Vu la requête, enregistrée le 6 août 2014, présentée par le préfet du Rhône, qui demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1402766 du 2 juillet 2014 par lequel le tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 7 janvier 2014 par lequel il a refusé de renouveler le titre de séjour dont M. B...était titulaire, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif de Lyon ;
Il soutient que la mention selon laquelle l'intéressé peut voyager vers son pays d'origine n'a à être précisée par le médecin de l'agence régionale de santé que lorsqu'il estime qu'un traitement approprié existe dans le pays d'origine ; que M. B...peut bénéficier de soins appropriés dans son pays d'origine ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 11 mars 2015, présenté pour M.B..., domicilié..., qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
Il fait valoir que le jugement attaqué est fondé ; que le refus de titre de séjour est signé par une autorité incompétente ; qu'il n'est pas motivé ; qu'il est entaché d'une erreur ; que le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ; qu'il méconnaît le 7° et le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il n'a pas été entendu préalablement à l'édiction de l'obligation de quitter le territoire français ; que l'obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ; qu'elle méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; que la décision fixant le pays de destination est signée par une autorité incompétente et est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ;
Vu la décision du 18 mars 2015, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. B...;
Vu la décision par laquelle le président de la formation de jugement, sur proposition du rapporteur public, a dispensé celui-ci d'exposer ses conclusions à l'audience, en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
Vu l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 mars 2015 :
- le rapport de Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller ;
1. Considérant que, par un jugement du 2 juillet 2014, le tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du 7 janvier 2014 par lequel le préfet du Rhône a refusé de renouveler le titre de séjour dont M. B...était titulaire, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office ; que le préfet du Rhône relève appel de ce jugement ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat. " ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté susvisé du 9 novembre 2011 : " Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : / - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; - la durée prévisible du traitement. / Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays. / Cet avis est transmis au préfet sous couvert du directeur général de l'agence régionale de santé. Celui-ci, s'il estime, sur la base des informations dont il dispose, qu'il y a lieu de prendre en compte des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, transmet au préfet un avis complémentaire motivé. / (...). " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, dans son avis rendu le 5 juillet 2013, le médecin de l'agence régionale de santé a estimé que l'état de santé de M.B..., ressortissant kosovar né le 25 décembre 1984 et entré en France le 15 novembre 2008, nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'il n'existe pas de traitement approprié dans son pays d'origine, que les soins nécessaires présentent un caractère de longue durée et qu'il ne peut voyager sans risque vers son pays d'origine ; que si le préfet du Rhône s'est fondé sur des rapports émanant de l'ambassade de France au Kosovo datés des 22 août 2010, 6 mai 2011 et 18 mars 2013 pour estimer que M. B... pourrait bénéficier des soins nécessités par son état de santé dans son pays d'origine, il n'apporte aucun élément qui permettrait de remettre en cause l'appréciation portée par le médecin de l'agence régionale de santé sur l'impossibilité pour M. B...de voyager sans risque vers le Kosovo, alors qu'il lui appartenait de s'en assurer dès lors qu'il envisageait de rejeter la demande de titre de séjour présentée par M B...en estimant qu'il pouvait bénéficier de soins appropriés dans son pays d'origine et que le médecin de l'agence régionale de santé s'est expressément prononcé sur ce point dans son avis ; que, dans ces conditions, le préfet ne pouvait pas, sans méconnaître les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, refuser de renouveler le titre de séjour dont M. B...était titulaire au regard de son état de santé ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet du Rhône n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé son arrêté du 7 janvier 2014 ;
5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que l'avocat de M. B...renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée, de mettre à la charge de l'Etat le paiement à celui-ci, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative combinées avec celles de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, une somme de 1 000 euros ;
DECIDE :
Article 1er : La requête du préfet du Rhône est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à Me C...la somme de 1 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au préfet du Rhône, à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 24 mars 2015, à laquelle siégeaient :
M. Riquin, président de chambre,
M. Picard, président-assesseur,
Mme Vaccaro-Planchet, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 14 avril 2015.
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N° 14LY02556
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