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21/04/2015 | FRANCE | N°14LY00716

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 21 avril 2015, 14LY00716


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 5 mars 2014, présentée pour

Mme A...B..., domiciliée... ;

Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1307778 du 11 février 2014 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 3 octobre 2013 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, lesdi

tes décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer un tit...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 5 mars 2014, présentée pour

Mme A...B..., domiciliée... ;

Mme B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1307778 du 11 février 2014 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 3 octobre 2013 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, lesdites décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation après lui avoir délivré une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, à payer à son conseil, la somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à charge pour ce dernier de renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat à sa mission d'aide juridictionnelle ;

Elle soutient :

- que le refus de titre de séjour méconnait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- que l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité de la décision refusant le titre de séjour ; qu'elle a été prise en méconnaissance du droit d'être entendu, en violation du droit de l'Union européenne ;

- que la décision fixant son pays de destination est illégale du fait de l'illégalité de la décision refusant le titre de séjour et de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ; qu'elle méconnait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 16 mars 2015, présenté par le préfet du Rhône qui conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de Mme B...une somme de 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Le préfet du Rhône soutient que les moyens ne sont pas fondés ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la décision du 24 avril 2014 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à Mme B...;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

Vu l'arrêt rendu par la Cour de justice de l'Union européenne le 5 novembre 2014, dans l'affaire C-166/13 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Sur sa proposition, le rapporteur public a été dispensé de prononcer des conclusions à l'audience en application de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative par le président de la formation de jugement ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 mars 2015 :

- le rapport de Mme Duguit-Larcher, premier conseiller ;

1. Considérant que Mme A...B..., née le 16 juin 1988, de nationalité nigériane, est entrée irrégulièrement en France à la date déclarée du 20 mars 2011 et a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile ; que le 23 octobre 2012, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a refusé de lui reconnaître la qualité de réfugiée ; que cette décision a été confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile en date du 26 juin 2013 ; que Mme B...relève appel du jugement du 11 février 2014 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 3 octobre 2013 par lesquelles le préfet du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

Sur le refus de titre de séjour :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

3. Considérant que Mme B...soutient qu'elle a tissé des liens en France et produit à l'appui de ses allégations le témoignage de son " compagnon ", qu'elle aurait rencontré en août 2011 et avec lequel elle vivrait depuis décembre 2011, ainsi qu'une attestation de l'association " l'amicale du Nid Rhône ", qui indique qu'elle la suit depuis le 8 juillet 2011 et qu'elle est très assidue aux cours d'apprentissage de la langue française ; que, toutefois, l'intéressée, qui aurait, selon ses déclarations, quitté son pays d'origine en mars 2008, à l'âge de 19 ans, pour rejoindre l'Italie, n'est arrivée en France qu'en mars 2011 et n'est pas dépourvue d'attaches familiales au Nigéria, où résident encore des membres de sa famille ; que, dans ces conditions, la décision contestée n'a pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, dès lors, la requérante n'est, en tout état de cause, pas fondée à soutenir que la décision attaquée méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes raisons, elle n'est, en tout état de cause, pas fondée à soutenir que la décision attaquée serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

4. Considérant, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré " ; que le préfet du Rhône ayant refusé, par l'arrêté attaqué du 3 octobre 2013, de délivrer un titre de séjour à MmeB..., elle entrait dans le cas prévu par les dispositions du 3° du I de l'article

L. 511-1 précité, où un étranger peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire

français ;

5. Considérant que la décision portant obligation de quitter le territoire français étant étroitement liée, en vertu de la directive 2008/115, à la constatation du caractère irrégulier du séjour, le droit d'être entendu ne saurait être interprété en ce sens que, lorsque l'autorité administrative compétente envisage d'adopter dans le même temps une décision constatant un séjour irrégulier et une mesure d'éloignement, cette autorité devrait nécessairement entendre l'intéressé de manière à lui permettre de faire valoir son point de vue spécifiquement sur cette dernière décision, dès lors que celui-ci a eu la possibilité de présenter, de manière utile et effective, son point de vue au sujet de l'irrégularité de son séjour et des motifs pouvant justifier que ladite autorité s'abstienne de prendre une décision de retour ;

6. Considérant que si Mme B...fait valoir qu'elle n'a pas été informée par le préfet de ce qu'elle était susceptible de faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français et n'a de ce fait pas été mis en mesure, en violation de son droit à être entendue, de présenter ses observations préalablement à l'édiction de cette mesure, elle a eu la possibilité de présenter son point de vue sur les motifs pouvant justifier que le préfet ne prenne pas de mesure d'éloignement à son encontre lors de sa demande de titre de séjour ; qu'au surplus, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle disposait d'éléments pertinents tenant à sa situation personnelle susceptibles d'influer sur le sens de cette décision ; que, dans ces conditions, Mme B...n'est pas fondée à soutenir qu'elle a été privée du droit d'être entendu qu'elle tient des dispositions du droit de l'Union européenne ;

7. Considérant qu'il résulte de l'examen de la légalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé, que Mme B...n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de cette décision à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour et de celle l'obligeant à quitter le territoire français à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de destination ;

9. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ;

10. Considérant que Mme B...fait valoir qu'elle a été victime d'un réseau de prostitution, auquel elle devrait encore la somme de 32 000 euros et qu'elle craint pour sa sécurité et la sécurité de sa famille si elle ne rembourse pas cette somme ; que, l'intéressée n'apporte cependant pas d'éléments probants de nature à établir que sa vie ou sa liberté seraient menacées en cas de retour au Nigéria ; que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit, par suite, être écarté ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à sa charge une somme à verser à l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du préfet du Rhône tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 24 mars 2015 à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Bouissac, président-assesseur,

Mme Duguit-Larcher, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 avril 2015.

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N° 04LY00716


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14LY00716
Date de la décision : 21/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Agathe DUGUIT-LARCHER
Rapporteur public ?: M. LEVY BEN CHETON
Avocat(s) : SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-04-21;14ly00716 ?
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