...) " ;

3. Considérant que sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle ; que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ; qu'en cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;

4. Considérant que le médecin de l'agence régionale de santé a émis, le 7 février 2014, un avis selon lequel, d'une part, Mme A... est atteinte d'une pathologie nécessitant une prise en charge médicale à défaut de laquelle l'intéressée serait exposée à des conséquences d'une exceptionnelle gravité et, d'autre part, elle ne peut recevoir le traitement approprié dans son pays d'origine ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A...souffre de stress post-traumatique ; que, pour remettre en cause cet avis en ce qui concerne la disponibilité des soins en République Démocratique du Congo, le préfet établit, par la production d'un courrier du médecin référent de l'ambassade de France et d'un rapport d'une institution canadienne, l'existence de soins psychiatriques dans son pays d'origine ; que, si Mme A...établit que les médicaments qui lui sont prescrits en France ne sont pas disponibles en République Démocratique du Congo, il ne ressort pas des pièces du dossier que ces médicaments seraient les seuls à pouvoir traiter convenablement sa pathologie ; qu'il suit de là que l'absence dans ce pays d'un traitement approprié à l'état de santé de MmeA..., traitement qui n'est pas nécessairement identique à celui prescrit en France, ne ressort pas des pièces du dossier ; qu'il ne ressort par ailleurs pas des pièces du dossier que les troubles psychiatriques dont est atteinte Mme A...auraient effectivement et directement pour origine des évènements traumatisants vécus dans son pays d'origine ; que, par suite, et sans que la requérante ne soit fondée à soutenir que les premiers juges auraient inversé la charge de la preuve ou dénaturé les pièces du dossier, le préfet du Rhône n'a ni méconnu les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en refusant de renouveler son titre de séjour, ni méconnu, en l'obligeant à quitter le territoire français, les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du même code ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que la requérante fait valoir qu'elle réside en France depuis 2009, qu'elle travaille comme assistante de vie et est bien intégrée dans sa communauté religieuse ; qu'elle évoque également son état de santé, la présence de sa soeur en France en qualité de réfugié, ainsi que le décès de son mari ;

7. Considérant toutefois qu'il ressort des pièces du dossier qu'un traitement approprié à l'état de santé de Mme A...existe dans son pays d'origine et qu'elle conserve des attaches familiales dans son pays d'origine, où vivent notamment ses enfants ; que, dans ces conditions, nonobstant ses efforts d'intégration, ni le refus de titre de séjour, ni l'obligation de quitter le territoire français ne portent une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de la requérante ; que, par suite, les moyens tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés ;

8. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 312-1 du même code : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 312-2 de ce code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. " ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du titre de séjour du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles L. 313-11, L. 314-11, L. 314-12 et L. 431-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou qui justifient d'une résidence habituelle de plus de dix ans sur le territoire français, auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ; que Mme A...n'est pas au nombre des étrangers remplissant les conditions énoncées à cet article pour obtenir un titre de séjour de plein droit ; qu'elle ne peut utilement se prévaloir de l'avis favorable qu'avait émis le médecin de l'agence régionale de santé, qui ne liait pas le préfet et ne lui donnait pas droit à l'obtention d'un titre de séjour ; qu'elle ne réside pas en France depuis plus de dix ans ; qu'ainsi, le préfet n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ;

9. Considérant, en quatrième lieu, qu'au regard de l'ensemble des circonstances de l'espèce précédemment rappelées, la mesure d'éloignement n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

10. Considérant, en cinquième lieu, qu'en absence de démonstration de l'illégalité du refus de titre de séjour et de la mesure d'éloignement, Mme A...n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de ces décisions ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, d'astreinte et tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 28 mai 2015, où siégeaient :

- M. Wyss, président de chambre,

- M. Mesmin d'Estienne, président-assesseur,

- Mme Samson-Dye, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 juin 2015.

''

''

''

''

N° 14LY00768

N° 14LY03624 4


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY03624
Date de la décision : 18/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. WYSS
Rapporteur ?: Mme Aline SAMSON DYE
Rapporteur public ?: M. DURSAPT
Avocat(s) : SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-06-18;14ly03624 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award