Vu la procédure suivante :
Mme A...B...a demandé au Tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 2 juillet 2014 par lequel le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour et assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire dans le délai d'un mois à destination de la Russie ou de tout autre pays dans lequel elle établit être légalement admissible.
Par le jugement n° 1405457 du 16 décembre 2014, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande.
Par une requête enregistrée le 7 janvier 2015, Mme B...représentée par Me C... demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 16 décembre 2014 ;
2°) d'annuler cet arrêté préfectoral du 2 juillet 2014 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère, si l'arrêté devait être annulé pour un motif de forme, de procéder au réexamen de sa situation dans le délai de deux mois suivant la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai d'un mois à compter de la décision à intervenir également sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) d'enjoindre au préfet, si l'annulation de la décision intervenait pour un motif de fond, de lui délivrer le certificat de résidence sollicité lui permettant d'exercer une activité salariée en France dans les trente jours suivant la notification de la décision à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 000 euros à verser à son conseil en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve, pour celui-ci, de renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
- la décision portant refus de titre méconnaît tout à la fois le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le préfet de l'Isère n'a pas procédé à un examen attentif et particulier de sa situation personnelle ;
- il a commis une erreur manifeste d'appréciation sur les conséquences de sa décision, compte tenu tout à la fois des risques qu'elle encourt dans son pays du fait qu'elle n'y a plus de liens, qu'elle a un compagnon en France et qu'elle souffre de multiples pathologies ;
- les autres décisions sont illégales du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
- l'obligation de quitter le territoire méconnaît l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision sur le pays de destination viole l'article 3 de la convention précitée et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- ces décisions sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation.
Par une décision du 27 janvier 2015, le bureau d'aide juridictionnelle a accordé à Mme B... le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.
Par ordonnance du 17 mars 2015 la date de clôture de l'instruction a été fixée au 2 avril 2015.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement, a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu, au cours de l'audience publique du 13 mai 2015, le rapport de Mme Gondouin, rapporteur.
1. Considérant que MmeB..., née en 1969, de nationalité russe, déclare être entrée irrégulièrement en France en septembre 2010 ; que sa demande d'asile politique a été successivement rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 8 juin 2011 et par la Cour nationale du droit d'asile le 7 avril 2014 ; que, par un arrêté du 2 juillet 2014, le préfet de l'Isère a refusé de lui délivrer un titre de séjour, assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire dans le délai de trente jours et fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée ; que Mme B...relève appel du jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 16 décembre 2014 qui a rejeté sa demande dirigée contre ces décisions ;
Sur la décision portant refus de titre de séjour :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° À l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ;
3. Considérant qu' il ressort des pièces du dossier que Mme B...est arrivée en France à l'âge de 41 ans ; que, comme l'ont relevé les premiers juges, si elle soutient entretenir une relation avec un étranger titulaire d'un titre de séjour, elle se borne à produire une photocopie de ce titre sans apporter aucun élément probant permettant d'établir la réalité d'une telle relation ; qu'elle ne se prévaut en France d'aucun autre lien privé ou familial ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, même si elle soutient que ses parents sont décédés et qu'elle n'a plus de nouvelles de ses frères et soeurs en Russie ni de sa fille mineure dont elle a été séparée au cours du voyage, que Mme B...est dépourvue de liens familiaux ou affectifs dans son pays d'origine ; que, dès lors, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet de l'Isère n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni commis d'erreur manifeste d'appréciation dans les conséquences de sa décision sur la situation de MmeB... ; que, d'autre part, Mme B...n'ayant pas déposé de demande de titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code précité, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions est inopérant ;
Sur les autres décisions :
4. Considérant, en premier lieu, que Mme B...n'est pas fondée à soutenir, compte tenu de ce qui précède, que les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination sont illégales du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;
5. Considérant, en deuxième lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celui tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés pour les mêmes raisons que précédemment ; que le moyen tiré de la méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant à l'encontre d'une obligation de quitter le territoire français ;
6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; qu'en vertu du dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations précitées ;
7. Considérant que si Mme B...soutient avoir fait l'objet de discriminations, de menaces et de violences en Russie à cause de ses origines géorgiennes, elle n'établit pas, par les pièces qu'elle produit et alors que son récit a été estimé particulièrement vague, confus et peu circonstancié par les autorités chargées de l'asile, qu'elle serait personnellement exposée à des risques en cas de retour dans son pays d'origine ; que, dès lors, le préfet de l'Isère n'a pas méconnu les stipulations et dispositions précitées ni commis d'erreur manifeste d'appréciation ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande dirigée contre les décisions du préfet de l'Isère en date du 2 juillet 2014 ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne permettant pas de faire bénéficier la partie perdante ou son conseil du paiement par l'autre partie des frais exposés à l'occasion du litige soumis au juge, les conclusions présentées par Mme B...sur le fondement de cet article doivent être également rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A...B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.
Délibéré après l'audience du 13 mai 2015 où siégeaient :
- M. Wyss, président de chambre,
- Mme Gondouin et MmeD..., premiers conseillers.
Lu en audience publique, le 11 juin 2015.
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N° 15LY00121