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24/02/2015 | FRANCE | N°13LY02297

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 24 février 2015, 13LY02297


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 12 août 2013, présentée pour M. B... A..., domicilié ... ;

M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300734 du 13 juin 2013 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 février 2013 par lequel le préfet de Côte d'Or lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 50

0 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 d...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 12 août 2013, présentée pour M. B... A..., domicilié ... ;

M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1300734 du 13 juin 2013 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 février 2013 par lequel le préfet de Côte d'Or lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

M. A...soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'une insuffisance de motivation ;

- le refus de titre de séjour est entaché d'une erreur de droit dès lors qu'il remplissait les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'arrêté litigieux a été pris en méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance du 25 octobre 2013 fixant la clôture d'instruction au 8 novembre 2013, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu l'ordonnance du 15 janvier 2015 portant réouverture de l'instruction en application de l'article R. 613-4 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 15 novembre 2013, présenté par le préfet de la Côte d'Or qui conclut au rejet de la requête ;

Le préfet de la Côte d'Or soutient que :

- le jugement attaqué est suffisamment motivé ;

- les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'ont pas été méconnues, le préfet ayant établi par la production de documents relatifs au système de soins au Kosovo que M. A...pourrait bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé ;

- il n'était pas tenu d'examiner la demande de M. A...sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il n'a pas sollicité un titre de séjour sur ce fondement ; en tout état de cause, l'intéressé est entré récemment en France et aucun document n'atteste de son insertion sociale ou professionnelle ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) en date du 19 septembre 2013 admettant M. A...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Sur sa proposition, le rapporteur public a été dispensé de prononcer des conclusions à l'audience en application de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative par le président de la formation de jugement ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 février 2015 :

- le rapport de Mme Bouissac, président-assesseur ;

1. Considérant que M.A..., ressortissant kosovar né en 1985, est entré irrégulièrement en France à la date déclarée du 1er mai 2010 ; que sa demande de reconnaissance de la qualité de réfugié a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 30 septembre 2010, puis par la Cour nationale du droit d'asile le 13 octobre 2011 ; qu'il a sollicité, le 28 septembre 2012, la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par arrêté du 25 février 2013, le préfet de la Côte d'Or a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité et l'a obligé à quitter le territoire français ; que M. A...relève appel du jugement du 13 juin 2013 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation desdites décisions ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que le jugement attaqué précise les motifs de rejet de la demande de M. A... et notamment qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'avait commis ni erreur de droit, ni erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il ressortait des pièces du dossier que le préfet de la Côte d'Or établissait que le Kosovo prenait en charge la plupart des pathologies psychiatriques alors qu'en revanche, M. A... ne démontrait pas que l'affection dont il souffre ne pourrait être prise en charge dans son pays d'origine ; qu'ainsi le jugement attaqué est contrairement à ce que soutient le requérant, suffisamment motivé ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;

Sur la légalité de l'arrêté du 25 février 2013 :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat. " ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " (...) le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général (...) " ;

4. Considérant qu'il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux parlementaires qui ont précédé l'adoption de la loi du 16 juin 2011 dont elles sont issues, qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l'article R. 313-22 précité, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire ; que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans le pays dont l'étranger est originaire ;

5. Considérant que sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle ;

6. Considérant que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ; qu'en cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par avis du 19 octobre 2012 le médecin de l'agence régionale de santé de Bourgogne a estimé que l'état de santé de M. A... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il n'existait pas de traitement approprié au Kosovo ; que, par décision du 25 février 2013, le préfet de la Côte d'Or a toutefois refusé de délivrer à M. A...le titre de séjour sollicité, considérant que l'intéressé pouvait disposer au Kosovo d'un traitement médical approprié, au vu d'un rapport du 11 mars 2009, communiqué par l'Ambassade de France au Kosovo ainsi que des éléments émanant de la République du Kosovo précisant la liste des médicaments essentiels disponibles dans ce pays ; que le certificat médical du 13 mars 2013, établi par le docteur François Perdon, psychiatre à Dijon, précisant que M.A..., qui présentait lors de son entrée en France en 2010 les symptômes habituels d'un syndrome post-traumatique, a vu son état de santé progressivement amélioré sous traitement psychotrope, ne permet pas de remettre en cause les informations dont disposait le préfet de la Côte d'Or ; que l'existence du lien dont l'intéressé fait état entre ses troubles psychologiques et des événements traumatisants qu'il aurait vécus au Kosovo n'est pas établie ; que, par ailleurs, le requérant ne s'est pas prévalu de circonstance humanitaire exceptionnelle au sens du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté ;

8. Considérant que lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet n'est pas tenu, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé ;

9. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A...ait sollicité un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il en résulte qu'il ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance par l'autorité administrative de ces dispositions ;

10. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance./ 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; que M. A...soutient qu'il réside en France depuis trois ans et a rencontré une jeune femme avec laquelle il entretient une relation stable et durable et qu'il est bien intégré ; que, toutefois, compte tenu notamment du caractère récent du séjour en France de l'intéressé, le préfet de la Côte-d'Or n'a pas porté au droit de M. A...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a pris sa décision et n'a pas méconnu, par suite, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, il n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 3 février 2015, à laquelle siégeaient :

M. Bourrachot, président de chambre,

Mme Bouissac, président-assesseur,

M. Besse, premier conseiller.

Lu en audience publique le 24 février 2015.

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N° 13LY02297

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY02297
Date de la décision : 24/02/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BOURRACHOT
Rapporteur ?: Mme Dominique BOUISSAC
Rapporteur public ?: M. LEVY BEN CHETON
Avocat(s) : LUKEC

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2015-02-24;13ly02297 ?
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